DossierSociologie du droitDroit et Société 2-1986La recherche de l’efficacité dela loi. Réflexions sur l’étude dela mise en œuvre (Le concept« d’implementation ») *Erhard Blankenburg**Résumé L’auteurIl est né le 20 octobre 1938.Docteur en Philosophie en 1966Quand les politologues distinguent l’« élaboration d’une politique » de saà l’Université de Bâle, en 1974 à« mise en œuvre », les termes de cette différenciation évoquent celle l’Université de Freiburg/B, M.A.qu’établit le droit positif entre fonctions « législatives » et fonctions a exé- en 1965 à l’Université d’Oregon.De 1965 à 1977, il enseigne àcutives «. Mais c’est dans une intention normative que le droit positif faitl’Université (le Fribourg ; dereposer la responsabilité des décisions légitimantes sur certains processus 1971 à 1980, il est « Senior Re-politiques, dispensant ainsi de s’auto-légitimer les agents chargés de searcher » (Prognos AG à Bâle,Max-Planck Institut à Fribourg,l’application. Cette distinction normative est volontairement conçue enpuis Wissenschaftszentrum ànégligeant le fait que, dans la réalité, les deux phases du processus sont Berlin). Il enseigne depuis 1980interdépendantes. En effet, les législateurs prennent en considération les la Sociologie du Droit à Amster-dam (Vrije Universiteit).facteurs agissant sur les probabilités d’observance de leurs décisions, etIl est membre de nombreusesceux qui les appliquent, lorsqu’ils usent de leur marge d’appréciation ...
La recherche de l’efficacité de la loi. Réflexions sur l’étude de la mise en œuvre (Le concept « d’implementation ») *
Erhard Blankenburg**
Résumé
Droit et Société 2-1986
L’auteur Il est né le 20 octobre 1938. Quand les politologues distinguent l’« élaboration d’une politique » de sa hDocteur en Philoso 1966 en « mise en œuvre », les termes de cette différenciation évoquent cellleB,g/urib..AMsrtiinevFeréeden1le,à’U974à’lpeieBéâdt’éOrdeegrosni.Univ qu’établit le droit positif entre fonctions « législatives » et fonctions a exé-en 1965 à l’Universit cutives «. Mais c’est dans une intention normative que le droit positif faitdrugisre(étFelobirseenneigl’àivUn9156à179,7ilDereposer la responsabilité des décisions légitimantes sur certains processus; e -politiques, dispensant ainsi de s’auto-légitimer les agents chargés deàAGsnoogPr(»rehcraeseRroin«Seestil980,à19117àFribInstitu-xlPnakcBlâ,eaM l’application. Cette distinction normative est volontairement conçue en négligeant le fait que, dans la réalité, les deux phases du processus sont).inrlBeseenlIpedengi0891siutrenàumhascszftiWsnessgruoiup,tinterdépendantes. En effet, les législateurs prennent en considération les ela Sociolo du facteurs agissant sur les probabilités d’observance de leurs décisions, etgitiàDoret-rAsmbredenombresusemdari(VUjevenitisr)tielI.tse ceux qui les appliquent, lorsqu’ils usent de leur marge d’appréciation,mem sont mis en demeure de légitimer la manière dont ils « exécutent » la loi.nadamnGre,»«coSdnawaL«:nioatcisoAstyiesaosictaoisn Pour les sciences politiques, l’élaboration et la mise en œuvre d’une poli-Dutch Sociology of Law Associa-tique s’inscrivent dans un processus continu en une succession indiffé-tion », (Research Committee on renciée de points de décision. Cette analyse s’appuie sur des exempleseedoSSiccoanitnolaioLnaIwn)t,er(oAlsosgoyciaotf.loioe)gi empruntés à des domaines relevant de conceptions différentes des fonc-Ses centres d’intérêt sont la po-tions de la loi : politiques traditionnelles, comme le droit pénal et la mo-nosseisrpfoelsce,li,elagélecnatsiss’a,lesqudirijueldortidse bilisation des tribunaux pour les affaires de droit privé, aussi bien que ré-rances,l’organisausèlaàitasjno-iduiaic gulatrices, comme la protection de l’environnement, et incitatives, comme les tri-re, l’acc s justice, la politique de l’emploi.nauxbuilscivloioocasdduegirtudtel,liavaiqir.ueitrompeé-ruetseloctieursdeplusésode I di num r :Jahrbuch fur Rech-tssoziologie und RechtstheorieetZeitschrift fur Rechtssozioloie.
Summary
If political scientists differentiate « policy formulation » from a « imple-mentation » their terminology appears like the distinction in jurispru-dence between « legislative » functions and « executive » ones. But juris-prudence has a normative purpose in mind by putting the burden of le-tgriatitomriszifnrgomdelecigsiitoinmsatoionncoenrttahineirpooliwcny.Tprhoeciresnsoersm,atthivuesrdiesliteinvicntigonaidsmpinuirs--* Article traduit de l’anglais par at in ac cess both are in l ed :Arlette Lagarde, CRIV, Vaucres-terre atson et Pierre Lascoumes, CETEL, lpeogsiisvlaetlyordsecsoignnsieddertothoevfearlcotoorkstihnfluencintugatlhperloikelihoodofcompliancetoeG**.evèneUnVrijsiteiveraFucti,ttlie their decisions, and administrators when using discretion are challengedder Rechtsgeleerdheid, Amster-dam, Pays-Bas.
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E. Blankenburg The explanatory power of pol- law.to legitimize the way they a execute « La recherche de l’efficacité deicy sciences which look at policy formulation and implementation as a la loi. Réflexions sur l’étude decontinuous process with an undifferentiated series of decision points is la mise en œuvre (Le conceptexemplified by reference to policy are as with different patterns of the use « d’implementation »)of law : traditional policy are as like penal law, mobilizing courts for pri-vate law cases, as well as regulatorv policies like environmental protec-tion, and stimulating ones like labour mark et policies.
Le terme anglais « implementation »1est devenu le terme sous lequel on désigne les problèmes que rencontrent les décideurs dans des domaines très divers. On l’emploie depuis longtemps dans la théorie de la gestion des entreprises. Citons, par exemple, l’étude dans laquelle Mumford et Pettigrew2e,imaxntnaalsemine œuvre de la décision d’une firme d’implanter un système électro-nique de traitement de l’information, découvrent un certain nom-bre de conséquences imprévues sur les relations établies et les ré-partitions du pouvoir au sein de cette organisation. Dans ce cas, comme dans n’importe quel autre, le concept trouve son origine dans les problèmes des décideurs qui sont désappointés si leur in-tention initiale n’est pas réalisée. On a fait observer à plusieurs reprises que l’engagement très fort des spécialistes américains dans les programmes de réforme des années 60 et les déceptions qu’ils ont ressenties pendant les années 70 pouvaient expliquer leur préoccupation pour la mise en œuvre. Il en est de même pour les politologues allemands : ayant participé activement aux processus d’élaboration de la politique et partagé les attentes sérieuses attachées aux programmes de ré-forme(s), ils ont, après coup, tenté d’expliquer pourquoi un petit nombre seulement de ces grands espoirs s’est réalisé. Ces décep-tions de voir de grands espoirs anéantis pourraient être simple-ment la conséquence de l’irréalisme des attentes de ceux qui ont élaboré la politique. Ce serait particulièrement le cas des décisions politiques (et législatives) qui sont prises dans un climat (de) polé-mique : les décideurs politiques, lorsque une question est politisée, 1a.nEglno-sacimeénrciecapinoleit)ilq’u«ei(mspulretomuetn-une porte de sortie dans la prise d’une décisiontrouvent souvent symbolique dont ils savent au préalable qu’elle restera sans effet tation»concernela’neinssmembledesau stade de la mise en œuvre. Après coup, seuls les partisans dcoécmispioorntse,mdeesntosrdgesacteeusrestsduersconvaincus pourraient être déçus ; les politiciens professionnels ne le plan de la mise en œuvre.le seront pas. Dans cette notion, la séparationDans cet article, la discussion portera sur lamise en œuvre en du pouvoir de décision (législatiftant que problème des législateurs, c’est-à-dire sur uonbjetprécis ou autre) de celui d’exécution est interprétée en termes de ré-d’analyse de la politique d’État. La mise en œuvre dleosis,comme ciprocité.celle d’autres programmes politiques, entraîne des conséquences 2. Enid MUMFORD, Andrewimprévues, des déplacements d’objectifs et des modifications des PETTIGREW,Implementating Stra-conceptions initiales. Les programmes à définition juridique sont tLeognigcmDaenc,is1io9n,7sNewY,kr5o.différents d’une autre forme de politique en ce sens que le droit ne
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se prête pas toujours à une évaluation en fonction de critères de réalisation d’objectifs,on l’évaluerait plutôt selon des critères d’accomplissement de normes spécifiques. Bien entendu ces deux types de critères se confondent : les décideurs politiques utilisent le droit parmi d’autres moyens pour parvenir à leurs fins et les lé-gislateurs ont en fait des objectifs politiques à l’esprit, lorsqu’ils attendent un certain accomplissement des réglementations qu’ils conçoivent. Cependant, sur le plan de l’analyse, nous ferions une distinction entreune politique centrée sur des objectifset les «programmes conditionnels»centrés sur la règle. Les législateurs, comme tous les autres décideurs politiques, doivent envisager les problèmes de la mise en œuvre et sont à la recherche d’analyses politiques afin de mieux prévoir les glisse-ments et difficultés susceptibles de se produire pendant ce proces-sus. C’est ainsi que s’est formé le besoin de « recherche sur la mise en œuvre » : dans ce cas, le développement scientifique se trouve stimulé par l’action réciproque des hommes de science et des ser-vices gouvernementaux. Le concept de « mise en œuvre » a été in-troduit par les décideurs politiques confrontés aux problèmes pra-tiques posés par la manière de réaliser leurs intentions. Il sert de mot de ralliement qui suscite des contributions émanant de diffé-rentes disciplines universitaires : analyse du processus politique, sociologie des organisations, évaluation de l’impact, évaluation de la politique, etc. Il faut espérer, qu’à la longue, l’accumulation de ces apports, dont chacun est marqué par quelque discipline tradi-tionnelle, constituera un champ d’études pluridisciplinaires pré-sentant une certaine convergence théorique. Depuis longtemps, le droit positif a établi une distinction identi-que à celle qui existe entre « élaboration de la politique » et « mise en œuvre », mais dans une intention normative : le fait de séparer les fonctions « législatives » des fonctions « exécutives » a placé la charge des décisions légitimantes sur certains processus politi-ques, en déchargeant ainsi les autres puisque les premiers sont les principaux producteurs de légitimité. Cette distinction normative néglige à dessein le fait que dans le processus réel, les deux types de fonctions sont étroitement liés ; en fait, les législateurs pren-nent en considération les facteurs qui influencent les probabilités d’observance de leurs décisions, et ceux qui les appliquent, lors-qu’ils font usage de leur marge d’appréciation, sont mis en de-meure de légitimer leur façon d’« exécuter » la loi. Par conséquent, il existe une critique sous-jacente de l’idéologie juridique dans le fait que les sciences politiques ignorent la séparation entre l’élabo-ration de la politique et sa mise en œuvre, les considérant toutes ddieffuéxrecnocmiémeeduenpopirnotcsedsseudsécciosnitoinnu»p(Prréessesntmaannt,«Wuilndeavssukcyc,e1s9si7o3-n.)ni3. Jeffrey PRESSMAN, Aaron WILDAVSKY,Implementation -Dans cet article, j’essaierai de démontrer qu’il est utile de dif-Now High Hopes Were Dashed in Oakland, Berkeley Univ. of Cali-férencier élaboration et mise en œuvre d’une politique même si onfornia, 1973.
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E. Blankenburgles perçoit comme interdépendantes. Je considère cette distinction La recherche de l’efficacité deentrel’élaborationet lamise en œuvred’une politique comme un la loi. Réflexions sur l’étude dee lé ti lamiseenœuvreo(nLe)conceptgirmesdeyomdnequesdestinéesàédicisnosujiridd’tenemdestraurednofmitig-él.Ceuresfaçotteoisncésiréeiutlion-nellntraditecovrileedcnoddeisécpraeisnalirujnoipuarti-tpaeesdiqu « d’implementati » culièrement répandue chez les décideurs appartenant aux cultures politiqueslégalistes,comme c’est le cas pour la culture allemande. Mon exposé portera sur quelques-unes des limites de leurs concepts, en démontrant l’utilité de stratégies de recherches visant à élaborer, également pour les programmes juridiques, une théorie de la mise en œuvre basée sur l’empirisme
I. L’élaboration de la politique et sa mise en œuvre Dans les années 1970, ont été publiées un certain nombre d’études sur le processus d’élaboration de la politique en RFA, dé-crivant les actions de l’administration gouvernementale relatives à la législation soumise au parlement, ainsi que celles concernant la phase post-législative de mise en œuvre des programmes au sein des bureaux administratifs des onze états fédéraux. Il s’agissait des premiers travaux rompant avec une conception traditionnelle considérant que la politique s’arrête avec la ratification définitive d’une loi. Le fait que les études antérieures se limitaient aux processus d’élaboration de la politique, est à rattacher à la prédominance en Europe de la notion de la séparation des pouvoirs. Cette notion est propre aux théories normatives des institutions démocratiques : de même que les décisions législatives tirent leur légitimité de l’accomplissement des procédures démocratiques, de même, la théorie traditionnelle fonde la légitimité des décisions administra-tives sur l’existence de décisions législatives obligatoires. Àla lecture de Montesquieu, sa théorie nous apparaît comme une tentative d’élaboration d’un critère normatif, dont la fonction principale est de délégitimer les structures de pouvoir absolu de son époque. De nos jours, toutefois, la théorie de la séparation des pouvoirs, défendue à l’origine par Montesquieu, est souvent prise comme unedescriptiondes processus politiques de l’époque ac-tuelle et, pratiquement, nombreux sont les décideurs politiques qui considèrent leur rôle en fonction de ce modèle normatif pré-conçu. En raison du poids de ces préconceptions normatives, il n’est pas suffisant d’attirer seulement l’attention sur le caractère empirique des processus politiques ; caractère qui les fait apparaî-tre comme une séquence décisionnelle souvent limitée du fait du déplacement ultérieur des objectifs et du non-accomplissement des intentions initiales. Si nous devions expliquer seulement les productionsde la politique, une différenciation stricte entre son
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élaboration et sa mise en œuvre serait sans signification. Naturel-lement, on ne peut déduire de l’interprétation de la lettre d’une loi ou d’un programme politique ce que l’un ou l’autre « fait » concrè-tement. Le résultat atteint dépend des décisions prises ultérieure-ment et des institutions chargées de la mise en œuvre. Mais il existe une différence selon que les services de mise en œuvre trou-vent leur légitimation dans l’« observation stricte d’un programme légal »ou qu’ils se considèrent comme agissant avec un certain pouvoir discrétionnaire ou même comme « essayant de réaliser des objectifs politiques » (cf. Sabatier/Mazmanian, 19834). Cette notion de la légitimation apparaît également dans les travaux sur la mise en œuvre qui étudient une décision législative et son intention, cette dernière constituant le point de référence pour l’évaluation de la réalisation ou des déplacements des objec-tifs initiaux. Van Meter et Van Horn5énoncent cela très clairement dans leur définition : « la mise en œuvre de la politique comprend les actions entreprises par des personnes (individus ou groupes) publiques ou privées en vue de la réalisation d’objectifs énoncés dans une décision politique antérieure ». La réflexion sur la mise en œuvre n’a de sens que s’il existe un consensus sur le fait que cer-taines décisions politiques peuvent légitimement déterminer des décisions ultérieures : c’est-à-dire si, dans la perception de la plu-part des acteurs, il existe une différenciation entre l’élaboration et la réalisation d’une politique. Ainsi, la théorie de la mise en œuvre est le produit des concep-tions normatives qui continuent de différencier, dans le processus politique, les processus légitimants des processus légitimés. Ce-pendant, au stade de l’élaboration, les décideurs politiques ont à prévoir la structure institutionnelle de la phase de mise en œuvre. Et, en sens inverse ceux qui mettent en œuvre la politique peuvent, en fonction de leurs intérêts directs, tenter d’influencer les déci-deurs. Ainsi, nous ne croyons pas qu’il soit efficace de séparer éla-boration et mise en œuvre d’une politique, mais nous traitons cette séparation comme un moyen heuristique nous permettant d’ana-lyser leurs interdépendances réciproques. II. Des concepts connexes : mise en œuvre, observance et impact En ne tenant pas pour acquis que les politiques produisent les4. Paul A. SABATIER, David résultats annoncés par les législateurs, la théorie de la mise en œu-MWAoZrkMA?NITAhNe,noitalugetitaenemplImaononRfC vre rejoint les questions d’« impact ». Tandis que les études surthe 1972 California Coastal Ini-« impact » se centrent surl’évaluationdes résultats voulus et in-tiative, New York, Plenum, 1983. volontaires de la politique, les travaux sur la « mise en œuvre ».5HORDN,ld«naThoVeANPiMloEcTyEIRpmlrealCm,VAeNnla-tententd’expliquerl’impact. De même, les problèmes de mise en œuvre ont quelque rap-dnas:werok,»mCossecA,noitorPAndcmeipntiustarlaFtiroa-n port avec ceux relatifs à « l’observance ». Si les programmes législaa-nd Society6 (1975), p. 445-488.
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E. Blankenburgtifs étaient réellement adaptés à leur objectif, on pourrait se La recherche de l’efficacité der la loi. Réflexions sur l’étude deopyhseddsesèhtesusteoueslurspgoedsseedarmmcomloientport’lresbonavr.ecpeCeanndbt,nieocntenterd’évalueensetra la mise en œuvre (Le concept-eleltuenévtairousé.nOpsrpjoteobjectifetlesopsseésrseelgèlprrtpo « d’implementation »)ment constater que l’observance atteint un taux élevé et, malgré cela, (ou même à cause du ritualisme de l’observance) due les ob-jectifs projetés n’ont pas été réalisés Bardach/Kagan, 19826.) La plupart des programmes législatifs sont quelque peu ambi-gus en ce qui concerne les trois critères d’évaluation de l’impact : les règles, les objectifs ainsi que leurs interrelations. C’est pour-quoi nous voudrions étudier l’observance en prenant comme base de départ les règles obligatoires et en cherchant jusqu’à quel point elles sont respectées ou non. Mais nous aimerions aussi connaître leur impact en considérant la loi comme un programme centré sur un objectif et en recherchant si les intentions initiales sont ou non réalisées. L’étude de la mise en œuvre devrait considérer ces deux points de vue en établissant le rapport entre les divers niveaux d’observance et les différentes variations de l’impact. Elle pourrait parfois démontrer que l’observance ne conduit pas à l’impact sou-haité parce que, au départ, on a mal conçu les programmes. Elle pourrait parfois révéler une corrélation entre l’observance et l’im-pact souhaité. Il s’agirait d’expliciter quand cette corrélation est positive, quand elle est négative et quand il n’existe aucune corrél-ation entre les deux. III. Quatre exemples de l’importance sociale des structures de mise en œuvre Illustrons par quatre exemples le rapport de l’impact à l’obser-vance : III.1. Premier exempte : un programme législatif « à l’ancienne mode » : le droit pénal En raison de la précision de ses prescriptions, de la complexité de sa dogmatique et de l’importance de son dispositif de contrôle par la police, le parquet et le juge, on peut considérer que le droit pénal appartient à une catégorie qui possède une vaste infrastruc-ture sauvegardant la mise en application de ses décisions. Cepen-dant, la police et le parquet sont loin de « contrôler » le comporte-ment délinquant. En disant cela nous ne voulons pas attirer l’atten-tion sur le nombre important de délits non élucidés, que l’on pour-rait considérer comme étant «« contrôlé » au moins en raison de 6. Eugene BARDACH, Robert KAGAN,Going by the look. Thesitagrnaleeloinndétesàcerctertaslytraetnngiecneapdnserastsdeoesgitéloci.eNuosovluonsplutôtsouliruelrnesigeemtrtenrpapla Problem of Regulatory Unreaso-nableness,Philadelphia, Templede délits (comme les vols ou les coups et blessures des cols bleus) Univ. Press, 1982.et l’absence de stratégies pour détecter d’autres types de délits
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(tels que la fraude ou l’escroquerie des cois blancs). Des tentatives récentes pour accroître la capacité des services spécialisés dans la répression de la délinquance des cols blancs ont eu pour résultat une augmentation de l’enregistrement policier de ce type de délin-quance. En ce qui concerne les délits, les chances de détection de-meurent, pour une large part, dépendantes de leur signalement par les victimes, mais, en dernière limite, elles restent dépendantes des compétences et de l’organisation des services de mise en œuvre. Lorsqu’ils édictent un programme par voie législative, les légi-slateurs prévoient habituellement les compétences des services de mise en œuvre. Très souvent, cependant, l’ambiguïté politique se manifeste par des décisions symboliques de droit positif, qui ne donnent pas aux services des moyens de mise en œuvre qui aient une chance quelconque d’efficacité. C’est le cas des lois en matière d’avortement : les combats hautement symboliques à propos de la législation contre l’avortement restant sans effet, les services char-gés des poursuites montrent depuis longtemps peu de rigueur dans l’application de la loi, et n’aboutissent à des sanctions pénales que dans des cas extrêmement rares. La légalisation totale de l’avortement rencontre une vive opposition de la part de groupes qui, dans le même temps, n’agissent pas dans le sens d’une effecti-vité réelle des poursuites. C’est en grande partie l’importance sym-bolique des lois sur l’avortement qui engendre la politisation de la question : dans sa pratique, la mise en œuvre en a depuis long-temps aboli le sanctionne ment. On sait que les lois remplissent des fonctions symboliques. La proportion dans laquelle elles le font exclusivement varie. Elles y parviennent d’autant mieux qu’on laisse aux services de mise en œuvre le soin de déterminer le niveau d’exécution. La « sous-application » des lois dont l’importance est hautement symbolique constitue une façon de les adapter à des normes sociales discutées, particulièrement dans le cas où existent des points de vue contra-dictoires quant à l’obsolescence d’une prescription légale. III.2exemple : les lois et les réglemen-. Deuxième tations concernant la politique de l’environnement Comme Renate Mayntz l’a établi (19787),le vote au Parlement des lois sur la destruction des déchets et la pollution de l’air et des eaux en R.F.A. a rencontré une résistance relativement faible, sim-plement parce que la définition des normes et les méthodes d’application étaient laissées à l’appréciation des autorités locales. Il n’existe pas de dissensus général sur la nécessité d’exercer un contrôle plus strict dans le domaine de l’environnement, mais on peut s’attendre à rencontrer une vive résistance aussitôt que sont cises et qu’il devient vraisemblable qu’elles7. Renate MAYNTZ(ed.),Voll-vdoéfnitniêetsredemsinseorsmeenspœruévre.Dansleprocessusd’élaborationdelaSztuugtstpgraortb,leKomllehdaemrmUemrt,v1e9lt7p8o.litik,
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E. Blankenburgon évite les conflits en laissant les détails de l’applicationpolitique, La recherche de l’efficacité deaux services de mise en œuvre. Il est possible qu’une loi énonce la loi. Réflexions sur l’étude detrès clairement ses objectifs et ses critères comme les lois sur la l«adm’iismepleenmœenutvarteio(nLe»)conceptdestruction des déchets qui définissent ce qu’on doit considérer comme « destruction obligatoire de déchets » malias charge de la mise en œuvre est laissée aux services, qui eux ont un intérêt di-rect à les interpréter avec indulgence. Dans le cas de la destruction des déchets, par exemple : 1) tous les conflits sont délégués à un niveau de règlement ré-gional dans lequel il est très probable qu’existe une coalition d’inté-rêts entre les autorités locales (intéressées à maximiser leurs reve-nus fiscaux en étant attractifs pour l’industrie) et les producteurs de déchets industriels (Hucke et al. 19808). 2) Ceci entraîne, au plan local, des différences dans le taux d’application et l’intensité d’exécution de la politique générale. Les autorités locales ont tendance à se montrer plus strictes là où les problèmes de déchets industriels ne sont pas très im-portants, elles penchent vers plus d’indulgence quand l’application stricte des normes légales risquerait de gêner plus sérieusement l’industrie locale. Ainsi, plus les problèmes locaux de déchets in-dustriels sont sérieux, plus les déficiences dans la mise en applica-tion tendent à augmenter. La non-application au niveau local de politiques décidées à l’échelon central n’est pas nécessairement une mauvaise chose. Les décisions prises à l’échelon central ont tendance à ne pas tenir compte des conditions diverses susceptibles de faire obstacle à la mise en œuvre et de produire des effets contraires. Dans le cas de la loi sur la destruction des déchets, son application stricte, selon des normes identiques, paraît tout à fait irréaliste. La seule alterna-tive, qui consisterait à abaisser le niveau des normes de manière que même les collectivités qui connaissent des problèmes très sé-rieux soient à même de les appliquer, aurait laissé une plus grande partie du pays sans aucune exigence effective concernant la des-truction des déchets. Ainsi, le fait de permettre des déficiences dans l’application a quelque peu amélioré la situation dans l’ensemble des collectivités, laissant la décision finale à la discré-tion de ceux qui mettent en œuvre au niveau local (cf. Bohne, 9 1980) .
III.3. Troisième exemple : la mobilisation du droit privé 8. Jochen HUCKE, et al.,Imple- contrô ent le c mentation kommunaler umwelt- omportement en imposant desLes lois, qui l politik, Frankfurt, Campus,sanctions é 1980.ctignivat,estnoosebdnigro’ruevedsemsnasieetdnceilla 9. E. BOHNE,Der informale Rech-yoneeusldsequ’ilss,tels-misdnoniutoapcsiiliptpiasunaefeuptnmttrsvooiuddrsusuLce’.atHsustmabaltot,undkeruDcnni,eBlr,1980.serrueLtsetcepeneism.reuvœgneerpuorelrutoritairedecesoesirdnétnlbatné,soetoiivpr