Géographie et profondeur sociale - article ; n°5 ; vol.22, pg 1005-1046
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Description

Annales. Économies, Sociétés, Civilisations - Année 1967 - Volume 22 - Numéro 5 - Pages 1005-1046
42 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1967
Nombre de lectures 42
Langue Français
Poids de l'ouvrage 3 Mo

Extrait

Paul Claval
Géographie et profondeur sociale
In: Annales. Économies, Sociétés, Civilisations. 22e année, N. 5, 1967. pp. 1005-1046.
Citer ce document / Cite this document :
Claval Paul. Géographie et profondeur sociale. In: Annales. Économies, Sociétés, Civilisations. 22e année, N. 5, 1967. pp.
1005-1046.
doi : 10.3406/ahess.1967.421598
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ahess_0395-2649_1967_num_22_5_421598CHRONIQUE DES SCIENCES SOCIALES
GÉOGRAPHIE
ET PROFONDEUR SOCIALE
Le terme de géographie sociale est ancien, son usage devient plus
fréquent, son sens se précise 4 Synonyme longtemps de géographie
humaine, il tend à désigner le courant de recherche qui donne plus de
place à l'analyse des faits proprement sociaux. L'évolution est un peu
la même dans tous les pays. En France, certains travaux se veulent
de géographie sociale : la thèse de M. Juillard 2 ou celle de Mlle Roche-
fort 3. Les travaux de M. George 4 et de son école sont axés sur i'ana-
lyse de ces aspects de la réalité. Et cependant, en France ccmme à
l'étranger, on a un peu l'impression que la géographie demeure étran
gère aux autres sciences de l'homme. Notre intention n'est pas ici de
rédiger un manifeste en faveur de la géographie sociale • — ceux-ci
Б à Mlle Re chef ort 6, mais ils sont sont nombreux, de Georges Hardy
peut-être dangereux dans la mesure où ils tendent à déplacer le pro
blème, à cabrer les bonnes volontés et les sentiments. Comme le remar
quait M. Pierre Monbeig 7 lors d'une communication que Mlle Roche-
1. On sait que le terme de géographie sociale a été utilisé pour la première fois par
Camille Vallatjx en 1908 (dans le titre d'un ouvrage : Géographie sociale : la Mer.
Paris, Doin). On trouvera des précisions sur l'évolution du sens du mot dans : Dudl
ey Stamp, A glossary of Geographical Terms. Londres, Longmans, 1962. Cf. p. 422 ;
James W. Watson, The sociological aspects of geography, pp. 463-499 de Geography
in the twentieth Century publié sous la direction de Griffith Taylor. Londres, Methuen,
1951.
2. Etienne Juillard, La vie rurale dans la plaine de Basse-Alsace, essai de géogra
phie sociale. Strasbourg, Paris, Le Roux, 1952, 584 p.
3. Renée Rochefort, Travail et travailleurs en Sicile. Étude de géographie sociale.
Paris, Presses universitaires de France, 1961, 363 p.
4. Les préoccupations sociales sont déjà manifestes dans les premiers ouvrages de
M. George : Pierre George, Géographie économique et sociale de la France. Paris, Hier
et aujourd'hui, 1937, 272 p. ; Pierre George, Géographie sociale du monde. Collection
« Que sais-je ? », n° 197. Paris, P.U.F., 1945, 119 p. Nous citons plus loin des études
où les problèmes sociaux sont plus directement abordés.
5. Georges Hardy, La géographie psychologique. Collection « Géographie humaine »,
n° 15. Paris, Gallimard, 1939, 188 p.
6. Renée Rochefort, « Géographie sociale et sciences humaines ». Bulletin de
l'Association des Géographes français, 1963, n01 314-315, mai-juin, pp. 19-32.
7. Ibidem, p. 31.
1005 ANNALES
fort avait effectuée à l'A. G. F. sur le thème de la « Géographie sociale
et des sciences humaines » : « La géographie sociale que Mlle Roche-
fort a présentée avec flamme est, somme toute, la géographie humaine
intelligente. » Dans l'abstrait, oui, la géographie humaine, nous y
reviendrons, est ouverte sur les réalités sociales et humaines — sinon
elle renonce à elle-même. Mais dans la pratique ? M. Monbeig précise :
« Et, comme nous sommes tous intelligents, nous faisons tous de la
géographie sociale ». La boutade repose sur une confusion : ce n'est
pas l'intelligence des géographes qui est en cause, mais l'ouverture
d'une certaine discipline sur les sciences voisines et souvent complé
mentaires. Le problème est donc de comprendre jusqu'à quel point
la géographie humaine a accepté d'être une science sociale, de voir ce
qui lui manque et ce qu'elle pourrait trouver en se laissant gagner par
de nouvelles manières de voir et de raisonner.
Lee trois aspects sociaux de la géographie classique.
La plupart des géographes français actuels, lorsqu'ils essaient de
définir leur discipline, partent de l'introduction que Demangeon 1
avait préparée pour le traité de géographie humaine qu'il n'eut pas
le temps de rédiger. Il y écrivait : « la géographie humaine est l'étude
des groupements humains dans leurs rapports avec le milieu géogra
phique ». Albert Demangeon arrivait à cette définition à la suite d'une
série de retouches successives : il parlait d'abord de l'étude des rap
ports de l'homme avec le milieu physique, puis montrait que cette
première formule est incomplète, puisqu'elle ignore la part humaine
dans la formation de l'environnement, puisqu'elle parle de l'homme,
et que c'est aux groupes que le géographe a affaire. On voit donc comme
sa démarche attirait doublement l'attention sur le caractère social de
la géographie humaine : on comprend ainsi l'exclamation de Monbeig,
et l'attitude de la plupart des géographes. On cesse d'être étonné
devant l'acrimonie avec laquelle Demangeon rendait compte 2 d'un
ouvrage inégal, mais curieux, celui dans lequel Georges Hardy 3 essayait
de jeter les bases d'une géographie psychologique — ce qui était une
façon de critiquer la position classique de Demangeon, en mettant en
évidence la part du monde qu'elle laissait inexpliquée.
Lorsqu'on lit en totalité le chapitre consacré par Demangeon à
son essai de définition de la géographie humaine, on s'aperçoit bien
vite pourtant que des groupes humains, il ne sera guère question. Cela
1. Albert Demangeon, Problèmes de géographie humaine. Paris, Armand Colin,
1947, 408 p. ; Cf. pp. 25-34, Une définition de la géographie humaine.
2. Albert « La géographie psychologique ». Annales de Géographie,
XLIX, 1940, pp. 134-137.
3. Georges Hardy, op. cit. Cf. note 5.
1006 GÉOGRAPHIE ET PROFONDEUR SOCIALE
apparaît dans les développements consacrés aux caractères de la
méthode de la géographie humaine. « La géographie humaine, écrit
Demangeon, doit travailler en s'appuyant sur une base territoriale...
C'est précisément la considération de ce lien territorial qui différencie
la géographie humaine de la sociologie... » Au paragraphe suivant,
Demangeon précise encore sa pensée : « Mais le propre de la géographie
humaine, c'est de constater que l'homme ne peut être étudié sans le
sol qu'il habite, et que le sol est le fondement de toute société. » x
Ce sont là des thèmes qui avaient été souvent abordés avant
Demangeon. Ils avaient alimenté une vive controverse entre les géo
graphes et les sociologues, au moment où les jeunes membres de l'An
née sociologique manifestaient à l'égard des autres disciplines humaines
un impérialisme non dissimulé. Lucien Febvre 2 rapporte assez lo
nguement les termes de ce conflit. « Nul groupe humain, nulle société
humaine sans support territorial. Tel est le point de départ des géo
graphes dans leur définition » : Demangeon reprend trait pour trait
cette interprétation de la géographie. Mais Lucien Febvre montre
qu'elle soulève quelques difficultés : « Formule équivoque dans une
certaine mesure, car il y a bien des « groupes » et bien des « sociétés »..,
sur qui l'influence du « substrat géographique » cher à Ratzel se fait,
somme toute, peu sentir... Le totémisme en particulier est à la racine
de formations sociales sans racines géographiques apparentes. » 3
Et Lucien Febvre s'amuse à montrer que les querelles que se font
géographes et sociologues sur ce point sont bien artificielles. Il pense
que tous les groupes humains peuvent, à un titre ou à un autre, inté
resser le géographe. La position de Demangeon est en retrait sur celle
de Lucien Febvre : « On ne saurait d'ailleurs méconnaître, dit-il, qu'il
existe d'autres ciments sociaux que la terre, en particulier ceux qui
reposent sur des principes de nature psychologique, tels que la parenté
et la religion, et leur étude appartient non aux g

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