Lamarck, Darwin et Vidal : aux fondements naturalistes de la géographie  - article ; n°561 ; vol.100, pg 617-634
19 pages
Français

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris

Lamarck, Darwin et Vidal : aux fondements naturalistes de la géographie - article ; n°561 ; vol.100, pg 617-634

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus
19 pages
Français
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus

Description

Annales de Géographie - Année 1991 - Volume 100 - Numéro 561 - Pages 617-634
When the Annales de Géographie were founded, one of the objectives of Vidal de la Blache was to acclimatize the natural sciences to his discipline. His sustained interest in the naturalists' contributions made him able to take advantage of the actual great models of nature in order to shape human geography. Darwinism and neo-Lamarckism are found to be combined in various degrees, i.e. according to the theoretical, methodological or rhetorical dimensions of the ambitionned shaping of human geography.
Un des objectifs de Vidal de la Blache lors de la fondation Annales de Géographie était d'acclimater les sciences naturelles à sa discipline. La fréquentation assidue de la pensée des naturalistes lui a permis de tirer parti des grands modèles de la nature pour formuler la géographie humaine. Darwinisme et néo-lamarckisme s'y combinent à des degrés divers, selon les dimensions théorique, méthodologique ou rhétorique du projet géographique.
18 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Sujets

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1991
Nombre de lectures 36
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Vincent Berdoulay
Olivier Soubeyran
Lamarck, Darwin et Vidal : aux fondements naturalistes de la
géographie
In: Annales de Géographie. 1991, t. 100, n°561-562. Numéro du Centenaire. pp. 617-634.
Abstract
When the Annales de Géographie were founded, one of the objectives of Vidal de la Blache was to acclimatize the natural
sciences to his discipline. His sustained interest in the naturalists' contributions made him able to take advantage of the actual
great models of nature in order to shape human geography. Darwinism and neo-Lamarckism are found to be combined in various
degrees, i.e. according to the theoretical, methodological or rhetorical dimensions of the ambitionned shaping of human
geography.
Résumé
Un des objectifs de Vidal de la Blache lors de la fondation Annales de Géographie était d'acclimater les sciences naturelles à sa
discipline. La fréquentation assidue de la pensée des naturalistes lui a permis de tirer parti des grands modèles de la nature pour
formuler la géographie humaine. Darwinisme et néo-lamarckisme s'y combinent à des degrés divers, selon les dimensions
théorique, méthodologique ou rhétorique du projet géographique.
Citer ce document / Cite this document :
Berdoulay Vincent, Soubeyran Olivier. Lamarck, Darwin et Vidal : aux fondements naturalistes de la géographie . In: Annales de
Géographie. 1991, t. 100, n°561-562. Numéro du Centenaire. pp. 617-634.
doi : 10.3406/geo.1991.21651
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/geo_0003-4010_1991_num_100_561_21651Géo., n° 561-562, 1991 Ann.
Lamarck, Darwin et Vidal :
aux fondements naturalistes
de la géographie humaine
V. BERDOULAY Univ. de Pau et C.N.R.S.-U.R.A. des O. Pays SOUBEYRAN de l'Adour 911,
L'« Avis au lecteur » du premier numéro des Annales de Géographie
affichait clairement l'intention de cette revue de servir d'instrument
pour « acclimater » les sciences naturelles à la discipline qu'elle voulait
promouvoir (p. II). Ainsi, pendant plus de dix ans, les naturalistes
publièrent plus d'articles que les géographes. On sait aussi l'importance
que les fondateurs de l'École française, et tout particulièrement Paul
Vidal de la Blache, accordaient à la dimension physique de la géograp
hie.
On est donc en droit de se demander jusqu'à quel point cet effort
d'acclimatation des sciences naturelles a pu structurer la pensée vida-
lienne. Certaines pratiques de la géographie humaine ont certainement
été marquées par celles des sciences naturelles, notamment le goût
pour le travail de terrain, pour les cartes géologiques et topographiques
ou pour l'étude préliminaire des données physiques. Mais, par delà
l'emprunt des résultats ou de quelques techniques de ces sciences
connexes, on peut s'interroger sur l'apport « fondationnel » de ces
disciplines dans la pensée géographique. Il s'agit alors de voir dans
quelle mesure ces sciences auraient fourni des modèles fondamentaux
d'approche des phénomènes géographiques. C'est ce qui fait l'objet des
pages qui suivent, où toute l'attention est réservée au cas de Vidal de
la Blache, l'inspirateur principal du mouvement d'acclimatation des
sciences naturelles à la géographie. Par là même, c'est l'occasion de
clarifier un point trop négligé de l'histoire de la géographie française,
à savoir son rapport avec le néo-lamarckisme de la fin du xixe siècle '.
1. Ce texte trouve son point de départ dans les conclusions antérieures des auteurs sur le
néo-lamarckisme, à savoir la thèse de Ph.D. de V. Berdoulay (Berkeley, 1974) et la communication
d'O. Soubeyran (1990) au Colloque sur l'histoire de la géographie française à la fin du xixe et au
début du xxe siècle (Paris, février 1990). 618 ANNALES DE GÉOGRAPHIE
Les Annales et l'évolutionnisme
Les travaux d'histoire de la géographie ont fait prendre conscience,
quoique à des degrés divers, de l'importance de l'évolutionnisme dans
la constitution de cette discipline. Ce grand courant d'idées qui embrasse
tout le xixe siècle et se prolonge au siècle suivant n'a effectivement pas
pu ne pas avoir d'incidence sur la pensée géographique. Par la dimens
ion naturaliste qui le sous-tend, il constitue une toile de fond sur
laquelle doit obligatoirement se dessiner une géographie attentive aux
influences du milieu sur les sociétés (cf. Vallaux, 1938 ; Claval, 1964,
1972 ; Pinchemel, 1968 ; Dickinson, 1969 ; Capel, 1981 ; Gômez Men-
doza et al, 1982, Robic, 1990).
Mais le plus souvent, en ce qui concerne l'importance du milieu,
référence est surtout faite à Darwin, ou au darwinisme, et ce, sans
discussion prolongée, au sein d'une sorte d'accord tacite sur la question
(Soubeyran, 1984). C'est un peu comme si évolutionnisme et darwi
nisme finissaient par s'équivaloir dans les esprits, tout au moins au
niveau de leur pertinence générale l'histoire de la géographie. Non
seulement cette présentation ne tire pas parti de la richesse de la pensée
évolutionniste du xixe siècle, mais elle facilite la rapidité avec laquelle
est faite la référence à Darwin ou au darwinisme proprement dit (c'est-
à-dire excluant son utilisation idéologique, comme le « darwinisme
social », dans certains pays). C'est ce qui a été constaté dans un des
rares examens approfondis de l'impact de Darwin sur l'histoire de la
géographie (Stoddart, 1966).
Si la référence à Darwin, comme représentatif de l'impact évolu
tionniste dans la géographie, était justifiée, elle devrait ressortir d'un
examen des premières livraisons des Annales. Or les renvois explicites
à Darwin y sont l'exception, notamment en rapport avec ceux qui sont
faits à d'autres naturalistes de renom tels que Humboldt, Forbes,
Wallace ou de Candolle. Si Darwin est parfois mentionné (Gallois, 1892,
1893 ; Costantin, 1898), c'est en tant que référence obligée, sans qu'il
soit prétexte à réflexion scientifique. Bonnier (1894), dans son important
article de géographie botanique, ne cite même pas une seule fois le
nom de Darwin alors que sont évoquées plusieurs des notions qui lui
sont traditionnellement associées (lutte pour la vie, concurrence vitale).
C'est seulement sur la question des récifs coraliens que la contribution
de Darwin est discutée de front (Bernard, 1892, 1893 ; Zimmermann,
1899 ; Caullery, 1900 et Davis 1918). Mais, selon l'article, le grand
naturaliste est alternativement pris à parti ou réhabilité. En somme, si
Darwin est présent, il l'est en filigrane, comme un grand penseur de
son époque que l'on n'aborde pas de front, sauf sur un point secondaire
de sa pensée. Même les articles de géographie coloniale n'usent pas
d'une certaine vision dite darwinienne (Dubois, 1894).
Pareillement, les écrits de Vidal dans les Annales ne font aucune DARWIN ET VIDAL 619 LAMARCK,
référence explicite à Darwin (il en va quasiment de même dans ses
autres publications). Ne peut-on cependant y discerner les traces d'une
vision darwienne de la nature ? Deux idées apparaissent pertinentes à
cet égard. Il s'agit d'abord, à l'occasion du commentaire élogieux des
écrits de Ratzel (Vidal, 1898), d'insister sur la précarité des équilibres
naturels, c'est-à-dire sur l'instabilité structurelle de la nature, sujette à
des recompositions de ses équilibres. La deuxième idée très darwinienne
est celle d'un progrès lié à la mise en transparence des espaces. Darwin
en effet reprend cette vieille idée, qui courait au sujet de l'évolution
historique des civilisations, dans ses analyses de naturaliste (Vidal, 1899,
1903, 1922).
A part ces deux idées, on retrouve dans les articles de Vidal des
expressions qui font penser à Darwin par leur évocation de la lutte
pour l'existence ou la concurrence des êtres (Darwin, 1876). Mais, en
aucun cas, elles ne recouvrent des notions opératoires dans sa pensée.
Elles ne jouent en effet aucun rôle moteur dans les évolutions dont il
parle. On note plutôt une thématique de la nature qui n'est clairement
pas darwinienne : des jugements moraux dans l'évaluation du rapport
humain à la nature, l'anormalité du gâchis dans le fonctionnement
naturel, et surtout la prégnance des conditions physique

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents