La population du Rouergue de la fin du Moyen Âge au XVIIIe siècle - article ; n°6 ; vol.28, pg 1555-1576
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Description

Annales. Économies, Sociétés, Civilisations - Année 1973 - Volume 28 - Numéro 6 - Pages 1555-1576
22 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1973
Nombre de lectures 115
Langue Français
Poids de l'ouvrage 3 Mo

Extrait

Monsieur Alain Guery
La population du Rouergue de la fin du Moyen Âge au XVIIIe
siècle
In: Annales. Économies, Sociétés, Civilisations. 28e année, N. 6, 1973. pp. 1555-1576.
Citer ce document / Cite this document :
Guery Alain. La population du Rouergue de la fin du Moyen Âge au XVIIIe siècle. In: Annales. Économies, Sociétés,
Civilisations. 28e année, N. 6, 1973. pp. 1555-1576.
doi : 10.3406/ahess.1973.293442
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ahess_0395-2649_1973_num_28_6_293442UNE REGION
La population du Rouergue,
de la fin du Moyen Age au xviiř siècle
Le Rouergue offre un avantage important pour les études d'histoire démog
raphique, économique et sociale : il garde, sur le très long terme, des limites
sensiblement identiques, qui permettent de comparer facilement les documents
le décrivant. Ceux-ci, établis les uns en « feux », les autres en habitants, d'autres
encore en « communiants », posent le problème d'un coefficient de rapport
entre les données. D'une région à une autre, d'une époque à une autre, la
valeur d'un tel coefficient change. D'abord réalité sociale fondamentale,
reposant sur la communauté d'habitation, le feu est vite utilisé comme unité
de mesure de la part contributive d'une ville ou d'un village. Si bien qu'on
distingue le feu fiscal, subdivisé en cent bellugues 1, chaque bellugue en quatre
quarts, du feu allumant ou foganhe qui conserve l'idée première de maisonnée
plus que de famille (au sens actuel du mot : le couple et ses enfants). Car
plusieurs familles vivant sous un même toit ne font qu'un feu. Or le Rouergue,
comme l'Auvergne, connaît longtemps une société patriarcale très structurée.
En 1690 à Laguiole 2, 35,51 % des foyers ont deux noyaux, à Inières 3, 29,17 %,
et jusqu'au xvie siècle, on trouve un grand nombre de « frérèches ». Les contrats
d'affrèrement 4, les achats et ventes faits en commun par des frères abondent
dans les registres notariaux. La tendance des familles à se grouper ou à se
séparer intervient donc autant que la natalité et la mortalité dans l'évolution
de la valeur du feu. Il ne faut pas s'étonner de trouver en Rouergue des valeurs
moyennes supérieures à 5 pour le feu, non seulement au Moyen Age 5, mais
au xvine siècle encore (5,5 par maison en 1771), les plus petites étant celles
des feux pauvres (4,3 en 1771).
1. En dialecte rouergat : blugo : étincelle ; en français : bluette.
2. R. Noël, « La population de la paroisse de Laguiole d'après un recensement de
1691 », Annales de démographie historique, 1967.
3. R. Noël, « La de la paroisse ď Inières d'après un recensement nominatif
du diocèse de Rodez en 1690 », Annales du Midi, avril-juin 1968, pp. 139 à 156.
4. Le verbe affrayra a été créé pour leur rédaction.
5. « Une grande partie des classes paysannes vivait, au début du xive siècle, sous le
régime de la communauté familiale, c'est-à-dire qu'une même maison, comptée pour
1555 UNE RÉGION
Les Causses, et d'abord les plus petits (région de Villefranche-de-Rouergue,
Causse Comtal près de Rodez), occupés les premiers au néolithique, sont
envahis par les Celtes en trois grandes poussées aux vine, vie et 111e siècles
av. J.-C. A partir de petits groupes gaulois détachés de formations celtiques
plus vastes, se constitue le peuple des Rutènes qui occupe le territoire qui
correspond à celui du diocèse de Rodez fondé avant la chute de la domination
romaine. En fonction du témoignage de César et des données qu'il fournit,
on peut estimer les Rutènes à 240000 personnes6, soit 26 à 27 hab./km2.
Si ce chiffre nous semble élevé, tous les témoignages d'époque insistent sur
l'abondante population de la Gaule à la veille de sa conquête par les Romains 7.
« Pointe avancée de la seigneurialisation franque en direction du Sud-
Ouest » 8, le Rouergue connaît du IXe au xine siècle une poussée démographique,
sans doute plus lente que dans le reste du Midi de la France. C'est ce qu'indique
le fractionnement assez faible des vastes manses qui sont à l'origine de la
dispersion de l'habitat. La province ne connaît pas encore au xne siècle l'émi
gration qui existe déjà dans les régions voisines 9. Cette poussée culmine au
début du xive siècle.
On dispose d'un dénombrement important qui donne le nombre de feux
de toutes les paroisses de la sénéchaussée du Rouergue avant la Peste Noire.
Il s'agit d'une copie du détail des opérations totalisées ensuite dans Г « État
des paroisses et des feux de 1328 » 10. Ce document 1X totalise 82 960 feux du
fait d'une erreur peut-être due au copiste. En fait, le total des paroisses donne
54 194 feux, très proche des 52 000 fournis par l'« état de 1328 », qui corre
spondent à la somme des totaux partiels contenus dans le document (52 245).
La valeur démographique du document 12, le fait que toutes les paroisses, y
compris celles appartenant aux seigneurs laïcs et ecclésiastiques, y aient été
un seul feu, groupait fréquemment plusieurs générations et un bon nombre de couples »,
écrit Marc Bloch, Caractères originaux de l'histoire rurale française, t. II, pp. 7 et 8,
Paris, 1961.
6. Les Rutènes ont 6 000 hommes en armes. Les Gaulois lèvent un homme sur dix en
état de porter les armes (César, De bello Gallico, II, 45 et VII, 75, 3, 5), cet effectif repré
sentant le quart de leur population totale (César, De bello Gallico, I 29, 1) ; donc 6 000 x
10 x 4 = 240000 habitants; cf. Albenque, Les Rutènes. Étude d'histoire, d'archéologie
et de toponymie gallo-romaine, Rodez, 1948, p. 39, note 1.
7. Cf. DiODORE de Sicile (V, 25, 1) et Strabon, Géographie (IV, 4 3).
8. Ch. HiGOUNET, « Observations sur la seigneurie rurale et l'habitat en Rouergue
du ixe au xive siècle », Annales du Midi, 1950, pp. 121 à 134.
9. Ch. « Mouvement de population dans le Midi de la France du xie au
xve siècle, d'après les noms de personnes et de lieux », Annales E.S.C., janv.-mars 1953,
pp. 1 à 24.
10. Sur la base d'une mauvaise copie du xvne siècle, M. Constans date ce dénombre
ment de 1349. Cf. M. Constans, Le livre de l'Épervier, Montpellier et Paris, 1882. Une
autre copie ramène cette date à 1341. Cf. Auguste Molinier, « La Sénéchaussée du
Rouergue en 1341 », Bibliothèque de l'École des Chartes, t. XXXIV, 1883, pp. 452 à 488.
En fait, 1341 n'est que la date, de la copie d'un document antérieur égaré. Pour l'analyse
du dçcument cf. F. Lot, « L'État des paroisses et des feux de 1328 », dans Bibliothèque
de l'École des Chartes, t. XC, 1929, pp. 51-107 et 256-315.
11. B.N. fonds latin, nouvelles acquisitions latines, n° 185.
12. Le feu fiscal n'apparaît pour la première fois en Rouergue que plus tard, dans
une sentence rendue le 22 juillet 1384 : cf. article « feu » de Affre, Dictionnaire des Insti
tutions, mœurs et coutumes du Rouergue, Rodez, 1903.
1556 GUÉRY LA POPULATION DU ROUERGUE A.
dénombrées tendent à le considérer comme ayant tout compté 13 et ne permet
tent pas d'ajouter à ce total des feux traditionnellement omis dans les relevés
fiscaux M. Avec un coefficient de 5,5, sans doute faible alors, on obtient une
population de 298 000 habitants, soit 33 hab./km2. C'est plus que pour le
Rouergue actuel (département de l'Aveyron et canton de Saint-Antonin-
Noble-Val du département de Tarn-et-Garonne : 288 000 habitants en 1968,
307 000 en 1962). Mais le problème actuel du Rouergue est sa dépopulation
depuis le milieu du xixe siècle, par rapport au reste de la France. Au xive siècle,
il est surpeuplé, comme le reste de la France ; avec 6 feux au km2, il se situe
légèrement au-dessous de 7,7 feux au km2 avancé pour le Royaume de France
par F. Lot et plus proche des 5,7 feux au km2 du Dauphine à la même époque 15.
Avec la Grande Peste, puis la guerre, la population diminue fortement.
Deux exemples : Millau et Rodez. A Millau, la baisse dès 1309
(1 835 chefs de familles en 1309, 1 541 en 1346) ; mais de 1346 à 1353, elle
chute de 40 % (1 541 chefs de familles en 1346, 918 en 1353). Les villages
voisins semblent avoir moins ressenti la catastrophe ; de 1344 à 1358, ils ont
perdu

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