Rupture et mutation de la justice royale. Le bailliage royal de Versailles au XVIIIème siècle - article ; n°2 ; vol.2, pg 303-335
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Description

Histoire, économie et société - Année 1983 - Volume 2 - Numéro 2 - Pages 303-335
33 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1983
Nombre de lectures 99
Langue Français
Poids de l'ouvrage 3 Mo

Extrait

Ahmed Farouk
Rupture et mutation de la justice royale. Le bailliage royal de
Versailles au XVIIIème siècle
In: Histoire, économie et société. 1983, 2e année, n°2. pp. 303-335.
Citer ce document / Cite this document :
Farouk Ahmed. Rupture et mutation de la justice royale. Le bailliage royal de Versailles au XVIIIème siècle. In: Histoire,
économie et société. 1983, 2e année, n°2. pp. 303-335.
doi : 10.3406/hes.1983.1327
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/hes_0752-5702_1983_num_2_2_1327RUPTURE ET MUTATION DE LA JUSTICE ROYALE
LE BAILLIAGE ROYAL DE VERSAILLES
AU XVIIIème SIECLE
par Ahmed FAROUK
Le bailliage royal de Versailles est une création relativement récente, comparée aux
juridictions qui portent le même nom à l'époque moderne. Dans un premier temps, et
durant les travaux que nécessite la construction du château, le roi s'installe seul sur les
lieux de son choix. Les ministres et les agents de l'Etat s'inclinent devant cette décision
et se rendent à Versailles au rythme des conseils hebdomadaires et des réunions qu'exige
leur fonction. La nouvelle affectation de Versailles s'accompagne du changement du
statut social et administratif de la nouvelle cité et de ses environs. Le modeste bourg aux
activités limitées, naguère une étape de marchands et un relais intermittent de chasse,
devient en quelques années une ville moyenne où se côtoient richesse et pauvreté.
Les anciennes juridictions seigneuriales font place sans encombre à deux juridictions
nouvelles et complémentaires dont les activités sont clairement définies par édit royal :
le bailliage royal et la prévôté de l'Hôtel. Le territoire du bailliage n'est pas spatialement
définitif à l'installation du bailli. Il s'est progressivement agrandi au fil des ans pour at
teindre à la fin de l'Ancien Régime un ensemble de 1 8 paroisses — 3 urbaines regroupant
les habitants de la ville de Versailles et 1 5 rurales dont 8 sont enclavées dans le Grand
Parc(l).
L'administration civile et criminelle est assurée par des officiers dont le nombre a été
fixé par l'édit de 1693, l'année de la création du bailliage. Le bailli, juge civil et crimi
nel, nommé par le gouverneur de la ville (2) et confirmé dans ses fonctions par le roi,
pratique son office avec la collaboration d'un officier du bailliage, un procureur du roi,
un commissaire enquêteur et examinateur (3) et un greffier. Ils sont secondés à Versailles
et représentés dans les paroisses rurales par des auxiliaires qui procureurs, commiss
aires, huissiers, notaires, sergents et gardes, dont le nombre varie selon l'importance de
la population et des biens de la localité.
1. Les jardins de Versailles comprenaient le Petit Parc et le Grand Parc. Au XVIIIème siècle le
Petit Parc avait approximativement une superficie de 1 700 ha. Il contenait le Grand Canal et le Tria-
non. Au-delà, c'est le Grand Parc, 6 000 ha de terrains boisés, entourés d'une muraille et réservés à la
chasse. Petit et Grand Parc ont été défigurés après la Révolution.
2. Sous Louis XIV, Blouin, ancien valet de chambre du roi, était nommé gouverneur de la ville. Il
était également, selon Saint-Simon, gouverneur de Marly et de Fontainebleau.
3. Pierre Narbonne était le premier commissaire de la ville et bailliage de Versailles. Ses «papiers»
baptisés «journal de Pierre Narbonne» donnent des renseignements utiles sur la vie sociale de la ville
sous le règne de Louis XIV et Louis XV. Une publication a été faite à Paris en 1866 par J. A. Le Roi. 304 Ahmed FAROUK
La présence du roi confère à la nouvelle capitale un statut judiciaire intérieur parti
culier : le bailli exerce son autorité sur tous les habitants (4) et la cour dépend de la pré
vôté de l'Hôtel. La ligne de partage entre les deux juridictions est légalement tracée. Elle
est tantôt respectée tantôt dépassée mais reste toujours dans le cadre d'une justice qui
tente de maintenir l'ordre, d'assurer la sécurité et de respecter les institutions établies,
émanant d'un groupe hiérarchisé et aux rouages parfaitement lubrifiés. Mais si les lois
sont adéquates dans un milieu hautement cloisonné à l'échelon du royaume, la ville
royale et son bailliage sont une exception à plusieurs niveaux, un laboratoire concret,
un espace judiciaire en avance sur le reste du royaume. Quels sont les facteurs qui ont
contribué à affirmer cette ? Les lois sont-elles interprétées autrement ? Les justi
ciables sont-ils moins violents, plus sensibles au progrès social, plus attachés à la gran
deur du royaume, au point de maîtriser leurs impulsions ? A toutes ces questions, et à
d'autres, plusieurs réponses, mais sûrement un dénominateur commun : la proximité de
la demeure royale au sein de la ville et du bailliage. Cependant, on peut objecter que ce
facteur n'est pas totalement suffisant puisque ce voisinage n'a pas produit les mêmes ef
fets naguère à Paris. La population parisienne est certes beaucoup plus importante et
plus hétéroclite que celle du bailliage (5). En outre, l'organisation judiciaire est moins
éparpillée, moins compliquée et, par conséquent, plus compacte et plus proche des jus
ticiables. Le nombre des délinquants arrêtés par les gardes, mis en geôle et consignés sur
le registre des écrous puis présentés à l'une des deux juridictions, le bailli ou le prévôt,
confirme un net changement dans les mentalités. Les plaintes déposées auprès d'un des
greffes, qui sont d'ailleurs contigus, par les victimes sont immédiatement prises en con
sidération par l'ouverture de «l'information». Elles ne souffrent aucun retard et ne ri
squent ni perte ni engloutissement dans la paperasserie souvent lourde. Cette célérité est
évidemment un atout majeur dont les conséquences sur les justiciables ne sont pas minc
es. D'un côté la victime qui s'adresse aux représentants de la justice royale est convain
cue qu'une prompte solution lui sera signifiée, de l'autre, l'inculpé n'ignore pas que la
sanction est inévitable à moins d'un arrangement amiable. Cette remarque (qui sera con
firmée plus loin) révèle deux attitudes : celle des officiers de justice qui prennent à cœur
leur charge et celle des justiciables dont le but est de sauvegardre les intérêts personnels
et la cohésion du groupe.
Les justiciables du bailliage étaient répartis en deux groupes sociaux, dont les activi
tés et les loisirs ne sont pas identiques. Les uns et les autres ont afflué vers le nouveau
centre d'attraction, l'ancien village devenu une ville, soit à cause des possibilités écono
miques offertes par les travaux de construction, soit pour répondre aux exigences d'un
souverain autoritaire. On a donc d'un côté une population urbaine et rurale active justi
ciable du bailli et de l'autre une population oisive formée de nobles courtisans, avec une
domesticité nombreuse, habitant au château ou ses environs et justiciable du prévôt. A
ces deux groupes bien distincts, il faut ajouter de nombreux gardes qui relèvent soit du
prévôt, pour la sécurité de la famille royale, soit du gouverneur, pour la sécurité de la
ville et de ses environs. Ils sont eux-mêmes auteurs de quelques querelles et violences peu
nombreuses et sans gravité.
4. Sont considérés habitants tous ceux qui possèdent une maison à Versailles. Les gens de la cour
sont donc justiciables du bailli s'ils occupent un logement en ville une fois le service quotidien terminé.
5. La population de la ville de Versailles était également hétéroclite durant la période de la cons
truction de la ville et du château. Il se stabilisera à partir des années 1 720, quelques années après la
mort de Louis XIV et la fin des grands travaux. Les effets de cette stabilisation ne se manifesteront
qu'à partir des années 1740, années de rupture entre une première partie de siècle turbulente et une
seconde partie plus calme. DE LA JUSTICE ROYALE 305 MUTATION
A la fin du XVIIème siècle et durant le premier quart du XVIIIème siècle, les justi
ciables du bailli sont sujets à des fluctuations, car nombreux sont ceux qui ne séjournent
dans les environs que le temps d'amasser quelque argent avant de s'en retourner chez
eux. Les membres de certaines pro

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