La connaissance individuelle selon Robert Grosseteste - article ; n°25 ; vol.75, pg 5-48
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Description

Revue Philosophique de Louvain - Année 1977 - Volume 75 - Numéro 25 - Pages 5-48
On possède deux ouvrages de Robert Grosseteste († 1253) sur l'épistémologie, le De veritate et le Commentaire sur les Analytiques postérieurs. Ils diffèrent par leur problématique comme par leur accent, mais ne s'opposent pas par la doctrine. Le premier explique la relation entre les vérités particulières et la Vérité suprême en termes d'illumination subjective et objective par la Lumière suprême. Le second reconnaît la validité de la connaissance scientifique dérivée de la sensation par abstraction des universaux. Mais si Grosseteste n'a aucun doute quant à la valeur de la méthodologie aristotélicienne, il n'a non plus aucune illusion quant à l'insuffisance de cette méthodologie comme guide menant à la vérité. Et lorsqu'il passe en revue toutes les sources de la connaissance humaine, la méthode scientifique se trouve modestement glissée entre le sens commun et la révélation divine dans une hiérarchie de la vérité qui tend à la vision de Dieu comme à son faîte et à sa perfection.
Robert Grosseteste († 1253) produced two works on epistemology, the De Veritate and the Commentarius in Libros Analyticorum Posteriorum Aristotelis. They differ in problematic and accent, but are not in doctrinal opposition. The first explains the relationship between particular truths and the supreme Truth in terms of subjective and objective illumination by the First Light. The second acknowledges the validity of scientific knowledge derived by abstraction of universals from sensation. But if Grosseteste had no doubt about the value of Aristotelean methodology, neither had he any illusions concerning its lack of comprehensiveness as a guide to truth. And when he passes in review all the sources of human knowledge, scientific method is slotted in modestly between commonsense and divine revelation, in a hierarchy of truth which aims at the vision of God as its summit and consummation.
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Publié le 01 janvier 1977
Nombre de lectures 155
Langue Français
Poids de l'ouvrage 3 Mo

Extrait

James McEvoy
La connaissance individuelle selon Robert Grosseteste
In: Revue Philosophique de Louvain. Quatrième série, Tome 75, N°25, 1977. pp. 5-48.
Résumé
On possède deux ouvrages de Robert Grosseteste († 1253) sur l'épistémologie, le De veritate et le Commentaire sur les
Analytiques postérieurs. Ils diffèrent par leur problématique comme par leur accent, mais ne s'opposent pas par la doctrine. Le
premier explique la relation entre les vérités particulières et la Vérité suprême en termes d'illumination subjective et objective par
la Lumière suprême. Le second reconnaît la validité de la connaissance scientifique dérivée de la sensation par abstraction des
universaux. Mais si Grosseteste n'a aucun doute quant à la valeur de la méthodologie aristotélicienne, il n'a non plus aucune
illusion quant à l'insuffisance de cette méthodologie comme guide menant à la vérité. Et lorsqu'il passe en revue toutes les
sources de la connaissance humaine, la méthode scientifique se trouve modestement glissée entre le sens commun et la
révélation divine dans une hiérarchie de la vérité qui tend à la vision de Dieu comme à son faîte et à sa perfection.
Abstract
Robert Grosseteste († 1253) produced two works on epistemology, the De Veritate and the Commentarius in Libros Analyticorum
Posteriorum Aristotelis. They differ in problematic and accent, but are not in doctrinal opposition. The first explains the
relationship between particular truths and the supreme Truth in terms of subjective and objective illumination by the First Light.
The second acknowledges the validity of scientific knowledge derived by abstraction of universals from sensation. But if
Grosseteste had no doubt about the value of Aristotelean methodology, neither had he any illusions concerning its lack of
comprehensiveness as a guide to truth. And when he passes in review all the sources of human knowledge, scientific method is
slotted in modestly between commonsense and divine revelation, in a hierarchy of truth which aims at the vision of God as its
summit and consummation.
Citer ce document / Cite this document :
McEvoy James. La connaissance individuelle selon Robert Grosseteste. In: Revue Philosophique de Louvain. Quatrième série,
Tome 75, N°25, 1977. pp. 5-48.
doi : 10.3406/phlou.1977.5920
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/phlou_0035-3841_1977_num_75_25_5920La connaissance intellectuelle
selon Robert Grosseteste*
On ne prétend pas trouver chez les scolastiques du xme siècle
un intérêt pour les problèmes de la connaissance comparable à celui
qui allait se généraliser dans une période ultérieure de l'histoire de
la philosophie. Toutefois il y a grand profit à se demander comment
un théologien de la première moitié du xme siècle, dont la réflexion
part d'un fonds d'idées augustiniennes, a réagi devant la théorie de
la connaissance qu'avait créée Aristote en réaction contre les idées
de son maître Platon. Une telle enquête est loin d'être assurée de
s'engager dans une voie facile, car elle se trouve dès l'abord aux
prises avec une conception de la connaissance qui se résume dans le
terme «illumination»; or celle-ci comporte des éléments d'obscurité
que ses adhérents n'ont jamais réussi à éclairer de façon adéquate.
L'historien éprouve de la difficulté à récupérer la problématique même
d'une théorie de la connaissance qui, elle, était restée à un niveau
encore relativement indifférencié; les distinctions qu'introduira l'évo
lution ultérieure de la pensée philosophique nous ont placés hors
de l'optique intégrale à l'intérieur de laquelle seulement, la théorie
de l'illumination pouvait convaincre les esprits.
Ce qui fait l'intérêt particulier de la pensée de Robert Grosseteste,
c'est bien sûr son rôle comme premier commentateur en latin des
Analytiques postérieurs du Stagirite, car ce rôle l'a obligé à confronter
deux traditions philosophiques nettement différentes : celle qui relie
* Cet article est extrait d'une thèse de doctorat soutenue le 16 février 1974
à l'Institut Supérieur de Philosophie, intitulée Man and Cosmos in the Philosophy of
Robert Grosseteste, 2 t., ix + 554 pp. L'auteur tient à remercier le plus vivement son
promoteur, M. le chanoine F. Van Steenberghen, Professeur Émérite de l'UCL, comme
aussi les autres membres du jury: le Professeur G. Van Riet, le regretté Professeur
Herman Van Breda O.F.M., le S. Mansion et (last but not least), le
Professeur Ch. Wenin. M. Henri Godin, Emeritus Professor of French of the Queen's
University of Belfast a rendu à l'auteur un service inestimable en acceptant de revoir
le texte de sa traduction et Mme Sinéad Smyth a eu l'amabilité de frapper l'ensemble
plus d'une fois. 6 James McEvoy
entre eux Platon et S. Augustin, et dans le cadre de laquelle Grosse-
teste lui-même avait été formé; et celle qui remonte dans l'histoire
des idées jusqu'à Aristote. Nous sommes loin de. nous attendre à
ce qu'un auteur des années 1220 à 1230 ait été en mesure de nous
livrer une synthèse parfaitement définie du domaine de la pensée
en question, mais nous espérons suivre de près la démarche d'un
esprit à la fois éveillé et honnête, qui entreprend d'interpréter,
de comprendre et de critiquer l'œuvre d' Aristote, dans le but de
prendre position à l'égard des problèmes classiques de l'épistémologie
qu'elle soulève. Ce sont effectivement ces qualités-là qui se manifestent
dans la démarche intellectuelle de Grosseteste, où elles sont présentes
d'ailleurs à un degré très supérieur à ce qu'on a communément
reconnu jusqu'ici.
1. Le De veritate
Notre étude s'ouvre par la discussion, réduite à l'essentiel, de la
doctrine de Grosseteste sur la vérité, telle qu'elle se trouve exprimée
dans son traité De veritate1. Ici le disciple d'Augustin et d'Anselme
passe sous silence la conception aristotélicienne de la connaissance
et les problèmes qu'elle soulève. Restant fidèle au langage et à l'esprit
de ses deux autorités, Grosseteste s'intéresse de façon directe au
problème du rapport entre les vérités particulières et la vérité suprême2.
Un seul de ses arguments, le cinquième pro, retiendra notre attention
ici; son importance particulière va se manifester par la suite. Si la
vision de la vérité suprême est réservée aux cœurs purs (mundi corde),
bien que la et la certitude ne soient pas tout à fait cachées
aux esprits demeurés impurs, il doit y avoir une vérité autre que la
vérité suprême3.
1 Ludwig Baur a publié le texte du De veritate parmi les opuscules de
Grosseteste: Die philosophischen Werke des Robert Grosseteste, Bischofs von Lincoln.
Zum erstenmal vollstàndig in kritischer Ausgabe besorgt von Ludwig Baur (Beitràge
zur Geschichte der Philosophie des Mittelalters, Band IX). Munster i. W., 1912,
xv + 183 + 778 pp.
2 La question se formule tout au début dans les termes suivants: «An sit aliqua
alia veritas, an nulla sit alia ab ipsa summa veritate». Ibid., p. 130.
3 Ibid., p. 131, 3ss. Baur écrit parfois mundi cordes et parfois mundi corde, sans
explication. Nous pensons que mundi cordes est une faute, soit de Baur, soit des
manuscrits qu'il utilise. connaissance intellectuelle selon Robert Grosseteste 7 La
Grosseteste se révèle solidaire de ses autorités quand il affirme
que sujet et objet de la connaissance ont tous deux besoin d'être
illuminés par la lumière suprême pour que la vraie connaissance se
produise. Le fondement sur lequel cette conclusion repose, c'est bien
sûr l'exemplarisme, doctrine préférée de Grosseteste, à laquelle il fait
appel en toute occasion et dans chacun de ses écrits. Toute réalité
créée possède une vérité qui lui est propre, à savoir sa conformité
à son exemplaire éternel dans l'esprit divin ou la parole créatrice de
Dieu4. Il s'ensuit logiquement que notre esprit ne saurait prétendre
à la possession de la vérité tout entière concernant n'importe quelle
chose individuelle, avant de voir, outre l'objet lui-même, l'exemplaire
qui en est la mesure o

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