Réflexions sur la systématisation philosophique - article ; n°58 ; vol.41, pg 185-216
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Revue néo-scolastique de philosophie - Année 1938 - Volume 41 - Numéro 58 - Pages 185-216
32 pages

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Publié le 01 janvier 1938
Nombre de lectures 30
Langue Français
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Extrait

Fernand Van Steenberghen
Réflexions sur la systématisation philosophique
In: Revue néo-scolastique de philosophie. 41° année, Deuxième série, N°58, 1938. pp. 185-216.
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Van Steenberghen Fernand. Réflexions sur la systématisation philosophique. In: Revue néo-scolastique de philosophie. 41°
année, Deuxième série, N°58, 1938. pp. 185-216.
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/phlou_0776-555X_1938_num_41_58_3889Réflexions
sur la systématisation philosophique
Le problème de la classification scientifique est à peu près aussi
ancien que la science et il présente, en raison des divers aspects
sous lesquels on peut l'envisager, une réelle complexité, même dans
les perspectives d'une philosophie déterminée. Pour traiter ces
questions avec compétence et autorité, il faudrait donc y avoir
consacré des recherches approfondies. Aussi notre dessein est-il
beaucoup plus modeste : le but de ces notes est de soulever des
questions, d'exprimer des doutes ou des craintes, tout au plus de
présenter des suggestions, afin de provoquer, si possible, un échange
d'idées qui pourrait être fructueux. Pour reprendre une formule
scolastique, nous procéderons ici « magis dubitando quam deter-
minando ».
D'autre part, ces réflexions, ébauchées depuis quelque temps
déjà, ont pris corps et se sont précisées à l'occasion de l'étude du
nouveau Cursus Philosophiae que nous devons au labeur infatigable
du R. P. Boyer. En prenant comme point de départ et comme
terme de comparaison la position adoptée par le distingué Profes
seur dans son traité, il sera facile de donner à cette enquête une
allure concrète et à la discussion une utilité actuelle.
Après l'analyse de l'ouvrage du P. Boyer, nous tenterons de
situer le débat et de l'élargir par le rappel de quelques données
historiques relatives au problème de la classification philosophique,
puis diverses suggestions seront développées en vue de résoudre
d'une manière plus satisfaisante ce problème.
Si nous ajoutons que toute cette étude se meut dans les cadres
généraux de la philosophie traditionnelle et selon ses perspectives,
nous aurons suffisamment déterminé la portée exacte et les limites
de cet essai. 186 F. Van Steenberghen
Le nouveau " Cursus Philosophiae ,,.
Les manuels de philosophie n'ont pas bonne presse. 11 est
facile de les dénigrer : ils simplifient, ils schématisent, ils laminent
la pensée... ; ils donnent l'illusion de la clarté, de la vérité toute
faite, découverte une fois pour toutes, démontrable par syllo
gismes...; ils tuent la réflexion personnelle, ils paralysent l'effort,
ils favorisent la routine... On pourrait continuer le réquisitoire. Les
manuels latins partagent la nocivité de leurs congénères écrits en
langues vivantes et soulèvent quelques griefs supplémentaires.
11 est donc facile de critiquer les manuels. Il est plus difficile
d'en faire. Le malheur est peut-être que les personnes capables écrire de bons se résignent rarement à cette tâche ingrate.
Car il faut de l'humilité, une grande patience et quelques autres
vertus connexes, chez un homme intelligent, pour rédiger un ma
nuel de philosophie.
Et cependant, qui ne voit l'importance de pareil travail ? Pour
faciliter les choses, limitons ces réflexions au monde de la pensée
catholique. Depuis un demi-siècle, une remarquable renaissance
des études philosophiques, et en particulier des études thomistes,
se développe dans les milieux intellectuels catholiques ; une équipe
de plus en plus nombreuse de spécialistes multiplie les monographies
de tous genres, tant dans le domaine de la critique philosophique
que dans celui des recherches historiques. D'autre part, il existe
de par le monde des centaines d'établissements ecclésiastiques
dans lesquels des milliers de jeunes gçns — clercs et laïcs — re
çoivent une formation philosophique élémentaire. 11 est assez évident
que le gros effort des spécialistes manquerait en partie son but s'il
ne se traduisait pas, en fin de compte, par une amélioration. parallèle
des études élémentaires : car sans exagérer le rendement et la portée
de ces études, on peut dire qu'elles représentent un facteur capital
dans l'éducation de nos élites intellectuelles : formation du juge
ment, assouplissement de la pensée, affermissement des principes
qui dominent la vision du monde et la conception de la vie.
Or, à considérer les choses de près, n'a-t-on pas l'impression
qu'il y a actuellement un abîme entre le renouveau philosophique
au niveau proprement scientifique et l'état général de l'enseigne
ment élémentaire, du moins tel qu'il se manifeste dans beaucoup
de manuels scolastiques en usage dans les établissements ecclé- Réflexions sur la systématisation philosophique 187
siastiques ? Pour n'être désobligeant vis-à-vis de personne, nous
éviterons de donner des exemples ; mais les gens avertis nous com
prendront.
Il semble donc que l'effort de haute vulgarisation, tendant à
faire bénéficier l'enseignement élémentaire des progrès de la r
echerche scientifique, n'est pas suffisant.
On 's'excuse trop aisément en prétendant que pareille tentative
est irréalisable et nécessairement décevante. Certaines expériences
prouvent qu'il n'en est rien et qu'on peut, dans une très large
mesure, éviter les travers de nombreux manuels. Nous le remar
quions ici même, il y a quelques mois, en soulignant les qualités
du nouveau Précis d'Histoire de la Philosophie du P. Thonnard (1).
Des qualités analogues assurèrent autrefois l'éclatant succès du
Cours de Philosophie publié par Mgr Mercier : dans ces volumes
aujourd'hui dépassés, la pensée scolastique reprenait vie et jeu
nesse : les problèmes, au lieu de . tomber du ciel, étaient posés
d'une manière si « réelle » et si humaine que l'« état de la ques
tion » suffisait à exciter la curiosité, parfois l'avidité de connaître
la solution ; le plus souvent, celle-ci se développait en contact
étroit, d'une part avec la tradition thomiste, d'autre part avec la
problématique moderne et les controverses contemporaines ; la
routine était absente de ces exposés ; Mgr Mercier ne craignait pas
d'innover, aucune position « acquise » n'était soustraite à l'examen
critique. Cette œuvre était si vivante qu'elle vit encore, sous le
regard du lecteur étonné, plus de trente ans après le départ de
Mgr Mercier pour Malines, départ qui marqua la fin de sa carrière
philosophique : les points de vue sont périmés, les problèmes se
sont renouvelés depuis, mais ces pages ont gardé et garderont tou
jours un Teflet de la pensée si personnelle qui s'y exprime (2).
Il est donc possible de rendre un manuel vivant et, dans cette
mesure, attirant. Par ailleurs il est possible d'y éviter le simplisme
et le dogmatisme : sans verser dans l'excès qui risquerait de faire
f1) Cf. la Revue Néoscol. de Philos., février 1938, p. 168.
<2> Toute proportion gardée, des qualités du même genre ont fait le succès
du Traité élémentaire de philosophie à l'usage des classes, édité par des Pro
fesseurs de l'Institut supérieur de Philosophie de Louvain. Ce manuel, aujour
d'hui épuisé et d'ailleurs vieilli, a connu sept éditions en vingt ans (1905-1926).
La Préface de la première édition renferme d'intéressantes considérations, dues
à la plume de Mgr Mercier, sur l'enseignement de la philosophie thomiste en
langue . vivante et sur l'ordre à établir dans l'enchaînement des branches de la
philosophie. Nous reviendrons plus loin sur ce second point. 188 F. Van Steenberghen
des sceptiques et des agnostiques, on peut cultiver, même dans un
traité pour débutants, le « sens du mystère » et de la complexité
des problèmes philosophiques. Il est indispensable qu'un étudiant
se rende compte, au terme d'un cycle d'études de deux ans, de
l'immense domaine ouvert à sa réflexion et à peine exploré au cours
de cette première initiation ; il doit

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