Bulletin d épistémologie. Le pragmatisme - article ; n°54 ; vol.14, pg 220-243
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Revue néo-scolastique - Année 1907 - Volume 14 - Numéro 54 - Pages 220-243
24 pages

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Publié le 01 janvier 1907
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Langue Français
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Extrait

Léon Noël
Bulletin d'épistémologie. Le pragmatisme
In: Revue néo-scolastique. 14° année, N°54, 1907. pp. 220-243.
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Noël Léon. Bulletin d'épistémologie. Le pragmatisme. In: Revue néo-scolastique. 14° année, N°54, 1907. pp. 220-243.
doi : 10.3406/phlou.1907.2104
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/phlou_0776-5541_1907_num_14_54_2104BULLETINS BIBLIOGRAPHIQUES
IL
BULLETIN D'EPISTEMOLOGIE.
Le Pragmatisme.
Dans le Catholic University Bulletin d'avril 1906, on pouvait
lire au sujet de -la « philosophie nouvelle » de certains auteurs
français contemporains, un article très bien fait de M. George
M. Sauvage : The new philosophy in France. Presqu'en même temps
(mai 4906) la Philosophical Review donnait sur le sujet un
article très étudié de M. Lalande : Philosophy in France.
D'autre part, la publication française trahit un intérêt croissant
pour les choses philosophiques d'Angleterre et d'Amérique. A ne
citer que quelques exemples, la Revue de Philosophie publiait
récemment, après le bel article de M. Boutroux sur L' Expérience
religieuse de M. W. James (t. VIH, p. 5) qui depuis servit de pré
face à la traduction française du célèbre ouvrage The varieties of
religious experience, un discours du même W. James sur le pragmat
isme (t. VIII, p. 463). Peu après, M. Dessoulavy prenait texte de
l'ouvrage de M. Schiller, The riddles of the Sphinx, pour soulever
sur la question du « Dieu fini » (t. VIII, p. 647) une très intéres
sante controverse. C'est au Père Tyrrell que les Annales de Philo
sophie chrétienne donnent l'hospitalité, et il y publie successive
ment un article intitulé : Notre attitude en face du pragmatisme
(décembre 1905), et un peu plus tard les bonnes feuilles de son
livre Lex credendi (juillet 1 906).
Et que dire de la controverse provoquée dans les revues catho
liques par le « newmanisme » que professent avec tant de ferveur
certains écrivains, entre autres M. Brémond?
Serait-il de mauvais goût d'établir un rapprochement entre l'éclo-
sion de cette philosophie « anglo-française », — ainsi l'appelait-on
récemment, — et « l'entente cordiale » de ces dernières années ? BULLETIN d'ÉPISTÉMOLOGIE 221
II sera du moins permis de constater, sans aucune intention
méchante, qu'ici encore, si les Anglo-Saxons se montrent sympat
hiques, c'est la France surtout qui jette feu et flamme.
Nous ne pouvons retracer dans un Bulletin tous les rétroacts
d'un mouvement qui date au moins d'une dizaine d'années, de bien
davantage même si l'on veut remonter jusqu'à l'article du Popular
science monthly où, pour la première fois en 1878, Charles Peirce
énonçait le principe du pragmatisme.
Nous ne voudrions parler que de certains articles récents. Mais
force est de dire, à l'usage des lecteurs non initiés, quelques
mots des antécédents du « pragmatisme » et de la « philosophie
nouvelle ».
Il y a quelques années, nous signalions dans cette même Revue *)
le mouvement philosophique auquel M. Boutroux avait surtout con
tribué à donner de la vogue et qu'on a appelé du nom barbare de
« contingentisme ». Cette philosophie continuait le mouvement
« néo-criticiste » de Renouvier. Avec lui, reprenant et accentuant
l'antithèse kantienne de la raison pratique et de la raison théorique,
elle prenait résolument parti pour la première, et afin de laisser
mieux encore place à la liberté elle entreprenait de déchirer le
réseau des lois naturelles. Avee une pénétration remarquable,
M. Boutroux montrait' comment les lois de la nature ne sont qu'un
à peu près *), comment c'est une illusion qui nous fait leur attribuer
la nécessité absolue des lois logiques, et comment en réalité elles
laissent entre leurs mailles une large place ouverte à la contingence,
à la liberté8). M. G. Milhaud, lui aussi, suivait la même voie et
faisait une critique serrée du déterminisme mathématique et logique
auquel les sciences positives semblaient tendre4). Plus spécialement
M. Duhem s'en prenait à la physique mécaniciste et montrait com
bien elle est arbitraire et artificielle 6).
D'autre part, dans le domaine de la psychologie introspective se
développait aussi un nouveau courant dont M. Ravaisson avait été
l'initiateur premier 6). Avec une poésie profonde, il avait signalé
1) L. Noël, La philosophie de la contingence (Rev. Néo-Scol , t. IX, 1902, p. 36S).
2) E. Boutroux, De ridée de loi naturelle dans la science et la philosophie
contemporaine. Paris, Alcan, 1895.
3) E. De la contingence des lois de la nature, 2e éd. Paris, Alcan, 1898
(ire éd. 1874).
4) G. Milhaud, Essai sur les conditions et les limites de la certitude logique.
Paris, Alcan, 1894.
6) Revue des Questions scientifiques. — Revue de philosophie. — Revue des
Deux-Mondes.
6) Rapport sur la philosophie en France au XIX* siècle. Paris, Imprimerie
impériale, 1868. 222 L. NOËL
la complexité, la richesse de la vie de l'âme, il avait montré com
ment ce n'est pas la nécessité logique, absolue et brutale, d'anté
cédent à conséquent, qui en fait le fond, mais au contraire une
spontanéité d'ailleurs tout harmonieuse. Notre vie intérieure c'est
d'abord, disait-il, « un monde de sensations, de sentiments, d'imagi
nations, d'idées, de désirs, de volontés, de souvenirs, mobile océan
sans bornes et sans fond, qui pourtant est tout nôtre, qui pourtant
est nous-mêmes. Comment nôtre, comment nous-mêmes? Parce que,
à'chaque moment et en chaque lieu de ce multiple tourbillon inté
rieur, nous formons de sa fuyante diversité des assemblages, des
ensembles dont le lien est une unité qui n'est autre que l'opération
même par laquelle nous les formons... La pensée ou action intel
lectuelle, d'un état de diffusion ou de confusion, où elle n'a eu,
en quelque sorte, qu'une existence virtuelle, se rappelle, se ramène,
par un mouvement continuel de recomposition dans l'unité de la
conscience, à l'existence active, et d'un état de sommeil et de rêve
remonte incessamment à l'état de veille » *).
En face de cette intuition profonde de notre vie morale, il dénonç
ait le vice de l'analyse qui découpe et morcelle les faits, et qui
sous prétexte d'expliquer le complexe par le simple « tend, de
degré en degré, au néant » *).
C'étaient déjà, en germe, les idées auxquelles un peu plus tard
M. Bergson devait donner une forme si brillante, dans les deux
ouvrages bien connus qui datent un renouveau de la philosophie
française a).
Formés à l'école de M. Bergson, de brillants esprits chez lesquels,
sans nécessairement accepter toutes leurs idées, on est heureux et
fier de pouvoir saluer des frères dans la foi, ont puissamment aidé
à répandre et à développer ses idées. C'est M. Le Roy qui a baptisé
la « philosophie nouvelle». Mathématicien de profession, il a pu
avec une toute particulière compétence développer la critique des
sciences. C'est à quoi il s'est attaché, ainsi que M. Wilbois 4).
Dans son testament philosophique M. Ravaisson développait en
core les mêmes idées et il concluait : « La philosophie ne construit
1) Op. cit., pp. 243-244.
2) lbid., p. 245.
3) H. Bergson, Essai sur les données immédiates de la conscience. Paris,
Alcan, 1889. — Matière et mémoire. Alcan, 1896.
4) E. Le Roy , Science et philosophie (R. de met. et de mor., jail., sept., nov. 1899,
janvier 1900). — Un positivisme nouveau (ibid., mars 1901). — Sur quelques objec
tions adressées à la philosophie nouvelle mai, juillet 1901) — La logique de
l'invention (ibid., mars 1905).
J. Wilbois, La méthode des sciences physiques (ibid., sept. 1899, mai 1900). —
L'esprit positif (ibid., mars, sept. 1901, janvier, mai 1902). d'ÉPISTÉMOLOGIE . 223 BULLETIN
pas le monde avec des unités mathématiques et logiques et final
ement des abstractions détachées des réalités de l'entendement ; elle
atteint, par le cœur, la vive réalité vivante, àme mouvante, esprit
de feu et de lumière »*).
On ne pourrait d'ailleurs mieux marquer la

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