La méthode scientifique de Galilée - article ; n°2 ; vol.18, pg 161-192
33 pages
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Description

Revue d'histoire des sciences et de leurs applications - Année 1965 - Volume 18 - Numéro 2 - Pages 161-192
32 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1965
Nombre de lectures 26
Langue Français
Poids de l'ouvrage 3 Mo

Extrait

Dominique Dubarle
La méthode scientifique de Galilée
In: Revue d'histoire des sciences et de leurs applications. 1965, Tome 18 n°2. pp. 161-192.
Citer ce document / Cite this document :
Dubarle Dominique. La méthode scientifique de Galilée. In: Revue d'histoire des sciences et de leurs applications. 1965, Tome
18 n°2. pp. 161-192.
doi : 10.3406/rhs.1965.2414
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rhs_0048-7996_1965_num_18_2_2414méthode scientifique de Galilée La
La science physique moderne commence avec Galilée au moment
où, dans les Discorsi e dimostrazioni matemaliche intorno a due
nuove scienze, celui-ci réussit à poser les premiers fondements et à
rassembler quelques éléments d'une mécanique correctement mathé-
matisée. Ce n'est certes pas encore la de Newton, mais
un seuil est franchi : avec cette œuvre, la science des processus
physiques n'en est plus à ses balbutiements préalables. Déjà
consciente et sûre de soi, elle fait ses premiers pas en avant. Comme
le dit Galilée lui-même à la fin de la troisième journée des Discorsi :
« maintenant la porte est ouverte, pour la première fois, à une
méthode nouvelle pourvue de résultats nombreux et remarquables
qui, dans les années à venir, s'imposeront à l'attention des esprits ».
Avec Galilée, cet avènement de la science physique moderne
se fait plus clairement même qu'avec Descartes. Chez ce dernier,
en effet, pour scientifiques et mathématiques qu'ils soient, les
principes de physique restent, pour le besoin de la philosophie,
associés à un système d'explications imaginatives de la réal
ité. L'exposition que Descartes fait de sa physique se rapproche
ainsi dangereusement de celles que font les systèmes anciens de la
nature. La physique newtonienne éliminera sans retour le « beau
roman de » conçu par le cartésianisme. Elle se situera,
par contre, directement dans la perspective de la mécanique de
Galilée.
Ceci n'a pas échappé aux historiens de la science et à ceux qui
réfléchissent sur sa méthode. Au siècle précédent, Galilée a été
d'ordinaire considéré comme le véritable initiateur de l'esprit
scientifique moderne. On a même voulu voir en lui un premier
représentant de l'empirisme et du positivisme tels qu'ils se conce
vaient alors eux-mêmes. La tendance apparaît clairement, par
exemple, dans l'exposé qu'E. Mach a fait de l'œuvre de Galilée
T. XVIII. — 1965 11 REVUE D'HISTOIRE DES SCIENCES 162
dans son ouvrage sur la mécanique (1). On la retrouve chez d'autres
auteurs.
Puis une réaction s'est faite. L'on est devenu beaucoup plus
attentif à l'idéal que Galilée s'est proposé d'une véritable « philo
sophie mathématique de la nature ». On a reconnu que son attitude
intellectuelle devant l'univers est bien moins empiriste qu'on ne
l'a dit parfois et qu'elle est encore plus éloignée de celle du posit
ivisme proprement dit. Dans les nombreuses études qu'il a consacrées
à Galilée, A. Koyré (2) a été l'un de ceux qui ont fait le plus pour
dégager l'aspect « platonicien » de sa pensée. Peut-être même la
réaction est-elle allée un peu trop loin, en cherchant à minimiser
systématiquement le rôle de l'expérimentation et surtout de sa
pratique effective dans la construction intellectuelle que Galilée
a faite de la science (3).
En réalité Galilée, qui n'est certainement pas un positiviste
avant la lettre, est un esprit scientifique parvenu, tout au moins
dans ses dernières œuvres, à dégager de façon fort équilibrée les
composantes maîtresses de la science physico-mathématique
moderne. C'est ce qui fait encore aujourd'hui l'intérêt de la réflexion
sur sa méthode et, si possible, du contact pris avec son œuvre,
laquelle est généralement fort mal connue des lecteurs français (4).
Lorsqu'on se met aujourd'hui à la lecture directe des écrits de
Galilée, on risque cependant d'éprouver, pour commencer, un sent
iment d'embarras et de déception. On se trouve en effet entraîné
dans un monde de discussions prolixes et minutieuses, relatives à
des idées qui nous sont devenues assez lointaines aujourd'hui.
Il s'agit là soit des conceptions de la physique aristotélicienne, soit
de celles de prédécesseurs ou de contemporains de Galilée qui
tâtonnaient pour leur propre compte, tout comme le savant florentin
a dû tâtonner lui-même. Ces discussions, souvent en forme de
(1) Die Mechanik in ihrer Entœicklung, chap. II, sect. 1. L'ouvrage a été traduit en
français sous le titre de : La mécanique, exposé historique et critique de son développement.
Trad. E. Bertrand, Paris, Hermann, 1904.
(2) Études galiléennes, 3 vol., Paris, Hermann, 1939 ; Galilée et la révolution scienti
fique du XVIIe siècle (Conf. du Palais de la Découverte, série I), n° 37). « Le De Motu
Gravium - — de Galilée. De l'expérimentation imaginaire et de son abus », Revue d'Histoire
des Sciences, XIII, 1960, pp. 197-245.
(3) On reviendra ci-dessous sur ce point particulier.
(4) Galilée, rappelons-le, a été très peu traduit en français. Le P. M. Mersenne publie,
en 1634, Les Méchaniques de Galilée, traduction adaptée d'un manuscrit de Galilée non
publié de son vivant et, en 1639, une assez libre des Discorsi, sous le titre :
Les nouvelles pensées de Galilée. Depuis cette époque, très peu de traductions ont été faites. LA MÉTHODE SCIENTIFIQUE DE GALILÉE 163
dialogue, occupent la majeure partie de l'œuvre, qui ne débouche
qu'assez rarement, sauf peut-être dans les Discorsi, sur ce que nous
jugeons à présent essentiel. Il faut néanmoins se rendre compte du
fait que ces discussions ont joué un rôle capital dans l'esprit de
Galilée et pour l'esprit scientifique de son époque. Elles sont le
fait de sa méthode et, compte tenu des circonstances,
en sont une action indispensable.
De toute façon, on s'efforcera de présenter dans ce qui suit, de
façon plus schématique et plus simple qu'ils ne paraissent à la
lecture immédiate de l'œuvre, les traits essentiels de l'attitude
intellectuelle et de la méthode de Galilée homme de science. On
verra qu'ils correspondent de façon très prochaine aux grands
préceptes de l'esprit scientifique moderne, à tout le moins lorsque
c'est de physique qu'il s'agit.
I. — La connaissance mathématique de l'Univers
Dès le Saggiatore, Galilée formule de façon très saisissante le
programme intellectuel de la connaissance mathématique de
l'univers. Il faut citer le passage le plus caractéristique à ce sujet :
La philosophie est écrite dans ce très grand livre qui se tient constam
ment ouvert devant les yeux (je veux dire l'univers), mais el'e ne peut se
saisir si tout d'abord on ne se saisit point de la langue et si on ignore les
caractères dans lesquels elle est écrite. Cette philosophie, elle est écrite
en langue mathématique ; ses caractères sont des triangles, des cercles et
autres figures géométriques, sans le moyen desquels il est impossible de
saisir humainement quelque parole ; et sans lesquels on ne fait qu'errer
vainement dans un labyrinthe obscur.
Le texte appelle aujourd'hui quelques commentaires. On lisque
de n'y voir qu'un témoignage parmi d'autres de la permanente
tradition de l'intention mathématicienne face à la réalité. Mais il
ne faut pas s'y tromper. C'est dans un esprit nouveau que le texte
du Saggiatore est écrit, en fonction de l'expérience intellectuelle
faite par une pensée qui a vu se produire (au moins pour son
compte propre) l'effondrement du système de la philosophie natur
elle scolastique. Ce n'est d'ailleurs pas au hasard que le mot
« philosophie » vient sous la plume de Galilée. La science physic
omathématique, pour la première fois établie en sa qualité de
véritable science ďunivers, est ce qui doit se substituer à l'ancienne
philosophie cosmologique de l'école. Avec la mécanique moderne REVUE D'HISTOIRE DES SCIENCES 164
naissante, Galilée attend déjà en esprit ce que la physique newt

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