La psycho-physiologie des états mystiques - article ; n°1 ; vol.17, pg 97-144
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Description

L'année psychologique - Année 1910 - Volume 17 - Numéro 1 - Pages 97-144
48 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1910
Nombre de lectures 8
Langue Français
Poids de l'ouvrage 3 Mo

Extrait

Albert Leclère
La psycho-physiologie des états mystiques
In: L'année psychologique. 1910 vol. 17. pp. 97-144.
Citer ce document / Cite this document :
Leclère Albert. La psycho-physiologie des états mystiques. In: L'année psychologique. 1910 vol. 17. pp. 97-144.
doi : 10.3406/psy.1910.7274
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/psy_0003-5033_1910_num_17_1_7274PSYCHOPHYSIOLOGIE DES ÉTATS MYSTIQUES * LA
Dans l'état présent des sciences psychophysiologiques, le
problème capital qui se pose en ce qui concerne les états
mystiques est celui-ci : d'une part, ceux qui les éprouvent
présentent toujours un certain nombre de caractères psychiques
et physiologiques morbides ou tératologiques fort pareils ou
même identiques à ceux que l'on rencontre, en nos cliniques,
dans des cas où nul ne songe à voir autre chose que de la
misère corporelle; mais de l'autre ils sont fréquemment doués
de qualités, d'aptitudes psychiques d'une véritable valeur,
dont on ne trouve que de très lointains analogues dans les
hôpitaux; et il est curieux au dernier point de voir ces qualités,
ces aptitudes, accompagnées soit seulement de tares physiolo
giques indiscernables de celles dont foisonnent les malades
d'hôpital et d'asile, soit encore, ou même surtout, de tares du
même ordre mais beaucoup plus faibles et notablement diffé
rentes de celles qu'offrent ces malades. Comment ces faits s'ex
pliquent-ils?
Dans un grand nombre de cas, il semble bien qu'il n'existait
à l'origine, chez le mystique, aucune des névroses classées en
médecine, et qu'un élément de nature purement psychique est
venu en créer une, plus ou moins à part, en un organisme où
il y avait seulement prédominance du tempérament nerveux,
avec ou sans singularités somatiques; ou bien, le sujet était
prédisposé à quelque névrose par une diathèse plus ou moins
1. La manière dont nous nous représentons, dans les faits de psychol
ogie mystique, les rapports du physique et du moral est en harmonie,
nous semble-t-il, avec celle dont ces rapports sont conçus par M. Binet.
Voir l'ensemble de ses articles dans la précédente Année psychologique. aussi notre Mémoire sur le Mécanisme de la Psychothérapie, Revue
philosophique, 1911, et notre article sur le Parallélisme psycho-physiolo
gique dans YArchiv von Psychologie. Nous avions indiqué l'idée maîtresse
du présent travail dans Le Mysticisme catholique et VAme de Dante, Bloud,
Paris, 1904, et dans l'Éducation morale rationnelle, Hachette, Paris, 1909.
l'année psychologique, xvn. 7 MÉMOIRES ORIGINAUX 98
précise, et un élément purement psychique, semble-t-il, est
venu présider à l'évolution d'une névrose très spéciale. Quel est
cet élément? Il doit, certes, être de nature psychique, car on ne
peut admettre qu'un organisme contienne une disposition
anatomo-histologique ou fonctionnelle à une névrose propre
ment religieuse : existât-il congénitalement quelque chose
d'approchant, aucune névrose de ce genre n'en sortirait sans la
collaboration ultérieure d'une ambiance imprégnée de religio
sité. Mais si cet élément doit être psychique, comme le psychique
en acte est rivé à des conditions physiologiques, rien ne sert,
pour saisir le secret de la force de cet élément, d'analyser l'acti
vité psychique dans son dynamisme, c'est-à-dire de s'en référer
purement et simplement aux lois de coexistence et de succession
des faits mentaux : au terme de ce travail, on retrouverait
l'organisme avec sa constitution et ses prédispositions, qui ne
rendent pas compte à elles seules de ce qu'on désire s'expliquer.
Reste donc à chercher dans la nature même des idées religieuses,
dans la puissance merveilleuse, — naturellement merveilleuse,
— dont elles sont douées grâce à leur contenu chez ceux qui
sont destinés par leur organisation cérébrale à les penser à
fond avec intensité, l'explication de l'influence extraordinaire
de ces idées sur des organismes susceptibles, d'autre part, de
vibrer fortement dès que quelque chose les émeut. Nous allons
essayer de montrer que les phénomènes de toute sorte qui
caractérisent la mysticité résultent d'un chassé-croisé d'effets-
causes et de causes-effets psychiques et physiologiques dont le
développement s'explique originairement, en son intensité et
en sa spécificité, par l 'influence d'idées religieuses fortes sur des
tempéraments à prédominance nerveuse, tarés ou non congénila-
lement.
La santé cérébro-spinale relative d'un nombre considérable de
mystiques expliquera conséquemment leur aptitude à persé
vérer, malgré même des tares innées ou acquises d'une certaine
gravité, dans un état physique souvent meilleur que celui de
nos malades auxquels ils ressemblent le plus, et dans un état
psychique en général au moins honorable à des titres divers;
cette santé relative les rend capables de tirer profit avec enthou
siasme de ce que peut renfermer de plus raisonnable, de plus
moral, de plus sain l'idéal religieux qui les possède, capables
tout d'abord de subir, plutôt que d'autres entraînements, la
séduction d'idées et d'images bizarres parfois, mais jamais vul-
aires ; ils savent, veulent et peuvent se servir de leur intelli- LECLÈRE. — LA PSYCHOPHYSIOLOGIE DES ÉTATS MYSTIQUES 99
gence, de leur conscience, de toutes leurs ressources nerveuses
pour éviter des bévues, des déchéances de toute sorte dont il
arrive qu'ils aient une appréhension passablement claire et
sagace, et pour utiliser jusqu'aux facteurs les plus morbides de
leur tempérament, plus étranges singularités de
lefar existence, — autant de faveurs, suivant eux, d'un Agent
surnaturel, — en vue d'atteindre des buts élevés spéculatifs ou
pratiques, individuels ou sociaux. N'aperçoit-on pas dès l'abord
que si de nos jours le nombre des cas mystiques diminue en
même temps que s'accroît celui des autres névroses, c'est en
partie parce que l'alcoolisme, toutes les autres causes de blas-
tophthorie, la conservation enfin d'une foule d'êtres faibles que
la médecine empêche de mourir jeunes sans savoir encore les
rendre sains, ont pour effet d'encombrer la société de milliers
d'êtres prédisposés aux névroses les plus graves, tandis que d'un
autre côté s'affaiblit la puissance des idées religieuses? Celles-
ci, aussi peu propres par elles-mêmes à engendrer la grande
mysticité en des milieux peu croyants qu'elles le sont peu à la
produire, quel que soit le milieu, en des organismes trop tarés,
— elles ne créent alors que de la sottise ou de la folie rel
igieuses, — sont des plus aptes à seconder toute l'hygiène
grâce à la moralité qu'elles favorisent et à l'atmosphère de
régularité, d'ordre, de décence sociale dont elles entourent
l'individu partout où elles régnent. Arrive-t-il que l'homme
s'exalte pour elles d'une façon notable? bien souvent elles ne
font éclore en lui que des névroses légères dont les suites psy
chiques ne doivent pas être globalement dépréciées a priori,
et qui interdisent en tous cas l'accès de l'organisme à d'autres
névroses, d'un rang plus bas et plus dangereuses; ou bien, si
les effets provoqués par ces idées sont graves, les espèces morb
ides que nous connaissons se trouvent modifiées de telle
sorte, grâce à l'élément idéel qui les détermine, qu'elles sont
toujours moins désastreuses pour le sujet, moins nocives pour
son ambiance ainsi que pour la race (les mystiques d'ailleurs
se reproduisent peu), et fréquemment méritent beaucoup mieux
que des louanges aussi négatives, quelque opinion que l'on
professe sur le fond de la religion. Ne suffit-il pas d'un coup
d'œil d'ensemble sur la série descendante qui va des états myst
iques supérieurs aux caricatures qu'on en observe dans les
cliniques, pour reconnaître déjà la vraisemblance de la thèse
que nous nous proposons d'établir? En haut, des cerveaux
toujours relativement sains,

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