La peur chez les enfants - article ; n°1 ; vol.2, pg 223-254
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Description

L'année psychologique - Année 1895 - Volume 2 - Numéro 1 - Pages 223-254
32 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1895
Nombre de lectures 159
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Alfred Binet
La peur chez les enfants
In: L'année psychologique. 1895 vol. 2. pp. 223-254.
Citer ce document / Cite this document :
Binet Alfred. La peur chez les enfants. In: L'année psychologique. 1895 vol. 2. pp. 223-254.
doi : 10.3406/psy.1895.1536
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/psy_0003-5033_1895_num_2_1_1536PEUR CHEZ LES ENFANTS LA
Notre étude sur la peur chez les enfants a été faite par
plusieurs méthodes : 1° par questionnaires distribués à une
centaine d'instituteurs ; 2° par des interrogations que nous
avons adressées à des adultes, à des personnes que nous con
naissons personnellement, qui nous paraissent dignes de toute
confiance et capables de bien s'analyser ; 3° par des observations
personnelles faites sur des enfants de notre famille et de notre
connaissance1.
Les questionnaires que nous avons fait distribuer aux inst
ituteurs étaient imprimés dans la marge d'une grande feuille
blanche ; les questions posées, que nous avons réduites à un
minimum, sont les suivantes :
4° Sous quelle forme et dans quelles circonstances avez-vous
observé le sentiment de la peur chez quelques-uns de vos élèves ?
(Prière de faire le récit de vos observations.)
2° Quels sont les signes physiques de la peur que vous avez
remarqués?
3° Quelle est la proportion des enfants peureux? (Par exemple
combien y en a-t-il sur une classe de 30 élèves ?)
4° Quelle est leur santé? (Développement physique, poids,
taille, force musculaire, sexe, âge.)
5° Quelle est leur intelligence? Quel est leur rang dans la
classe ?
6° Quel est leur caractère ?
(1) II n'entre pas dans notre plan de faire une bibliographie de la
question. Nous renverrons seulement aux récents articles semi-populaires
de James Sully dans Popular Science Monthly (1895) ; l'auteur y a traité
avec beaucoup de détails la peur des enfants, et il a discuté le mécanisme
de la peur de l'obscurité. 224 TRAVAUX DU LABORATOIRE DE PSYCHOLOGIE DE PARIS
7° Avez-vous observé sous quelle influence le sentiment de la
peur se développe chez les enfants ? Le tiennent-ils de leurs
parents? La contagion de l'exemple, les récits effrayants, etc.,
jouent-ils un rôle quelconque ? Quelle est l'influence de l'âge,
de l'éducation religieuse, du milieu (ville ou campagne)?
8° Peut-on guérir un enfant peureux, et comment doit-on s'y
prendre ?
9° Nom et adresse du correspondant.
Environ deux cent cinquante exemplaires ont été distribués.
Ils n'ont pas été distribués indifféremment à tous les institu
teurs, mais seulement à une élite. MM. les inspecteurs d'aca
démie ont bien voulu choisir dans le personnel enseignant de
leur département les instituteurs les plus intelligents elles plus
zélés. Sans grand effort de notre part, nous avons recueilli
110 questionnaires remplis ; nous avons borné notre enquête
à six départements ; nous aurions pu certainement recueillir
un plus grand nombre de documents ; mais nous avons pensé
que ceux-là suffisent.
La bienveillante intervention de MM. les inspecteurs a assuré
le succès de cette enquête. Réduits à nos seules forces, nous
n'aurions pas réuni dix réponses. C'est une chose curieuse que
des personnes qui par profession ou par goût s'intéressent à
ces questions montrent une indolence extrême à remplir le
questionnaire et à le renvoyer. Une cinquantaine d'instituteurs
nous ont écrit spontanément pour nous demander des ques
tionnaires; sur ce nombre de volontaires, deux seulement nous
ont écrit des réponses.
Les questionnaires confiés à l'autorité académique ont été
distribués entre les instituteurs et les institutrices d'école
primaire élémentaire, et un petit nombre ont été envoyés aux
directrices d'écoles maternelles. Parmi les réponses, quelques-
unes sont, sous une forme polie, de simples refus de répondre;
elles en général, rédigées de la manière suivante :
« Aucune circonstance ne m'a permis de constater le sentiment
de la peur chez les enfants confiés à mes soins ; > — ou encore :
« La directrice de l'école et ses adjointes, après avoir délibéré
sur la question, ont été d'accord pour affirmer qu'elles n'ont
jamais remarqué chez les élèves le moindre signe de peur. »
Un autre instituteur fait la même déclaration, dans des
termes qui méritent d'être reproduits : « Je n'ai jamais remarqué
de peur chez mes élèves. Au reste, ils auraient peur de quoi?
De leur maître? Ce n'est plus de l'époque. — De l'école? Elle BTNET. — LA PEUR CnEZ LES ENFANTS 225 A.
leur est rendue aussi agréable que possible. — Du travail ? On les
instruit en les amusant. — Des punitions ? Elles sont si légères
et si rares! Non ; à tort ou à raison, les enfants d'aujourd'hui
n'ont peur de rien; du moins, le sentiment de la peur n'a pas
l'occasion de se manifester pendant le temps de l'école. » Saluons
cette heureuse école, et passons à d'autres.
Plusieurs correspondants, sans chercher dans ce motif une
dispense de répondre, ont remarqué avec raison que l'école où
les enfants sont en sécurité et entourés de leurs camarades,
n'est pas un milieu favorable pour l'observation du sentiment
de la peur, et il est incontestable que les pères de famille en
savent plus sur ce point que les instituteurs ; mais on ne peut
pas adresser aux pères de famille un questionnaire de psychol
ogie, ils n'y répondraient pas; d'autre part, plusieurs institu
teurs ont une famille, des enfants, et peuvent noter les obser
vations qu'ils ont faites chez eux ; d'autres connaissent les
parents de leurs élèves, reçoivent des confidences, assistent à
des scènes intimes et ont par conséquent toute l'expérience
nécessaire pour nous renseigner. Le questionnaire qu'cm adresse
eux instituteurs de bonne volonté n'est donc pas inutile. Plu
sieurs, en effet, nous ont envoyé des observations prises par
eux en dehors de l'école. Nous avons reçu de véritables mé
moires, composés de 10 à 12 pages, et rédigés avec ce soin
calligraphique qui caractérise en général les instituteurs. En
moyenne, les réponses ont une longueur d'une demi-page de
texte imprimé. Il nous a semblé que les réponses des insti
tutrices sont souvent plus détaillées, faites avec plus de soin,,
sinon avec plus d'intelligence que celles des instituteurs ; seule
ment, elles manquent de détails précis; ainsi, pour le poids et
la taille des enfants, les institutrices se contentent souvent de
dire : poids ordinaire, taille élevée, et expressions analogues,
tandis que les instituteurs nous envoient d'ordinaire une
mesure précise en kilogrammes et en centimètres.
Notre questionnaire conviait surtout nos correspondants à
nous envoyer des faits d'observations. La plupart nous ont
envoyé des faits précis, des renseignements détaillés sur des
enfants en particulier, dont on nous donnait une courte biogra
phie ; quelques-uns nous ont donné des observations un peu
diffuses, sans marques propres. Cinq ou six instituteurs ont
interrogé leurs élèves; il en est même qui ont fait composer
les élèves sur le sentiment delà peur, en les priant de raconter
les circonstances où ils ont éprouvé ce sentiment avec le plus
ANNÉE PSYCHOLOGIQUE. II. 15 TRAVAUX DU LABORATOIRE DE PSYCHOLOGIE DE PARIS 226
de force. Ce sont là les meilleures observations. Nous leur oppo
serons les réponses de correspondants qui, ne comprenant pas
exactement le but de notre enquête, nous ont envoyé une série
de réflexions morales, ou une véritable homélie plus édifiante
qu'instructive.
I
DÉFINITION DE LA PEUR
Quelques correspondants ont commencé par remarquer, et
avec raison, qu'avant de faire des observations sur la peur des
enfants, il faut définir le sentiment de la peur, car il présente
plusieurs variétés bien différentes. Il existe une crainte légitime,
qui se manifeste en présence ou à l'idée d'un danger réel,
possible ou seulement probable, et qui nous permet d'agir avec
prudence. Ce n'est pas de ce sentiment naturel, à la fois raison
nable et uti

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