Le Japon : les doutes d un créancier - article ; n°1 ; vol.54, pg 5-55
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Revue de l'OFCE - Année 1995 - Volume 54 - Numéro 1 - Pages 5-55
Japan : the doubts of a creditor Olivier Passet The industrial production downturn since April underlines the weakness of Japanese growth. It is in line with the lack of strength of private demand and the reduction public stimulus at the end of 1994. The Japanese government has counted on an endogenous comeback of private demand too soon and now has to implement new stimulative measures. The lack of competitiveness of Japanese enterprises slows down production, especially because of the efforts they make to restrain unit costs. Their rapid adjustment to the high yen, in the end affects household revenue and spending. The most unstable part of their earnings (bonuses, and overtime) varies according to random shocks emanating from foreign exchange markets. This explains their cautious savings behaviour. The buoyant durable goods demand, which was one of the most promising features of Japanese growth, now appears to be one of substitution between other goods, because of the decrease in their relative prices. What is named « Kakaku hakai » in Japan, or « price destruction » especially affects clothing and durable goods and is mainly due to the opening of the distribution system. This could have biased the outlook of the Japanese recovery. One can raise doubts, moreover, about the capacity of the private sector to overtake public demand, when are takes into account the dire situation of financial intermediaries. Bad loans amplify the risk of a financial « systemic crisis », which can be detonated by the banckruptcies of non-banks specialised in real estate financing. One could think that the world's first international creditor could mobilise its reserves to sustain recovery. But these depreciating reserves are becoming a handicap. Japan realises too late that it has lent above its means and hesitates to liquidate this depreciated asset. This conservatism weakens Japanese growth and magnifies the bad loans problem. But the present crisis is not exclusively due to the high yen and the depreciation of financial assets. Moreover, the factors sustaining the high yen are fragile. The internationalisation of the yen is too slow to justify the large gap between its present value and its purchasing power parity during the last few years. The present level of the yen would rather be a handicap to its more intensive international use as a reserve and transaction currency. Its high level seems especially due to Japanese investors, who wish to increase their yen denominated assets in order to decrease the exchange rate risks. Taking into account these small factors, a comeback of the yen to a more normal level is probable. The slowdown of Japanese potential growth is inscribed in a long term view. This ends a period during which the Japanese economy was catching-up to the other developped economies. Now, it has to adapt to the standard performance of other OECD countries. It can temporarily benefit from the regional dynamism, thanks to direct investment. But this can only last a certain time, given the vulnerability of its domestic market (because of the rationalisation and the deregulation of its distribution system) and the process of catching-up and the growing independence of its Asian partners. The overvalued Japanese currency has above all countered the délocalisation policy. The greatest long-term risk is that of an Asian boomerang, due to a disorganised délocalisation of intermediary activities, and an uncontrolled diffusion of technical progress.
La dégradation de l'activité industrielle depuis le mois d'avril, souligne la fragilité de la reprise japonaise. Ce mouvement ne fait que confirmer les doutes que l'on pouvait avoir sur les moteurs de la croissance. Il accompagne le repli de la politique de soutien à l'activité menée par le gouvernement depuis la fin de l'année der- nière. Ce dernier, ayant misé trop tôt sur la dynamique autonome de la demande privée, doit donc se résoudre à de nouvelles interventions. C'est moins la perte de compétitivité des entreprises nippones qui constitue à court terme le principal obstacle à la croissance, que l'effort déployé par ces dernières pour contenir leurs coûts unitaires. Leur rapide adaptation à la parité du yen a pesé en dernier ressort sur le revenu des ménages, qui voient, au gré des aléas du marché des changes, varier la partie la plus instable de leurs revenus, que sont les primes et la rémunération des heures supplémentaires. Simultanément les hausses négociées de salaire s'érodent d'année en année. Ceci explique en partie la prudence des comportements d'épargne des ménages. La vitalité de la demande de biens durables, qui constituait un des éléments les plus prometteurs et solides de la reprise, apparaît se substituer à d'autres achats, en raison de le baisse des prix relatifs de ce type de biens. Ce que l'on appelle au Japon le « Kakaku Hakai », phénomène de « destruction des prix » (qui touche particulièrement les biens durables et l'habillement), lié à l'ouverture du système de distribution et à la hausse du yen, a pu fausser la perception de la reprise. On peut douter, de plus, de la capacité du secteur privé à prendre la relève de l'Etat, dans le contexte actuel de délabrement des bilans des organismes financiers. Compte tenu du poids des mauvaises créances, un risque de crise systémique pèse sur le système de financement nippon, dont /'epicentre se situe au niveau des intermédiaires non bancaires, spécialisés dans le financement de l'immobilier. On pouvait croire jusque là que le premier créancier du monde pouvait compter sur ses réserves pour sortir son écono- mie de l'impasse. Mais ce matelas de créances, en se dépréciant, se transforme en fardeau : le Japon réalise tardivement qu'il a prêté au dessus de ses moyens et hésite aujourd'hui à liquider un actif déprécié. Cet attentisme participe à la faiblesse de l'activité et exacerbe un peu plus le problème des créances douteuses. Mais la crise que traverse aujourd'hui le Japon dépasse les conséquences de /'après bulle et de la hausse du yen. Cette dernière est d'ailleurs probablement partiellement réversible. On trouve difficilement les fondamentaux qui justifieraient le niveau actuel de parité de la devise nippone. L'internationalisation du yen est bien trop lente pour justifier une déviation d'une telle ampleur de la monnaie par rapport à sa parité de pouvoir d'achat, au cours des dernières années. Son niveau actuel serait plutôt un handicap à la diffusion du yen comme monnaie de réserve et de facturation, tant il accroît le risque de change. Il semble davantage lié aux arbitrages qu'opèrent les banques nippones en faveur du yen, compte tenu de la dégradation de leurs bilans et de leur volonté de diminuer les risques. Si l'on admet que l'appréciation du yen n'a pas d'autre fondement structurel, il faut alors envisager les consé- quences qu'engendrerait la mise en jeu de forces de rappel. Le ralentissement du potentiel de croissance nippon s'inscrit dans le long terme. Après une phase de rattrapage de productivité, l'économie japonaise devra composer dorénavant avec un sentier de croissance de moyen et long terme proche des performances moyennes de l'OCDE. Elle peut s'en écarter un temps, grâce à la dynamique régionale, par le truchement de l'investissement direct. Mais ce jeu n'a qu'un temps, compte tenu de la perméabilité croissante de son marché intérieur (liée à la rationalisation et à la déréglementation de son système de distribution), et du processus de rattrapage et d'auto- nomie grandissante de ses voisins asiatiques. La surévaluation de la devise nippone a surtout rompu la cohérence de la politique de délocalisation. Le risque le plus sensible à long terme, est celui d'un boomerang asiatique, lié à une délocalisation désordonnée des activités intermédiaires, guidée par l'urgence, et d'une diffusion incontrôlée du progrès technique.
51 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1995
Nombre de lectures 26
Langue Français
Poids de l'ouvrage 4 Mo

Extrait

Olivier Passet
Le Japon : les doutes d'un créancier
In: Revue de l'OFCE. N°54, 1995. pp. 5-55.
Citer ce document / Cite this document :
Passet Olivier. Le Japon : les doutes d'un créancier. In: Revue de l'OFCE. N°54, 1995. pp. 5-55.
doi : 10.3406/ofce.1995.1400
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ofce_0751-6614_1995_num_54_1_1400Résumé
La dégradation de l'activité industrielle depuis le mois d'avril,
souligne la fragilité de la reprise japonaise. Ce mouvement ne fait
que confirmer les doutes que l'on pouvait avoir sur les moteurs de
la croissance. Il accompagne le repli de la politique de soutien à
l'activité menée par le gouvernement depuis la fin de l'année der-
nière. Ce dernier, ayant misé trop tôt sur la dynamique autonome
de la demande privée, doit donc se résoudre à de nouvelles
interventions. C'est moins la perte de compétitivité des entreprises
nippones qui constitue à court terme le principal obstacle à la
croissance, que l'effort déployé par ces dernières pour contenir
leurs coûts unitaires. Leur rapide adaptation à la parité du yen a
pesé en dernier ressort sur le revenu des ménages, qui voient, au
gré des aléas du marché des changes, varier la partie la plus
instable de leurs revenus, que sont les primes et la rémunération
des heures supplémentaires. Simultanément les hausses négociées
de salaire s'érodent d'année en année. Ceci explique en partie la
prudence des comportements d'épargne des ménages.
La vitalité de la demande de biens durables, qui constituait un
des éléments les plus prometteurs et solides de la reprise, apparaît
se substituer à d'autres achats, en raison de le baisse des prix
relatifs de ce type de biens. Ce que l'on appelle au Japon le
« Kakaku Hakai », phénomène de « destruction des prix » (qui
touche particulièrement les biens durables et l'habillement), lié à
l'ouverture du système de distribution et à la hausse du yen, a pu
fausser la perception de la reprise.
On peut douter, de plus, de la capacité du secteur privé à
prendre la relève de l'Etat, dans le contexte actuel de délabrement
des bilans des organismes financiers. Compte tenu du poids des
mauvaises créances, un risque de crise systémique pèse sur le
système de financement nippon, dont /'epicentre se situe au niveau
des intermédiaires non bancaires, spécialisés dans le financement
de l'immobilier. On pouvait croire jusque là que le premier créancier
du monde pouvait compter sur ses réserves pour sortir son écono-
mie de l'impasse. Mais ce matelas de créances, en se dépréciant,
se transforme en fardeau : le Japon réalise tardivement qu'il a prêté au dessus de ses moyens et hésite
aujourd'hui à liquider un actif
déprécié. Cet attentisme participe à la faiblesse de l'activité et
exacerbe un peu plus le problème des créances douteuses.
Mais la crise que traverse aujourd'hui le Japon dépasse les
conséquences de /'après bulle et de la hausse du yen. Cette
dernière est d'ailleurs probablement partiellement réversible. On
trouve difficilement les fondamentaux qui justifieraient le niveau
actuel de parité de la devise nippone. L'internationalisation du yen
est bien trop lente pour justifier une déviation d'une telle ampleur
de la monnaie par rapport à sa parité de pouvoir d'achat, au cours
des dernières années. Son niveau actuel serait plutôt un handicap à
la diffusion du yen comme monnaie de réserve et de facturation,
tant il accroît le risque de change. Il semble davantage lié aux
arbitrages qu'opèrent les banques nippones en faveur du yen,
compte tenu de la dégradation de leurs bilans et de leur volonté de
diminuer les risques. Si l'on admet que l'appréciation du yen n'a
pas d'autre fondement structurel, il faut alors envisager les consé-quences qu'engendrerait la mise en jeu de forces de rappel.
Le ralentissement du potentiel de croissance nippon s'inscrit
dans le long terme. Après une phase de rattrapage de productivité,
l'économie japonaise devra composer dorénavant avec un sentier
de croissance de moyen et long terme proche des performances
moyennes de l'OCDE.
Elle peut s'en écarter un temps, grâce à la dynamique régionale,
par le truchement de l'investissement direct. Mais ce jeu n'a qu'un
temps, compte tenu de la perméabilité croissante de son marché
intérieur (liée à la rationalisation et à la déréglementation de son
système de distribution), et du processus de rattrapage et d'auto-
nomie grandissante de ses voisins asiatiques. La surévaluation de
la devise nippone a surtout rompu la cohérence de la politique de
délocalisation. Le risque le plus sensible à long terme, est celui
d'un boomerang asiatique, lié à une délocalisation désordonnée des
activités intermédiaires, guidée par l'urgence, et d'une diffusion
incontrôlée du progrès technique.
Abstract
Japan : the doubts of a creditor
Olivier Passet
The industrial production downturn since April underlines the weakness of Japanese growth. It is in line
with the lack of strength of private
demand and the reduction public stimulus at the end of 1994. The
Japanese government has counted on an endogenous comeback of
private demand too soon and now has to implement new stimulative
measures. The lack of competitiveness of Japanese enterprises slows
down production, especially because of the efforts they make to restrain
unit costs. Their rapid adjustment to the high yen, in the end affects
household revenue and spending. The most unstable part of their earnings (bonuses, and overtime)
varies according to random shocks emanating from foreign exchange markets. This explains their
cautious savings
behaviour.
The buoyant durable goods demand, which was one of the most
promising features of Japanese growth, now appears to be one of
substitution between other goods, because of the decrease in their
relative prices. What is named « Kakaku hakai » in Japan, or « price
destruction » especially affects clothing and durable goods and is mainly
due to the opening of the distribution system. This could have biased the
outlook of the Japanese recovery.
One can raise doubts, moreover, about the capacity of the private
sector to overtake public demand, when are takes into account the dire
situation of financial intermediaries. Bad loans amplify the risk of a
financial « systemic crisis », which can be detonated by the banckruptcies
of non-banks specialised in real estate financing. One could think that the
world's first international creditor could mobilise its reserves to sustain
recovery. But these depreciating reserves are becoming a handicap.
Japan realises too late that it has lent above its means and hesitates to
liquidate this depreciated asset. This conservatism weakens Japanese
growth and magnifies the bad loans problem.
But the present crisis is not exclusively due to the high yen and the
depreciation of financial assets. Moreover, the factors sustaining the high
yen are fragile. The internationalisation of the yen is too slow to justify
the large gap between its present value and its purchasing power parityduring the last few years. The present level of the yen would rather be a
handicap to its more intensive international use as a reserve and transaction currency. Its high level
seems especially due to Japanese investors,
who wish to increase their yen denominated assets in order to decrease
the exchange rate risks. Taking into account these small factors, a
comeback of the yen to a more normal level is probable.
The slowdown of Japanese potential growth is inscribed in a long
term view. This ends a period during which the Japanese economy was catching-up to the other
developped economies. Now, it has to adapt to the standard performance of other OECD countries. It
can temporarily benefit from the regional dynamism, thanks to direct investment. But this can only last a
certain time, given the vulnerability of its domestic market (because of the rationalisation and the
deregulation of its distribution system) and the process of catching-up and the growing independence of
its Asian partners. The overvalued Japanese currency has above all countered the délocalisation policy.
The greatest long-term risk is that of an Asian boomerang, due to a disorganised of
intermediary activities, and an uncontrolled diffusion of technical progress.Japon : les doutes d'un créancier Le
Olivier Passet
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