Épopée et identité : exemples africains - article ; n°1 ; vol.58, pg 7-22
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Journal des africanistes - Année 1988 - Volume 58 - Numéro 1 - Pages 7-22
Identity and epic : african examples. In oral cultures, the epic genre with its semantic and pragmatic functions comprises two major types (mythological and historical) that are linked to two different sorts of social organization (polyarchy and empire). Two examples of each type are presented from central and west Africa : on the one hand, the Fang mvet (Gabon) and the Nianga epic (Zaïre), and on the other, the Malinke epic of Sundiata (Mali) and the Mâssina Fulani epic (Mali). This comparative analysis takes into account : the sociopolitical or historical context ; the bard's (or griot's) status and role ; and the content of the texts.
La vocation à la fois sémantique et pragmatique du genre épique dans les cultures d'oralité rend compte des deux grands types d'épopées — mythologiques et historiques — que l'on rencontre en Afrique du Centre et de l'Ouest et qui sont liés à deux types de sociétés : sociétés polyarchiques et empires. Quatre cas sont étudiés : le mvet des Fang du Gabon et l'épopée nyanga du Zaïre d'une part, l'épopée malinké de Soundiata et l'épopée peule du Mâssina (Mali) de l'autre. L'analyse comparative s'articule sur trois points pertinents : le contexte sociopolitique ou historique, le contenu des textes épiques, le statut et le rôle du barde ou du griot.
16 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1988
Nombre de lectures 109
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Christian Skydou
Épopée et identité : exemples africains
In: Journal des africanistes. 1988, tome 58 fascicule 1. pp. 7-22.
Résumé
La vocation à la fois sémantique et pragmatique du genre épique dans les cultures d'oralité rend compte des deux grands types
d'épopées — mythologiques et historiques — que l'on rencontre en Afrique du Centre et de l'Ouest et qui sont liés à deux types
de sociétés : sociétés polyarchiques et empires. Quatre cas sont étudiés : le mvet des Fang du Gabon et l'épopée nyanga du
Zaïre d'une part, l'épopée malinké de Soundiata et l'épopée peule du Mâssina (Mali) de l'autre. L'analyse comparative s'articule
sur trois points pertinents : le contexte sociopolitique ou historique, le contenu des textes épiques, le statut et le rôle du barde ou
du griot.
Abstract
Identity and epic : african examples. In oral cultures, the epic genre with its semantic and pragmatic functions comprises two
major types (mythological and historical) that are linked to two different sorts of social organization (polyarchy and empire). Two
examples of each type are presented from central and west Africa : on the one hand, the Fang mvet (Gabon) and the Nianga epic
(Zaïre), and on the other, the Malinke epic of Sundiata (Mali) and the Mâssina Fulani epic (Mali). This comparative analysis takes
into account : the sociopolitical or historical context ; the bard's (or griot's) status and role ; and the content of the texts.
Citer ce document / Cite this document :
Skydou Christian. Épopée et identité : exemples africains. In: Journal des africanistes. 1988, tome 58 fascicule 1. pp. 7-22.
doi : 10.3406/jafr.1988.2246
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/jafr_0399-0346_1988_num_58_1_2246CHRISTIANE SEYDOU
Epopée et identité :
exemples africains *
L'Europe a longtemps méconnu — lorsqu'elle ne l'a pas niée — l'exis
tence d'épopées en Afrique. Le nombre des textes épiques africains publiés à
ce jour a corrigé cette erreur. Bien plus, il nous est apparu que, pour une juste
appréciation du genre épique, l'Afrique offrait un champ d'exploration privi
légié : en premier lieu parce que l'épopée, s'y trouvant inscrite dans des « civi
lisations de l'oralité », y est demeurée — comme l'indique l'étymologie du terme
— « parole » vivante et peut donc y être saisie en situation et dans son fonc
tionnement même ; ensuite parce que, produite par des sociétés très différent
es — tant dans leurs structures politiques et sociales que dans leur histoire et
leurs normes culturelles — , elle y adopte des formes d'expression et des modal
ités d'énonciation variées ; une telle situation nous semble donc favoriser une
réflexion sur ce qui peut faire la spécificité du genre épique et le définir comme
tel, en dégageant par une comparaison synchronique les traits communs à tous
ces textes et en nous permettant, par contrecoup, de comprendre les raisons
de leurs différences.
Dans une étude consacrée au premier point de cette réflexion (Seydou
1982), la comparaison très systématique de deux types d'épopées africaines
les plus dissemblables possibles nous avait révélé seulement trois points de
convergence portant respectivement sur les plans formel, textuel et culturel :
— mode d'énonciation : association obligatoire de la parole épique à un in
strument de musique spécifique ;
— logique narrative : permanence de la notion de transgression comme res
sort de toute l'action épique (défi concurrentiel, transgression, situation ago-
nistique) ;
— fonction du texte : réactualisation d'une « identité » idéologique, fondat
rice d'une unité communautaire.
La recherche de l'exaltation est manifestement la notion clé de l'éth
ique et de l'esthétique épiques : c'est elle qui rend compte des trois points de
convergence repérés ci-avant ; car c'est pour obtenir cette exaltation du public
que sont mises en œuvre toutes les ressources textuelles, contextuelles, réfé-
rentielles et paralinguistiques, musicales et même, à l'occasion, gestuelles.
*. Version française d'un texte publié en finlandais « Eepos ja kulttuuri-identiteetti Afrikán nàkôkulmasta »
in Kalevala ja maailman eepokset, Suomalaisen Kirjallisuuden Seura, Helsinki 1987 ; 302-16 (version
anglaise, sous presse).
Joui nul des ufi iiamstes. 58 (l) 1989 : 7 22. EPOPEE ET IDENTITÉ : EXEMPLES AI RICAINS
C'est que la finalité de l'épopée est de couler un savoir collectif com
mun (l'histoire narrée est généralement connue de tous) et porteur des valeurs
idéologiques du groupe, dans une forme capable de « dynamiser » ce savoir
en ranimant en l'auditoire, par sa communion dans l'exaltation, la conscience
de son identité distinctive et l'aspiration à réaliser cette identité.
Compte tenu de cette vocation à la fois sémantique et pragmatique de
l'épopée, il semble pertinent de chercher à dégager et à analyser le rapport
entre les divers types d'épopées et les diverses sociétés qui les produisent, cha
que peuple dessinant les contours de son identité en fonction de sa situation
écologique et historique, de son organisation sociale et politique, de son éthi
que et de sa religion, en un mot, de tout son système de relation au monde.
Pour cette étude nous avons dû limiter notre champ d'exploration à
deux grandes aires géographiques — une partie de l'Afrique centrale et l'Afrique
de l'Ouest — , où l'on trouve deux types de sociétés — des sociétés polyarchi-
ques et des empires — et deux types d'épopées — mythologiques et historiques.
Nous présenterons donc quatre exemples : le mvet des Fang du Gabon
et l'épopée nyanga du Zaïre, pour l'Afrique centrale, l'épopée malinké de Soun-
diata et l'épopée peule du Mâssina (Mali), pour l'Afrique de l'Ouest.
Nous articulerons notre analyse sur trois points particuliers qui, mani
festement en corrélation, nous sont apparus les plus pertinents pour notre projet
comparatif ; ainsi étudierons-nous, pour chacun des cas concernés, le contexte
sociopolitique ou historique, le thème des épopées et le rôle du barde ou du
griot par rapport à l'élaboration et à renonciation du texte épique.
PREMIER EXEMPLE : LE MVET
Chez les Boulou, les Fang et les Béti du Cameroun, du Gabon et de
la Guinée équatoriale, le terme de mvet désigne tout à la fois un instrument
de musique — longue harpe-cithare à quatre cordes — et un ensemble de gen
res littéraires (lyrique, romanesque et épique) qu'accompagne cet instrument,
mais dont l'épopée est considérée comme le plus représentatif et méritant ple
inement le nom de mvet.
Le mvet (instrument et récit) est censé avoir été révélé au premier ini
tié, plongé dans un état de sommeil léthargique qui dura une semaine, au cours
de la longue migration qui, selon la tradition, conduisit ce peuple, des rives
du haut Nil à son habitat actuel. Ce seraient les accents et les paroles du mvet
qui, en exaltant leur fougue, muèrent cette troupe de fuyards en guerriers invin
cibles pour les conduire jusqu'à la côte atlantique. Et c'est ce rêve inspiré que
répètent les bardes lorsque, au cours des interminables séances de mvet (jusqu'à
sept nuits de récitation !), ils exposent la création cosmique à partir de l'œuf
de cuivre originel, puis la longue généalogie qui mène enfin aux deux frères
ancêtres de ces deux peuples, les Mortels et les Immortels, dont les combats
fantastiques — par héros invidivuels interposés — constituent l'essentiel de
l'épopée fang. SEYDOU CHRISTIANE
La récitation du mvet fait alterner de longs épisodes narratifs relatant
la lutte des Immortels pour étendre leur hégémonie et celle des Mortels pour
conquérir l'Immortalité, avec des interludes lyriques chantés — avec réponse
en chœur du public — évoquant, sur un ton de lamento, la douloureuse situa
tion du barde : « Je me sacrifie pour le mvet !... Je meurs à cause de la
harpe !... » C'est que le barde est comme le porte-parole du mvet ancestral
qui lui est « dicté » par son instrument ; ainsi la parole ancienne ne fait que
passer par lui... mais au prix d'une

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