Ordre des mots, ordre dans les mots - article ; n°1 ; vol.111, pg 10-37
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Description

Langue française - Année 1996 - Volume 111 - Numéro 1 - Pages 10-37
Patrick SAUZET : « World Order, Order within the Words » Instead of being thought of as an inherent property of morphemes, linearity should be derived from a lexical state where phonological primes are only related to each other via attenance (unoriented adjacency). It is shown that order within words can be construed as an effect of phonology. However, such a phonological process sometimes interprets syntactic configurations. Hence the interaction between phonological ordering (order within words) and syntactic ordering (word order) is also explored in this paper. Cliticisation, it is argued, may represent the maximal relevance of phonological ordering, whereas syntactic (external) ordering effects may in turn be embedded within phonological domains (compound tenses).
28 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1996
Nombre de lectures 43
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Patrick Sauzet
Ordre des mots, ordre dans les mots
In: Langue française. N°111, 1996. pp. 10-37.
Abstract
Patrick Sauzet : « World Order, Order within the Words »
Instead of being thought of as an inherent property of morphemes, linearity should be derived from a lexical state where
phonological primes are only related to each other via attenance (unoriented adjacency). It is shown that order within words can
be construed as an effect of phonology. However, such a phonological process sometimes interprets syntactic configurations.
Hence the interaction between phonological ordering (order within words) and syntactic ordering (word order) is also explored in
this paper. Cliticisation, it is argued, may represent the maximal relevance of phonological ordering, whereas syntactic (external)
ordering effects may in turn be embedded within phonological domains (compound tenses).
Citer ce document / Cite this document :
Sauzet Patrick. Ordre des mots, ordre dans les mots. In: Langue française. N°111, 1996. pp. 10-37.
doi : 10.3406/lfr.1996.5349
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/lfr_0023-8368_1996_num_111_1_5349Patrick SAUZET
Université de Paris VIII
ORDRE DES MOTS, ORDRE DANS LES MOTS
En important dans l'analyse du cinéma des concepts linguistiques, Christian Metz
notait : « Ces relations syntagmatiques (entre les « éléments signifiants » qui constituent un
film) peuvent se déployer dans la simultanéité aussi bien que dans la succession, car le film se
joue à la fois dans le temps et dans l'espace » (Metz 1977 : 121). Les langues naturelles '
n'ont pas cette latitude du « langage » cinématographique. Sauf au niveau de la combina-
toire qui construit les segments (classiquement, celle des traits distinctifs, celle des cléments
dans une phonologie particulaire), et dans la mise en œuvre des éléments suprasegmentaux
(tons, intensité), toute structure doit s'exprimer en successivité.
On peut globalement rapporter l'exigence de successivité à l'interaction du caractère
analytique du langage avec l'utilisation du support vocal-auditif qui interdit la production et
la perception simultanée des éléments associés dans l'expression. On ne peut prononcer et
entendre deux mots à la fois. C'est le caractère phonique du langage, l'existence d'une
composante phonologique qui est, en fin de compte, responsable de la linéarité du langage.
Or il se trouve que les composantes de la grammaire qui se préoccupent de produire de
l'ordre sont la syntaxe et la morphologie. La phonologie, telle qu'on la pratique couram
ment, se contente d'interpréter des successivités présupposées 2. Le syntacticien construit de
l'ordre linéaire en énonçant par exemple « le verbe précède l'objet » dans telle langue. De
même le morphologue qui énonce « tel morphème est un suffixe » . Le phonologue exploite un
ordre qu'il se donne comme un présupposé s'il fait une attaque de la consonne qui précède
une voyelle, ou s'il formule une règle qui a pour effet d'accentuer la syllabe finale d'une
séquence déjà dotée d'un début et d'une fin, d'un ordre donc.
1. Dériver la successivité en phonologie 3
La concaténation n'est pas un objet linguistiquement autonome, et pas nécessairement
un objet linguistiquement pertinent. Une concaténation enregistre l'effet de successivité
1. Dans les langues de signes comme la Langue des Signes Française (LSF), qui s'adressent à l'œil,
les limitations sur la coexpression sont moins fortes, et corrélativement la linéarisation semble jouer un
rôle moins important : « La voix a donc le désavantage de ne pouvoir émettre plusieurs sons à la fois,
mais l'avantage de les faire très vite l'un après l'autre. De son côté la langue gestuelle, dont les
mouvements sont plus longs à faire que les sons à émettre, a l'avantage d'offrir une très grande variété
d'expressions simultanées » (Suit un exemple ou un seul geste coexprime au moins trois morphèmes :
personne / passer / vite.) (Moody 1983 : 67).
2. On parle parfois de phonologie « non linéaire » (ainsi parmi beaucoup d'autres Jouanet 1985).
Ce terme est à comprendre au sens de « unilinéaire » c'est-à-dire de multilinéaire. La successivité
est toujours présupposée mais dans plusieurs objets (tons et segments, consonnes et voyelles) dont il
s'agit de décrire la superposition ou l'interdigitation linéaire.
3. Je résume ici plusieurs analyses développées dans Sauzet 1993.
10 d'une structure en éliminant cette structure même. Soit une phrase simple :
(1) Pierre connaît Marie.
Parler de concaténation entre les trois mots de cette phrase est une façon d'enregistrer leur
successivité. Mais cette successivité n'est qu'un effet de l'interprétation d'une structure
qu'on peut noter schéma tiquemcnt, en ne retenant que les enchâssements :
(2) [Pierre [connaît [Marie]]]
La successivité des trois mots n'existe pas indépendamment de la structure qu'elle réalise et
qu'elle permet de reconnaître.
Considéré physiquement, le signal sonore correspondant à un énoncé a une durée, mais
pas d'ordre. Pour qu'il y ait de l'ordre, il faut qu'il y ait des parties discrètes. Une analyse,
morphosyntaxique comme phonologique, opère une segmentation en unités discrètes. Elle
interprète donc un continuum temporel comme un ordre, mais en même temps elle pose une
structure de constituants.
La pure concaténation ne s'impose nécessairement nulle part dans le langage. Soit il n'y
a pas d'unités discrètes et il n'y a rien à ordonner. Soit il y a des unités discrètes et l'ordre est
consubstantiel à la structure qui le produit.
Seule l'écriture, opération artificielle, qui repose sur un encodage de la successivité par
la concaténation, suggère l'indépendance de la concaténation. L'écriture, en un sens,
s'appuie sur l'organisation du langage qu'elle note, en ce qu'elle en reconnaît le caractère
discret. Mais en un autre sens elle impose une abstraction pratique par laquelle elle écarte la
structure (phonologique ou syntaxique). La difficulté de l'apprentissage de l'écriture et de la
lecture est largement celle de la reconnaissance de cette structuration, absente de la notation.
L'autonomie de la concaténation est suggérée par les définitions courantes de l'ambi
guïté 4. Mais c'est en fait une facilité, issue du maniement de l'écriture, que de définir
l'ambiguïté comme l'identité de la séquence terminale, définie comme une concaténation, et
la divergence de la structure. Considérons des phrases ambiguës :
(3) La petite ferme la cache.
str. syntaxique a : [P [la petite ferme][sv la cache]]
La petite ferme cache (la mare),
str. b : [P la petite [sv ferme[la cache]]]
La petite (fille) ferme la cache (du trésor).
*' str. phonologique a & b [la ferme] [la cache]
4. Ainsi dans Chomsky (1975 : 376) ou dans Chomsky (1957 : 94 de la traduction française) : « En
général nous disons que nous avons un cas d'homonymie de construction quand une certaine suite de
phonèmes supporte plusieurs analyses à un niveau quelconque. »
5. Notons que la réalisation [la petite] [ferme la cache], avec ce découpage en phrases phonologi
ques, n'est compatible qu'avec une structure où « petite » est nom, et « ferme » verbe (voir ci-dessous
l'asymétrie de Dell dont ceci est un exemple). Parler de « désambiguation » suppose faussement que la
séquence est première par rapport à la structure alors que l'inverse est vrai : la séquence est une
abstraction construite à partir de la linéarisée. La question de la pertinence de cette est à la fois empirique et conceptuelle : il faut doter la concaténation d'un statut autonome
(même dérivé) pour en faire une instance descriptive ou explicative.
11 II a trouvé le garçon qui lisait dans la bibliothèque. (4)
str. syntaxique a : [Щ_а trouvéfle garçon qui lisait dans la bibliothèque]]]
(et pas celui qui jouait dans la cour)
str. b : [il[sv[sv a trouvéfle garçon]][qui lisait dans la
thèque]]]
(alors qu'il le pensait parti depuis longtemps)
str. phonologique a & b : [il a trouvé le garçon][qui lisait dans la bibliothèque]
L'ambiguïté

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