Comment peut-on distinguer solidarités communautaires et  communautarisme ? Les critères d appréciation
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Comment peut-on distinguer solidarités communautaires et communautarisme ? Les critères d'appréciation

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Comment peut-on distinguer solidarités communautaires et communautarisme ? Lescritères d'appréciation sont-ils exclusivement ceux de la population majoritaire ouceux des autres populations sont-ils à prendre en compte ? En anglais des États-Unis, le mot community désigne d'abord une collectivité locale (village ouquartier) mais peut aussi avoir le sens de « groupe religieux ». Cette ambivalence est étroitement liée à l'histoire du peuplement et des institutions démocratiquesaméricaines, fondés sur des groupes d'émigrés fuyant les persécutions religieuses. L'organisationsociale des communities, enracinée dans le monde rural, s'est reproduite dans l'univers urbain desvagues successives d'immigrants. Dans son acception française, le concept de communautarismerenvoie confusément à ce modèle où se mêlent communautés de migrants, de « race » et dereligion. La construction du modèle français a suivi un chemin inverse de réduction des particularismesreligieux et linguistiques d'abord sous la houlette de l'Eglise catholique puis dans le creuset del'École républicaine. La question du communautarisme se pose à partir du double moment où l'islamémerge comme religion de masse et où l'École peine à assurer sa mission de brassage socialdevant le creusement des inégalités. Depuis la fin de la première guerre mondiale - qui marque à la fois l'achèvement de l'unitélinguistique française et la fin de l'affrontement entre l'Église et la République - il a existé et il ...

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Comment peut-on distinguer solidarités communautaires et communautarisme ? Les
critères d'appréciation sont-ils exclusivement ceux de la population majoritaire ou
ceux des autres populations sont-ils à prendre en compte ?
En anglais des États-Unis, le mot community désigne d'abord une collectivité locale (village ou
quartier) mais peut aussi avoir le sens de « groupe religieux ».
Cette ambivalence est étroitement liée à l'histoire du peuplement et des institutions démocratiques
américaines, fondés sur des groupes d'émigrés fuyant les persécutions religieuses. L'organisation
sociale des communities, enracinée dans le monde rural, s'est reproduite dans l'univers urbain des
vagues successives d'immigrants. Dans son acception française, le concept de communautarisme
renvoie confusément à ce modèle où se mêlent communautés de migrants, de « race » et de
religion.
La construction du modèle français a suivi un chemin inverse de réduction des particularismes
religieux et linguistiques d'abord sous la houlette de l'Eglise catholique puis dans le creuset de
l'École républicaine. La question du communautarisme se pose à partir du double moment où l'islam
émerge comme religion de masse et où l'École peine à assurer sa mission de brassage social
devant le creusement des inégalités.
Depuis la fin de la première guerre mondiale - qui marque à la fois l'achèvement de l'unité
linguistique française et la fin de l'affrontement entre l'Église et la République - il a existé et il existe
encore en France des communautés de migrants, de l'intérieur comme de l'extérieur, marquées par
une forte influence religieuse et des associations culturelles et sociales très actives, notamment
parmi les Amicales d'Auvergnats, de Bretons..., les Polonais, les Arméniens ou les Portugais. Les
amicales d'anciens élèves de grandes écoles, les membres de sociétés philosophiques, les
groupements politiques ou syndicaux revendiquent le plus souvent une forte identité spécifique et
développent des liens de solidarité entre leurs membres.. Aucune de ces communautés n'a jamais
été considérée comme une menace pour la laïcité, l'unité nationale ou les valeurs républicaines.
A contrario, alors que les musulmans se caractérisent par la faiblesse et l'éclatement de leurs
institutions communautaires, c'est l'affirmation de leur identité culturelle et religieuse qui est qualifiée
de communautariste, parce qu'elle renvoie à un double phénomène :
- l'existence de menaces explicites contre la laïcité et la démocratie proférées par une minorité très
active de prédicateurs islamistes
- et la relégation économique et sociale des habitants des quartiers populaires issus de l'immigration.
En dénonçant le communautarisme, on exprime la crainte que cette population socialement et
culturellement exclue ne soit le « terreau » d'une extension de l'islamisme politique.
© La laïcité à l’usage des éducateurs - La Ligue de l'enseignement - Les Ceméa - Les Francas
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Le communautarisme qui mérite d'être combattu n'est donc pas l'existence d'identités religieuses,
culturelles ou la manifestation d'appartenance à une communauté, mais tout ce qui, volontairement
ou non, a pour effet l'exclusion d'individus ou de groupes par rapport à la communauté des citoyens.
Si les personnes dites « issues de l'immigration » vivant en France peuvent se sentir appartenir à
une communauté nationale, elles peuvent aussi, sans que l'un exclue l'autre, avoir le sentiment
d'être membres de communautés ou supposées comme telles, liées à la culture du pays dont elles
et/ou leur famille sont originaires. Ce sentiment d'appartenance à une communauté peut les amener
à ressentir de la solidarité envers d'autres membres de cette communauté notamment lorsque
ceux-ci rencontrent des difficultés de tous ordres (et particulièrement lorsqu'ils sont victimes de
discrimination).
La solidarité envers des personnes dont on se sent proche est un sentiment noble et légitime.
Certes, nous pouvons regretter que certains individus se sentent uniquement solidaires de
personnes qui leur « ressemblent », mais la solidarité relève d'une démarche personnelle et aucun
texte de loi n'oblige à apporter de l'aide à autrui, hormis dans le cas de l'assistance à personne en
danger.
L'individualisme, la compétition entre les individus, fortement présents dans la société
contemporaine, ne nous incitent pas toujours à nous sentir solidaires les uns des autres. Des modes
d'organisation plus communautaires, par exemple au niveau de la cellule familiale, existent encore
dans certaines cultures. Les citoyens vivant en France, originaires de pays imprégnés de ces
cultures, peuvent à l'occasion adopter des attitudes, développer des comportements, notamment en
terme de solidarité, liés à ces modes d'organisation.
Ces attitudes ne nous semblent pas relever du communautarisme, mais sont plutôt le produit de
l'éducation, d'un mode de vie entre pairs accentué par les phénomènes de ghettoïsation et, parfois,
d'une affirmation identitaire. Certaines personnes adoptent des comportements qui leur semblent, à
tort ou à raison, être ceux que se doivent d'embrasser les membres de leur communauté.
Ces attitudes ne sont condamnables que si elles contreviennent aux lois de le République. Leur
importance doit être relativisée, dans la mesure où tout individu ne développe pas qu'un type de
comportement et que les personnes dites « issues de l'immigration », même celles qui sont
fortement attachées à leur culture d'origine, adoptent aussi un certain nombre d'attitudes influencées
par la population française majoritaire.
Dans notre société où l'on rencontre des difficultés de tous ordres, il est naturel et normal que l'on
recherche des liens privilégiés avec des personnes avec lesquelles on se sent en affinité pour des
raisons politiques, syndicales, culturelles, sportives, professionnelles, géographiques ou religieuses.
Les solidarités ainsi rencontrées permettent une meilleure insertion sociale.
© La laïcité à l’usage des éducateurs - La Ligue de l'enseignement - Les Ceméa - Les Francas
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Mais personne ne doit être contraint d'être membre d'une communauté qu'il n'a pas librement choisie
et personne n'a à subir la loi d'un groupe pour des normes auxquelles il n'a pas librement et
volontairement adhéré. L'appartenance à une communauté est le résultat d'un choix qui n'est ni
exclusif, ni définitif. Les communautés étant le produit de choix individuels ne peuvent donc disposer
de droits particuliers.
Et c'est bien entre individus de différentes communautés, par la connaissance de l'autre, la
reconnaissance mutuelle, les affinités que l'on crée, le sentiment de partager des valeurs communes,
que l'on peut dépasser la notion de solidarité ne s'exerçant qu'envers les membres de sa «
communauté ».
© La laïcité à l’usage des éducateurs - La Ligue de l'enseignement - Les Ceméa - Les Francas
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