Intégration fonctionnelle et développement accéléré en Afrique - article ; n°48 ; vol.12, pg 729-750

Laï Kamara

Description

Tiers-Monde - Année 1971 - Volume 12 - Numéro 48 - Pages 729-750
22 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Sujets

• Sociologie, société et politique

Informations

• Publié par: TIERS-MONDE
• Publié le: 01 janvier 1971
• Nombre de lectures: 22
• Langue: Français
• Poids de l'ouvrage: 1 Mo

Extrait

Laï Kamara
Intégration fonctionnelle et développement accéléré en Afrique
In: Tiers-Monde. 1971, tome 12 n°48. pp. 729-750.
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Kamara Laï. Intégration fonctionnelle et développement accéléré en Afrique. In: Tiers-Monde. 1971, tome 12 n°48. pp. 729-750.
doi : 10.3406/tiers.1971.1819
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/tiers_0040-7356_1971_num_12_48_1819INTÉGRATION FONCTIONNELLE
ET DÉVELOPPEMENT ACCÉLÉRÉ
EN AFRIQUE
par Laï Kamara*
Les nombreuses difficultés économiques politiques et sociales, ren
contrées lors de la mise en œuvre du processus d'intégration économique
en Afrique, mettent en lumière la nécessité d'une connaissance appro
fondie de ce dernier.
Ces difficultés tiennent fondamentalement au double caractère de
l'intégration économique, qui est à la fois objectif et moyen du dévelop
pement et de la prospérité économiques.
En tant qu'objectif l'intégration économique vise à constituer un
espace économique cohérent, territorialement localisé, national ou
international, regroupant des espaces antérieurement indépendants ou
inarticulés.
Si l'intégration économique envisagée comme objectif, trouve son
champ d'application dans le cadre d'un espace national, il s'agit géné
ralement d'une forme perfectionnée d'aménagement du territoire.
Si ce champ d'application est international, il s'agit par le biais de la
réalisation d'une union économique ou douanière, voire d'un marché
commun, de promouvoir la constitution d'un ensemble politique futur,
régional ou continental.
En tant que moyen, l'intégration économique vise à mettre en œuvre
les techniques de réalisation de ces objectifs, en conférant à l'économie
ou les économies considérées, une assise socio-économique de taille
telle que les économies d'échelle puissent permettre un accroissement
rapide du potentiel de la zone.
Si aucune difficulté majeure n'apparaît lorsque l'on envisage l'inté-
* Diplômé d'Etudes supérieures de Droit public; maître es Lettres; magistrat.
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т. m. 48 48 KAMARA LAI
gration économique en tant qu'objectif, celle-ci étant identique pour
tous les Etats, quel que soit leur niveau économique, il n'en est pas de
même lorsqu'elle est envisagée en tant que moyen.
Ainsi, lorsque le processus d'intégration économique est mis en
œuvre entre pays développés, il s'agit de constituer des marchés très
vastes, susceptibles de fournir des débouchés et des stimulants aux
progrès technologiques et aux capacités d'expansion industrielle.
Le facteur privilégié est alors dans ce cas la libération des échanges,
qui favorise la concurrence et sélectionne les facteurs de production (i).
Nous sommes alors en présence d'une intégration d'expansion (2),
aux caractères bien particuliers, entraînant notamment la suppression
de toutes les restrictions concernant les mouvements de facteurs à l'i
ntérieur de la 2one, et l'harmonisation des politiques économiques,
fiscales, monétaires et sociales favorisant par l'égalisation des conditions
du milieu, le jeu de la libre concurrence.
Les instruments privilégiés du point de vue institutionnel sont alors
le marché commun et l'union économique.
Dans le cas de pays moyennement développés, ou de pays développés
possédant néanmoins un secteur attardé, la coexistence de secteurs éco
nomiques ayant atteint des niveaux variables et inégaux de développe
ment, et partant imparfaitement articulés, confère aux avantages attendus
de l'intégration économique, un caractère sélectif selon les secteurs.
En ce qui regarde les secteurs en avance, les avantages attendus sont
ceux de l'intégration d'expansion, mais en ce qui concerne les secteurs
relativement en retard, Д s'agit d'augmenter leur capacité de production
et de compétitivité, de telle sorte qu'ils puissent s'articuler et participer
au mouvement d'expansion (3).
Il s'agit dans ce cas d'une intégration de croissance (4).
Pour les pays en voie de développement, il s'agit essentiellement
en intégrant les économies, de permettre la création d'ensembles écono
miques, financiers et humains, de taille suffisante pour que la jonction
(1) Art. 2 et 3 du traité de Rome instituant la CEE.
(2) « L'expansion étant un accroissement temporaire et réversible de quantités écono
miques, lié aux mouvements courts de la conjoncture, aux fluctuations aujourd'hui, aux cycles
autrefois », Pr François Perroux.
(3) Art. 39, titre II du traité de Rome instituant la CEE.
(4) « La croissance étant l'augmentation poursuivie en longue période des quantités
significatives et impliquant des modifications dans la structure économique », Pr François
Perroux.
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des marchés et des potentiels de production et d'innovation technolo
gique, de capacité individuelle faible ou nulle, permette la diversifi
cation des économies, ainsi que l'implantation d'entreprises industrielles,
car comme disait Nehru, « il n'y a pas de pays sous-développés, il n'y a
que des pays qui ne sont pas industrialisés ». Nous sommes alors en
présence d'une intégration de développement (i).
L'intégration économique envisagée comme moyen est par consé
quent un processus ordonné et successif, qui doit être envisagé spéc
ifiquement en fonction du niveau économique des pays auxquels il est
destiné à s'appliquer ; elle se définit donc en trois vocations fonc
tionnelles, intégration d'expansion, intégration de croissance et intégration de
développement.
En Afrique, la réalisation de l'intégration de développement s'est
heurtée à des obstacles structurels, conséquences directes de la confusion
entre la notion de vocation fonctionnelle et d'objectif à long terme (2),
et partant, de l'inadéquation des moyens et méthodes utilisés aux buts
recherchés.
Le type d'intégration fonctionnelle à promouvoir en Afrique, doit
donc être tourné vers le premier développement, et compte tenu des
perspectives des prochaines décennies, vers le développement accéléré.
Or, en l'état actuel, les économies des Etats africains souhaitant se
regrouper, se caractérisent par un fort degré de dépendance vis-à-vis
des circuits économiques et commerciaux internationaux, dont la
pression tend à imprimer à l'évolution de celles-ci certaines directions.
Cette dépendance résulte essentiellement de l'absence ou de la fa
iblesse de l'industrialisation des pays africains, dont la cause peut être
recherchée d'une part dans l'inarticulation intersectorielle interne et
interterritoriale des économies de ces pays, ainsi que d'autre part, dans
leurs faibles capacités individuelles de production et de compétitivité.
L'intégration fonctionnelle peut donc constituer un support privi
légié du développement accéléré en Afrique, notamment en favorisant
une certaine industrialisation susceptible de briser la dépendance
internationale.
(1) « Le développement étant un faisceau de transformations dans les structures mentales
et traditionnelles, qui permet l'apparition de la croissance et sa prolongation en période
historique », Pr François Perroux.
(2) Voir Intégration territoriale et conflits institutionnels en Afrique, par Lai Kamara,
revue Tiers-Monde, t. XI, n° 44, octobre-décembre 1970, p. 701-732. KAMARA LAI
Dans un premier point, nous analyserons donc l'industrialisation
comme condition du développement accéléré, puis dans un second point,
l'intégration fonctionnelle comme condition de l'industrialisation, enfin,
nous conclurons en envisageant l'intégration fonctionnelle comme
support du développement accéléré.
I. — Développement accéléré
ET INDUSTRIALISATION EN AFRIQUE
L'industrie a un rôle moteur fondamental dans l'économie et son
développement, et son influence est déterminante dans les mutations
sociales et psychologiques