Le corps de l’automate - article ; n°1 ; vol.81, pg 167-182
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Description

Communications - Année 2007 - Volume 81 - Numéro 1 - Pages 167-182
Technological progress partly relies on a magical and religious way of thinking about modernity. Genetics is urged to create a faultless human body. In aircraft automation, the flight systems behave as the metaphorical body of its designers. Like a divinity, any new device demands the symbolic corporal sacrifice of test pilots. Then, like a shaman, it travels across time and space, bringing inside each cockpit the engineers’ representation for what the operator’s body must be, as well as their benevolent knowledge in case of a danger.
La pensée magique ou religieuse irrigue le progrès technique. On somme la génétique de créer des corps humains sans défaut. En aéronautique, l’automate est conçu en partie comme un sosie d’humain, ses organes reflètent la représentation que se font les ingénieurs d’un opérateur sans faute. Telle une divinité, chaque innovation exige le sacrifice au moins symbolique de pilotes d’essais. Puis, tel un chamane, les systèmes de vol apportent dans chaque cockpit la «présence absente» du concepteur qui a pensé l’action corporelle du pilote, pour la normaliser comme pour la secourir.
16 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 2007
Nombre de lectures 26
Langue Français

Extrait

Victor Scardigli
Le corps de l’automate
Qu’est-ce que l’automate ? Un dispositif fait de main d’homme et doté d’autonomie d’action. Les systèmes à base d’informatique et de télécommunications qui com-posent la plupart des automates complexes ont une autonomie toute rela-tive, puisqu’ils ne peuvent qu’obéir à la pré-programmation qui leur a été imposée. Pour qu’ils soient vraiment des automates, il leur manque un corps. Seul un corps vivant leur apporterait la liberté de changer pour faire face à des situations totalement imprévues, la capacité de se réor-ganiser pour s’adapter, à la manière de l’épigenèse qui vient individualiser le « câblage » de chaque cerveau humain (Changeux, 1983). Notre sujet d’étude sera donc le corps dont nous parlent les automates : celui de ses créateurs et de ses utilisateurs. Notre époque voit se généraliser des dispositifs d’une extrême complexité, qui prolongent ou remplacent l’homme dans trois composantes de sa corporéité : l’action intelligente, la vie en société et la reproduction biologique de l’espèce humaine. Pour éclairer comment les outils techniques « prennent corps » selon ces trois sens, risquons une hypothèse qui tout à la fois fournit une unité à ce champ disparate et fait apparaître notre modernité moins originale qu’il n’y paraît. Pour Leroi-Gourhan (1965), les outils préhistoriques prolongeaient déjà le geste de l’homme. Mais ils restaient dans sa main. L’automate, lui, peut agir à distance, spatiale ou temporelle, de son artisan. Or il partage cette propriété remarquable avec les « choses dotées de pouvoir » des sociétés traditionnelles : depuis le bâton de chamane, l’idole ou l’icône, objets certes faits de la main de l’homme mais dont l’action peut se déployer à distance de leur artisan, jusqu’au banal objet d’échange, dont le hau , « l’âme et le pouvoir de la chose donnée » (Mauss, 1950, p. 158, n. 4), sera redoutable pour qui négligerait de rendre don pour don. 167
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