Un projet de « mission ouvrière » à Paris au milieu du XIXe siècle - article ; n°1 ; vol.6, pg 36-46

Jean-Baptiste Duroselle

Description

Archives des sciences sociales des religions - Année 1958 - Volume 6 - Numéro 1 - Pages 36-46
11 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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• Philosophie et théologie

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• Publié le: 01 janvier 1958
• Nombre de lectures: 14
• Langue: Français

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Jean-Baptiste Duroselle
Un projet de « mission ouvrière » à Paris au milieu du XIXe
siècle
In: Archives des sciences sociales des religions. N. 6, 1958. pp. 36-46.
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Duroselle Jean-Baptiste. Un projet de « mission ouvrière » à Paris au milieu du XIXe siècle. In: Archives des sciences sociales
des religions. N. 6, 1958. pp. 36-46.
doi : 10.3406/assr.1958.2661
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/assr_0003-9659_1958_num_6_1_2661UN PROJET DE MISSION OUVRI RE
PARIS
au milieu du XIXe siècle
celles-ci les deux texte Guédon détruites premiers que aux nous en tiers Archives février publions du XIXe 1831 de ici Archevêché siècle puis été en Il 1871 trouvé en de sont est par Paris très que On pauvres plus le sait chanoine heureux pour que
que ce Projet association pour Enseignement et la prédication
gratuites des classes populaires ait survécu Examinons dans une
courte introduction les principaux problèmes que pose ce texte
Date Il certainement été écrit avant le janvier 1856 il
été discuté ce jour-là par Mgr Sibour devant son clergé Parlant de 1849
auteur laisse entendre que cette date est nettement passée On peut le
situer sans grave risque erreur en 1855 Mgr Sibour été assassiné le
janvier 1856
Auteur Sur ce point on ne peut faire que des hypothèses auteur
est un prêtre séculier du diocèse de Paris Nous qui écrivons ce mémoire
étant depuis longtemps adonné aux uvres de missions populaires et de
conférences faites aux militaires nous en occupant journellement encore
et nous trouvant sans cesse avec ceux qui en occupent nous savons
que la grande et nous pourrions dire unique difficulté est la pénurie
ouvriers Telle est la seule allusion il fait sa personne Ceci nous
amène penser que auteur pourrait bien être abbé Fran ois-Auguste
Ledreuille
ai essayé dans mon livre Les débuts du Catholicisme social en
France de reconstituer la biographie de ce curieux personnage Né le
10 avril 1797 une famille pauvre venu Paris en octobre 1814 ordonné
diacre en 1819 il interrompt alors sa carrière sacerdotale et devient pro
fesseur de philosophie Vers 1843 il commence parler dans les réunions
de la Société de St Fran ois-Xavier laquelle fondée en 1840 se proposait
évangéliser les ouvriers par des réunions mensuelles le soir dans les
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Eglises Outre instruction religieuse on faisait des conférences on
chantait et la Société avait organisé un système de secours mutuels
Ledreuille qui était un excellent orateur populaire ne tarda pas jouer
un rôle de premier plan Mgr Affre archevêque de Paris comprit influence
que pouvait avoir cet homme et le décida recevoir le 17 mai 1845 la
plénitude du sacerdoce Il est le prêtre des ouvriers 1848 son
activité sociale ne cesse de accroître Il organise une Maison des
ouvriers pour le placement gratuit avec entier appui de archevêque
Il est populaire Paris Aux élections avril 1848 il obtient plus de
32.000 voix La mort de Mgr Affre et les journées de juin furent pour lui
un coup très dur Il quitta alors Paris pour six mois et dès lors tout en
continuant son apostolat il cessa de faire de grands projets de réforme
sociale Peut-être freiné par Mgr Sibour il déclare en septembre 1849
il ne croit plus en aucun moyen pour réformer la société
Le 23 octobre 1848 il est nommé deuxième aumônier au Val de
Grâce Le juillet 1850 il est premier aumônier Il démissionnera la fin
de 1858 pour raison de santé et mourra le 18 septembre 1860 Paris
Ainsi abbé Ledreuille qui expérience la fois des milieux populaires
et des militaires au Val de Grâce pourrait-il fort bien être auteur du
texte Aucune considération de style ne va encontre de cette hypothèse
le ton de ses écrits et celui de ce rapport ayant au contraire beaucoup de
parenté
Une autre hypothèse serait attribuer le texte abbé Roux
né en 1805 Aix fils un ancien soldat professeur Juilly ordonné
prêtre en 1830 vicaire aux Quinze-Vingts sur le faubourg St-Antoine
Prêtre socialiste mêlé aux journées de juin fondateur un club Roux se
voit proposer en août 1848 le poste de premier aumônier au Val de Grâce
mais il le refuse uvre des ouvrières il essaie de créer est mal vue
de archevêché et Roux est même interdit le 13 septembre 1849 par
officialité diocésaine La dernière mention on ait de lui date de 1854
Il avait plus de fonction II est assez peu probable que ce prêtre brouillon
ambitieux en mauvaise relations avec Mgr Sibour en 1849 ait pu être
suffisamment réconcilié avec lui pour lui faire adopter un projet par ailleurs
modéré et raisonnable la veille de sa mort
Retenons donc comme plus probable hypothèse que abbé Ledreuille
peut être auteur du texte
Originalité du texte Il est hors de doute un texte datant de
1855 et qui propose une méthode spéciale apostolat pour les classes
populaires présente un grand intérêt Le fait que le projet concerne aussi
les militaires enlève rien originalité de la conception Près un
siècle avant institution des prêtres ouvriers il là un signe pré
curseur Un enseignement religieux des masses populaires enseignement
actif apostolique persévérant qui aille chercher ces masses les pénètre
offre facilement elles et prenne une forme adaptée leurs besoins
voilà une formule tout fait moderne peu près la même époque
abbé Picherit Angers écrit en 1856 La tâche imposée notre
37 DE SOCIOLOGIE DES RELIGIONS ARCHIVES
siècle est le retour la religion des classes populaires. Si cruel en
soit aveu il faut pourtant bien en convenir les travaux sont grands et
le succès une nullité désolante Le peuple oppose une résistance obstinée
tous ces assauts du zèle le plus pur et de la charité la plus ardente.
part quelques rares individualités que on parvient enlever de temps
autre la masse est inébranlable et ne se laisse point entamer
La conscience que auteur de la déchristianisation des milieux
ouvriers et artisans Paris est un aspect également original du texte et
montre en tous cas il connaissait bien le peuple parisien Près un
million de travailleurs et de petits commer ants dit-il vivent pour la
plupart éloignés des instructions et des pratiques de la religion
Quant la méthode il propose elle inspire une part de expé
rience de la Mission de France sous la Restauration autre part de
celle de la Société de Saint Fran ois-Xavier Elle repose en effet sur les
principes suivants Création une société de prêtres séculiers statuts
très souples se réunissant au moins une fois par mois aidés par des laïques
et également par des réguliers que on éviterait de mettre au premier
plan Caractère volontaire et désintéressé de adhésion cette asso
ciation Les discours faits aux ouvriers par des prêtres ou des laïques ne
comporteraient pas honoraires Les prêtres accompliraient leur tâche
de mission populaire en plus de leur ministère normal Effort pour
intéresser les ouvriers des réunions où la culture populaire Jouerait un
rôle important par rapport instruction religieuse En effet expé
rience apprend que le peuple est pas susceptible une attention longtemps
soutenue sur des matières sérieuses Si on veut donc attirer si on veut
le fixer il faut avoir recours la diversité quelque chose qui se rapproche
du drame et de la discussion pour lesquels le peuple se passionne si aisé
ment Un seul discours une seule matière un seul et même orateur diffi
cilement amèneront et retiendront une foule que intérêt religieux ne
captive point et qui veut trouver une sorte de récréation dans enseigne
ment on lui donne Effort pour trouver un style adapté aux
ouvriers discussions dialogues ne donner que des idées nettes et
méthodiques des preuves solides empreintes une force puisée dans le
bon sens et développées dans un langage simple mais vif et coloré
Acceptation du principe que la mission populaire pourra le cas échéant
être extra-paroissiale quoique placée sous la juridiction de Ordinaire
par intermédiaire un Directeur général spécialement qualifié
Pourquoi le projet a-t-il été abandonné La responsabilité en
incombe sans doute au cardinal Morlot successeur de Mgr Sibour moins
conscient que lui de la gravité du problème De m