L Instinct de l isolement chez les Insectes. - article ; n°1 ; vol.19, pg 194-217
25 pages
Français

L'Instinct de l'isolement chez les Insectes. - article ; n°1 ; vol.19, pg 194-217

-

Le téléchargement nécessite un accès à la bibliothèque YouScribe
Tout savoir sur nos offres
25 pages
Français
Le téléchargement nécessite un accès à la bibliothèque YouScribe
Tout savoir sur nos offres

Description

L'année psychologique - Année 1912 - Volume 19 - Numéro 1 - Pages 194-217
24 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1912
Nombre de lectures 38
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Etienne Rabaud
VI. "L'Instinct de l'isolement" chez les Insectes.
In: L'année psychologique. 1912 vol. 19. pp. 194-217.
Citer ce document / Cite this document :
Rabaud Etienne. VI. "L'Instinct de l'isolement" chez les Insectes. In: L'année psychologique. 1912 vol. 19. pp. 194-217.
doi : 10.3406/psy.1912.3911
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/psy_0003-5033_1912_num_19_1_3911VI
« L'INSTINCT DE L'ISOLEMENT »
CHEZ LES INSECTES
Par Etienne Rabàud.
Maître de Conférences à la Sorbonne.
« II est des Insectes qui vivent dans le gland, écrit Réaumur,
comme de ceux qui vivent dans les autres fruits, ils aiment, je l'ai déjà dit, à vivre seuls. J'ai ouvert bien des cen
taines de glands véreux, et il ne m'est jamais arrivé de trouver
dans le même gland deux chenilles, ou deux vers; il m'est
arrivé quelquefois, mais bien rarement, de trouver dans le
même gland une chenille et un ver. Dans ce dernier cas, le ver
et la chenille avaient crû ensemble dans le même fruit; pour
quoi deux chenilles ou deux vers n'y pourraient-ils pas vivre
ensemble? Ceci semble confirmer ce que nous avons soupçonné
ci-dessus que chaque papillon des chenilles de gland, et que
chaque mouche des vers de ce fruit, ne laissent qu'un œuf sur
le jeune fruit, et qu'ordinairement le papillon distingue non
seulement des autres les jeunes glands sur lesquels un autre
papillon a déjà laissé un œuf, qu'il n'y en laisse pas un des
siens, mais qu'il reconnaît même les glands sur lesquels un
œuf a été attaché par une mouche, et que la mouche sait voir
si quelque papillon n'a point laissé un œuf sur le gland où elle
veut pondre 1. »
Réaumur pose ainsi nettement la question; il la résout non
moins nettement : un certain nombre d'Insectes, dont les larves
vivent dans des conditions diverses, en particulier à l'inté-
1. Réaumur, Mémoires pour servir à l'histoire des Insectes, t. II, 1136,
p. 502. — II ressort du contexte que le « ver » dont il est ici question est
évidemment une larve de Gurculionide (Balaninus) et non une larve de
Mouche. RABAUD. — « L'INSTINCT DE L'ISOLEMENT » 195 E.
rieur des tissus végétaux, seraient doués d'un instinct spécial
qui les empêche de pondre un œuf là où un œuf a été préc
édemment pondu. Cette conclusion a eu l'heureuse fortune de
rallier l'adhésion de tous et de supporter l'épreuve du temps.
J. H. Fahre, cent cinquante ans après, lui apporte l'appui de ses
observations personnelles. Constatant, par exemple, que la larve
du Charançon delà Carline (Larinus vittatus F.) vit seule dans
un capitule, J. H. Fabre estime qu'une femelle dépose seul
ement un œuf par capitule, que nulle autre ne vient après elle,
« sauf erreur ». Affirmant que « l'isolement dit le genre de
nourriture»1, J. H. Fabre trouve une explication plausible, à
son avis, de cet isolement, dans l'instinct qui préviendrait
l'Insecte qu'un seul capitule de Carline (Carlina corymbosa L.)
ne pouvant suffire à l'alimentation de plus d'une larve, chaque
capitule ne doit pas en renfermer plus d'une.
Les auteurs les plus récents se rangent, d'une manière génér
ale, à la même façon de voir, fournissant une explication
pour chaque cas particulier, prêtant, par exemple, à telle chen
ille, la « crainte d'être mangée » 2.
Une pareille opinion repose-t-elle sur un fondement vrai
ment solide? Existe-t-il, soit chez les femelles pondeuses, soit
1' « instinct de l'isolchez les larves elles-mêmes un « instinct »,
ement », qui aurait pour résultat, sinon pour but, de mettre
les animaux à l'abri des compétitions, instinct trouvant sa
raison d'être, suivant l'expression de M. de Selys-Longchamps,
« dans la nécessité, pour eux, de se réserver un minimum de
substance? » 3
L'ISOLEMENT SECONDAIRE
Assurément, une observation sommaire semble donner à
cette manière de voir un très sérieux appui. Nombreuses sont
les larves d'Insectes, nombreux sont les animaux qui vivent
isolés. Dans un capitule de Chardon-foulon (Dipsacus sylvestris
1. J.-H. Fabre, Souvenirs entomologiques, 7° série, le Larin ours, p. 76
et suiv.
2. P. Portier, Recherches physiologiques sur les champignons ento-
mophytes. Thèse de la Fac. des Se. de Paris, 1911.
3. M. de Selys-Longchamps, Sur les cas de vie solitaire chez certains
animaux. Bulletin de l'Institut sociologique Solvay, n° 18, 1912. MÉMOIRES ORIGINAUX 196
Mill) on trouve une unique chenille iïOlethreutes oblongana Hw. ;
dans un capitule de Garline, une unique larve de Charançon
(Larinus vittatus L.); dans une noisette, dans un gland, une
unique larve d'autres Charançons (ßalaninus nucumh., B. tur-
batus Gyll. , B. elephas Gyll., etc) ; dans la tige de Chardons divers
des chenilles isolées de Myeloïs cribrella Hb., etc. La liste pourr
ait être indéfiniment allongée. Ces faits constatés, et facilement
constatables, impressionnent tout observateur non prévenu.
Moi-même, étudiant de près le comportement de la chenille
du Chardon-foulon et ne trouvant jamais, en fin de saison,
qu'un individu par capitule, j'en arrivais à me demander si la
présence de cet individu à ses divers états n'était pas révélée,
par un moyen ou par un autre, à tout autre individu parvenant
au voisinage du capitule. Je ne m'en étonnais point; persuadé
que chaque être a du monde extérieur une connaissance qui
lui est propre, je ne voyais aucun mystère dans le fait qu'un
Insecte fut sensible à telle ou telle influence imperceptible
pour moi.
Néanmoins, si cette explication écartait, du moins en appa
rence, le point de vue téléologique et ramenait le phénomène
à la possibilité d'un contrôle, force m'était bien de reconnaître
qu'elle reposait sur un raisonnement par analogie plutôt que
sur des faits positifs. Je continuai donc mes recherches. Je
finis par remarquer — et j'aurais pu m'en douter dès le début
— que, suivant les errements de mes prédécesseurs, je me
plaçais dans des conditions assez spéciales. En effet, aussi bien
pour la chenille du Chardon-foulon que pour le Charançon de
la Carline et diverses autres larves, j'examinais exclusivement
des capitules complètement évidés, renfermant des larves par
venues, ou sur le point de parvenir, à la fin de leur croissance.
Dès lors, il importait de se demander si le fait constaté corre
spondait au phénomène tout entier, ou seulement à une partie
du phénomène. L'isolement ne serait-t-il pas, du moins dans
un assez grand nombre de cas, un isolement secondaire, résul
tant de migrations ou de destructions? Il convenait donc de
rechercher et d'examiner des capitules pendant la période qui
suit immédiatement la ponte.
Pratiquée dans ces conditions, la recherche conduit à de fort
intéressants résultats. Sans doute, quelle que soit la larve dont
il s'agisse, nombre de fleurs ou de fruits ne renferment et
n'ont jamais renfermé qu'un seul individu; mais d'autres en
renferment deux, quelquefois trois et davantage. J'ai compté RABAUD. — « L'INSTINCT DE L'ISOLEMENT » 197 E.
jusqu'à 9 larves de Charançon dans un capitule de Garline
et, plus heureux en cela que Réaumur, parmi les quelques
glands de Chêne que j'ai pu examiner, j'en ai trouvé plusieurs
qui renfermaient deux et jusqu'à trois larves de Balanin, soit
jeunes, soit assez voisines de leur complet développement.
La coexistence d'un certain nombre d'individus de même
espèce dans une fleur ou dans un fruit ne saurait donc, en
aucune façon, passer pour exceptionnelle. Plus ou moins fré
quente, en corrélation de conditions diverses que je tâcherai
de préciser, elle est certainement normale; et cela seul importe,
puisque cela conduit a dire que la présence d'un œuf ou d'une
larve dans un habitat n'empêche pas une femelle de déposer
un œuf dans cet habitat, ni une autre larve d'y pénétrer. Tout
se passe, au point de vue d'une femelle pondeuse ou d'une
larve, comme si les tissus végétaux parasités ne différaient en
rien des tissus végétaux demeurés sains; ni cette femelle, ni
ces larves ne paraissent i

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents