Le système préscolaire selon Pauline Kergomard (1838-1925) - article ; n°1 ; vol.54, pg 135-148
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Le système préscolaire selon Pauline Kergomard (1838-1925) - article ; n°1 ; vol.54, pg 135-148

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Description

Communications - Année 1992 - Volume 54 - Numéro 1 - Pages 135-148
14 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1992
Nombre de lectures 37
Langue Français

Extrait

Élise Terdjman
Le système préscolaire selon Pauline Kergomard (1838-1925)
In: Communications, 54, 1992. pp. 135-148.
Citer ce document / Cite this document :
Terdjman Élise. Le système préscolaire selon Pauline Kergomard (1838-1925). In: Communications, 54, 1992. pp. 135-148.
doi : 10.3406/comm.1992.1818
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/comm_0588-8018_1992_num_54_1_1818Elise Terdjman
Le système préscolaire
selon Pauline Kergomard
(1838-1925)
tôt, après teurs C'est L'école tente avoir de dans l'institution en sera été France le brièvement un troisième instrument son scolaire, affermissement. révolutionnaire tiers de pour du cet xixe des affermissement, raisons siècle trois quarts que sociales la de et République, siècle les et idéolo- fonda- plus
giques, seront amenés à réfléchir ou à susciter des réflexions sur
l'enfant et, ainsi, à participer à l'émergence de la psychologie de
celui-ci.
C'est le contexte social et économique qui a déterminé la création
des « salles d'asile », et lorsqu'en 1879 Pauline Kergomard est appel
ée à l'inspection générale des écoles maternelles par Jules Ferry
(poste qu'elle occupera jusqu'en 1917), elle a conscience de leur
fonction sociale, davantage que pédagogique :
notre état social ne permet pas toujours à la mère de s'occuper de
son enfant. Forcée d'aller travailler au-dehors, elle ne peut laisser
son enfant seul à la maison ; elle ne peut pas davantage le
errer dans les rues ou sur les routes, exposé à mille dangers, il
faut un abri à cet enfant ; il lui faut des soins.
Cet abri et ces soins, il les a d'abord trouvés à la salle d'asile, qui
a, pendant une période de soixante ans, rendu d'immenses ser-
vices aux familles '.
Cette « période de soixante ans » correspond au développement
des premières industries en France, qui vont employer une main-
d'œuvre féminine et engendrer le problème de la garde des enfants.
Dès la Restauration, les témoignages abondent sur les conséquences
lamentables du travail féminin en usine : les enfants d'ouvriers sont
laissés à l'abandon, enfermés dans la maison durant la très longue
journée de travail des parents. A tel point que le travail très précoce
135 Élise Terdjman
de l'enfant apparaît presque comme un moindre mal dans les villes
industrielles ; c'est ainsi que...
A Lille, les usines peuvent faire travailler, dans la première moitié
du siècle, les petits de six à sept ans. L'enquête de Villermé
(1837) a révélé des cas où les enfants commençaient l'usine à l'âge
de quatre ans 2.
Mais c'est quand même par la scolarisation précoce que le
XIXe siècle va répondre au problème, issu de l'industrialisation, de la
garde des enfants. Les crèches, comme les salles d'asile, deviennent
urgentes, et commencent à ouvrir.
En ce qui concerne les salles d'asile, après l'entreprise sans lende
main du pasteur Oberlin dans les Vosges, dès 1770, la marquise de
Pastoret et Mme Jules Mallet ouvrent en 1826 une « salle d'essai »
rue du Bac ; mais c'est en 1827 que l'avocat Denys Cochin (1789-
1841) se consacre à la création de salles d'asile, pour lesquelles il
conçoit un ouvrage de pédagogie spécifique. Elles furent d'abord
dépendantes du budget des hospices, puis de celui de la Ville de
Paris. C'est seulement en 1837 que l'État les prendra en considérat
ion, par une ordonnance de Salvandy (ministre de l'Instruction
publique de Louis-Philippe). Toutefois, elles garderont le statut
d'institutions charitables jusqu'à ce que Jules Ferry les rattache par
une loi aux établissements d'instruction primaire, assimilant alors
les directrices d'école maternelle à des institutrices.
Les intentions pédagogiques de ces salles d'asile sont précisées
dans diverses circulaires. Tout d'abord dans celle de 1833,
d'Adolphe Thiers, qui affirme :
II peut être fort utile de commencer l'instruction dès l'âge le plus
tendre : et tel semble être le but principal des salles d'asile, qui
formeraient le premier degré de l'enseignement élémentaire 3.
Ces vues sont confirmées la même année par Guizot, dans une cir
culaire aux recteurs où il précise que les enfants reçoivent dans les
salles d'asile :
Les premières instructions, des notions élémentaires qui les pré
parent à suivre avec plus de fruit l'enseignement que d'autres ét
ablissements leur offriront plus tard... 4.
L'ordonnance royale du 22 décembre 1837 est encore plus expli
cite :
136 système préscolaire selon Pauline Kergomard Le
II y aura dans les salles d'asile des exercices qui comprendront
nécessairement les premiers principes de l'instruction religieuse et
les notions élémentaires de la lecture, de l'écriture ou du calcul
verbal 5.
Le succès même des salles d'asile laisse entrevoir les pratiques
pédagogiques mises en œuvre. En 1867, les salles d'asile reçoivent
432 141 enfants, et en 1875, à Paris seulement, 8 000 à 10 000 en
fants les fréquentent ; à l'origine, certains établissements ont reçu
plusieurs centaines d'enfants, assis sur des gradins, sans appui, une
ardoise sur les genoux ; il fallait « des vaisseaux de classe
immenses », qui épuisaient les femmes (une directrice et une surveil
lante) ayant la charge des enfants. Bien que cette situation fût deve
nue exceptionnelle, la diversité d'aptitudes et d'attente des enfants
regroupés sans distinction d'âge de 2 à 6 ans ajoute à la difficulté.
Du point de vue de la formation accordée aux femmes éduca-
trices, Denys Cochin avait annexé un cours normal à une de ses
salles d'asile dès 1828. Salvandy développe ce cours normal en
créant en 1847 une « maison provisoire d'études », qui devient cinq
ans plus tard le Cours pratique des salles d'asile et où les futures
directrices ou inspectrices de salles d'asile sont formées ; Mme Pape-
Carpantier, alors directrice de la salle d'asile principale du Mans, en
prend la direction - elle y restera vingt-sept ans. A partir de 1855, la
direction des salles d'asile est explicitement réservée à des femmes,
et cela jusqu'en 1977.
C'est donc dans ce contexte politique et social que va se dévelop
per l'action de Pauline Kergomard. Alors que les sciences humaines
ne sont pas encore institutionnalisées, elle va user de son statut au
sein du système scolaire pour faire passer dans la pratique des
découvertes encore embryonnaires de la sociologie, de la pédagogie
et de la psychologie de l'enfant.
Tout d'abord, c'est pour des raisons politiques qu'elle obtient -
après que l'arrêté du 28 avril 1848 d'Hippolyte Carnot nommant les
salles d'asile « écoles maternelles » eut été remis en question par la
loi Falloux en 1850 et après que Mme Pape-Carpantier l'eut récl
amée - la substitution définitive du nom d'« école maternelle » à
celui d'« asile ».
Pour Pauline Kergomard, en effet, l'école doit permettre aux dif
férentes catégories sociales de se côtoyer, or le terme d'« asile », trop
connoté « lieu de charité », écartait les enfants des familles aisées ;
comme la crèche, pour les plus jeunes, c'était vraiment l'endroit où
les femmes laborieuses déposaient leurs enfants - ce service était du
reste contenu, sous le Second Empire, dans la définition même des
deux institutions :
137 Élise Terdjman
protégées par l'autorité publique. Elles ont pour fonction de gar
der et soigner les enfants en bas âge dont les mères travaillent
hors de leur domicile 6.
Le terme d'« école » au contraire, surtout si celle-ci atteint la
réputation à laquelle Pauline Kergomard prétend la hisser, attirera
les classes aisées et n'humiliera pas les autres 7. En fait, il faudra
attendre les années 1950 pour que ce vœu se réalise.
Pauline Kergomard voit donc dans le côtoiement des différentes
catégories sociales un des buts de l'école, mais elle est en même
temps consciente que ce n'est peut-être là qu'un vœu limité

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