L Être comme πολλά chez Platon. Les enseignements du «Parménide» et du «Sophiste» - article ; n°1 ; vol.94, pg 7-18
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Revue Philosophique de Louvain - Année 1996 - Volume 94 - Numéro 1 - Pages 7-18
L'Être est l'Un. Tel est l'héritage que Platon reçoit de Parmé- nide. Non pas l'Être est un, mais: l'Être est l'Un. Autrement dit, l'Un n'est pas prédicat ni accident de l'Être, il en constitue l'essence. Quand l'Éléate affirme: l'Être est, le non-Être n'est pas, Platon comprend: l'Un est, le non-Un n'est pas. Dès lors, le sens du parricide que va commettre l'Étranger dans le Sophiste sera non pas, comme on l'entend traditionnellement: l'Être n'est pas, le non-Être est, mais l'Un n'est pas, le non-Un est. En refusant l'identification parménidienne de l'Être à l'Un, Platon révèle son véritable dessein, à savoir, montrer que l'Être, le réellement réel, le ontôs on, c'est le Plusieurs (les Idées).
Being is the One. This is Plato's inheritance from Par- menides. Not that Being is one, but: Being is the One. In other words: the One is not a predicate or an accident of Being, but is its essence. When the thinker from Elea affirms that Being is and non-Being is not, Plato understands: the One is, the non-One is not. Hence the meaning of the patricide which the Foreigner is going to commit in the Sophist will not be the traditional interpretation: Being is not, non-Being is, but: the One is not, the non-One is. By refusing to follow Parmenides' identification of Being with the One, Plato reveals his true purpose, namely that of showing that Being, the really real, the ontôs on, is the Manifold (the Ideas). (Transl. by J. Dudley).
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Publié le 01 janvier 1996
Nombre de lectures 159
Langue Français

Extrait

Hervé Pasqua
L'Être comme πολλά chez Platon. Les enseignements du
«Parménide» et du «Sophiste»
In: Revue Philosophique de Louvain. Quatrième série, Tome 94, N°1, 1996. pp. 7-18.
Résumé
L'Être est l'Un. Tel est l'héritage que Platon reçoit de Parmé- nide. Non pas l'Être est un, mais: l'Être est l'Un. Autrement dit, l'Un
n'est pas prédicat ni accident de l'Être, il en constitue l'essence. Quand l'Éléate affirme: l'Être est, le non-Être n'est pas, Platon
comprend: l'Un est, le non-Un n'est pas. Dès lors, le sens du parricide que va commettre l'Étranger dans le Sophiste sera non
pas, comme on l'entend traditionnellement: l'Être n'est pas, le non-Être est, mais l'Un n'est pas, le non-Un est. En refusant
l'identification parménidienne de l'Être à l'Un, Platon révèle son véritable dessein, à savoir, montrer que l'Être, le réellement réel,
le ontôs on, c'est le Plusieurs (les Idées).
Abstract
Being is the One. This is Plato's inheritance from Par- menides. Not that Being is one, but: Being is the One. In other words: the
One is not a predicate or an accident of Being, but is its essence. When the thinker from Elea affirms that Being is and non-Being
is not, Plato understands: the One is, the non-One is not. Hence the meaning of the patricide which the Foreigner is going to
commit in the Sophist will not be the traditional interpretation: Being is not, non-Being is, but: the One is not, the non-One is. By
refusing to follow Parmenides' identification of Being with the One, Plato reveals his true purpose, namely that of showing that
Being, the really real, the ontôs on, is the Manifold (the Ideas). (Transl. by J. Dudley).
Citer ce document / Cite this document :
Pasqua Hervé. L'Être comme πολλά chez Platon. Les enseignements du «Parménide» et du «Sophiste». In: Revue
Philosophique de Louvain. Quatrième série, Tome 94, N°1, 1996. pp. 7-18.
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/phlou_0035-3841_1996_num_94_1_6971A
L'Etre comme no'k'kâ chez Platon
Les enseignements du «Parménide» et du «Sophiste»
L'Être est l'Un. Tel est l'héritage que Platon reçoit de Parménide.
Notons l'expression: non pas l'Être est un mais: il est l'Un. L'Un, ici,
n'est pas un prédicat, ou un accident, c'est l'essence même de l'Être.
Voilà ce que Platon comprend. Quand l'Éléate affirme: «ecrxi yàp
eîvai, u.r|ôèv 5'oùk eaxiv» (frag. VI), l'Être est, le non-être n'est pas,
Platon comprend: l'Un est, le non-un n'est pas. Dès lors, le sens du par
ricide que va commettre l'Étranger dans le Sophiste sera non pas,
comme on l'entend traditionnellement: l'Être n'est pas, le non-être est
mais, l'Un n'est pas, le non-un est. En refusant l'identification parméni-
dienne de l'Être à l'Un, Platon révèle son véritable dessein, à savoir,
montrer que l'Être, le réellement réel, le ôvxcoç ôv, c'est le Plusieurs,
TloXXà. Tout l'effort du Parménide consiste, en effet, à justifier l'exis
tence du Multiple. Contre Zenon qui le nie1, Socrate veut prouver que le
plusieurs est en s 'élevant du plan matériel, où se situe le disciple de Par
ménide, au plan immatériel des Idées2. Tel est le sens général du dia
logue dont la première partie est consacrée à prouver que le Multiple est,
et la deuxième que l'Un n'est pas.
Dans cette dernière Platon affronte la difficulté la plus grave, celle
qui peut détruire la théorie des Idées: comment concevoir le Multiple
sans l'Un? Le sort du Plusieurs est analysé dans les hypothèses six, sept,
huit et neuf en fonction de la conclusion de la première: l'Un n'est pas.
Si l'Un n'est pas, qu'advient-il des autres, xà akXal Aussitôt, ils se di
sséminent dans une série hétérogène, xâ aXka ëxepa ëaxiv, se diffusant
dans la différence pure. Car, de ces autres on ne peut plus dire qu'ils
sont autres que l'Un puisque l'Un n'est pas. C'est la raison pour laquelle
ils se multiplient sans limite et sans ordre, cbteipôç 7iÀ,f|9ei. En
l'absence de l'Un, le multiple se multiplie en un pullulement pléthorique
1 Cf. 127 e: «TApa xoùxô èaxtv ô Pou^ovtai ctou ol Xôyoi, oûk akko xi f[
napà nàvxa xà Xeyôueva d>ç où noXkâ èaxi». Cf. Platon, Parménide.
Traduction inédite, introduction et notes par Luc Brisson, Flammarion, Paris, 1994.
2 Parménide, 127e- 130a. Hervé Pasqua 8
qui ne connaît aucun point d'arrêt. Dès lors, l'existence du multiple est
elle-même en danger puisqu'elle se confond avec une dissipation, une
désagrégation atteignant l'atome lui-même qui se brise à son tour en une
multiplicité incontrôlable, et ainsi à l'infini. Telle est la débâcle catas
trophique provoquée par la négation de l'Un.
Comment Platon va-t-il pouvoir affirmer l'existence du Multiple
après avoir nié l'être de l'Un? «Si l'Un n'est pas, rien n'est», conclura
la neuvième hypothèse3. Si l'Un n'est point, les autres non seulement ne
sont pas, mais ils ne se laissent imaginer ni un ni plusieurs4. Les autres
que l'Un, si l'Un n'est pas, jamais ne pourront se penser comme mult
iples. Telle est la raison pour laquelle Platon se trouvera acculé à
rejeter l'existence du Multiple sans l'Un. En effet, si l'Un n'est pas, rien
n'est.
Telle est la difficulté dans laquelle se débat Platon sans pouvoir la
résoudre autrement qu'en transformant le nXr\Qoq en jroÀ,À,à, c'est-à-
dire, le multiple innombrable en multiple nombrable, le multiple sans
l'Un en une multiplicité d'Uns: les Idées. Alors seulement le monde des
Idées sera un monde structurable, comptable, où l'addition et la sous
traction seront possibles, où en d'autres termes les Idées pourront se pré-
diquer l'une de l'autre. Mais il restera pour cela à introduire le mouve
ment dans cette communauté. Ce sera la tâche du Sophiste. Pour l'heure,
une chose demeure à démontrer: le ôvxcoç ôv, le réellement réel, est
multiple.
Les deux premières hypothèses du Parménide déterminent la série
des hypothèses qui suivent et s'ordonnent selon que l'Un est ou selon
qu'il n'est pas. Toutes deux se formulent de la même façon: el ëv
êcmv, si l'Un est. Mais la première s'interroge sur l'Un en tant qu'unité
pure5, la seconde sur l'Un en tant que réalité6. Dans les deux cas, il n'est
jamais question de l'Être en tant qu'Être, mais de l'Être en tant qu'Un
conformément à la doctrine parménidienne. Or, c'est celle-ci que vise
Platon dans son dialogue. Il la fera voler en éclats en poussant à bout
l'idée d'Un: si l'Un est l'Un il n'est pas l'Être, donc il n'est pas. Tel est
le résultat de la première hypothèse. Toute l'argumentation repose sur
l'opposition de l'Un au Multiple: «S'il est Un, n'est-il pas vrai que l'Un
3 Id., 165 e.
4 Id., 166 b: «"Ev apa el [ir\ ëcm, xàXXa ôuxe ëcmv orne ôoÇâÇeTai ëv où5è
â».
5 Id., 137 c-142 b.
6 Id., 142 b-155 e. L'Être comme noXXâ chez Platon 9
ne saurait être plusieurs? »7. L'Être est nié de l'Un à partir de cette oppos
ition. Cela signifie que, dans l'esprit de Platon, l'Être se trouve déjà du
côté du Multiple. Dès lors, dire: l'Un n'est pas, c'est affirmer: le plu
sieurs est.
Pierre Boutang, commentant cette partie du dialogue, parle d'un
«offusquement» de l'être: «Nous disons que l'être se trouve offusqué,
au profit de l'un»8. Le nerf de son argumentation consiste à observer
que la formulation de la première hypothèse ne peut être: «si l'un est
un», car il n'y a aucune trace d'une telle tautologie dans le texte: e! ev
èaxiv, mais «ce qui est, c'est l'Un». Il s'agit donc bien de l'Être-Un
de Parménide. En d'autres termes, l'Un n'est pas affirmé ind

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