Nécrologie : Anatole Le Braz - article ; n°3 ; vol.37, pg 458-472
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Description

Annales de Bretagne - Année 1925 - Volume 37 - Numéro 3 - Pages 458-472
15 pages

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1925
Nombre de lectures 37
Langue Français
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Extrait

G. Dottin
Nécrologie : Anatole Le Braz
In: Annales de Bretagne. Tome 37, numéro 3-4, 1925. pp. 458-472.
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Dottin G. Nécrologie : Anatole Le Braz. In: Annales de Bretagne. Tome 37, numéro 3-4, 1925. pp. 458-472.
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/abpo_0003-391X_1925_num_37_3_1625NÉCROLOGIE
Anatole LE BRAZ
Le 20 mars, une dépêche de Mme Le Braz m'annonçait la mort
de son mari. Il s'était éteint, le matin même, presque subitement
et sans souffrance. Ceux qui l'avaient vu, le 19 novembre 1924,
plein d'entrain et de vitalité, au dîner d'adieux qu'il avait offert à
ses collègues, ne pouvaient croire à la triste nouvelle; lui-même,
après une longue période de fatigue, sentait ses forces augmenter
rapidement; le 23 février il m'écrivait : « Ma santé continue à se
rétablir, si même elle n'est pas complètement rétablie ». C'est au
moment où il croyait que la vie revenait en lui que la vie l'a
quitté.
Anatole-Jean-François-Marie Lebras (en littérature Le Braz) était
né le 2 avril 1859, à Saint-Servais-de-Duault, où son père
instituteur. Il habita successivement avec les siens Ploumilliau, où
il fut moniteur dans l'école paternelle et où il commença le latin
sous la direction du recteur, l'abbé Villiers de l'Isle-Adam, — Bïhu-
lien, Ploubezre, Penvénan. Il fit de brillantes études au lycée de
Saint-Brieuc, puis au lycée Saint-Louis. Reçu licencié es lettres en
Sorbonne, il prépara l'agrégation de philosophie; il ne put être reçu
au concours parce qu'il s'y était présenté sans avoir le bacca
lauréat es sciences restreint, exigé des futurs philosophes. En 1886,
il arrivait au lycée de Quimper comme professeur de lettres. Il
y resta jusqu'en 1901, où il ,fut nommé, le 29 juin, maître de
conférences de littérature française, à la Faculté des Lettres de
Rennes (2); professeur titulaire le 25 décembre 1904, il demandait et
obtenait sa retraite le 1er août 1924.
(1) Le numéro de La Bretagne Touristique du 15 avril 1926, entièrement
consacré à Le Braz, donne l'essentiel sur sa vie et ses œuvrea.
La présente notice tient compte des articles nécrologiques, mais est surtout
fondée sur ses conversations et ses lettres, de 1902 à 1926.
Sa bibliographie sera publiée dans notre prochain numéro par M. J. Ollivier.
(2) D'abord rétribué par l'Université qui avait reçu de M. de Kerjégu et
d'une personne qui garda l'anonymat, une subvention de 4.000 francs. JVÉCJfcOLOGlE. 459
Voilà, dans sa noble simplicité, toute la carrière universitaire (3)
du Breton illustre qui, né et élevé en Bretagne, y revenait, après
dix ans d'études à Paris, pour enseigner dans un lycée et dans une
Faculté, pendant trente-huit ans. Il importe de ne pas oublier que
de cette vie si bien remplie, la plus grande part fut donnée à l'e
nseignement. Et de tous les aspects de cette physionomie si variée
d'homme de lettres, à la fois conférencier, historien de la littérature,
folkloriste, romancier, poète, c'est le professeur qui, dans les Annales
de Bretagne auxquelles il collabora, apparaît, tout d'abord, à l'évo
cation, triste et douce, des images du passé.
Je le revois, à Quimper, dans sa classe de troisième, où j'allai
le prendre un jour; il parlait en se promenant de long en large,
un livre à la main, et les yeux de ses élèves1 le suivaient avec une
attentive admiration. Combien de vocations littéraires suscita-t-il
pendant ses quinze années d'enseignement secondaire ? Nous le
saurons à mesure que les souvenirs surgiront autour de sa mémoire.
A Rennes, il eut aussitôt la sympathie des étudiants. M. Chassé
qui fut parmi ses premiers élèves a raconté quelles leçons leur
donnait ce maître incomparable qui par le charme de ses phrases
enchanteresses. les élevait au-dessus d'eux-mêmes. Le Braz avait
horreur de l'érudition pesante et compliquée. Il disait plaisamment
d'un grand savant dont il avait suivi les leçons : « Cet homme si
bien renseigné avait le don d'agiter si bien le flacon de sa science
que ce n'était plus qu'une bouteille à l'encre ». Il n'avait garde
de faire de même. La science était l'appui solide d'où il prenait
son élan pour atteindre sans efforts à l'éloquence simple et émouv
ante. Sa voix puissante résonnait dans les couloirs et jusque dans
la cour centrale. Dans leur argot de collège les étudiants le su
rnommaient l'As. Parfois son enseignement était interrompu par
un brusque départ pour des conférences en lointain pays. Puis il
revenait reprendre la tâche inachevée. Enfin l'heure vint où il
lui fallut prendre du repos.
« Ce n'est pas sans émotion », m'écrivait-il le 28 juillet 1924,
« que j'ai parcouru ce papier officiel qui met fin à ma carrière de
professeur. Vous savez de quel cœur j'étais attaché à mon métier
et à la Faculté où je l'exerçais. Tout cela est désormais dans le
(3) Voici, vérifiée sur les documents officiels, la carrière de Le Braz jusqu'à
son entrée à la Faculté : maître auxiliaire au lyeée Saint-Louis (3 janvier
1879); boursier de licence à la Sorbonne (15 septembre 1880); boursier d'agré
gation de philosophie (15 septembre 1881); en congé pour raison de santé
(15 septembre 1883); professeur de philosophie au collège d'Etampes (12 novembre
1884); professeur de lettres au lycée de Quimper (17'septembr© 1886); professeur de
troisième au même lycée (30 août 1895). n fut nommé chevalier de la Légion
d'honneur le 31 décembre 1897 $t Officier le 30 juillet 1914, ■460 NÉCROLOGIE.
passé et le mot même de retraite est plein de signification mélanc
olique. Ce qui me console et me rassérène, c'est que, grâce à cette
mesure, d'autres fils de la balle comme moi-même, d'autres enfants
issus des entrailles mêmes du peuple vont pouvoir en jouir pour se
cultiver et goûter les mêmes joies d'intelligence qui ont été les
grandes douceurs de ma vie. Je souhaite de durer assez longtemps
pour qu'elle garde quelques années son efficace ». Si ce vœu ne
sest pas réalisé, hélas, les étudiants lui restent profondément recon
naissants d'avoir pensé à employer sa pension de retraite à créer
pour eux trois bourses de cinq mille francs.
Les sujets qu'il traitait dans ses cours publics se rapportent à
deux ordres principaux d'étude. Le premier comprenait : Le roman
au XVIIIe siècle; les théories dramatiques "en France au XVIIIe siècle;
les précurseurs du romantisme au XVIIIe siècle. Le second se
rapportait à la littérature régionale de langue bretonne ou de langue
française : Le théâtre du. peuple en Bretagne, la Bretagne et le
romantisme; Chateaubriand, histoire des œuvres.
A Rennes, il donna encore des conférences publiques, au théâtre
ou à la Faculté, sur Shakespeare et l'âme celtique (1916), sur ses
impressions d'Amérique (1913), sur le président Wilson (1920-1921),
pour ne citer que les principales.
Dès 1910, il alla enseigner à l'étranger : en Suisse à Genève,
Neufchâtel et Lausanne; aux Etats-Unis où il passa dès 1906, puis
en 1910-1911 et 1911-1912. Il y retourna pendant la guerre et, de
1914 à 1919, il se dépensa sans compter, pour faire connaître et
aimer notre pays. Du nord au sud et de l'est à l'ouest, que ce fût
à New- York, à Cincinnati, à Saint-Louis, à San-Francisco, dans
les Universités comme dans les groupes de l'Alliance Française
sa parole émouvante ne se lassait pas de retentir dans tous les
milieux. Quand les Etats-Unis décidèrent de prendre part à la lutte,
il se trouvait dans l'Etat de Tennessee et il s'employa à faire des
cours de français à l'école des sbus-officiers. Il pénétra profondé
ment l'esprit public américain et se mêla de près au mouvement difficultés*
des idées et des opinions. Dès 1915, il avait prévu les
que les questions d'argent susciteraient au lendemain de

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