Aux origines de la division de l Europe : l été 1943 - article ; n°3 ; vol.54, pg 295-304
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Aux origines de la division de l'Europe : l'été 1943 - article ; n°3 ; vol.54, pg 295-304

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Description

Revue des études slaves - Année 1982 - Volume 54 - Numéro 3 - Pages 295-304
10 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1982
Nombre de lectures 16
Langue Français

Extrait

Monsieur Jean Laloy
Aux origines de la division de l'Europe : l'été 1943
In: Revue des études slaves, Tome 54, fascicule 3, 1982. pp. 295-304.
Citer ce document / Cite this document :
Laloy Jean. Aux origines de la division de l'Europe : l'été 1943. In: Revue des études slaves, Tome 54, fascicule 3, 1982. pp.
295-304.
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/slave_0080-2557_1982_num_54_3_5235ORIGINES DE LA DIVISION DE L'EUROPE. AUX
L'ETE 1943
PAR
JEAN LALOY
L'Europe, dit -on, a été partagée à Yalta. Comme toute légende, celle de Yalta
continue à courir. Ce mot magique offre en deux syllabes l'explication simple
d'un phénomène surprenant, le «rideau de fer», devenu aujourd'hui réseau de
barbelés. Mais peut on en rester là ?
Plusieurs ouvrages, dont deux récents, considèrent l'année 1943 comme le
moment où le clivage entre l'Est et l'Ouest a pris un relief si accusé qu'ensuite
il était difficile de revenir en arrière.
Il y a dix ans, Gabriel Kolko a soulevé entre beaucoup d'autres le problème
de l'armistice italien. Constatant que l'U.R.S.S. n'a pas reçu dans l'administration
alliée en Italie une place égale à celle des Anglais et des Américains, il en déduit
que, plus tard, en Europe orientale, elle n'a fait que leur rendre la monnaie de leur
pièce* .
Plus récemment, Vojtech Mastný fixe lui aussi à 1943 l'origine de la mainmise
soviétique sur l'Europe de l'Est. Mais il en voit la cause moins dans un ostracisme
subi par l'U.R.S.S. en Italie ou ailleurs que dans l'absence de vigilance de Roosevelt
et de Churchill à l'égard de Stalin2 .
Dans une thèse fondée sur un dépouillement très complet des archives britan
nique, M. Arcidiacono étudie de près ce qu'il appelle non sans finesse « l'i
nvasion de l'Italie dans les relations interalliées3 ». Il s'agit bien sûr d'un enva
hisseur malgré hli. Sans se prononcer par oui ou par non sur les effets de cette
« invasion » dans les rapports avec l'Union soviétique, il constate en tout cas
qu'Anglais comme Américains pendant les négociations de l'automne 1943 ont su
que le mode de contrôle de l'Italie pourrait servir de précédent lors de la capitula
tion des pays de l'Est. Précédent ou prétexte ? L'auteur ne tranche pas. Du point
de vue de la méthode historique, il a raison d'en rester là.
1 . G. Kolko, The politics ofwar, New York, 1968, notamment chap. 3.
2. V. Mastný, Russia's road to the cold war, New York, 1979, notamment chap. 8.
3. Bruno G. Arcidiacono, l'Invasion de l'Italie dans les relations interalliées. La répétition
générale : le Foreign Office et le problème du contrôle du territoire italien. Thèse présentée
à l'Université de Genève. Genève, 1981, 1 vol. ronéotypé.
Rev. Êtud. slaves, Paris, LIV/3, 1982, p. 295-304. 296 J. LALOY
L'histoire en effet se fonde sur les documents. On connaît la richesse des archives
anglaises et américaines. Elles livrent les moindres détours des discussions internes
des deux gouvernements pendant la guerre. Pour l'U.R.S.S., en dehors des textes
officiels et de la presse (utile à dépouiller parce qu'officieuse), on ne possède
pour comprendre les desseins des dirigeants soviétiques que les propos tenus à des
tiers, le plus souvent à des étrangers. On peut en tirer quelque chose, mais il reste
une zone d'ombre. Pour s'y aventurer, il faut quelques lanternes, c'est-à-dire
quelques questions. Celles que nous voudrions poser sont les suivantes : est-il vrai
que l'U.R.S.S. a voulu créer au-delà de ses frontières, un simple « glacis », une
zone protectrice ? Si oui, quel genre de glacis ? Si non, quel était son objectif
probable ?
Rappelons d'abord brièvement les tendances de la politique des trois grands
en 1943, au moment où, avec la chute de l'Italie et l'échec de l'offensive allemande
autour de Kursk, la victoire finale devient probable.
Les préoccupations européennes du gouvernement britannique.
Vers la fin de 1942, le Foreign Office commence à établir des plans pour l'après-
guerre. Ceux-ci prennent corps au printemps 1943. D'une part, Churchill a rédigé
plusieurs notes dans lesquelles il propose d'asseoir le futur Conseil mondial (composé
essentiellement des trois Puissances) sur des systèmes régionaux, Europe, Amérique,
Asie du Pacifique. De l'autre, le chef de la section de la Reconstruction au Foreign
Office, Gladwyn Jebb, futur Lord Gladwyn, multiplie les esquisses dont l'une finit
par être acceptée le 25 mai 1943 par le Cabinet. Sous la forme d'un mémorandum,
ce plan est transmis comme base de discussion au gouvernement soviétique le
1er juillet, à celui des États-Unis le 161 . Ce document prévoit, pour la période entre
la fin des hostilités en Europe et la signature de la paix, un organe de coordination,
la « Commission des Nations-Unies pour l'Europe » composée de l'Angleterre, des
États-Unis, de l'U.R.S.S. et de la France. Il en sera question plus bas.
Beaucoup d'autres plans pour un organisme européen ont été élaborés en
Grande-Bretagne pendant la guerre. Us visent tous à maintenir l'Allemagne hors
d'état de nuire, donc surveillée, à l'Ouest par la Grande-Bretagne et la France,
à l'Est par des groupements fédéraux s'appuyant sur l'U.R.S.S. Le rôle des États-
Unis est le plus difficile à définir. Nul ne pense que leurs forces resteront indéfin
iment en Europe après la guerre. C'est pourquoi, à Londres, on envisage un certain
regroupement des pays du continent, aussi bien à l'Est qu'à l'Ouest de l'Allemagne.
On découvre ici en germe beaucoup des casse-tête de l'avenir : poids de l'U.R.S.S. ;
sort des pays qui ont la malchance d'être ses voisins ; rôle de la Grande-Bretagne
dans un système continental européen ; en conséquence, rôle de la France ; ult
érieurement, place de l'Allemagne dans cet ensemble. Les plans britanniques
n'offrent pas de solution à ces difficultés. Ils ont le mérite de les faire apparaître.
Roosevelt, le monde et l'Europe.
Ce n'est pas le cas des projets américains pendant la guerre. L'Europe en tant que
telle n'y figure guère. Roosevelt, lorsqu'il pense à l'avenir, s'inspire d'un précédent
qu'il connaît bien, celui du président Wilson. En 1919, les États-Unis se sont heurtés
aux accords passés directement entre les Européens. Cette fois, il faut réussir.
Donc, pas d'accords délimitant des frontières, des zones d'influence. Des principes
universels, une organisation universelle de sécurité, créée avant la fin des hostilités.
1 . The Memoirs oflord Gladwyn, London, 1972, notamment chap. 9 et 10. L'ÉTÉ 1943 297
Le reste sera facile à régler puisque les quatre vainqueurs (les Trois plus la Chine)
seront les seuls à disposer de forces efficaces. De ce point de vue, celui de la Charte
de l'Atlantique, tout statut spécial pour l'Europe apparaît comme un corps étranger,
un élément perturbateur. Il s'agit plus de vues que d'idées et ces vues peuvent varier,
en raison du caractère mobile de Roosevelt, chez lequel l'idéalisme se teintait
souvent d'amateurisme. Mais le Président invoque trop souvent ces conceptions
pour qu'on puisse douter de son orientation générale. Celle-ci se révèle dans l'un
des actes décisifs de la guerre, l'exigence de la capitulation sans conditions, pro
clamée à Casablanca en janvier 1943.
On a dit que cette déclaration avait contribué à prolonger la guerre en ôtant
à l'adversaire toute raison de négocier. Ce n'est pas entièrement vrai pour l'Italie
ni pour le Japon. C'est vrai, dans une certaine mesure, pour l'Allemagne. Mais le
défaut de cette exigence est ailleurs. Elle permet en effet de rejeter à l'après-guerre
toute réflexion commune sur l'avenir, spécialement celui de l'Europe. Dès lors
que le but est de faire partout table rase, on a du temps devant soi pour envisager
la reconstruction. Il est vrai qu'avec un adversaire tel qu'Hitler, aucune négociation
n'était possible. Mais on aurait pu mieux s'occuper de ce qui viendrait après lui.
Même en 1943, on po

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