L histoire entre le Cosmos et le Hasard entrevue avec - article ; n°9 ; vol.4, pg 7-18
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Description

Médiévales - Année 1985 - Volume 4 - Numéro 9 - Pages 7-18
12 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1985
Nombre de lectures 23
Langue Français

Extrait

Monsieur Robert Delort
L'histoire entre le Cosmos et le Hasard entrevue avec
In: Médiévales, N°9, 1985. pp. 7-18.
Citer ce document / Cite this document :
Delort Robert. L'histoire entre le Cosmos et le Hasard entrevue avec. In: Médiévales, N°9, 1985. pp. 7-18.
doi : 10.3406/medi.1985.998
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/medi_0751-2708_1985_num_4_9_998L'HISTOIRE ENTRE LE COSMOS
ET LE HASARD :
entrevue avec Robert DELORT
MEDIEVALES. — Le titre que vous avez donné à votre récent
livre, Les animaux ont une histoire, est d'une certaine façon
polémique...
ROBERT DELORT. — Polémique, n'exagérons rien. Je voudrais
attirer l'attention sur le fait que les animaux ont une histoire qui leur
est propre et que ce n'est pas uniquement les rapports de l'homme et
des animaux qu'on doit considérer, mais aussi les animaux en eux-
mêmes. Avec une vision d'homme, évidemment, ce qui fait qu'ils
apparaissent toujours dans une optique humaine, mais en privilégiant
d'abord les rapports des animaux avec les hommes, puisque c'est une
trame particulièrement féconde pour écrire cette histoire.
Je reconnais volontiers qu'il est cependant difficile d'étudier par
exemple les insectes dans cette perspective. On en a retrouvé très peu
de fossiles, à part ceux conservés dans la glace du Mont Look ou dans
l'ambre de la Baltique, ou encore les quelques traces chitineuses
égarées dans des tourbières ; mais on ne peut généralement atteindre
les insectes, comme la plupart des invertébrés qui n'ont pas de
coquille, que de manière indirecte : par l'action qu'ils ont eue sur les
végétaux, les animaux ou les hommes, domestiqués comme le ver à
soie, véhiculant la malaria, détruisant vigne, pomme de terre, puceron
comme phylloxéra, doryphore, coccinelle... De ce fait l'histoire des
insectes repose en grande partie sur des sources humaines.
Pourtant vous mettez souvent l'accent sur le fait qu'il faut éviter
de faire une histoire trop humaine des animaux.
R.D. — Certes ; et c'est à la rigueur possible pour tous les vertébrés
qui ont laissé des vestiges, des poils, des plumes, des ossements... à
part que nous conservons alors l'optique elle aussi humaine du zoologue
de laboratoire. Mais pour les invertébrés, à part les éponges (spicules),
les mollusques (coquilles) ou d'autres cas rarissimes, nous devons
abandonner toute étude directe car les structures molles disparaissent. Et les tortillons de lombrics ou la plupart des traces d'animaux que
l'on pourrait repérer dans des fouilles sont très difficilement étudiables.
// semble que cet intérêt pour les animaux se manifeste depuis
votre thèse qui est consacrée au commerce des fourrures dans
l'occident médiéval.
R.D. — Oui. Ma thèse est elle-même suivant un système télescopique
une amplification de mon mémoire de l'Ecole Française de Rome, de
ma thèse des Hautes-Etudes, et de mon mémoire de maîtrise ! C'est
depuis le début de mes études d'histoire que je m'intéresse aux ani
maux, en fait depuis mon enfance. D'abord par le biais de l'histoire,
ensuite par le biais de la zoologie, et maintenant disons par le biais
de la zoohistoire.
Dans cet ordre là? Vos recherches sur les sauterelles, par
exemple, vous semblent être une étape intermédiaire ?
R.D. — C'est-à-dire qu'après ma thèse de Lettres, j'ai repris des
études de sciences, avec des jeunes qui venaient de passer le « bac » ;
c'est à ce moment-là que j'ai obtenu les trente-huit U.V. qui me
donnent droit au titre envié de licencié es sciences ! puis j'ai commencé
une thèse de doctorat es sciences... J'ai essayé de réunir des connais
sances scientifiques venant de la zoologie, de la botanique, etc., avec
des recherches historiques. Si nous revenons au cas particulier des
criquets, j'ai fait des études aussi bien dans les ouvrages d'entomol
ogie, de zoologie, dans les laboratoires de Paris-VII, que dans les
Annales carolingiennes. Et après avoir bien dépouillé les Annales caro
lingiennes, je me suis dit qu'il fallait chercher aussi dans la Bible ;
j'ai alors eu la chance de tomber sur un article de la nièce de Uvarov
(celui qui a trouvé le système des phases) qui avait fait l'étude des
criquets à partir du XVIIe siècle, puis sur une masse de sources...
Le processus que vous décrivez, c'est ce qui vous a amené à faire
vos recherches sur les criquets?
R.D. — Voilà, entre autres ; parce qu'il y aussi le fait qu'étant
professeur d'histoire du Moyen Age, je m'étais intéressé à Charlemagne.
Depuis trente ans que j'enseigne cette histoire, j'ai évidemment regardé
un grand nombre de textes, et c'est parce que j'enseignais sur Charl
emagne que j'ai trouvé ces textes sur les criquets, lesquels correspon
daient aux études que je faisais à la Faculté des sciences à l'époque.
On ne peut pas dire ce qui a été premier...
Vous avez dit tout à l'heure que les animaux, c'était une piste
très importante pour ce qui vous semblait devoir être l'histoire.
R.D. — Là aussi ce sont des idées qui remontent très loin. Je
pense que l'histoire, c'est la science de l'espace dans le temps. Car
c'est bien l'espace qu'on étudie dans le temps. Tous les phénomènes évolutifs me semblent ainsi avoir une histoire : l'astrophysique c'est
une histoire de l'univers et c'est quand même une histoire. Les galaxies,
le système solaire, la planète Terre, ont une L'homme est
arrivé si tard, que l'histoire de la Terre, c'est surtout l'histoire des
phénomènes comme le champ magnétique terrestre, les tremblements
de terre, la variation du niveau des mers, le climat, la course autour
du soleil, la création des sols... Donc un ensemble de facteurs abio-
tiques qui changent dans le temps, et un de bio: la couverture végétale, les animaux, et l'homme qui tous
changent naturellement. L'homme biologique, par exemple ; au Moyen
Age, il n'était pas comme à l'heure actuelle : les règles des femmes
apparaissaient peu avant dix-huit ans. En Occident, elles avaient le
bassin plus important et la poitrine plus menue ; les hommes étaient
plus petits, la répartition des groupes sanguins était différente... Bref,
en quelques siècles, les hommes ont changé, tout comme les animaux
ou la couverture végétale, celle-ci en partie sous l'action de l'homme
mais en partie aussi sous l'effet des phénomènes évolutifs naturels.
Tout cela représente des idées que j'ai depuis très longtemps. Au
début je pensais même que c'était parce qu'il faisait plus froid que
les gens mettaient plus de fourrures ; puis j'ai vu que non et que, en
Occident médiéval, ce phénomène était principalement dû à la tradi
tion, à la mode, au luxe, au mental et au psychologique plus qu'au
physiologique. Puis j'ai constaté que les variations du climat et du
milieu faisaient aussi varier la qualité et l'épaisseur des peaux, et les
conditions du marché, etc.
Depuis que je suis président d'une commission du CNRS, j'ai pu
faire quelques démarches en faveur de l'étude des variations dans le
temps des phénomènes naturels et grâce à la compréhension du direc
teur du PIREN se tient le 20 juin une journée de réflexion sur ces
thèmes ; ont été invités des astrophysiciens, des géologues, des géo
graphes, des climatologues, des zoologues... En effet, si l'histoire est
bien la science de l'espace dans le temps, elle doit coordonner l'e
nsemble des connaissances humaines, ce qui est particulièrement
ambitieux.
Bien entendu je suis incapable de coordonner l'ensemble des
connaissances humaines, mais je pense que tous les spécialistes de
toutes les connaissances humaines devraient être coordonnés par des
historiens, ou du moins devraient mettre une dimension chronologique
à leurs préoccupations. Souvent d'ailleurs ils font de l'histoire sans
le savoir : il faudrait le leur dire.
Quand mes professeurs de Paris-VII me disaient qu'on avait fait
pousser le blé avec des résultats différents sous différents champs
magnétiques, je me souvenais que le champ magnétique terrestre avait
beaucoup varié :

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