Mis en ligne le 11 déc. 2007 Table ronde n°24 - Thème Horizons - 18 décembre 2007 L’information sur le médicament joue un rôle majeur pour l’accès au soin et le bon usage.Le rôle des différents émetteurs identifiés, publics et privés, leur place respective, leurs interférences éventuelles, font l’objet de débat.Un récent rapport de l’IGAS « L'information des médecins généralistes sur le médicament » fait l’état des lieux et présente des recommandations sur ce thème.Consultez la synthèse de la réunionModérateur : G. Bouvenot, membre du Collège de la HAS > pas de présentation réaliséeIntervenants : PL. Bras, IGAS > pas de présentation réaliséeY. Bur, Député, Membre de la Commission des affaires culturelles, familiales et sociales, OPEPS > pas de présentation réaliséeR. Dahan, AstraZeneca > pas de présentation réaliséeG. Errieau, Médecin voir sa présentation (bientôt en ligne)P. Pignarre, Éditeur, Écrivain > pas de présentation réaliséeM. Stephan, Directeur adjoint, IPSOS voir sa présentation Retour au sommaire des Rencontres HAS 2007 L’information sur le médicament joue un rôle majeur pour l’accès au soin et le bon usage.Le rôle des différents émetteurs identifiés, publics et privés, leur place respective, leurs interférences éventuelles, font l’objet de débat.Un récent rapport de l’IGAS « L'information des médecins généralistes sur le médicament » fait l’état des lieux et présente des recommandations sur ce thème.Consultez la synthèse de la réunionModérateur : G. Bouvenot, membre du Collège de la HAS > pas de présentation réaliséeIntervenants : PL. Bras, IGAS > pas de présentation réaliséeY. Bur, Député, Membre de la Commission des affaires culturelles, familiales et sociales, OPEPS > pas de présentation réaliséeR. Dahan, AstraZeneca > pas de présentation réaliséeG. Errieau, Médecin voir sa présentation (bientôt en ligne)P. Pignarre, Éditeur, Écrivain > pas de présentation réaliséeM. Stephan, Directeur adjoint, IPSOS voir sa présentation Retour au sommaire des Rencontres HAS 2007 Mis en ligne le 11 déc. 2007
Paternité, pas d'utilisation commerciale, partage des conditions initiales à l'identique
Langue
Français
Extrait
Table ronde 24 Informations sur le médicament : quels besoins, quelles réponses ?
Gilles BOUVENOT, membre du collège de la HAS.
Pour commencer cette table ronde, je vous propose dentendre Madame Stephan qui va nous présenter les résultats de létude Ipsos.
Marion STEPHAN, Directeur adjoint, IPSOS
Létude que lIpsos a menée pour la Haute Autorité de Santé a interrogé 602 médecins généralistes par téléphone pendant les 15 premiers jours du mois de juillet 2007. Cette enquête visait à cerner les attentes et les besoins des médecins généralistes en France dans le domaine de linformation sur le médicament.
Daprès cette enquête, 87 % des médecins généralistes se disent bien informés sur ce qui a trait aux médicaments. Cependant, seuls 13 % se déclarent très bien informés sur le médicament. 42 % dentre eux souhaiteraient être informés sur les études comparatives entre médicaments de même classe, 40% sur le niveau dASMR, 35 % sur les effets secondaires, effets indésirables et interactions médicamenteuses. Leurs autres préoccupations concernent le prix (28 %), les alternatives thérapeutiques (24 %), le remboursement et les conditions de ce remboursement (21 %). Seuls 3 % sont en attente dinformations en matière de posologie et dindications de prescription.
43 % des médecins généralistes interrogés disent privilégier linformation papier quils reçoivent directement à leur cabinet. 33 % se fient plus volontiers aux informations orales données en face à face (visite médicale, bouche à oreille, groupe de pairs). 13 % utilisent Internet, 9 % principalement les logiciels daide à la prescription.
Le Vidal, première source citée par les généralistes, reste une source primordiale dinformations pour 58 % des sondés. 83 % des médecins généralistes citent lAfssaps, lAgence du médicament et les réunions de formation médicale continue comme source primordiale ou importante dinformations. 80 % citent la Haute Autorité de Santé, 72 % la presse médicale, 56 % lindustrie pharmaceutique et la visite médicale.
49 % des sondés considèrent que le visiteur médical est lacteur le moins crédible de cette chaîne dinformation, suivi par la CNAM pour 21 % des personnes interrogées. Pour les généralistes, les acteurs les plus crédibles sont lAfssaps, lAgence du médicament et la Haute Autorité de Santé.
La Haute Autorité de Santé et lAFSSAPS bénéficient à la fois dun niveau de confiance élevé et dun niveau dinfluence important. Ce même constat peut être fait dans une moindre mesure pour la FMC et pour le bouche à oreille (dans lequel on inclut les relations entre pairs). La presse médicale occupe une place intermédiaire. Dautres acteurs publics comme la DGS, la CNAM, lInpes présentent un niveau de confiance moyen, mais un niveau dinfluence faible. Lindustrie pharmaceutique, quant à elle, jouit dune influence relativement
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importante, mais dun niveau de confiance et de crédibilité moindre. LAFSSAPS et la Haute Autorité de Santé jouissent dune relative bonne image aux yeux des professionnels de santé interrogés, suivis ensuite par le ministère de la Santé, par lInpes et par lAssurance Maladie.
68 % des médecins interrogés considèrent que linformation donnée sur le médicament est redondante. 55 %estiment quil existe une incohérence de communication entre les différents acteurs, 44 % que les informations données sont contradictoires.
Les médecins généralistes ont tendance à faire un amalgame entre la Haute Autorité de Santé et lAFSSAPS et méconnaissent le rôle respectif de chacune de ces instances. Ils considèrent que la Haute Autorité de Santé est une structure généraliste en charge, entre autres, du médicament alors que lAFSSAPS se concentrerait essentiellement sur le médicament. Ils estiment que la DGS joue un rôle de veille et dalerte sanitaire et que la CNAM contrôle les dépenses. Les médecins interrogés méconnaissent le rôle de lInpes considérant que linstitut ne joue quasiment aucun rôle en matière dinformation sur le médicament.
Les médecins interviewés affirment que la visite médicale permet de délivrer une information intéressante sur les nouveaux produits et de faire un rappel sur les indications des médicaments plus anciens. 73 % considèrent que la visite médicale est claire, 60% quelle est de nature à influencer leur pratique, 60 % quelle est adaptée à leurs besoins, 55 % quil sagit dune information indispensable. En revanche, seuls 37 % jugent quil sagit dune information complète et 27 % quelle est objective.
Les médecins considèrent que linformation donnée par lAFSSAPS et par la Haute Autorité de Santé est objective et claire, quelle est intéressante sur les nouveaux produits, quelle est de nature à influencer la pratique (75 %), indispensable (75 %), complète (75 %) et adaptée à leurs besoins (63 %). Ils considèrent en revanche que cette information est moins utile que la visite médicale pour se remémorer les caractéristiques de vieux médicaments.
68 % des médecins interrogés pensent que linformation délivrée par lAssurance Maladie est claire. 55% disent quelle est de quelle est %nature à influencer leur pratique, 46 indispensable et objective, 45complète, 43 % quelle est intéressante pour les% quelle est nouveaux produits, 38 % quelle est adaptée à leurs besoins, 35 % quelle est utile pour se remémorer les caractéristiques de vieux médicaments.
GillesBOUVENOT
Quelle est la position de lInspection Générale des Affaires Sociales (IGAS) à ce sujet?
Pierre-Louis BRAS, IGAS
Les principaux émetteurs dinformation sur le médicament sont lindustrie pharmaceutique et les pouvoirs publics. Il faut rappeler que les dépenses de promotion du médicament de lindustrie pharmaceutique représentent environ 3 milliards d'euros selon le LEEM. Ce chiffre est certainement sous-estimé: il doit en fait représenter près de 17 à 18 % du chiffre d'affaires du médicament en France. Or, ces dépenses sont en forte croissance : elles atteignent 3 milliards d'euros en 2005 contre 2 milliards d'euros en 1999. Les trois-quarts de ces dépenses se concentrent sur la visite médicale. Nous comptions 22700visiteurs médicaux en France en 2006.
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La qualité de la visite médicale nest pas remise en cause. Les visiteurs médicaux (VM) sont bien formés. Cependant, nous ne devons pas oublier que cette démarche dinformation est à visée commerciale. Les objectifs commerciaux des visiteurs médicaux représentent en effet 20 à 30 % de leur rémunération. Cette situation pose problème, dans la mesure où 9 consultations sur 10 en France se terminent par une ordonnance alors que ce chiffre est inférieur à 50 % aux Pays-Bas. De plus, la promotion se concentre sur les nouveautés sur lesquelles les marges commerciales sont supérieures et non sur les génériques. En outre, sachant que la durée moyenne dune visite est de 8 à 10 minutes pour deux à trois mentions, nous ne pouvons quen conclure que la durée de la visite ne peut permettre de satisfaire aux exigences de qualité dune bonne information. Les visites des VM ne permettent pas non plus détablir des comparaisons entre les molécules, alors quil sagit de la première demande des médecins.
La visite médicale a une influence sur la pratique. Pour partie, elle permet de mettre en avant un produit pour contrecarrer un produit adverse. Elle concourt également à lexpansion générale des prescriptions. La visite permet de faire connaître les innovations ayant une supériorité clinique avérée et peut être un auxiliaire du bon usage des produits. Cependant, elle peut aussi conduire à accélérer le développement dinnovations dont la supériorité clinique nest pas avérée et faire passer les médicaments dune deuxième intention en première intention. Enfin, la visite médicale favorise les produits chers.
Le coût minimal de la visite médicale est de 25 000 euros par généraliste et par an. Ce montant est à rapporter au revenu moyen des généralistes qui atteint 65 000 euros par an. Cest donc un moyen dispendieux de diffuser linformation, dautant que ce coût est supporté par la collectivité, à travers les prix du médicament, et non par la seule industrie.
Tous les observateurs saccordent à dire que le nombre de visiteurs médicaux diminuera pour arriver à 18 000 personnes vers 2012, compte tenu du nombre de produits qui tombent dans le domaine public et dinnovations qui se concentrent sur des niches.
La HAS a un rôle majeur à jouer dans le domaine de linformation et doit théoriquement donner des orientations à lAFSSAPS. La HAS a construit une politique de communication sur le médicament simple, visible, pratique, réactive et hiérarchisée. Cependant, la HAS na pas accès à linformation en face à face et ses informations ne sont pas exhaustives. Pourtant, cest une absolue nécessité pour que la HAS devienne une référence en matière dinformation. En outre, certaines recommandations de la HAS restent rédigées de manière diplomatique et sont de ce fait peu opérationnelles pour les médecins. Par ailleurs, il ny a aucun dispositif dobservation des stratégies dinfluence des autres intervenants ni de collecte des besoins dinformation de la profession.
LAFSSAPS poursuit son effort de communication malgré la réorientation donnée par le législateur en 2004, ce qui explique le sentiment de redondance exprimée par les médecins lors du sondage Ipsos. LAssurance Maladie, quant à elle, avec les délégués (DAM) sest dotée de moyens dinformer les médecins en face à face. LAssurance Maladie compte aujourd'hui 900 délégués et devrait en compter 1 200 à la cible. Malgré limage dégradée de la CNAM, la visite de ces délégués est plutôt bien perçue. La CNAM se demande donc si elle doit dupliquer les méthodes utilisées par lindustrie pharmaceutique. Si elle souhaite être efficace, elle devra se professionnaliser et utiliser les méthodes de lindustrie pharmaceutique.
La HAS doit être confortée dans son rôle de premier émetteur dinformation. Elle doit mener une politique non pas de communication mais de promotion active du bon usage. Le
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législateur doit lui confier la mission de surveiller les stratégies dinfluence qui se développent dans le monde du médicament. Linitiative de la CNAM doit être confortée au plan légal et professionnalisée. Enfin, il conviendrait de faire baisser le niveau dintensité de la visite médicale par la taxe sur la promotion ou par la fixation d'objectifs quantitatifs de classe, comme prévu dans l'avenant quantitatif à la charte qualité. Ainsi, nous pourrions organiser un désarmement commercial favorable tant pour l'Assurance Maladie que pour l'industrie pharmaceutique.
GillesBOUVENOT
Le rapport dont vous venez de nous donner une synthèse na pas déplu à la HAS et contribue à sa réflexion. Je vous propose maintenant de donner la parole au représentant de lindustrie.
Robert DAHAN, AstraZeneca
Les sources dinformation des professionnels de santé sont dorigines diverses : des plus officielles aux moins contrôlables en passant par les plus commerciales et les plus économiques. Les agences de régulation apportent cette information officielle. On peut préjuger de leur sérieux et de leur impartialité, mais nous ne pouvons pas préjuger de la constance de leurs conclusions. En effet, suivant les pays, les agences de régulation poursuivent des objectifs différents. LInternet est sans doute la source dinformation la moins contrôlable, et plus généralement, nous pouvons citer les médias et la presse, ainsi que les associations de patients et les patients eux-mêmes. Les sociétés savantes constituent également des sources dinformation, ainsi que les organismes chargés du remboursement des soins. Bien entendu, lindustrie du médicament est source dinformation et son action se focalise sur la démonstration de la qualité de son produit. En fait, il nexiste pas une source dinformation unique et pas une nest entièrement exacte.
Les besoins dinformation nont jamais été aussi importants. Ceci tient à une complexité médicale et scientifique de plus en plus grande, à lapparition de nouvelles pathologies liées au vieillissement de la population et à un savoir qui devient de plus en plus technique. La réforme du système de santé, qui met le médecin généraliste au cur de la réflexion, conduit également à accroître linformation sur les produits qui sortent de la réserve hospitalière et sur le besoin dinformation sur des pathologies quils nont jamais ni diagnostiquées ni traitées. La croissance des besoins dinformations tient également à la responsabilisation du médecin qui lui confère une obligation de savoir.
Lindustrie informe les professionnels de santé sur ses produits par lintermédiaire de différents médias et moyens, dont les visiteurs médicaux. Cette information est appelée information promotionnelle ou publicité. Cette activité est universelle: elle existe dans tous les pays. Elle est régulée et contrôlée. En France, la visite médicale passe par un processus de certification. Enfin, indiquons que lindustrie précise le cadre dans lequel les professionnels de santé peuvent prescrire le médicament. Tout manquement aux règles entraîne des sanctions. Dans le juste cadre de la prescription, les avantages du produit comparativement à dautres sont énoncés, ces avantages devant être scientifiquement prouvés.
Lindustrie pharmaceutique veut aller plus loin dans la réponse quelle apporte aux besoins dinformation des professionnels. Elle veut être un partenaire de la formation médicale continue. Lindustrie pharmaceutique a signé par lintermédiaire de son syndicat une charte de bonne conduite avec le ministre de la Santé. Un bilan de cette charte doit être dressé
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dans 18 à 24 mois. Lindustrie a également dit être prête à devenir un partenaire dans laccompagnement des patients. En effet, comment lindustrie peut-elle être responsable de ses produits après leur commercialisation si on lui interdit de les suivre ? Cette question est certes complexe et je ne sous-estime pas lensemble des problèmes que cela peut poser.
En conclusion, je souhaite rappeler que 800 oncologues soccupent du cancer du sein et 100 000 femmes sont atteintes dun cancer du sein adjuvant sous traitement antihormonal. Chaque femme doit voir son oncologue 30 minutes par an et son médecin généraliste 60 à 90 minutes par an. Chaque médecin généraliste voit en moyenne une fois par an une femme à ce stade de la maladie. Les médecins ont donc besoin dune information particulière et chaque femme a besoin dune prise en charge revisitée. Je souhaite donc que nous néliminions personne de lattente et de la réalisation de ces besoins dinformation et daccompagnement.
Yves BUR, Député, Rapporteur pour les recettes et l'équilibre général du projet de loi de financement de la Sécurité Sociale ; Président du groupe d'études sur le médicament et les produits de santé
Les laboratoires sont mis sur le banc de laccusation concernant linformation sur le médicament en direction des praticiens. Ceci tient à leur longue pratique qui na pas toujours été parfaitement éthique. Nous estimons que les pratiques de promotion de lindustrie restent excessives. Une charte a été élaborée, mais javoue que je reste sceptique quant à ses résultats. Nous serons vigilants et le législateur se saisira de la question si le résultat nest pas celui qui est attendu.
Une autorité doit être le recours naturel des professionnels de santé pour sinformer. La Haute Autorité de Santé dispose de toutes les qualités requises pour le devenir si elle se met en position dapporter les informations nécessaires et de se coordonner avec lAfssaps pour apporter une information en temps réel. Les médecins doivent aussi sinscrire dans une stratégie de formation continue. Cette stratégie de formation continue doit être autonome financièrement. Cependant, le fait que des parrains soient présents pour assurer le financement de cette formation est une habitude tellement ancrée que ceux-ci ne font pas leffort de concevoir un autre système. Je ne suis pas gêné que les laboratoires interviennent dans un cursus de formation continue pour apporter le point de vue du développeur du médicament, mais il nen demeure pas moins que les médecins doivent réfléchir aux moyens dêtre moins dépendants. Enfin, rappelons que 80% des consultations se terminent par une prescription, que ces prescriptions sont souvent excessives, voire contradictoires, et que certaines sont hors AMM.
La profession médicale doit prendre son autonomie par rapport aux laboratoires. Lindustrie a sa place dans le paysage médical, mais pas nécessairement en tant que financeur de tout et nimporte quoi. Nous devons donc engager une réflexion pour nous assurer que linformation sera davantage certifiée. Devons-nous envisager dintensifier le réseau des DAM de lAssurance Maladie ? Cest peut-être laiguillon que nous devrons utiliser.
Enfin pour répondre à Monsieur Dahan, je préciserai quil vous faudra du temps pour convaincre les parlementaires de laisser les laboratoires entrer dans laccompagnement thérapeutique. Sil sagit dapprentissage à ladministration, nous pourrons en discuter. En revanche, laccompagnement thérapeutique nest certainement pas le rôle des laboratoires.
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GillesBOUVENOT
Je vous propose douvrir le débat.
GillesBOUVENOT
Monsieur Pignarre, pensez-vous que les praticiens sont dans une situation de grande dépendance vis-à-vis des laboratoires pharmaceutiques? Pensez-vous que cest à lautorité publique darmer des divisions pour contrecarrer linformation pharmaceutique?
Philippe PIGNARRE
Nous rencontrons un problème de diffusion de linformation mais aussi un problème de production de la connaissance. Avant 1983, nous pensions quil était indigne de prescrire des génériques, compte tenu de la vitesse à laquelle avançait le progrès médical. Pourtant, aujourd'hui encore, nous ne savons pas toujours si les nouveaux produits sont plus efficaces que les génériques. Notre modèle de connaissance est partiel, car basé sur les études cliniques. Ces études durent une année ou deux, mais rarement davantage. Or, cest sur ces études cliniques que nous récupérons la connaissance sur le médicament. Ce modèle est intéressant pour les médicaments que lon prend sur une période limitée, comme cest le cas des antibiotiques, il est en revanche insuffisant pour les médicaments que le patient doit prendre toute sa vie.
Le rapport de lIGAS démontre quil existe une prime aux nouveaux produits. La courbe des médicaments décline pourtant au fur et à mesure que nous prenons conscience de leurs effets indésirables et secondaires, tandis que le degré de confiance des médecins diminue aussi au fur et à mesure quils entendent leurs patients sen plaindre.
Désarmer la visite médicale est une bonne idée. Il ne sagit pas de la supprimer. Je souhaite surtout que la Haute Autorité de Santé dispose de moyens de financer des études comparatives afin quelle puisse produire sa propre connaissance. Le fait que des officines comme IMS surveillent les prescriptions des médecins est contradictoire avec le Code de santé publique, comme le souligne le récent rapport. Aussi faudrait-il interdire lactivité de ces agences. Je suis surpris que les médecins qui sont si attachés à lexercice libéral naient jamais porté plainte contre ce système. La part variable des salaires des visiteurs médicaux est également en augmentation constante. Nous pourrions donc demander aux laboratoires de supprimer cette part variable pour nous convaincre que les visiteurs exercent leur métier de manière honnête. Enfin, je crois que lindustrie pharmaceutique fait face à un problème dinnovation mais que trop de marketing tue linnovation.
Gilles ERRIEAU, médecin
Jexerce la médecine générale depuis 30 ans. Je sais depuis longtemps que lindustrie pharmaceutique sait beaucoup de choses sur ma pratique, mais je sais depuis peu que la CNAM sait tout sur moi. Je souhaiterais donc que la CNAM me fournisse un relevé trimestriel de ce que je prescris à mes patients. Cette information me permettrait dengager un début de réflexion sur cette partie de mon activité.
Nous souffrons plus globalement dune inculture thérapeutique et pharmacologique des médecins et des prescripteurs et je crois que la Haute Autorité de Santé a un rôle à jouer dans lamélioration de cette connaissance . Je ne suis pas certain quune prescription moins coûteuse soit systématiquement synonyme dune meilleure prescription. Il est vrai que les médecins français prescrivent beaucoup de
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médicaments. Cependant, certains faits doivent être mis en corrélation. Par exemple, il faut certainement rappeler que la France compte les meilleurs taux despérance de vie après 65 ans, alors que cest aussi après cet âge que lon prescrit le plus de médicaments.
Nous devons avoir une ambition commune en matière dinformation sur les médicaments. Les Français doivent continuer à avoir accès aux médicaments dans les meilleures conditions. La HAS a la qualité pour encourager un plan ambitieux dinformation et de formation des prescripteurs sur le médicament en redonnant ces lettres de noblesse à la prescription.
Par ailleurs, pour revenir sur les propos de Monsieur Bras, je pense que leffort promotionnel de 25 000 euros consentis par les laboratoires en direction de chaque médecin ne doit pas être rapporté aux revenus dudit médecin, mais au chiffre d'affaires quil prescrit, c'est-à-dire à 200 000 euros. Je ne sais pas si nous dépensons trop, mais il faut évidemment dépenser mieux. Cest une exigence sur laquelle nous pouvons tous être daccord.
De la salle
Quand publiera-t-on des essais négatifs?
Robert DAHAN
Tous les laboratoires dune certaine notoriété publient la totalité des études cliniques en cours, quels que soient les résultats obtenus.
De la salle
En tant que consultant, jai accompagné les caisses dAssurance Maladie de la région Languedoc-Roussillon pour la conduite de campagnes pilotes sur linformation sur les médicaments. Cependant, notre approche méthodologique nest pas suivie par la caisse nationale. Cette situation minterpelle. Pourquoi la caisse nationale a-t-elle rendu inopérante la visite des DAM en leur demandant de porter 14 thématiques différentes?
Pierre-Louis BRAS
Dans notre rapport, nous suggérons à lAssurance Maladie de sengager dans des méthodes qui se rapprochent de celles utilisées par lindustrie. Je ne pense pas quil existe un complot. Simplement, lenvironnement juridique des caisses nest pas stabilisé. En interne, il existe aussi un débat sur ce que les DAM peuvent faire. Je pense quune certification de la HAS ou quune intervention du législateur pourraient donner une légitimité à lAssurance Maladie et lui permettre dêtre plus proactive dans la manière dont elle organise sa promotion.