De la façon de se dire quand on est dépendant : analyse interactive et énonciative - article ; n°1 ; vol.76, pg 5-41
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Description

Langage et société - Année 1996 - Volume 76 - Numéro 1 - Pages 5-41
Carcassonne Rouif, Marie - How does a dependent person speak of him/herself ? An analysis of interaction and enunciation.
This comparative study of the beginning of three clinical research interviews between a psychiatrist and persons at risk (ordalie) due to some problem of dependence (anorexia-bulimia, drug-addiction, delinquency) focuses on two central issues : 1- Observing the way a speaker interacts with the interviewer and with him /herself (dialogue between self and self and between self and other) gives rise to hypotheses about how such an interview functions. 2- Based mainly on the affinities and markings (or not) of the sources of enunciation, the analysis tries to point out the similarities and differences in the wording and phrasing of the people questioned (all of whom are talking about themselves), thus allowing their style of speech to be characterized.
Cet article présente une analyse comparative du début de trois entretiens cliniques à visée de recherche. Ces entretiens mettent chacun en interaction un psychiatre et une personne présentant une conduite à risques (voire ordalique), conduite liée à un problème de dépendance (anorexie-boulimie, toxicomanie, délinquance). L'analyse se centre sur deux aspects : 1- L'observation de la manière dont le locuteur enchaîne sur lui-même et sur l'autre (dialogue de soi avec soi et dialogue de soi avec l'autre) permet d'émettre des hypothèses sur le fonctionnement interactif de ce type d'entretien. 2- L'analyse énonciative, en s'appuyant surtout sur l'observation des affinités et du marquage (ou non) des sources énonciatives, cherche à montrer les ressemblances et les différences dans la mise en mots des personnes interrogées. Elle permet ainsi de caractériser le style discursif de personnes qui tiennent toutes un discours sur elles-mêmes.
37 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1996
Nombre de lectures 24
Langue English
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Casper Marie-Claude
De la façon de "se dire" quand on est dépendant : analyse
interactive et énonciative
In: Langage et société, n°76, 1996. pp. 5-41.
Abstract
Carcassonne Rouif, Marie - How does a dependent person speak of him/herself ? An analysis of interaction and enunciation.
This comparative study of the beginning of three clinical research interviews between a psychiatrist and persons at risk ("ordalie")
due to some problem of dependence (anorexia-bulimia, drug-addiction, delinquency) focuses on two central issues : 1- Observing
the way a speaker interacts with the interviewer and with him /herself (dialogue between self and self and between self and other)
gives rise to hypotheses about how such an interview functions. 2- Based mainly on the affinities and markings (or not) of the
sources of enunciation, the analysis tries to point out the similarities and differences in the wording and phrasing of the people
questioned (all of whom are talking about themselves), thus allowing their style of speech to be characterized.
Résumé
Cet article présente une analyse comparative du début de trois entretiens cliniques à visée de recherche. Ces entretiens mettent
chacun en interaction un psychiatre et une personne présentant une "conduite à risques" (voire "ordalique"), conduite liée à un
problème de dépendance (anorexie-boulimie, toxicomanie, délinquance). L'analyse se centre sur deux aspects : 1- L'observation
de la manière dont le locuteur enchaîne sur lui-même et sur l'autre (dialogue de soi avec soi et dialogue de soi avec l'autre)
permet d'émettre des hypothèses sur le fonctionnement interactif de ce type d'entretien. 2- L'analyse énonciative, en s'appuyant
surtout sur l'observation des affinités et du marquage (ou non) des sources énonciatives, cherche à montrer les ressemblances
et les différences dans la mise en mots des personnes interrogées. Elle permet ainsi de caractériser le style discursif de
personnes qui tiennent toutes un discours sur elles-mêmes.
Citer ce document / Cite this document :
Marie-Claude Casper. De la façon de "se dire" quand on est dépendant : analyse interactive et énonciative. In: Langage et
société, n°76, 1996. pp. 5-41.
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/lsoc_0181-4095_1996_num_76_1_2738s
Parler de soi quand on est dépendant.
Analyse interactive et énonciative
Marie CARCASSONNE ROUIF
Université de Paris V - LEAPLE-URA 103 1
L'analyse que nous allons proposer1 concerne trois débuts d'entre
tiens recueillis par l'association GRECO (Groupe de Recherche et
d'Étude sur les Conduites Ordaliques) et que l'on trouvera en
annexe, p. 35. Cette association regroupe des cliniciens pratiquant
dans diverses institutions spécialisées de soins pour toxicomanes
ainsi que des chercheurs intéressés par la notion de "conduites
ordaliques". Cette notion a été développée par A. J. Charles-Nicolas
et Marc Valleur (1982 : 82-102). Dans un bref rappel sur ce thème,
l'un des auteurs remarque :
Elles [les conduites ordaliques] sont le fait, pour un sujet, de s'engager de façon
plus ou moins répétitive dans des épreuves comportant un risque mortel :
épreuve, non suicide pur et simple ou simulacre, et l'issue ne doit pas être év
idemment prévisible. Le "fantasme ordalique", sous-tendant ces conduites, serait
le fait de s'en remettre à l'Autre, au hasard, au destin, à la chance, pour le maîtri
ser ou en être l'élu, et par sa survie, prouver tout son droit à la vie, sinon son carac
tère exceptionnel, peut-être son immortalité. (Valleur 1994 : 10-11)
L'association GRECO s'est créée pour procéder à des recherches
sur ces conduites. Le rapport (Valleur 1994) issu de ces
1. Je remercie Monsieur Frédéric François dont les idées inspirent ce travail.
© Langage et société n° 76 - juin 1996 6 MARIE CARCASSONNE ROUIF
constitue une réflexion, à partir d'entretiens, sur les événements et
les représentations tels que le deuil, la perte, la mort, le rapport au
risque intervenant dans certains domaines : toxicomanie, consom
mation abusive de médicaments psychotropes, troubles des
conduites alimentaires, tentatives de suicides, etc. Le recueil de ces
entretiens s'est fait à partir d'une liste de thèmes à aborder de
manière relativement souple {cf. dernière page de l'annexe).
Trois de ces entretiens ont été choisis pour le travail ici présenté,
entretiens dans lesquels trois chercheurs différents interrogent trois
personnes présentant une "conduite à risques" et une dépendance
différente :
- Françoise est une ancienne anorexique devenue boulimique. Âgée
de trente-sept ans, elle exerce la profession de diététicienne (mi-temps
thérapeutique). Elle a une longue expérience de la psychothérapie
et a beaucoup réfléchi à son "problème". Elle est interrogée durant
deux heures par un psychiatre qu'elle sait être un collègue de son
psychothérapeute actuel.
- Maurice est un toxicomane de vingt-cinq ans, sans profession. Il
commence sa première cure de désintoxication et c'est sur son lieu
d'hospitalisation qu'il est interrogé durant un peu moins de deux
heures.
- Roger est un délinquant de dix-neuf ans, sans profession. Il a fait
plusieurs séjours en prison pour vol de voitures. Il est interrogé
dans une maison d'arrêt, ce qui limite très strictement la durée de
l'entretien à une heure.
L'histoire conversationnelle de chacun (comme l'histoire personn
elle en générale) influence sans doute l'idée qu'il se fait des attentes
de son interrogateur : ainsi, il serait possible que ce soit la longue
expérience de psychothérapie de Françoise qui l'induise à vivre
l'ensemble de l'entretien comme une recherche de causalité. De même,
le fait que Roger ne donne pas spontanément d'explication à son
comportement et ait besoin d'être constamment relancé serait peut-
être à mettre en relation avec le fait qu'il est le seul à ne pas avoir
entrepris une démarche pour sortir de son état de dépendance.
Les trois informateurs se soumettant aux interviews sont volont
aires. Ils ont été informés à l'avance de l'objet et du but de cet entre- PARLER DE SOI QUAND ON EST DÉPENDANT 7
tien et l'anonymat leur est garanti. Chercheurs et informateurs ne
se sont jamais rencontrés auparavant. Les corpus ne sont donc pas
la transcription d'entretiens psychothérapeutiques même si les inte
rrogateurs sont psychiatres (M. et Z.) ou psychanalyste (P.). Il s'agit
plutôt "d'entretiens cliniques à visée de recherche". Ce type d'entre
tien « n'a ni visée diagnostique ni visée thérapeutique. Mais il n'est
pas pour autant dénué de but. Il correspond en fait à un plan de
travail du chercheur. » (M.-F. Castarède, 1983 : 119).
Notre analyse va montrer comment les informateurs, en adopt
ant chacun un ensemble de postures énonciatives 2 qui leur est spéci
fique, font preuve d'une certaine indépendance par rapport à l'inte
rrogateur. Cette analyse se déroulera en deux temps.
1 - L'analyse interactive s'intéressera aux mouvements 3 globaux du
discours : comment le locuteur enchaîne-t-il sur lui-même et sur
l'autre, à proximité et à distance ? Le dialogue de soi avec soi sera
ainsi tout autant pris en compte que le de soi avec l'autre.
2- L'analyse énonciative privilégiera parallèlement deux approches :
a) Comment le locuteur marque-t-il les différentes sources énonciat
ives dans son discours ?
Cette première approche précisera de manière locale les observa
tions précédentes concernant le dialogue de soi avec soi. On
reprendra ici la notion de dialogisme de Mikhail Bakhtine
(1979 : 364) pour qui toute énonciation mélange à la fois les "mots
de moi", "de l'autre" et de "on". Paul Drew (1991 : 38) remarque
que dans certains entretiens médicaux, les patients peuvent utili
ser une terminologie médicale tout en précisant qu'ils ne s'attr
ibuent pas la source de ce savoir. Nous soulignons dans les extraits
suivants les procédés utilisés par les patients cités par l'auteur pour
dissocier les sources énonciatives :
Exemple 1 : Patient : I seem to have, what is it - contracted tendon.
2. Ensemb

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