Wittgenstein. Le langage à la racine de la question philosophique - article ; n°60 ; vol.83, pg 559-584
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Description

Revue Philosophique de Louvain - Année 1985 - Volume 83 - Numéro 60 - Pages 559-584
La pensée de Wittgenstein est une philosophie du langage au sens le plus fort du terme : c'est l'interrogation du langage qui serait à l'origine de la philosophie. D'abord porté par une structure idéale a priori dans le Tractatus logico-philosophicus, le langage s'identifie ensuite, dans les Investigations philosophiques, à la pluralité de ses «jeux», c'est-à-dire de ses emplois, comme formes de vie.
Mais ce qui demeure au travers de ces deux étapes, c'est le caractère indicible du langage même, qui ne peut être l'objet d'aucun discours : car il ne peut que se montrer et non se dire. Toute thèse philosophique s'égare car elle tente d'expliquer le langage. Le «vrai» philosophe pratique une ascèse du langage, il s'incline devant le non-dicible, qui est l'élément mystique dont le langage dessine le contour. Cependant l'élément mystique n'est pas hors du langage : car le langage ne le limite pas du dehors, mais le porte en son centre, en tant qu'il ne peut pas dire ce qu'il dit, mais seulement le dire. En ce sens la pensée de Wittgenstein se tient dans un rapport éminemment intime avec la pensée du langage. de Wittgenstein se tient dans un rapport éminemment intime avec la pensée du langage.
Wittgenstein's thought is a philosophy of language in the strongest sense of the term : it is the inquiry into language which is held to be the origin of philosophy. Born firstly by an ideal a priori structure in the Tractatus logico-philosophicus language is identified afterwards in the Philosophical Investigations with the plurality of its articulations, i.e. of its usages, as forms of life.
But that which remains across these two stages is the unutterable character of language itself, which cannot be the object of any discourse, as it can only show itself and cannot express itself. All philosophical theses err, as they attempt to explain language. The «true» philosopher practises a linguistic asceticism, he bows before the unutterable which is the mystical element of which language forms the contour. However, the mystical element is not outside language, as language does not limit it from the outside, but bears it at its centre, inasmuch as it cannot state what it states, but can only state it. In this sense Wittgenstein's thought is connected in an eminently intimate manner with the thought of language. (Transl. by J. Dudley).
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Publié le 01 janvier 1985
Nombre de lectures 60
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Luce Fontaine-De Visscher
Wittgenstein. Le langage à la racine de la question
philosophique
In: Revue Philosophique de Louvain. Quatrième série, Tome 83, N°60, 1985. pp. 559-584.
Citer ce document / Cite this document :
Fontaine-De Visscher Luce. Wittgenstein. Le langage à la racine de la question philosophique. In: Revue Philosophique de
Louvain. Quatrième série, Tome 83, N°60, 1985. pp. 559-584.
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/phlou_0035-3841_1985_num_83_60_6381Résumé
La pensée de Wittgenstein est une philosophie du langage au sens le plus fort du terme : c'est
l'interrogation du langage qui serait à l'origine de la philosophie. D'abord porté par une structure idéale a
priori dans le Tractatus logico-philosophicus, le langage s'identifie ensuite, dans les Investigations
philosophiques, à la pluralité de ses «jeux», c'est-à-dire de ses emplois, comme formes de vie.
Mais ce qui demeure au travers de ces deux étapes, c'est le caractère indicible du langage même, qui
ne peut être l'objet d'aucun discours : car il ne peut que se montrer et non se dire. Toute thèse
philosophique s'égare car elle tente d'expliquer le langage. Le «vrai» philosophe pratique une ascèse
du langage, il s'incline devant le non-dicible, qui est l'élément mystique dont le langage dessine le
contour. Cependant l'élément mystique n'est pas hors du langage : car le langage ne le limite pas du
dehors, mais le porte en son centre, en tant qu'il ne peut pas dire ce qu'il dit, mais seulement le dire. En
ce sens la pensée de Wittgenstein se tient dans un rapport éminemment intime avec la pensée du
langage. de Wittgenstein se tient dans un rapport éminemment intime avec la pensée du langage.
Abstract
Wittgenstein's thought is a philosophy of language in the strongest sense of the term : it is the inquiry
into language which is held to be the origin of philosophy. Born firstly by an ideal a priori structure in the
Tractatus logico-philosophicus language is identified afterwards in the Philosophical Investigations with
the plurality of its articulations, i.e. of its usages, as forms of life.
But that which remains across these two stages is the unutterable character of language itself, which
cannot be the object of any discourse, as it can only show itself and cannot express itself. All
philosophical theses err, as they attempt to explain language. The «true» philosopher practises a
linguistic asceticism, he bows before the unutterable which is the mystical element of which language
forms the contour. However, the mystical element is not outside language, as language does not limit it
from the outside, but bears it at its centre, inasmuch as it cannot state what it states, but can only state
it. In this sense Wittgenstein's thought is connected in an eminently intimate manner with the thought of
language. (Transl. by J. Dudley).Le langage à la racine de la Wittgenstein.
question philosophique
La pensée de Wittgenstein est essentiellement liée à ce qu'on a
appelé, au milieu de ce siècle, la «philosophie du langage». Or, il y a
diverses manières de concevoir cette appellation; et il semble qu'on
pourrait les ramener à trois principales :
1° une acception «faible» laissant d'ailleurs la place à beaucoup
d'interprétations serait celle qui désignerait par «philosophie du
langage» une certaine pensée, une certaine définition du langage, que
ce soit l'idée de système de signes, de système de communication,
d'expression de la pensée, de «chair» de la pensée comme a dit Husserl,
de «forme de vie», telle l'approche de Wittgenstein dans les Investiga
tions philosophiques;
2° une acception plus «réductrice» celle-là, qui serait une manière
résolument positiviste de considérer que la philosophie n'est qu'une
affaire de mots, qu'elle n'est somme toute qu'une illusion, une erreur
langagière, qu'une saine analyse du langage doit arriver à dissiper;
ce qui a été l'attitude prise par tout un courant d'empirisme issu de
Wittgenstein, la «philosophie analytique», à laquelle il faudrait cepen
dant se garder de le réduire, ce qu'ont montré nombre de commentat
eurs;
3° enfin une troisième acception, l'acception «forte», considérant
que la question du langage est la question philosophique, parce que
le langage est le «tout». De sorte que cette «philosophie du langage»,
au troisième sens, devient le recentrement indéfini de la question philo
sophique du langage sur la question du langage de la philosophie.
Parce que la philosophie est un discours dont la prétention va au
sens maximal : sa tâche est d'interroger tout discours, elle culmine
dans la question de son propre discours.
Pour revenir à la «philosophie analytique», dont les prémices sont
dues pour une bonne part à Wittgenstein, elle constitue elle-même
un mouvement très diversifié; malgré son allure générale d'empirisme,
il est difficile d'en extraire un dénominateur commun. Tout ce qu'on
peut dire, c'est qu'elle marque un déplacement important du foyer de 560 Luce Fontaine-De Visscher
la question philosophique. Les causes sont à en chercher d'abord dans
un contexte plus largement culturel que spécifiquement philosophique.
En effet, deux événements marquants s'annoncent dès la moitié du
siècle dernier, dont les suites se prolongent encore aujourd'hui :
tout d'abord dans le domaine des sciences humaines en général
et de la linguistique en particulier : à la linguistique historique la
philologie succède une théorie du signe qui provoque un déplace
ment du problème de la connaissance vers celui de la signification.
La question devient : «que voulons-nous dire?» («what do we mean?»)
et donc «comment parlons-nous!» («how do we speak!»);
et d'autre part, dans le domaine des sciences exactes, il y a le
grand bouleversement des nouvelles mathématiques qui, apparaissant
comme un cas particulier de la logique, perdent leur caractère catégori
que. «Le» logique, dans son autonomie, devient le levier d'Archimède.
C'est donc la naissance d'un nouveau rationalisme : de synthéti
que, la logique devient désormais purement analytique; elle se clôt
sur elle-même, réseau de relations externes, totalement i
ndépendant de son contenu. Plus de jugement synthétique, seule vaut
la représentation comme double du monde et extérieure à lui. Tout
autre discours est sinnlos, privé de sens. Un peu plus tard, et coïncidant
avec le deuxième Wittgenstein, toute métaphysique sera évacuée; seul
demeure le langage, qui est toujours parfait, puisqu'il ne dit que lui-
même et donc fonctionne bien. Disparaît ainsi même la toile de fond
d'un langage idéal derrière les langages existants. Le langage est seul
ement à analyser, non plus à réduire ou à expliquer à partir d'un quel
conque modèle ou principe, dont on ne pourrait d'ailleurs rien dire,
car le langage s'aplatirait en lui. C'est ce qui comme on sait fait
trébucher tout le Tractatus logico-philosophicus.
Avec le recul du temps, la pensée de Wittgenstein semble acquérir
une actualité et receler une fécondité toujours grandissante. Sans doute
parce que, initiateur de la «philosophie analytique», il ne s'y est jamais
enfermé, même lors de ses premiers écrits. Toujours et partout, sa
pensée reste ouverture de sa propre question. C'est pourquoi il est
resté, de toute sa génération, le philosophe le plus interrogé, jamais
dé-passé mais paraissant toujours se tenir en avant de nous, posant
les questions qui sont les nôtres aujourd'hui. La bibliographie soulevée
par son uvre est déjà immense, et notre ambition n'est certes pas de
faire le tour de la question wittgensteinienne.
Nous avons fait un choix de quelques interprètes, pas seulement Wittgenstein 561
des plus récents, mais surtout de ceux qui nous paraissent les plus
susceptibles de nous faire pénétrer la pensée empiriste anglaise. J. Bou-
veresse1 semble être, à cet égard, un de ceux qui, en France, ont le
mieux aperçu l'empirisme comme philosophie. Il en est de même pour
G. Granger2.
Parmi les auteurs anglais, nous nous sommes adressé en particulier
à D. Pears3, à J. Kenny4, à D. Pole pour le deuxième Wittgenstein5,
à l'oxfordien O. Kerr6 pour les rapports qu'o

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