La nature des conflits internationaux - article ; n°2 ; vol.14, pg 295-308

Jean-Baptiste Duroselle

Description

Revue française de science politique - Année 1964 - Volume 14 - Numéro 2 - Pages 295-308
14 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

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• Publié le: 01 janvier 1964
• Nombre de lectures: 127
• Langue: Français
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Extrait

Monsieur Jean-Baptiste
Duroselle
La nature des conflits internationaux
In: Revue française de science politique, 14e année, n°2, 1964. pp. 295-308.
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Duroselle Jean-Baptiste. La nature des conflits internationaux . In: Revue française de science politique, 14e année, n°2, 1964.
pp. 295-308.
doi : 10.3406/rfsp.1964.418407
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rfsp_0035-2950_1964_num_14_2_418407Les Conflits Internationaux
NATURE DES CONFLITS INTERNATIONAUX
Trois définitions dés conflits
II est pas aisé de faire le partage entre idée de tension et celle de
conflit Si se place sur le plan de usage de la force on parlera de
tension ou de crise tant que la force pas été utilisée de conflit partir
du moment où elle entre en jeu Conflit équivaudrait guerre Mais le
langage courant admet pas une définition aussi restrictive et il admet
il conflit dans des cas où la violence est pas utilisée Cependant
comme le mot conflit implique un choc de deux ou de plusieurs volontés
on pourrait admettre il conflit lorsque un des camps au moins
envisage la force comme un des moyens utilisables pour faire triompher
son point de vue
Mais la force si elle est le moyen ultime est cependant un
moyen parmi bien autres Ceux-ci peuvent être la menace utiliser la
force laquelle implique pas nécessairement la volonté réelle en arriver
là le bluff est une arme politique de portée réelle) la pression éco
nomique la pression morale Pourquoi choisirait-on le seul critère de la
force pour déterminer il ou non conflit
On aboutira ainsi un premier type de définition du conflit le choc
entre des volontés opposées quels que soient les moyens envisagés ou uti
lisés par les adversaires bou assurer le triomphe de leurs ambitions
On peut se placer un second point de vue et au lieu de partir des
sujets placer au centre de la définition Yobjet qui constitue le conflit
Cet objet peut être concret et perceptible comme un territoire concret
et non immédiatement perceptible comme un bénéfice commercial et
même abstrait comme un succès de prestige Trop de guerres ont été
provoquées par des motifs de prestige pour que nous ne considérions pas
cette donnée si superficielle evanescente et insaisissable soie-elle comme
un objet possible de conflits Tout élément considéré étant objet on peut
dire que le conflit apparaît un objet se transforme en enjeu enjeu
est objet que on veut acquérir ne le possédant pas mais alors celui
qui le possède veut dans la plupart des cas le conserver et on lui impose
ainsi de extérieur de considérer son tour objet comme un enjeu
apparition un enjeu suscite celle du risque Les dirigeants des Etats
écrit Arnold Wolfers peuvent exprimer les espoirs ou les idéaux de leurs
Discord and collaboration Baltimore 1962 xviii-283 p. 71
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peuples mais ces espoirs ne constituent pas en tant que tels ce on
peut appeler proprement parler des enjeux policy goals Ils ne devien
dront des enjeux que si la décision est prise il faut pour leur réali
sation faire un effort national impliquant des sacrifices ou le risque de
sacrifices
On pourra de ce point de vue définir le conflit comme les situations
successives dans lesquelles deux ou plusieurs partenaires considèrent un
objet comme un enjeu dont la possession conquérir ou garder mérite
que on coure des risques
Mais cette définition est également insuffisante car elle ne tient aucun
compte des motifs qui amènent certains hommes Etat transformer un
objet quelconque en enjeu Ici nous touchons un des problèmes essen
tiels de la politique en général et des relations internationales en parti
culier homme Etat responsable prend en principe des décisions ou
parfois entérine celles un subordonné Mais pourquoi les prend-il
Tout serait relativement simple il les prenait uniquement en fonction
des pressions qui exercent sur lui et il suffisait de se placer dans un
système de causalité Tout serait aussi relativement simple il prenait
ses décisions uniquement en fonction des buts il se propose de sa
propre conception de intérêt national de son évaluation personnelle de
ce qui est souhaitable de ce qui est possible par conséquent si on se
pla ait uniquement dans un système de finalité extrême difficulté des
analyses celle de historien comme celle du politicologue vient du
fait que ces deux systèmes sont inextricablement mêlés Mis en face une
décision concrète nous avons beaucoup de peine déterminer si auteur
prise parce il pensait ainsi donner satisfaction des groupes qui
exer aient sur lui des pressions ou bien parce il pensait que la décision
était bonne Certes il des cas extrêmes Le président McKinley en
1898 ne voulait pas la guerre contre Espagne Il cependant proposé
au Congrès de la déclarer par suite une large et intense pression une
partie de opinion et cela afin de ne pas détruire ses chances de réélec
tion en 1900 Hitler décidé attaquer U.R.S.S en 194l non parce
une pression de opinion exer ait sur lui mais par un acte délibéré
de sa propre volonté Mais entre la décision forcée et la décision
gratuite ou artificielle il existe innombrables zones intermédiaires
La décision qui déclenche un conflit est donc sauf dans les cas extrêmes
une résultante de action de homme Etat et de la réaction de la popu
lation La masse est souvent indifférente en matière de politique étran
gère si celle-ci pas de conséquences perceptibles sur la vie des citoyens
Guizot disait propos du peuple fran ais Tenez pour certain que
la politique extérieure ne préoccupe pas du tout la France Les gouver-
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nements peuvent faire ce qui leur fait plaisir si ce sont des folies on ne
les soutiendra point si ce ne sont que des sottises on les sifflera sans
colère et sans les renverser pour cela si ailleurs ils sont bons quelque
chose pour les affaires intérieures du pays les seules il prenne au
sérieux Mais une part cette indifférence est pas continue et il
peut avoir des explosions de nationalisme de pacifisme isola
tionnisme des cas où on veut intervenir pour sauver un peuple étranger
ami telle la Pologne pour les Fran ais du xixe siècle autre part
indifférence est jamais générale Il des groupes conscients des
lobbies des associations intérêts des associations idéologiques et
ces groupes cherchent susciter dans opinion plus large des courants
intérêt Si un conflit se déclenche que ce soit par action ou par réaction
les risques mêmes il fait courir soulèvent des émotions On ne peut
donc imaginer un conflit sans déchaînement des passions et peut-être cela
constitue-t-il essence même du conflit international
On aboutit ainsi une troisième définition le conflit international
est un ensemble complexe de tensions où action de homme Etat ac
compagne de émotionnelles collectives
On peut ainsi penser que ces réactions émotionnelles valorisent le
conflit indifférence permet peut-être comme le pensait Guizot aux
dirigeants de déclencher des conflits Mais une fois ceux-ci déclenchés
indifférence disparaît On peut se passionner pour la cause ou au
contraire protester avec indignation contre une initiative dangereuse Mais
les réactions sont là parfois une ampleur insoup onnée De larges
secteurs de opinion britannique se sont dressés contre la politique
gouvernementale lors de la révélation du Plan Laval-Hoare en décembre
1935 et lors de opération militaire de Suez en 1956 Ces réactions ont
contribué échec des décisions gouvernementales autres au contraire
poussent homme Etat plus loin il ne le voudrait Lorsque indiffé
rence subsiste comme ce fut le cas en France et même en Allemagne
lors du conflit sarrois est il peine conflit
Un cas particulier est celui où un territoire étant enjeu la population
de ce territoire réagit émotionnellement Sous Ancien Régime avant que
apparaisse le sentiment national une telle réaction se manifestait rare
ment Elle est hui un phénomène essentiel Les Sarrois en 1955
ont finalement pu décider de leur sort Les habitants de Trieste ont lutté
de 1945 1954 soit pour le rattachement Italie soit pour le ratta
chement la Yougoslavie soit pour un statut autonome De même ceux
de Chypre
Lord Lettres Aberdeen de 16 Guizot septembre sa 1849 famille et 270 ses amis Paris 1884 438 p.
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Lorsque le conflit se déclenche e