Élégie pour la mort de Tierno Bôkar Sâlif - article ; n°2 ; vol.63, pg 61-79
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Élégie pour la mort de Tierno Bôkar Sâlif - article ; n°2 ; vol.63, pg 61-79

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Description

Journal des africanistes - Année 1993 - Volume 63 - Numéro 2 - Pages 61-79
19 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1993
Nombre de lectures 59
Langue Catalan
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Amadou Hampaté Ba
Élégie pour la mort de Tierno Bôkar Sâlif
In: Journal des africanistes. 1993, tome 63 fascicule 2. pp. 61-79.
Citer ce document / Cite this document :
Hampaté Ba Amadou. Élégie pour la mort de Tierno Bôkar Sâlif. In: Journal des africanistes. 1993, tome 63 fascicule 2. pp. 61-
79.
doi : 10.3406/jafr.1993.2387
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/jafr_0399-0346_1993_num_63_2_2387Élégie pour la mort de Tierno Bôkar Sâlif
composée par
Amadou Hampâté Bâ en 1940
Possédant une copie de ce poème chanté magnifiquement par l'auteur lui-même
et enregistré le 14 octobre 1966 lors d'une émission retransmise par la radio de
Niamey (Niger), j'avais informé A. Hampâté Bâ que je me préoccupais de trans
crire et de traduire ce texte *. Or, à quelque temps de là, je reçus, écrite de sa
main et datée du 26 juillet 1968, une version de ce poème, qui présentait quelques
variantes par rapport au texte enregistré dont je disposais. Ce que je soumets ici
au lecteur est donc une édition critique de cette élégie, établie à partir de la version
orale, A, et de la version écrite, B, toutes les variantes étant indiquées en notes.
Toutefois ce n'est pas sans un certain regret que je devrai me contenter de
la seule transmission écrite de ce texte auquel son interprétation orale confère, grâce
à la voix profonde et chaude de A. Hampâté Bâ et aux inflexions et modulations
caractéristiques de la récitation chantée de la poésie mystique, une intensité d'émot
ion et une qualité esthétique que l'écriture occulte et que la traduction est forcé
ment impuissante à restituer.
Bien qu'œuvre de circonstance, cette élégie est loin de n'être — comme tant
d'autres — qu'un exercice académique conventionnel : composée sous le coup de
l'émotion dans les jours qui suivirent immédiatement la mort de Tierno Bôkar,
elle traduit certes les sentiments qui assaillirent l'auteur mais, en outre, elle porte
manifestement la marque d'un contexte historico-politique qu'il nous faut ici rap
peler. En effet cette région du Mali connaissait alors une période de turbulences
et de luttes sournoises, nourries de différends d'ordre religieux et de manœuvres
politiques, que les aléas de la conjoncture historique et l'intervention de l'Admin
istration coloniale ne firent qu'envenimer.
Les allusions répétées aux persécutions endurées par Tierno Bôkar Sâlif durant
les dernières années de sa vie (et surtout après la visite qu'il rendit au cheikh Hamal-
lâh, en 1937) reflètent une situation dont l'actualité était brûlante au moment de
la composition du poème. Ce qui explique que, même lorsque l'auteur semble ne
faire que sacrifier aux lois du genre en rappelant, sur le ton des vérités générales,
les vicissitudes et la vanité du monde d'ici-bas ou en invoquant, comme dans son
refrain, l'inéluctable destin promis à toute créature (« Tout à la mort est voué ! »),
l'on devine, en filigrane, une admonestation implicite à l'adresse des contempteurs
du Maître (« l'avènement de la mort n'est pas pour le seul Bôkar Sâlif ! ») et l'on
perçoit les accents d'une « sainte » indignation, si contenue soit-elle, en particulier
lorsqu'il s'emploie à démontrer avec insistance l'absurdité des calomnies et fausses
rumeurs attribuant la mort de Tierno Bôkar à la vindicte posthume ou l'influence
occulte de son grand oncle Al-Hadj Oumar Tall (v. 20-27).
* Allocution prononcée par Christiane Seydou à l'occasion de l'hommage rendu à Amadou Hampâté
Bâ par la Société des africanistes le 9 mars 1У92. 62 JOURNAL DES AFRICANISTES
La dissension entre ces deux adeptes de la confrérie Tidjâniyya est à nouveau
démentie aux vers 90-91 et la raison principale de cette opposition est explicitée
à la fin du poème (v. 102-105) auquel est ainsi donnée une conclusion élevée, d'ordre
théologique. C'est en effet sur le problème précis des « onze » ou « douze » grains
de chapelet que se cristallisa la polémique qui, à cette époque, scinda la Tidjâniyya
en deux mouvements groupés l'un sous la bannière de Cheikh Hamallâh, l'autre
sous celle des fidèles d'Al-Hadj Oumar le Foutanké. Les « onze grains » — comme
on les appelait — se réclamaient de l'enseignement originel du fondateur de la conf
rérie, Si Ahmed Tidjàni, qui enjoignit de réciter onze fois l'oraison « Perle de
la perfection » constituant le wird de la Tidjâniyya, enseignement originel remis
en vigueur par les réformistes. Quant aux « douze grains », ils suivaient la tradi
tion introduite par des disciples du Fondateur et reprise par la branche oumarienne
de la confrérie ; initiative qui ne constituait en rien à l'origine une innovation con
damnable mais qui, dans le contexte historico-politique de l'époque, devint la pierre
d'achoppement puis le critère de ralliement au hamallisme pour les « onze », au
mouvement oumarien pour les « douze ».
Amadou Hampâté Bâ, replaçant la conclusion de son élégie sur le plan de la
pure mystique, rappelle le sens et l'origine du nombre onze dans la tradition sou-
fie. Ce qu'il explicite ailleurs en ces termes :
L'importance du nombre onze vient de sa signification dans la symbolique
numérologique musulmane. Il est le nombre de la spiritualité pure et de l'ésotérisme,
car il symbolise l'unité de la créature liée à l'unité du Créateur. Il est la clef de la com
munion mystique. Ce nombre joue un grand rôle tant dans le symbolisme musulman
que dans les traditions africaines. Le nombre douze, qui en est issu, symbolise, lui,
l'action dans le monde et le sacrifice ». Cf. Vie et enseignement de Tierno Bôkar. Le
sage de Bandiagara (Paris, éditions du Seuil, Points Sagesse, 1980, note de la page 53).
■ Ainsi voyons-nous, tout au long de cette élégie, se tisser sur la trame du « thème
imposé » un véritable plaidoyer mêlant la dénonciation des injustices et des calomn
ies qui éprouvèrent Tierno Bôkar Sâlif au soir de sa vie, à la proclamation de
ses vertus et à la justification de ses actes. Ce faisant, l'auteur, tout en prenant
clairement position, s'efforce de maîtriser, par le recours à l'élévation de pensée
et la réflexion mystique, la souffrance morale que lui occasionne la perte de son
maître spirituel, et par le recours à l'argumentation logique et théologique, son ind
ignation à l'égard des ennemis du « saint » homme.
Cet engagement dans la défense de Tierno Bôkar Sâlif et l'illustration de sa
pensée devait se concrétiser plus tard dans l'ouvrage qu'Amadou Hampâté Bâ et
Marcel Cardaire lui consacrèrent (Tierno Bôkar. Le sage de Bandiagara, Paris, Pré
sence africaine, 1957) puis dans celui — refonte du précédent — qui a été publié
aux éditions du Seuil en 1980, ouvrages grâce auxquels nous sont connus la vie
et l'enseignement de ce cheikh qui, jusqu'au cœur des conflits dont il fut la vic
time, ne cessa de se faire le chantre de la tolérance, rappelant à ses « frères en
Dieu, quelle que soit la religion ou la congrégation à laquelle ils étaient affiliés,
de méditer longuement sur ce verset :
La création des cieux et de la terre,
la diversité de vos langues et de vos couleurs
sont autant de merveilles pour ceux qui réfléchissent (Coran XXX, 22).
Christiane Seydou NOTES ET DOCUMENTS 63
Fac-similé des vers du poème, écrits par Amadou Hampâté Bâ (vers 96-105)
U. W
& e e J J
Ce
^ 64 JOURNAL DES AFRICANISTES
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4.

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