Rationalité et coopération : le rôle de la confiance en économie - article ; n°1 ; vol.84, pg 67-84
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Description

Revue d'économie industrielle - Année 1998 - Volume 84 - Numéro 1 - Pages 67-84
Economists often use the notion of trust in order to justify, in spite of contractual incompleteness, agents commitment in cooperative relationships. However in the bosom of economic literature devoted to trust, this notion is polysemic. We discern two large definitions of trust, which are lying on very different motivational hypothesises concerning the agents. The first definition, i.e. trust in a first meaning, is akin to standard theory. The agents are motivated by the pursuit of their self-interest. In this perspective, trust and mistrust are paradoxically compatible. Then, the use of the notion of trust is a subject for discussion. The second definition, i.e. trust in a second meaning, involves a different view about agents' motivations. This definition is set up in reference to other social sciences. We show that the integration of trust in its second sense comes on theoretical and empirical snags. Consequently, the status of trust in economics is far from being firmly sealed.
Les économistes ont souvent recours à la notion de confiance pour justifier, en dépit de l'incomplétude contractuelle, l'engagement des agents dans des relations de coopération. Cependant, au sein de la littérature économique aujourd'hui très développée consacrée à la confiance, cette notion revêt un caractère polysémique. Nous discernons deux grandes définitions de la confiance, qui reposent sur des hypothèses de motivation des agents très différentes. La première définition, la confiance au sens 1, retient de la théorie néoclassique standard la vision d'un individu engagé dans la quête égoïste de son intérêt personnel. Dans cette perspective, confiance et méfiance sont paradoxalement tout à fait compatibles. La pertinence de l'emploi du terme de confiance peut alors être discutée. La seconde définition, la confiance au sens 2, repose sur une vision différente des motivations des individus. Cette définition est élaborée en référence à d'autres disciplines. Nous montrons que l'intégration de cette confiance au sens 2 dans l'analyse microéconomique trouve des limites aussi bien théoriques qu'empiriques. Par conséquent, le statut de la confiance en économie est loin d'être fermement scellé.
18 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1998
Nombre de lectures 53
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Pascal Billand
Rationalité et coopération : le rôle de la confiance en économie
In: Revue d'économie industrielle. Vol. 84. 2e trimestre 1998. pp. 67-84.
Citer ce document / Cite this document :
Billand Pascal. Rationalité et coopération : le rôle de la confiance en économie. In: Revue d'économie industrielle. Vol. 84. 2e
trimestre 1998. pp. 67-84.
doi : 10.3406/rei.1998.1716
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rei_0154-3229_1998_num_84_1_1716Abstract
Economists often use the notion of trust in order to justify, in spite of contractual incompleteness, agents
commitment in cooperative relationships. However in the bosom of economic literature devoted to trust,
this notion is polysemic. We discern two large definitions of trust, which are lying on very different
motivational hypothesises concerning the agents. The first definition, i.e. trust in a first meaning, is akin
to standard theory. The agents are motivated by the pursuit of their self-interest. In this perspective,
trust and mistrust are paradoxically compatible. Then, the use of the notion of trust is a subject for
discussion. The second definition, i.e. trust in a second meaning, involves a different view about agents'
motivations. This definition is set up in reference to other social sciences. We show that the integration
of trust in its second sense comes on theoretical and empirical snags. Consequently, the status of trust
in economics is far from being firmly sealed.
Résumé
Les économistes ont souvent recours à la notion de confiance pour justifier, en dépit de l'incomplétude
contractuelle, l'engagement des agents dans des relations de coopération. Cependant, au sein de la
littérature économique aujourd'hui très développée consacrée à la confiance, cette notion revêt un
caractère polysémique. Nous discernons deux grandes définitions de la qui reposent sur des
hypothèses de motivation des agents très différentes. La première définition, la confiance au sens 1,
retient de la théorie néoclassique standard la vision d'un individu engagé dans la quête égoïste de son
intérêt personnel. Dans cette perspective, confiance et méfiance sont paradoxalement tout à fait
compatibles. La pertinence de l'emploi du terme de confiance peut alors être discutée. La seconde
définition, la confiance au sens 2, repose sur une vision différente des motivations des individus. Cette
définition est élaborée en référence à d'autres disciplines. Nous montrons que l'intégration de cette
confiance au sens 2 dans l'analyse microéconomique trouve des limites aussi bien théoriques
qu'empiriques. Par conséquent, le statut de la confiance en économie est loin d'être fermement scellé.Pascal BILLAND (1)
CREUSET
Université Jean Monnet
RATIONALITE ET COOPERATION :
LE RÔLE DE LA CONFIANCE EN ÉCONOMIE
Mots clés : Motivations - Rationalité - Opportunisme - Confiance - Coopération.
Key words : - Rationality - Opportunism - Trust - Cooperation.
INTRODUCTION
L'existence, dans de nombreuses situations économiques, de ce qu'il est
convenu d'appeler une incomplétude contractuelle (2), incomplétude portant
sur des attributs tels la qualité des produits échangés ou le niveau d'effort des
salariés, a reçu une attention croissante en économie. Les économistes ont sou
vent recours à la notion de confiance pour justifier, en dépit de cette incomp
létude, l'engagement des agents dans des relations de production et d'échang
e, le respect des promesses qu'ils ont faites et la réussite de leur coopération.
Ce point commun est cependant trompeur. Au sein de la littérature écono
mique aujourd'hui très développée consacrée à la confiance, cette notion revêt
un caractère polysémique et son emploi est compatible avec des types de com
portement très différents. Ainsi, par exemple, Wintrobe et Breton (1986) lient
la confiance à l'existence de sanctions incitant les agents à tenir leurs pro
messes. Kandel et Lazear (1992) affirment que cette condition est trop restric
tive et conduit à une impasse théorique. Selon eux, les individus ne sont pas
forcément tentés par le non-respect de leurs promesses et c'est dans un tel cas
(1) Cet article a bénéficié des critiques, commentaires et réflexions de P. Solal, M. Bellet et
N. Massard, chercheurs au CREUSET. L'auteur reste responsable des imperfections qui
subsistent.
(2) Un contrat complet est défini par Hart (1988, p. 758) comme un contrat qui « spécifie les
obligations de chaque partie pour toute éventualité concevable ».
REVUE D'ÉCONOMIE INDUSTRIELLE — n° 84, 2e trimestre 1998 67 que l'on peut parler de confiance. Les discussions destinées à lever certaines
ambiguïtés sur la confiance ont un impact important au niveau pratique. En
fonction de l'interprétation de cette notion, les actions mises en œuvre, notam
ment au niveau des firmes, non seulement peuvent être différentes mais peu
vent se révéler incompatibles.
Afin d'éclaircir les tâtonnements théoriques autour de la confiance, ce texte
au caractère exploratoire examine certaines modalités d' appréhension de cette
notion dans l'analyse économique. Nous montrons qu'une ouverture vers
d'autres disciplines permet certes d'appréhender la confiance dans un sens
nouveau, plus proche de l'usage courant de ce terme, et d'expliquer des phé
nomènes de coopération considérés comme des énigmes dans le cadre tradi
tionnel. Cependant, l'intégration de cette forme de confiance en économie
pose un certain nombre de problèmes. Le point de départ de ce travail (1.) s'in
téresse à des auteurs très proches de la théorie néo-classique standard, qui
recourent à la notion de confiance en préservant l'hypothèse de rationalité des
agents de cette théorie. Cette hypothèse recouvre en fait deux aspects com
portementaux, qui sont respectivement la possibilité de maximisation des
gains et l'égoïsme de l'individu le conduisant à être intéressé uniquement par
ses propres gains. Nous discernons alors deux axes de remise en cause de cette
conception, qui modifient l'appréhension de la confiance. Le premier (2.) cri
tique le premier aspect de l'hypothèse de rationalité standard à savoir les capac
ités cognitives attribuées aux agents ; il suppose que ces derniers sont dotés
d'une rationalité limitée et examine la confiance sur la base d'un relâchement
de l'hypothèse de maximisation. Dans ce cadre, la confiance reste intégrée
dans une représentation de l'économie fondée sur l'interaction des seuls inté
rêts individuels et l'emploi du terme confiance peut être discuté. Le second axe
de remise en cause de la conception standard de la rationalité (3.) critique une
telle représentation. Il montre que le deuxième aspect de l'hypothèse standard
de rationalité, la recherche égoïste par l'agent de ses propres gains, n'est pas
pertinent. Il préconise alors une appréhension enrichie des motivations. Le
résultat en est une nouvelle conception de la confiance (la confiance au sens
2), plus proche du sens courant de ce terme, et très différente de la conception
précédente (la confiance au sens 1). Les remises en question de l'hypothèse de
rationalité de la théorie standard, dans ses deux aspects, permettent d'envisa
ger des actions de modelage des motivations destinées à créer la confiance au
sens 2. Cette dernière se trouve alors endogénéisée dans l'analyse économique
(4.). À partir des limites de ce type d'approches, il apparaîtra au terme de notre
examen que le statut de la confiance en économie est loin d'être établi clair
ement et d'une façon satisfaisante.
I. — CONFIANCE ET MAXIMISATION DES GAINS
Wintrobe et Breton (1982), Kreps (1990) mobilisent la notion de confiance
dans leurs études des modes de coopération entre les agents en préservant la
référence au cadre d'analyse néo-classique traditionnel. Ainsi, ils retiennent
£g REVUE D'ÉCONOMIE INDUSTRIELLE — n° 84, 2e trimestre 1998 l'hypothèse centrale de l'agent rationnel, maximisateur de ses gains. Ils pro
posent toutefois d'enrichir ce cadre en rejetant le postulat implicite de la défi
nition parfaite des biens (ou services) proposés à l'échange. Selon eux, en
effet, de nombreuses t

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