Réalité et principe d immanence - article ; n°103 ; vol.25, pg 23-35
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Description

Langages - Année 1991 - Volume 25 - Numéro 103 - Pages 23-35
13 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1991
Nombre de lectures 34
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Jean-Claude Coquet
Réalité et principe d'immanence
In: Langages, 25e année, n°103, 1991. pp. 23-35.
Citer ce document / Cite this document :
Coquet Jean-Claude. Réalité et principe d'immanence. In: Langages, 25e année, n°103, 1991. pp. 23-35.
doi : 10.3406/lgge.1991.1605
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/lgge_0458-726X_1991_num_25_103_1605Jean-Claude COQUET
Paris VIII, CNRS
RÉALITÉ ET PRINCIPE D'IMMANENCE
La langue est un objet abstrait où seules comptent les relations entre les termes.
Ce principe d'immanence, tel du moins que l'ont compris les linguistes, ne mériterait
guère de commentaires tant il est connu, accepté et continûment appliqué depuis plus
d'un demi-siècle. C'est le principe qui « fonde la linguistique comme science de la
langue et science des langues » '. Pensée systémique qui n'a que faire de la « réalité ».
Pensée commune pour l'essentiel à Saussure et à Hjelmslev. Le choix est clair : d'un
côté la « pensée scientifique », de l'autre « un réalisme naïf » ; tel est le constat fidèle
établi par A. Martinet dans son célèbre compte rendu des Fondements de la théorie
linguistique : « L'existence d'objets comme autre chose que des termes de relation est
une hypothèse métaphysique dont la pensée scientifique a intérêt à se défaire pour
considérer ce qu'un réalisme naïf appelle des objets comme les points de croisement de
faisceaux d'interpendances et de relations » 2. Depuis, bien des écoles linguistiques se
sont succédé, mais le principe demeure. Quelques repères contemporains devraient
suffire. La « sémantique des relations de vérité entre phrases », dite sémantique
« véri-relationnelle », de R. Martin, se fonde explicitement sur « l'immanence des
phénomènes linguistiques » 3. Il en va de même en sémiotique discursive : pour
affronter des textes réputés obscurs comme les Illuminations de Rimbaud, la règle est
de faire porter la recherche non sur les déviances manifestées mais sur une
organisation transphrastique immanente 4.
Et pourtant le renouveau de l'intérêt pour renonciation devrait nous amener à
reconsidérer sinon le principe lui-même, du moins son champ de validité. Autrement
dit, une question resurgit avec force : quelle que soit l'extension du principe
d'immanence, est-il ou non nécessaire de réserver une place à la « réalité » ?
Pour y répondre au mieux, un retour à l'histoire récente ne paraît pas inutile.
J. Dubois disait : « le principe d'immanence fonde la linguistique ». La formulation
laisserait croire qu'il n'y a qu'une seule linguistique possible et, plus généralement,
qu'une sémiotique possible, théorie des modes de signifier possible. Or, pour ne
remonter qu'aux années 30, il est clair qu'une distribution s'était faite entre les
tenants d'un immanentisme exclusif « nominaliste » et ceux qui rappelaient les droits
du «réalisme», fût-il «naïf». Dès son petit traité de 32 pages, Anleitung zu
phonologischen Beschreibungen, publié en 1935, Troubetzkoy faisait le partage entre ce
qui lui paraissait indispensable à une étude scientifique, la conceptualisation, et la
prolifération terminologique. Il était entendu qu'on ne pouvait pas faire une science
1. J. Dubois, Grammaire structurale du français : la phrase et les transformations, Larousse,
1969, p. 6.
2. A. Martinet, « Au sujet des Fondements de la théorie linguistique de Louis Hjelmslev »,
BSL 42, 1946, p. 25. La traduction française porte le titre : Prolégomènes à une théorie du langage.
On notera le passage à l'indéfini.
3. R. Martin, Pour une logique du sens, PUF, 1983. p. 13 et 18.
4. J. С Coquet, Le Discours et son sujet, 2, Klineksierk, 1985. p. 11.
23 .
avec les seuls « faits » et qu'il fallait assumer les concepts алее toutes leurs
conséquences logiques : « La peur des sophismes ne doit pas faire renoncer à la pensée
abstraite ». Mais il fallait aussi prendre garde à ne pas se laisser aller au « plaisir de
forger des concepts (...) comme c'est le cas chez les glossématiciens danois ». Pour
éviter les aberrations du nominalism».:, Troubetzkoy donnait même le remède : ne pas
perdre le contact avec le « matériel concret », en particulier avec la langue poétique.
« II (...) suffit de comparer mes écrits avec ceux de Louis Hjelmslev pour sentir la
différence » •'. La ligne de partage était ainsi bien tracée : soit une science linguistique
tenue pour une sorte d'« algèbre immanente des langues » 6 (c'était le projet de
Hjelmslev salué avec admiration ei solennité quelque vingt années plus tard par son
continuateur, A.-J. Greimas : « Pour la première fois peut-être le terme de scientifi
que, attribué à un domaine des sciences humaines, perd son emploi métaphorique » 7.
En somme, une théorie logistique du langage) ; soit une science linguistique intégrant
le « matériel concret » jugé nécessaire par Troubelzkoy. Dans leur analyse fonctionn
elle du matériel sonore, les Pragois jugeaient ainsi « nécessaire et inévitable » de
garder «un certain contact entre phonologie et phonétique» et cela «malgré leur
indépendance de principe » 8. Comment aurait-on pris la mesure du phénomène
poétique, par exemple, si « le côté palpable des signes », le « signifiant », disait-on
dans la tradition de l'Ecole de Prague (ici à l'opposé de Saussure et de Hjelmslev), et
singulièrement la substance phonique acoustique, n'était pas retenue " ? Sur le plan de
la signification, intégrant l'étude du langage en acte, ils adoptaient sans mal le schéma
trifonctiormel de K. Biïhler (1()34). Rappelons-le brièvement bien qu'il soit très
connu: la fonction d'expression (Auadruck) est rapportée au locuteur; la fonction
d'appel (Appell) vise l'allocutaire : la fonction de figuration, de mise en scène
(Darstellung) a pour cible « l'état de choses dont on s'entretient » '". Comment
aurait-on fait l'impasse sur le discours, rintersubjectivité et la référence ? C'est ce que
souligne encore Jakobson, quand il présente, bien des années aprè*. les « caractères et
objectifs de la linguistique contemporaine » ' '. Parmi les événement:-- d'importance, la
précision est significative, il relève « la communication remarquable [de Husserl] du
11 novembre 1935 (' Phénoménologie (1er Spraehe) ». A ce que Ion sait, le philosophe
y avait surtout repris le théine de la cinquième Méditation cartésienne,
1 intersubjeetivité l2. ISous sommes là au cœur de la pensée sémiotique. Faut-d aller
dans le sens préconisé par la théorie logistique du langage? Faut-il maintenir les
droits de la visée phénoménologique 'i Si Ton veut atteindre à « la réalité linguistique
totale », dit Jakobson, projet assurément « métaphysique ». c"e*t -à-dire insensé pour
Hjelmslev, on ne peut en rester au « modèle saussurien de la langue considérée comme
un système statique et uniforme de règles obligatoire* ». Le débat est ainsi bien situé :
d un côté ceux qui adoptent le point de vue statique, coinbinatoire de Carnap. comme
Hjelmslev. de l'autre ceux qui sont attaché* à la notion de d\ nautique. Jakobson est
."). V . С. Л afîèfic « Kx trait* de la ci trn1*) ник lance de N. S. Tri tu bel z ko v ». Lu Linguist i qui1. 1 .
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7. A.-.l. (ireima*. « Préface» à If l.tiniLUUf de L. Iljrlm-le\. Minuit. l'X.h. |t. \\-\2.
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10. N. S. Triiubetzko>. op. ni., [t. Ht.
11. H. .1 akob.-on. « La Liniiiii-t iipie ». I rndtiru i's princi pair* dt lu rrchvrchi- iluif- 1rs \cirncrs
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