La Force du Droit. Contribution à la définition de l'entrepreneur parisien du bâtiment au XVIIIe siècle - article ; n°2 ; vol.14, pg 163-189

Robert Carvais

Description

Histoire, économie et société - Année 1995 - Volume 14 - Numéro 2 - Pages 163-189
Résumé L'historiographie française méconnaît encore le concept d'entrepreneur de l'Ancien Régime. Afin de contribuer à sa compréhension, la présente étude s'attèle à analyser celui exerçant son métier dans le domaine de la construction : « l'entrepreneur du bâtiment » - le plus souvent maçon - terme qui déjà à l'époque moderne relevait du pléonasme. Après avoir précisé la confusion qui régnait dans les esprits et qui persiste aujourd'hui lorsque l'on traite de l'entrepreneur, de l'architecte ou bien de l'ingénieur, l'expérience du droit (en particulier, les archives judiciaires de la Chambre des Bâtiments à Paris) apporte scientifiquement les deux critères nécessaires et suffisants à une définition claire et simple de l'entrepreneur du bâtiment : une formation et un contrat. Désormais l'identification de ces personnages devrait s'avérer plus aisée et fiable.
Abstract The French historiography does still ignore the concept of the Ancient Regime entrepreneur. In order to contribute to its understanding, this study gets down to analysing the entrepreneur practising in the building field : « the entrepreneur in the building trade » - most of the time a master-mason - term which already in the modern times was a pleonasm. After clarifying the confusion which prevailed over people's minds and which still remains today when we deal with the entrepreneur, the architect or the construction engineer, the experience in law (especially the judicial Archives of the Chamber of the building trade) brings scientifically two necessary and sufficient criteria to a clear and simple definition of the entrepreneur of the building trade : a training and a contract. In future the identification of these different characters should be easier and reliable.
27 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

• Publié par: HISTOIRE-_ECONOMIE_ET_SOCIETE
• Publié le: 01 janvier 1995
• Nombre de lectures: 52
• Langue: Français
• Poids de l'ouvrage: 2 Mo

Extrait

Robert Carvais
La Force du Droit. Contribution à la définition de l'entrepreneur
parisien du bâtiment au XVIIIe siècle
In: Histoire, économie et société. 1995, 14e année, n°2. pp. 163-189.
Abstract The French historiography does still ignore the concept of the Ancient Regime entrepreneur. In order to contribute to its
understanding, this study gets down to analysing the entrepreneur practising in the building field : « the entrepreneur in the
building trade » - most of the time a master-mason - term which already in the modern times was a pleonasm. After clarifying the
confusion which prevailed over people's minds and which still remains today when we deal with the entrepreneur, the architect or
the construction engineer, the experience in law (especially the judicial Archives of the Chamber of the building trade) brings
scientifically two necessary and sufficient criteria to a clear and simple definition of the entrepreneur of the building trade : a
training and a contract. In future the identification of these different characters should be easier and reliable.
Résumé L'historiographie française méconnaît encore le concept d'entrepreneur de l'Ancien Régime. Afin de contribuer à sa
compréhension, la présente étude s'attèle à analyser celui exerçant son métier dans le domaine de la construction : «
l'entrepreneur du bâtiment » - le plus souvent maçon - terme qui déjà à l'époque moderne relevait du pléonasme. Après avoir
précisé la confusion qui régnait dans les esprits et qui persiste aujourd'hui lorsque l'on traite de l'entrepreneur, de l'architecte ou
bien de l'ingénieur, l'expérience du droit (en particulier, les archives judiciaires de la Chambre des Bâtiments à Paris) apporte
scientifiquement les deux critères nécessaires et suffisants à une définition claire et simple de l'entrepreneur du bâtiment : une
formation et un contrat. Désormais l'identification de ces personnages devrait s'avérer plus aisée et fiable.
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Carvais Robert. La Force du Droit. Contribution à la définition de l'entrepreneur parisien du bâtiment au XVIIIe siècle. In:
Histoire, économie et société. 1995, 14e année, n°2. pp. 163-189.
doi : 10.3406/hes.1995.1768
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/hes_0752-5702_1995_num_14_2_1768LA FORCE DU DROIT.
CONTRIBUTION A LA DÉFINITION
DE L'ENTREPRENEUR PARISIEN DU BATIMENT
AU XVIIIe SIÈCLE
A Juliette M. Turlan
par Robert CARVAIS
Résumé
L'historiographie française méconnaît encore le concept d'entrepreneur de l'Ancien Régime. Afin de
contribuer à sa compréhension, la présente étude s'attèle à analyser celui exerçant son métier dans le
domaine de la construction : « l'entrepreneur du bâtiment » - le plus souvent maçon - terme qui déjà à
l'époque moderne relevait du pléonasme. Après avoir précisé la confusion qui régnait dans les esprits et qui
persiste aujourd'hui lorsque l'on traite de l'entrepreneur, de l'architecte ou bien de l'ingénieur, l'expérience
du droit (en particulier, les archives judiciaires de la Chambre des Bâtiments à Paris) apporte scientifiqu
ement les deux critères nécessaires et suffisants à une définition claire et simple de l'entrepreneur du bât
iment : une formation et un contrat. Désormais l'identification de ces personnages devrait s'avérer plus
aisée et fiable.
Abstract
The French historiography does still ignore the concept of the Ancient Regime entrepreneur. In order
to contribute to its understanding, this study gets down to analysing the entrepreneur practising in the buil
ding field : « the entrepreneur in the building trade » - most of the time a master-mason - term which
already in the modern times was a pleonasm. After clarifying the confusion which prevailed over people's
minds and which still remains today when we deal with the entrepreneur, the architect or the construction
engineer, the experience in law (especially the judicial Archives of the Chamber of the building trade)
brings scientifically two necessary and sufficient criteria to a clear and simple definition of the entrepre
neur of the building trade : a training and a contract. In future the identification of these different charact
ers should be easier and reliable.
Depuis le livre d'Hélène Vérin l on connaît l'histoire des mots « entrepreneur » et
« entreprise » dans leur globalité. A la lecture des grands dictionnaires, l'auteur en a
dégagé trois sens qui s'entrecroisent au travers de quatre vocabulaires différents 2 : « le
premier relève d'un ordre militaire et stratégique, il place l'entreprise dans une perspective
1. H. Vérin, Entrepreneurs, Entreprise, histoire d'une idée, Paris, PUF, 1982, 262 p. Lire depuis, les actes du col
loque : L'impresa. Industria Commercio Banca Secc. XIII - XVIII, sous la direction de S. Cavaciocchi, Istituto Interna-
zionale di Storia Economica « F. Datini », Prato, Le Monnier, 1991 (Série II - Atti délie « Settimane di Studi » e altri
Convegni - 22) ; P. Verley, Entreprises et entrepreneurs du XVIIIe siècle au début du XXe siècle, Paris, Hachette, 1994.
255 p. ; les actes de la table ronde : Les institutions de l'économie de marché en Europe XVIIIe - XXe siècles, sous la
direction de J.-P. Hirsch, G. Gayot, N. Malle-Grain et D. Terrier, dans Revue du Nord, t.. LXXVI, n° 307, octobre -
décembre 1994, p. 691-903 ; A. Beltran, J.-P. Daviet, M. Ruffat, L'histoire d'entreprise en France - Essai bibliogra
phique, Paris, Cahiers de l'Institut d'Histoire du Temps Présent (C.N.R.S.), n° 30, juin 1995, 117 p. (Supplément du
Bulletin de Г1НТР, n° 60) et les visions novatrices de J. Hilaire dans son recueil de travaux Le droit, les affaires et l'his
toire, Paris, Economica, à paraître.
2. Celui de la guerre, celui de la justice et police des métiers, de la politique et, bien sûr, celui des activités écono
miques. 1 64 Histoire Économie et Société
d'affrontement organisé des risques et relie le sens des activités de l'économie aux tradi
tions des actions aventureuses et hasardeuses ; le deuxième souligne la façon dont le cal
cul du risque mène de l'apprentissage des savoirs à la maîtrise des calculs sur l'avenir ; le
troisième, enfin, apparaît dans la pensée économique par la confrontation avec les usages
empiriques et la nécessité d'organiser le profit pour l'avenir du capital » 3.
Dès la fin du XVIIe siècle, dans les esprits l'« entrepreneur », - homme d'initiati
ve qui engage un risque pour un profit - est « l'entrepreneur du bâtiment » 4. C'est
l'exemple-type de l'entrepreneur à tel point qu'à l'époque on pourrait dire que
l'expression forme presque un pléonasme 5. Pour comprendre ce phénomène il faut
admettre que sous l'Ancien Régime l'économie industrielle de la France n'en est qu'à
ses balbutiements. On parle de proto-industrialisation 6. Or, à côté des manufactures -
textiles du Nord et sidérurgie minière - et hormis le domaine du commerce qui s'est
considérablement développé depuis le Moyen Age 7, le secteur du bâtiment représente
une part importante du marché économique 8. L'entreprise du bâtiment et des travaux
publics est une grosse entreprise capable de réunir des capitaux importants afin de
produire un bien grâce à un savoir-faire et de dégager une plus-value appelée bénéfi
ce. L'entrepreneur du bâtiment correspond à ce « troisième homme » dont nous parle
J.-B. Say, à ce nouvel intermédiaire des temps modernes. Il ne faut cependant pas
perdre de vue l'ampleur du projet architectural réalisé. En dehors de la construction
des bâtiments royaux, publics, d'hôtels et d'immeubles de rapport, l'entrepreneur de
bâtiment agira souvent à petite échelle, au coup par coup, presque à un niveau artisa
nal pour des réparations, rénovations et augmentations de bâtisses. Néanmoins avec le
temps et l'évolution de la société urbaine face à une demande sociale accrue, il se
constituera en société commerciale, investira de plus en plus dans du matériel, des
fournitures et une main-d'œuvre spécialisée. Même lorsque l'activité du bâtiment ne
formera qu'une des nombreuses facettes de la vie économique industr