Ethnomusicologie d un rituel. La représentation, ou de Velasquez à Francis Bacon - article ; n°133 ; vol.35, pg 77-97
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Ethnomusicologie d'un rituel. La représentation, ou de Velasquez à Francis Bacon - article ; n°133 ; vol.35, pg 77-97

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Description

L'Homme - Année 1995 - Volume 35 - Numéro 133 - Pages 77-97
21 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1995
Nombre de lectures 20
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Gilbert Rouget
Ethnomusicologie d'un rituel. La représentation, ou de
Velasquez à Francis Bacon
In: L'Homme, 1995, tome 35 n°133. pp. 77-97.
Citer ce document / Cite this document :
Rouget Gilbert. Ethnomusicologie d'un rituel. La représentation, ou de Velasquez à Francis Bacon. In: L'Homme, 1995, tome 35
n°133. pp. 77-97.
doi : 10.3406/hom.1995.369879
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/hom_0439-4216_1995_num_35_133_369879Gilbert Rouget
Ethnomusicologie d'un rituel
La représentation,
ou de Vélasquez à Francis Bacon
danses Francis Gilbert du Rouget, Bacon. palais — à Ethnomusicologie Porto-Novo Prologue pour sous Un d'un le roi règne rituel. africain de La Gbèfa et représentation, sa (1948-1976) musique de ou — cour. de à paraître Vélasquez Chants pro et à
chainement — *, ce texte publié ici en bonnes feuilles définit d'abord, brièvement,
l'ambition de l'ouvrage, lequel, complété par deux disques compacts et une cassette
vidéo, vise à fournir au lecteur les moyens de « se représenter aussi pleinement que
possible » ce qu'était cette musique de cour. On y montre en quoi ce travail, centré
autour d'un rituel de nouvelle année, poste tout particulièrement le problème de la
distinction à respecter entre la représentation et son objet, entre les faits, leur repro
duction, leur description et leur interprétation ; on y débat des relations entre le
modèle et son peintre ; on y justifie la présence de ce dernier dans le tableau et
l'importance donnée à la dimension esthétique de l'objet « représenté » — i.e. la
musique et le rituel. Il s'agit donc d'une réflexion sur l'épistémologie de cette publi
cation pluridimensionnelle et, implicitement, d'un manifeste pour une certaine pra
tique de l' ethnomusicologie.
Ouvrant ce livre, le lecteur se demandera peut-être si pour traiter de la
musique de cour d'un obscur royaume africain, il était réellement
indispensable d'accumuler tant de descriptions, d'explications et de
photographies, tant de textes chantés reproduits in extenso en deux langues, tant
de transcriptions musicales, en un mot tant de pages et, par surcroît, de ren
voyer à des disques et à une vidéo-cassette. N'aurait-on pas pu faire plus bref et
plus simple ? La musique de cour de l'empereur du Japon est à coup sûr — et à
juste titre — l'une des plus réputées qui soient ; nul ne s'est jusqu'ici encombré
d'un si lourd appareil pour en rendre compte. Pourquoi, dans le cas présent,
pareil déploiement de moyens ? Pour deux raisons, répondrai-je. La première
est que si les institutions impériales du Japon et la musique traditionnelle de ce
pays sont aujourd'hui largement connues, tel n'était pas le cas pour le royaume
* Publication de CNRS-Éditions, avec le concours de la Fondation Singer-Polignac.
L'Homme 133, janv.-mars 1995, pp. 77-97. 78 GILBERT ROUGET
de Porto-Novo ; la seconde est que s'il est vrai — paraphrasons la formule
célèbre — que «la musique, c'est toujours plus que la musique», c'était
l'occasion ou jamais de le montrer.
Faire qu'à travers ces pages et leurs annexes audio-visuelles le lecteur
puisse se représenter, aussi pleinement que possible, ce qu'était la musique à la
cour d'un roi africain, dans cette région du golfe de Guinée où les traditions
royales étaient parfois très vivantes encore au début du XXe siècle, telle est
l'ambition principale de cet ouvrage. Mais que veut dire ici «pleinement» ?
Que cette musique on puisse: 1) l'entendre — condition sine qua non, car
nulle transcription, si fidèle et si détaillée soit-elle, ne remplace l'audition
réelle ; 2) la voir pendant qu'elle se fait — parce que, comme toute musique,
disons « naturelle », elle est inséparable à la fois du geste qui donne naissance
au son et de la danse qui l'accompagne ; 3) la comprendre — et pas seulement
pour ce qui est des paroles (puisqu'à une exception près elle est toujours chan
tée) et de la composition, mais au moins autant pour sa symbolique propre et
celle du rite auquel elle est associée ; 4) en apprécier le caractère émouvant et
la beauté. C'est sur ce dernier point du programme, le plus problématique parce
que relevant largement de l'invérifiable, qu'il me faut m' attarder un moment.
Rituel, art, musique
Apprécier en tant qu' œuvre d'art un bronze à la cire perdue de l'ancien
royaume du Bénin (Bini), un masque gèlèdè des Yorouba du Nigeria, ou encore
la célèbre statue en fer forgé de Gou, dieu de la métallurgie chez les Fon, dans
l'ancien Dahomey, suppose certes, de la part de celui qui contemple l'objet, en
plus de sa sensibilité à l'émotion artistique, une certaine éducation du regard ; il
n'en reste pas moins qu'exposée dans une salle de musée, l'œuvre est offerte à
sa vue et soumise à son jugement esthétique dans les meilleures conditions
d'appréciation possibles. Il en va tout autrement de la musique qui nous
occupe. À la différence des œuvres plastiques dont on vient de parler, elle est
pour plusieurs raisons difficilement isolable de son contexte. D'abord parce
que, comme toute musique non écrite, elle est indissolublement liée à ceux qui
la font et qu'en la circonstance ce lien est spécialement étroit, les musiciens, et
plus encore les musiciennes ayant avec elle des rapports très particuliers et
n'étant pas de purs et simples exécutants. Ensuite et surtout parce que son exé
cution est assujettie à ses conditions d'occurrence, lesquelles ne sont pas celles
d'un concert, mais bien celles d'un rituel dont la musique ne constitue, en fait,
qu'un élément parmi d'autres. C'est donc le rituel tout entier et non pas seul
ement sa musique — ou sa dimension musicale — qu'il faudrait offrir au juge
ment de l'amateur d'art. Théoriquement, c'est ce qu'un film aurait dû permettre
de faire. Pour toutes sortes de raisons, qui apparaîtront d'elles-mêmes au fil
des pages, l'entreprise était impossible à réaliser. Mais, précisons-le tout
suite, il n'en aurait pas moins fallu accompagner ce film d'un écrit donnant à Ethnomusicologie d'un rituel 79
comprendre ce que l'image et le son auraient donné à voir et à entendre. Le
livre que voici eût donc été, de toute façon, indispensable.
Traiter un rituel comme une œuvre d'art dont une des dimensions est la
musique et, réciproquement, traiter la musique comme une dimension — essent
ielle — de cette œuvre d'art qu'est un rituel, tel a été, en fin de compte, le parti
choisi1. Il est en effet construit autour de la « cérémonie de la tête », ta núwiwa
(tête chose-faire), qu'en 1964 le roi Gbèfa célébra, comme chaque année, au
milieu de la saison sèche et à laquelle il me fit l'honneur et l'amitié de me
convier. Ce rituel de la plus haute portée symbolique, engageant la destinée (seJ
du roi pour la nouvelle année et par là même la prospérité du royaume, n'avait
jusqu'à présent pas été décrit. L'importance du « culte de la tête », dont cette
cérémonie annuelle constitue le point culminant, a par contre été signalée non
seulement chez les Yorouba, voisins immédiats des Goun, mais plus encore, un
peu à l'est, chez les Édo, autrement dit dans l'ancien et célèbre royaume du
Bénin. C'est pour avoir inconsidérément risqué de perturber le déroulement des
cérémonies que célébrait le roi (oba) du Bénin, et donc, entre autres, ce rituel de
la tête, que le 4 janvier 1897 la petite troupe sans armes que dirigeait le vice-
consul d'Angleterre et qui, venue du sud, se dirigeait vers Benin City, fut mas
sacrée en chemin avant d'y parvenir. On connaît la suite : l'expédition punitive
organisée par les Anglais, le sac de Benin City, les représailles, les exécutions,
le roi emmené en captivité, les trésors de la ville pillés, les merveilles en bronze
ou en ivoire, orgueil du royaume, emportées, vendues aux collectionneurs, dis
persées dans les plus grands musées d'Europe et d'Amérique, puis rapidement
tenues pour les chefs-d'œuvre les plus accomplis de l'art africain. Ce rituel de
la tête, on le trouve donc m&

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