F. Manns--Le milieu semitique de l Evangile de Marc
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LE MILIEU SÉMITIQUE DE L’ÉVANGILE DE MARC F. Manns 1Dans notre ouvrage Une approche juive du Nouveau Testament nous avons exploré les techniques juives utilisées par les Évangiles en laissant de côté cependant l’Évangile de Marc. C’est pour combler cette lacune que nous voudrions souligner quelques traditions juives de cet Évangile. Dans une première partie nous mentionnerons les sémitismes, puis nous nous attar- derons à l’étude exégétique de Marc 9,1. 2Définir les sémitismes de l’Évangile n’est pas chose aisée . Plutôt que 3de considérer le problème sous son aspect général , nous voudrions souli- 1. Paris 1988. 2. P. Grelot, « Sémitismes », SDB 12 (1992) 333-424. 3. Les sémitismes sont nombreux dans l’Évangile de Marc. Nous n’en soulignons que les principaux. La parataxe est fréquemment utilisée (Mc 4,1-9; 5,21-43). Le rappel du relatif par un pronom complément (Mc 1,7; 7,25; 13,19) correspond au relatif araméen dont la fonction est rappelée après le verbe ou le nom dont il est complément par un suffixe qu’in- troduit une particule. Le casus pendens, où le sujet d’une subordonnée est anticipé comme complément direct d’une principale, est employé en Mc 8,24; 7,2 et 11,32. Les anacoluthes qui indiquent un changement de construction de cours (Mc 6,13; 13,11) peuvent avoir été provoquées par des sémitismes du texte primitif. L’ouverture sémitisante kai egeneto en Mc 1,9; 2,23; 4,4 correspond au wyyhy hébreu. Le recours à des participes qui n’ajoutent rien au sens général ; mais qui introduisent des verbes de mouvement en Mc 8,13 et 2,14 est un hébraïsme. Le distributif se fait comme en hébreu par la répétition du mot qui en fait l’objet (Mc 6,7; 6,39-40). Les redondances qui joignent à un verbe un complément qui dérive de la même racine (Mc 7,13; 12,23; 13,19; 10,38) et les conjugaisons périphrastiques (Mc 2,6; 2,18; 9,4; 10,32; 14,4; 14,54; 15,43) font soupçonner l’influence d’une tradition orale ara- méenne. Le génitif hébreu « fils du tonnerre » en Mc 3,17, l’expression « toute chair » de Mc 13,20 et la tournure « le siècle futur » de Mc 10,30 sont des expressions hébraïques dont il est facile de retrouver l’équivalent sémite. Il en est de même pour le heis suivi du génitif de Mc 5,22 qui correspond à l’araméen ˙d mn råy. Un sémitisme est perceptible derrière les emplois de koinos au sens de souillé rituellement en Mc 7,2.5. Cet adjectif est si déroutant que Marc éprouve le besoin de l’expliquer. Marc a recours également au mot crochet. Après la citation d’Isaïe 40,3 (qwl qwr’ bmdbr) en 1,1-4 il introduit l’apostolat de Jean-Baptiste en répétant le même mot crochet : wyyhy Yw˙nn bmdbr †wbl wqwr’. Enfin, l’emploi du verbe à la troisième personne du pluriel sans sujet défini en Mc 5,35-43 peut provenir d’un emploi sémite. Parfois c’est au niveau des variantes que les sémitismes res- sortent. Ainsi en Mc 1,6 il est dit que le vêtement de Jean-Baptiste était de poils de cha- meau (trichas kamêlou). Une variante du codex D porte : de peau de chameau (derrên kamêlou). L’hébreu portait probablement : lbwå å ‘r gmlym. L’auteur du codex D a lu : lbwå ‘r gmlym. D’autres sémitismes ont été étudiés par G.M. Lee dans la revue NovT 20(1978) 74 et par G. Schwarz dans la même revue 17 (1975) 109-112. L’étude de LA 48 (1998) 125-142 126 F. MANNS gner les assonances, voire quelques jeux de mots qui sont sous-jacents au 4texte lorsqu’on le retraduit en hébreu . La méthode employée est celle de la rétroversion du texte grec en hébreu et la comparaison des versions sy- noptiques entre elles. 1. Rétroversions en hébreu L’affirmation de Jean-Baptiste en Mc 1,7 : « Je ne suis pas digne de me courber à ses pieds pour délier (lusai) la courroie de ses chaussures » doit être confrontée à la version de l’évangile de Matthieu. En Mt 3,11 Jean affirme qu’il n’est pas digne de porter (bastasai) les chaussures du Messie. L’hébreu sous-jacent à la version de Matthieu est lå’ qui est très proche du grec lusai. La scène de la tentation de Jésus en Mc 1,13 se termine par la mention de Jésus au milieu des bêtes. En hébreu le jeu de mots est explicite : whyh ym h˙yyh. En Mc 1,28 il est question de la renommée de Jésus qui se répandit dans toute la contrée de Galilée. Le terme hébreu Galil signifie le cercle, la contrée et la Galilée. Lc 4,37 n’a retenu que le premier sens du mot Galil et traduit: «Sa renommée se répandait partout dans la contrée ». Mc 2,4 relatant la guérison du paralytique évoque l’impossibilité des porteurs de s’approcher de Jésus. « Ne pouvant pas (dunamenoi) le lui pré- senter ». Lc 5,19 dit qu’ils ne trouvaient pas (heurontes) par où le présen- ter. Or les deux verbes dunamai et heuriskô traduisent l’araméen åk˙ qui E.C. Maloney, Semitic Interference in Markan Syntax, Chico 1981 mérite d’être consultée. L’ouvrage de J. Carmignac, La naissance des Évangiles Synoptiques, Paris 1984 reste une source de références importantes. Du côté juif il faut mentionner deux essais : celui de H.P. Chajes, Markus Studien, Berlin 1899 et celui de D. Flusser, Jesus, New York 1969. Du même auteur est l’article important intitulé « Das Schisma zwischen Judentum und Christentum », EvTh 40 (1980) 219-239. L’auteur pense pouvoir distinguer dans l’évangile de Marc une couche où n’apparaît ni la christologie ecclésiale, ni la signification expiatrice de la passion de Jésus ni le thème du rejet d’Israël. R. Lindsey, A Hebrew Translation of the Gospel of Mark, Jérusalem, sans date, est disciple de D. Flusser. Le même point de vue est partagé par P. Lapide, Israelis, Jews and Jesus, New York 1979, ix-x. 4. La discussion reste ouverte pour savoir si la tradition orale de cet Évangile était basée sur l’araméen ou sur l’hébreu. On trouvera de bonnes suggestions dans l’ouvrage de F. Zim- mermann, The Aramaic Origin of the Four Gospels, New York 1979. Sur la question des jeux de mots on peut se reférer aux livres de M. Casanowicz, Paranomasia in the Old Tes- tament, Berlin 1892 et de G. Aicher, Hebräische Wortspiele im Matthäusevangelium, Bam- berg 1929. LE MILIEU SÉMITIQUE DE L’ÉVANGILE DE MARC 127 5signifie pouvoir et trouver à la fois . Le verbe hébreu mßh avait également ce double sens à l’origine (Dt 19,5; 1 Sam 31,1-3; Is 10,9; 1 Ch 17,25). En Mc 2,6 l’évangéliste note que des scribes étaient assis et pensaient en eux-mêmes. En hébreu ce texte présente une assonance: ywåbym w˙wåbym. En Mc 2,12 dans le récit de la guérison du paralytique, Marc note: «Il se leva prenant (aras) son grabat». Or le mot hébreu pour désigner le gra- bat est ‘rs, dont la prononciation est identique au grec aras. La vocation de Lévi en Mc 2,14 qui correspond à l’appel de Matthieu 6en Mt 9,9 a repris un jeu de mots déjà connu par la Synagogue . Le nom de Lévi est mis en rapport avec le verbe suivre (llwt) qui en grec sera rendu par akolouthei moi. Quant au nom de Lévi il sera remplacé par celui de Matthieu dans la liste des apôtres en Mc 3,16. En Mc 2,21 Jésus demande de ne pas rapiécer un vêtement vieux avec un morceau neuf, sinon la déchirure devient plus mauvaise (cheiron schisma). Retraduit en hébreu cette expression est basée sur un jeu de mots: qr‘ – r‘. En Mc 3,3 l’ordre donné par Jésus à l’homme à la main desséchée : egeire eis to meson (lève-toi au milieu) suppose un original sémitique où le sens de qwm signifie « se lever » et « se tenir debout ». La réaction de Jésus est notée par deux participes : « Promenant sur eux un regard de colère, navré de l’endurcissement de leurs coeurs » qui peuvent correspondre aux deux verbes hébreux : wy˙r wy˙s. Mc 3,10 évoque les foules qui suivent Jésus. Ceux qui étaient affligés de maladies se précipitaient vers lui pour le toucher. L’original hébreu fait un jeu de mots entre le terme ng‘ (la blessure, la maladie) et le verbe ng‘ (toucher). Mc 3,14-15 décrit la mission des douze : Jésus les envoie, il leur donne autorité pour chasser les démons. Ces actions correspondent à trois verbes hébreux qui présentent des assonances entre elles: ål˙ (envoyer), ål† (avoir autorité) et ålk (chasser). 5. Voir Lc 6,7 et 11,54 : hina heurôsin katêgorein auton, alors que Mt et Mc n’ont que : hina katêgoreusôsin auton. Mt 26,40 joue sur le double sens du verbe åaka˙: «Jésus les trouva (w’åk˙) en train de dormir. Il leur dit: Vous n’avez pas pu ( ‘åk˙twn) veiller avec moi une heure». En Lc 13,24 certains manuscrits lisent: ouch heuresousin, alors que d’autres lisent: ouch ischusousin. Ces deux variantes supposent le même verbes hébreu åk˙ comme point de départ. 6. GenR 72: lwy zh ‘tyd llwt ‘t hbnym. 128 F. MANNS En Mc 3,21 l’expression : « Est-ce qu’on met la lampe sous le bois- seau ou sous le lit ? » contient un jeu de mots en hébreu : mdh (le bois- seau) et m†h (le lit). En Mc 4,6 la mention du soleil (åmå) que Luc supprime s’apparente phonétiquement à la racine (årå). Selon Mc 4,19 les épines qui étouffent la semence symbolisent les sou- cis du monde, la séduction de la richesse et les désirs au sujet du reste. Lc 8,14 a remplacé le troisième terme par les plaisirs de la vie. En hébreu le mot å’r (reste) a les mêmes consonnes que le terme å’r (la chair). Mc 4,30 introduit la question de Jésus : « A quoi comparerons-nous le Royaume des cieux », alors que Lc 13,18 posait la question : « A quoi ressemble le Royaume des cieux ». Ces deux questions résultent d’une lecture différente de la même expression, les voyelles n’étant pas écrites. Marc suppose la lecture ndmh (nous comparerons), tandis que Luc lit nydmh (est comparé). En Mc 5,5-7 la guérison du possédé suppose un jeu de mots entre les verbes ’s r (lier) et ysr (torturer, tourmenter). En 5,10 le diable sup- plie Jésus de ne pas le chasser de la région (exô tês choras), tandis que Lc 8,31 porte la version de ne pas les chasser dans l’abîme (abysson). La version de Marc suppose l’hébreu t˙wm, tandis que celle de Luc suppose thwm. Une confusion entre ˙ et h est courante dans les textes rabbiniques. Mc 5,13 évalue le troupeau de porcs au chiffre d’environ deux mille (k’lpym). Ce mot peut être voca
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