Conclusions - autre ; n°1 ; vol.16, pg 361-371
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Description

L'année psychologique - Année 1909 - Volume 16 - Numéro 1 - Pages 361-371
11 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1909
Nombre de lectures 7
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Alfred Binet
Th. Simon
Conclusions
In: L'année psychologique. 1909 vol. 16. pp. 361-371.
Citer ce document / Cite this document :
Binet Alfred, Simon Th. Conclusions. In: L'année psychologique. 1909 vol. 16. pp. 361-371.
doi : 10.3406/psy.1909.3795
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/psy_0003-5033_1909_num_16_1_3795Kl
CONCLUSIONS
Après tant d'analyses de détail auxquelles nous venons de
nous livrer, on sent le besoin de tout résumer, de tout con
denser, et d'arriver à une formule d'ensemble qui soit courte
et pleine. La méthode que nous avons employée, on la connaît
maintenant, elle n'a rien de bien original d'ailleurs ; elle a con
sisté essentiellement à faire marcher d'accord l'étude de toutes
les maladies mentales, à les confronter constamment les unes
avec les autres, avec l'intention d'obtenir par ces comparai
sons une vue claire des différences essentielles qui les séparent.
Nous n'avons mis fin à notre travail d'analyse que lorsque
nous avons eu le sentiment de tenir enfin une définition qui
convenait à chaque maladie que nous considérions et qui con
venait à elle seule ; c'est du reste la règle classique de toute
définition.
Par cette méthode, il faut dire d'une part ce que nous ne
pouvions pas obtenir, et d'autre part ce que nous avons obtenu
en fait.
Nous ne pouvions pas obtenir des conclusions précises sur
la constitution des maladies mentales ; car, ainsi que nous l'avons
déjà indiqué dans notre introduction, état mental et maladie
mentale ne sont point synonymes ; pour constituer une
interviennent d'autres facteurs, l'étiologie, l'anatomie patho
logique, le traitement, l'évolution. Il n'est pas impossible
d'admettre que des états mentaux identiques se rencontrent
dans des maladies différentes ; ainsi, la confusion et la démence
précoce nous paraissent se ressembler au point de vue mental,
mais il se peut que l'élément pathogène soit tout à fait diffé
rent, infectieux dans la confusion, dégénératif dans la démence
précoce, ou passager dans la première et définitif dans la
seconde. A l'inverse, on conçoit qu'une même maladie pro
duise des états mentaux si divers que ce n'est pas avec eux 362 MÉMOIRES ORIGINAUX
qu'on pourrait réaliser une unité morbide; c'est ce qui se pré
sente notamment pour l'alcoolisme, où c'est par la nature de
l'étiologie qu'on constitue la maladie, bien plus que par ses
symptômes psychiques, si variables. Ainsi comprise, l'étude
de la maladie mentale sort de notre sujet actuel, puisqu'elle
ne dépend pas uniquement de la méthode de psychologie cl
inique.
Notre travail nous a servi, au contraire, toutes les fois que la
maladie mentale est constituée, admise, reconnue, et qu'il ne
s'agit plus que d'en faire le diagnostic différentiel pour la dél
imiter d'une autre maladie. Gomme, dans ce cas, le diagnostic
se fait le plus souvent, pour ne pas dire toujours, par des phé
nomènes psychiques, notre étude, consistant à serrer de près
l'état mental, à supprimer l'accessoire, accentuer l'essentiel,
devient très importante pour la pratique.
Mais ici, il faut bien s'expliquer, et montrer en quoi nos ana
lyses sont en progrès sur d'autres. Ce n'est pas évident à pre
mière vue. Prenons par exemple la folie maniaque-dépressive;
qu'ajoutons-nous à la définition de cette maladie? Est-il même
nécessaire d'y ajouter quoi que ce soit, puisqu'elle est reconnue
par des aliénistes appartenant à des écoles aussi différentes
que Kraepelin et Magnan? Mais si on y regarde de près, on
s'aperçoit à la longue que le clinicien de Heidelberg comprend,
sous des termes à peu près identiques à ceux de Magnan, non
seulement des cas identiques, mais aussi des cas différents :
et la définition trop peu précise de l'affection ne rend pas
compte de la divergence, et même elle la dissimule, et contribue
à l'obscurité de toute la question. Il y a donc beaucoup à faire
dans ce sens.
Ces insuffisances de précision dans la définition tiennent à
beaucoup de causes, qu'il serait extrêmement curieux de
dégager, car si on les connaissait toutes, on verrait comment
un aliéniste comprend l'aliénation et en classe les espèces. Il y
a d'abord à signaler un certain psittacisme, qui permet d'appli
quer des étiquettes, tout en perdant de vue les principes ayant
servi à les établir. Il y a ensuite une méthode très classique,
qu'on peut appeler méthode de sériation des symptômes, ou la
méthode des tableaux cliniques, qui paraît être suivie de préfé
rence par Kraepelin. Le grand aliéniste formule à peine les
principes qui le guident, il s'attache à une étude minutieuse de
symptômes, qui le conduit à modifier les cadres, sans qu'il
marque d'une manière explicite le lien général des cas qu'il BINET ET TH. STMON. — CONCLUSIONS 363 A.
groupe dans chacun. En cela, il imite beaucoup d'anciens
auteurs qui ont étudié les états mentaux typiques au moyen
de descriptions concrètes à travers lesquelles il fallait deviner
l'idée générale qui les guidait. Il en résulte que le diagnostic
d'un malade se fait par une sorte d'échantillonnage, un rappro
chement global de faits concrets. Sans doute, Krœpelin a fait
mieux que ces anciens auteurs, il a porté leur procédé au
maximum de puissance, de là l'impression qu'il a produite. En
lisant des descriptions ainsi faites, par réunions de sympt
ômes, on s'écria : « Voilà bien les malades tels qu'ils se pré
sentent! » On ne s'aperçut pas que la description pouvait être
excellente en effet, mais n'apprenait rien, car l'idée fondament
ale en restait cachée. Nous ne voulons pas médire d'une
méthode qui a rendu de grands services ; mais nous ne serions
pas surpris d'apprendre que si elle a donné quelque chose,
c'est parce que les malades étaient déjà groupés par ailleurs
d'une manière assez semblable. D'ailleurs ses mérites ne sont
si apparents que parce qu'on ne tient pas compte de ce qu'elle
laisse en dehors de ses cadres. Elle ne correspond qu'à quelques
cas ; les autres n'y rentrent qu'après avoir subi une violence.
A la vérité, cette méthode de classement se sert d'une idée qui
n'est pas plastique, qui n'est pas vivante; c'est une idée trop
concrète et trop individuelle. Et, soit dit en passant, il est sin
gulier d'avoir à remarquer qu'une idée trop individuelle, trop
chargée de détails, cesse d'être vivante, et qu'une idée ab
straite l'est beaucoup plus. Or, si jamais on a eu besoin d'un
principe souple de classification, c'est bien ici; rien n'égale en
variété, en diversité, en nombre, et en contrastes les tableaux
cliniques que nous présente la réalité; il n'y a pas deux
malades qui se ressemblent, et on en rencontre tous les jours
qui, par leur détail, semblent contraster avec tous les autres.
Comment les reconnaître, les identifier, les classer avec cette
méthode concrète? Cela devient malaisé, presque impossible;
ce que nous appellerons un peu irrévérencieusement la rigidité
teutonne de la méthode s'y oppose.
En face de cette méthode, il en faut ériger une autre, qui est
particulièrement la méthode des aliénistes français. Elle cons
iste à chercher l'essentiel, l'àme de l'aliéné, et à mettre au
second plan les attitudes, les gestes, les paroles, l'infini détail ;
au concret on oppose l'abstrait. Mais cette méthode a paru
périlleuse, pour bien des raisons ; d'abord, elle est difficile ; on
a plus de peine à noter un état d'âme que ses signes extérieurs : MÉMOIRES ORIGINAUX 364
il y faut plus de sens clinique, plus de doigté, une plus
longue habitude des malades ; en outre les anciens aliénistes
n'avaient à leur disposition que des explications psychologiques
insuffisantes, car ils marchaient avec la psychologie de leur
temps, peut-être avec même un peu de retard sur cette psy
chologie. C'est cette méthode de l'école française que nous
avons reprise, et dont nous no

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