Le bison d élevage ou le sauvage dans notre assiette - article ; n°1 ; vol.76, pg 109-126
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Communications - Année 2004 - Volume 76 - Numéro 1 - Pages 109-126
L'élevage du bison d'Amérique en France, loin de mettre en cause le statut « sauvage » de l'animal, sert plutôt de dispositif permettant la transmission des qualités attribuées à la condition sauvage (naturel, sain, hygiénique, etc.) à sa chair puis à sa viande. En parallèle, l'éleveur de bisons, tenu de respecter la prophylaxie bovine, doit malgré tout entretenir a minima des rapports de proximité avec l'animal. Il tente ainsi de trouver une « juste distance » avec un animal qui ne serait ni trop familiarisé ni trop craintif.
The breeding of wild herd for slaughter is a challenging subject. The study of the case of buffalo in France reveals that their wildness is never questioned, neither by breeders nor consumers, though the animals are raised on farms. The breeding of buffalos is implemented as a means to transfer the inherent qualities of wildlife (natural, healthy, hygienic) over to the food product. The buffalo breeder who is compelled to observe disease prevention regulations — which implies a closeness with the animals — does his best to maintain an adequate distance.
18 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 2004
Nombre de lectures 27
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Mme Patricia Pellegrini
Le bison d'élevage ou le sauvage dans notre assiette
In: Communications, 76, 2004. pp. 109-126.
Résumé
L'élevage du bison d'Amérique en France, loin de mettre en cause le statut « sauvage » de l'animal, sert plutôt de dispositif
permettant la transmission des qualités attribuées à la condition sauvage (naturel, sain, hygiénique, etc.) à sa chair puis à sa
viande. En parallèle, l'éleveur de bisons, tenu de respecter la prophylaxie bovine, doit malgré tout entretenir a minima des
rapports de proximité avec l'animal. Il tente ainsi de trouver une « juste distance » avec un animal qui ne serait ni trop familiarisé
ni trop craintif.
Abstract
The breeding of wild herd for slaughter is a challenging subject. The study of the case of buffalo in France reveals that their
"wildness" is never questioned, neither by breeders nor consumers, though the animals are raised on farms. The breeding of
buffalos is implemented as a means to transfer the inherent qualities of wildlife (natural, healthy, hygienic) over to the food
product. The buffalo breeder who is compelled to observe disease prevention regulations — which implies a closeness with the
animals — does his best to maintain an adequate distance.
Citer ce document / Cite this document :
Pellegrini Patricia. Le bison d'élevage ou le sauvage dans notre assiette. In: Communications, 76, 2004. pp. 109-126.
doi : 10.3406/comm.2004.2161
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/comm_0588-8018_2004_num_76_1_2161Patricia Pellegrini
Le bison d'élevage
ou le sauvage dans notre assiette
Élevage : action d'élever (les animaux domestiques
ou utiles), art de les faire naître, de veiller à leur
développement, leur entretien, leur reproduction
(1836) K
Traditionnellement pratiqué en France pour le repeuplement cynégé
tique 2, l'élevage d'animaux sauvages s'est également orienté, depuis une
trentaine d'années, vers la production d'une venaison de boucherie. Cette
activité agricole met un point d'honneur à se « démarquer des produits de
la chasse3 »en fournissant un aliment qui, comme la viande bouchère,
présente des « garanties en matière d'hygiène sanitaire, de conditions
d'abattage, d'âge des animaux4... » et la possibilité d'être consommé en
toute saison.
Depuis une quinzaine d'années, on assiste à l'apparition, dans les
exploitations agricoles françaises, d'un autre type d'animal qui n'appart
ient pas à la liste des espèces dont la chasse est autorisée. Il s'agit d'an
imaux exotiques qui, tels les oiseaux coureurs (comme l'autruche, l'émeu,
le nandou) et le bison, sont élevés à des fins alimentaires. Qualifiés de
« non domestiques » par la réglementation dans la mesure où ils n'ont subi
aucune « modification de sélection de la part de l'homme5 », ils font
cependant l'objet de traitements similaires à celui de l'animal de rente
(bovin, ovin, caprin...)6. C'est d'ailleurs à partir de savoir-faire agricoles
que les exploitants parviennent à élever ces animaux pour produire une
viande dont ils souhaitent promouvoir la qualité sauvage. Il ne s'agit pas là
de fournir du gibier, même d'élevage, mais de la viande bouchère d'origine
sauvage. Reste à comprendre comment l'éleveur parvient à produire du
« sauvage » à partir du « non-domestique » avec des pratiques, des savoirs
et des savoir-faire empruntés à l'élevage d'espèces domestiques. L'examen
des modalités de production de bisons à des fins de boucherie nous per-
109 Patricia Pellegrini
mettra de saisir comment les différentes catégories conceptuelles (sau
vage, non-domestique, domestique) sont ici utilisées, convoquées ou réfu
tées par les professionnels concernés. Cela nous conduira à nous interro
ger, d'une part, sur la spécificité du rapport que l'éleveur entretient avec
ce type d'animal et, d'autre part, sur les caractéristiques distinctives attr
ibuées au produit « viande sauvage » par rapport à de la viande bovine pro
venant d'élevages extensifs.
La filière Bison.
On ne peut évoquer le bison sans être aussitôt transporté vers les loin
taines contrées sauvages de P« Amérique indienne » où des troupeaux
paissent tranquillement entre deux courses effrénées à travers de vastes
étendues. Animal emblématique des productions cinématographiques
américaines, associé à la conquête de l'Ouest, il a quelque peu éclipsé son
homologue européen, qui n'a pas été impliqué dans une construction ident
itaire (sinon dans les discours des écologistes fascinés par la forêt de Bia-
lowieza, vue comme l'une des rares forêts primaires, et qui abrite des
bisons). Élevé pour la boucherie aux États-Unis et au Canada, le bison fut
importé en Europe à la fin des années 1980, à l'instigation d'éleveurs dési
reux de diversifier leurs productions pour de nouveaux marchés. Qu'en
est-il aujourd'hui de cette pratique ? Comment, au côté de la filière bovine
« traditionnelle », est-elle parvenue à se faire une place?
Comme vache et taureau, le bison fait partie de la famille des bovidés
mais, si les premiers appartiennent au genre Bos (Bos taurus), le second
relève du genre Bison 7. La taxinomie distingue deux espèces de bisons :
le bison d'Europe (Bison bonasus), réintroduit dans le parc national polo
nais de Bialowieza et présent dans plusieurs parcs animaliers français
(la réserve de Sainte-Eulalie en Lozère, le Zoorama européen de la forêt
de Chizé dans les Deux-Sèvres, le parc de Gramat dans le département du
Lot), et le bison d'Amérique (Bison bison).' Celui-ci se subdivise en deux
sous-espèces : le bison des bois (Bison bison athabascae), classé dans le
groupe des « espèces menacées d'extinction » par la réglementation inter
nationale qui régit le commerce mondial des espèces sauvages menacées
(annexe II de la convention de Washington 8), et le bison des plaines
(Bison bison bison), dont l'élevage est autorisé par la législation internatio
nale à des fins de production de viande.
Jusqu'en 1991, en France, seul le ministère de l'Environnement prenait
en considération l'élevage du bison de boucherie. Puis une directive com
munautaire (relative aux échanges commerciaux de produits frais carnés) 9,
a étendu le terme « animal de boucherie » à la sous-espèce Bison bison
110 Le bison d'élevage ou le sauvage dans notre assiette
bison, conférant ainsi un statut agricole à l'activité. Depuis cette date,
l'élevage du bison pour la boucherie dépend à la fois du ministère de
l'Écologie et du Développement durable (plus précisément de la division
« Faune sauvage captive » du Bureau de la faune et de la flore sauvages,
Direction de la nature et des paysages) et de deux secteurs du ministère de
l'Agriculture. Les questions économiques sont traitées par le Bureau du
porc, des volailles et de la diversification de la Direction des politiques
économiques et internationales, tandis que les aspects sanitaires sont de
la responsabilité de la Direction générale de l'alimentation.
L'élevage de ce bovidé nécessite l'obtention d'un certificat de capacité 10
délivré par les préfets sur avis d'une commission départementale des sites
(où siègent des élus locaux, les services vétérinaires du ministère de
l'Agriculture ainsi que les services décentralisés du ministère de l'Écolo
gie et du Développement durable) — avant 1999, l'attribution de ce docu
ment se faisait au niveau ministériel, ce qui augmentait considérablement
les délais. Le certificat de capacité n'est obtenu qu'après une formation
(stages pratiques obligatoires effectués dans des exploitations) au cours de
laquelle l'éleveur apprend les techniques de conduite d'un « troupeau »
de bisons — ainsi nommé dans les textes administratifs11. Dans le dossier
de demande de certificat de capacité, l'attestation de stage précise les
manipulations acquises devant ainsi garantir l'aptitude de l'éleveur à s'o
ccuper d'animaux sauvages, dans l

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