La délimitation de la psychologie - article ; n°1 ; vol.18, pg 121-144
25 pages
Français

La délimitation de la psychologie - article ; n°1 ; vol.18, pg 121-144

-

Le téléchargement nécessite un accès à la bibliothèque YouScribe
Tout savoir sur nos offres
25 pages
Français
Le téléchargement nécessite un accès à la bibliothèque YouScribe
Tout savoir sur nos offres

Description

L'année psychologique - Année 1911 - Volume 18 - Numéro 1 - Pages 121-144
24 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1911
Nombre de lectures 15
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

P. Souriau
La délimitation de la psychologie
In: L'année psychologique. 1911 vol. 18. pp. 121-144.
Citer ce document / Cite this document :
Souriau P. La délimitation de la psychologie. In: L'année psychologique. 1911 vol. 18. pp. 121-144.
doi : 10.3406/psy.1911.3854
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/psy_0003-5033_1911_num_18_1_3854VI
LA DÉLIMITATION DE LA PSYCHOLOGIE
Dans son étude sur Lame et le corps, A. Binet fait la critique
des définitions diverses qui ont été données de la psychologie.
Il admet que le domaine de cette science est nettement délimité
en lui-même par l'opposition violente du monde moral et du
monde physique, et, par conséquent, qu'il n'est pas difficile de
marquer la ligne qui la sépare des sciences limitrophes. Mais
la grande difficulté, selon lui, est de condenser dans une défi
nition claire l'essence de la psychologie. Avec son ingéniosité
et sa finesse de dialectique coutumières, il discute les diverses
définitions qui ont été proposées, pour s'arrêter à cette con
clusion, que l'essentiel de la loi mentale est d'être téléologique-
« Finalité, opposée à mécanisme, telle est l'expression la plus
concise et aussi la plus vraie dans laquelle il faut chercher ce
qui constitue le propre de la psychologie et des sciences
morales, le caractère essentiel par lequel les faits psycholo
giques se séparent des faits physiques ». Cette solution peut-
elle être regardée comme définitive? Le problème est trop
important pour que nous hésitions à le poser à nouveau.
On s'étonnera peut-être que la psychologie en soit encore à
se demander quel est l'objet propre de ses investigations, et à
délimiter son propre domaine. Il semble que c'est par là qu'elle
eût dû commencer. En réalité, il en a été de cette science
comme de toutes les autres : elle s'est constituée avant de
chercher à se définir. Elle s'est adonnée à l'étude de certains
faits dont depuis longtemps le sens commun avait formé une
catégorie à part, et auxquels nous avions des raisons toutes
spéciales de nous intéresser : nos sentiments, nos passions, nos
pensées, notre vouloir, toute notre vie intérieure. Elle s'est
ainsi fait de l'étude du monde moral son domaine propre, par
droit de premier occupant. Sa seule préoccupation était de
mettre de la précision et de la méthode dans la connaissance
empirique que nous avons de cet ordre de faits. Mais un 122 MÉMOIRES ORIGINAUX
moment est venu où d'autres sciences, qui s'étaient développées
à côté d'elle, ont commencé à s'étendre sur son propre terrain,
à le lui disputer. Elle-même, élargissant son enquête, a fait de
fréquentes incursions dans le domaine des sciences limitrophes,
notamment de la physique et de la physiologie. A-t-elle gagné
ou perdu à cet envahissement? A coup sûr ses frontières sont
devenues plus indécises. Il faut remarquer aussi que certaines
opinions traditionnelles, qui tendaient à lui assurer sa spécial
ité, ont cessé de s'imposer aux esprits. On s'était longtemps
évertué à établir, entre les réalités d'ordre physique et les réa
lités d'ordre moral, des oppositions tranchées, au point d'en
faire vraiment deux mondes séparés : d'un côté le monde
grossier de la matière pesante et opaque, de l'autre le
subtil des purs esprits. La psychologie se définissait alors
très simplement, sans que personne songeât à discuter cette
formule, comme la science de l'âme. Mais cette métaphysique
dualiste a fait son temps. La cloison étanche que Ton avait
établie entre les deux mondes est tombée : on a compris que de
l'un à l'autre il y avait des relations trop étroites pour que
l'on pût continuer à en parler comme d'entités distinctes,
hétérogènes, irréductibles. Dès lors la question se posait de
savoir quel est exactement le domaine de la psychologie, ou
si même elle a vraiment un objet spécial. Autrefois, on savait
très bien en quoi un phénomène physique diffère d'un phéno
mène psychique. Aujourd'hui on ne le sait plus guère. Les
esprits les plus réfléchis et les mieux informés sont précisément
ceux qui hésiteraient le plus à déterminer d'une façon nette
le point où finissent les sciences physiques et physiologiques,
où commence la psychologie.
Peut-on sortir de cette indécision? Entre le fait physique et
le fait psychique, peut-on établir une barrière quelconque? Je
ne le crois pas. Prenons, l'une après l'autre, les principales oppo
sitions que l'on a voulu établir entre ces deux genres de faits :
nous n'en trouverons pas une qui puisse être maintenue en
toute rigueur.
Ces prétendues oppositions sont d'ordres divers. Nous les
rangerons sous trois titres, un peu artificiellement sans doute,
et sans attacher à cette classification plus d'importance qu'elle
n'en a; mais il faut bien sérier les questions. Les unes portent
sur la nature même des faits; les autres, sur notre façon d'en
prendre connaissance; les autres, sur leur loi de dévelop
pement. SOURIAU. — LA DÉLIMITATION DE LA PSYCHOLOGIE 123 P.
On a dit que la matière était étendue par essence, l'esprit
inétendu. Que l'on considère, en effet, un objet matériel quel
conque, on constatera qu'il a un volume, à tout le moins une
surface. Tous les phénomènes physiques s'accomplissent dans
l'espace, et l'on ne pourrait même se les figurer autrement-
Mais les phénomènes psychiques n'ont le caractère spatial à
aucun degré. Ils n'ont ni volume, ni surface, ni forme définie.
Si quelques-uns sont localisés, ce n'est que par illusion, par
une sorte de vertige qui nous les fait transporter dans le monde
matériel dont ils semblent prendre les propriétés. Mais les plus
authentiques, les plus purs ne le sont à aucun degré. Une tris
tesse, une joie, une pensée, une décision, voilà des choses qui
n'ont aucun rapport avec l'étendue, et qu'à ce titre nous
sommes autorisés à rapporter à quelque agent absolument dis
tinct de la matière, à une force psychique, à une âme, à un
pur esprit.
Nous sommes si familiarisés avec ces idées, qu'elles nous
semblent toutes naturelles, et de sens commun. Aussi est-ce
vraiment du sens commun qu'elles proviennent, c'est-à-dire
des jugements superficiels fondés sur la première apparence.
Regardons-y de plus près, nous les trouverons inadmissibles.
Il serait bien téméraire, étant donné le peu que nous savons
de l'essence des choses, d'affirmer que la matière est essentie
llement étendue. Le résultat des réflexions qu'ont pu faire à ce
sujet les métaphysiciens serait plutôt que l'étendue de la matière
est une apparence subjective, le produit d'une synthèse ment
ale, de sorte qu'à vrai dire l'étendue ne serait pas dans les
choses, mais justement dans l'esprit. Si quelque chose la
réalité externe répond à cette apparence, ce doit être l'activité
locale qui se manifeste sur chacun des points ainsi rassemblés
en une seule intuition, c'est-à-dire de l'inétendu. Peut-on même
affirmer que la représentation des faits physiques est nécessai
rement, constamment extensive? Cela ne peut être affirmé que
de leur représentation visuelle ou tactile, qui est en effet un
schématisme spatial. Mais cette géométrie n'épuise pas la
réalité, ni même notre représentation de la réalité. Nous con
cevons aussi des phénomènes sonores, calorifiques, des tensions
et des attractions correspondant à l'effort musculaire, des
forces agissantes dans lesquelles nous ne mettons guère la
notion d'étendue. Ainsi la matière apparaît comme plus
ou moins spatiale, sans que nous puissions affirmer qu'elle
l'est essentiellement, ni même réellement. r^^/^r^v^^*^!"!^^
124 MÉMOIRES ORIGINAUX
D'autre part, il est inexact d'affirmer que les phénomènes
psychiques nous apparaissent comme absolument inétendus.
On peut constater au contr

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents