Nobles et paysans en Russie, de l « âge d or » du servage à son abolition (1762-1861) - article ; n°1 ; vol.21, pg 111-140
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Nobles et paysans en Russie, de l'« âge d'or » du servage à son abolition (1762-1861) - article ; n°1 ; vol.21, pg 111-140

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Description

Annales. Économies, Sociétés, Civilisations - Année 1966 - Volume 21 - Numéro 1 - Pages 111-140
30 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1966
Nombre de lectures 42
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Michel Laran
Nobles et paysans en Russie, de l'« âge d'or » du servage à son
abolition (1762-1861)
In: Annales. Économies, Sociétés, Civilisations. 21e année, N. 1, 1966. pp. 111-140.
Citer ce document / Cite this document :
Laran Michel. Nobles et paysans en Russie, de l'« âge d'or » du servage à son abolition (1762-1861). In: Annales. Économies,
Sociétés, Civilisations. 21e année, N. 1, 1966. pp. 111-140.
doi : 10.3406/ahess.1966.421355
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ahess_0395-2649_1966_num_21_1_421355NOBLES ET PAYSANS EN RUSSIE,
DE « L'AGE D'OR » DU SERVAGE A SON ABOLITION
(1762-1861)
De inspirée une proie dont a l'exploitent, et plupart frappant, milliers seuls de 1780, attaché autant désespoir « lui trentaine Dans plus trois qui à dépend les de des son mais ont d'ecclésiastiques, de l'histoire trois centièmes propriétaires reste paysans et exigences nom. la les d'années, toute de aussi volumes moitié le moyens fureur Que plus de le la toujours Russie, dernier vie sont représentent souvent « de l'État) nobles dans dont bourgeois de l'Histoire du par des l'être la 2. le pays qui ? plus inerte, Pougatchovchtchina rapport Les synthèse personnage serfs Mais tiennent — » », de numériquement, éléments et lourdes ce écrivait privés cette en Russie artisans, aux sont dehors magistrale toutes essentiel, immense de (les 95 actifs à les M. laquelle un de pour la autres Pierre quelques les est — centième part x dans masse c'est fonctions l'exemple 100 que ou Paul étant Pascal, de du la le de lui dizaines explosions rurale, Milioukov Russie de moins ceux paysan... moujiks pour avaient de le nobles il plus y resqui les de en la a
ponsabilité et de commandement. Face au serf, qui est aussi domestique,
artisan, contribuable et soldat, le seigneur est le propriétaire foncier, le
patron, l'employeur, le collecteur d'impôts, l'officier. Il est le juge,
l'administrateur, le recenseur. В devrait être un père, un directeur de
conscience, un conseiller agronomique, un sauveur en cas de famine.
En fait, dans un État qui, si autocratique que soit le souverain, a besoin
de ses services mais ne peut les exiger depuis le manifeste de 1762, le
seigneur est le maître absolu de ses paysans.
1. P. Pascal, « Le paysan dans l'histoire de Russie », Revue historique, 1934, I,
pp. 32-79.
2. Pour l'orthographe des mots russes, j'adopte ici une transcription de caractère
phonétique (avec, en outre, le signe ë pour exprimer le son io). Dans les références
infrapaginales, j'ai suivi la translittération internationale pour le nom des auteurs ;
mais, pour les titres des œuvres écrites en russe, je ne donne que leur traduction en
français.
111 ANNALES
L'exclusivité de sa domination revêt un double aspect : les nobles
seuls peuvent posséder des propriétés peuplées de serfs ; eux seuls, ayant
réussi à s'interposer entre l'autorité publique et les paysans, la repré
sentent auprès d'eux. Depuis l'avènement d'Elisabeth Petrovna (1741),
les serfs ne prêtent plus serment de fidélité au souverain : c'est Paul Ier
qui, jaloux de son autorité et hostile aux privilèges nobiliaires, rétablira
cette coutume de la monarchie patriarcale. Depuis le recensement de
1747, chaque propriétaire dresse lui-même, pour l'État, la liste des
« âmes de révision », c'est-à-dire des serfs de sexe masculin, qui peuplent
son domaine. Depuis 1760, il peut envoyer en Sibérie les mauvaises
têtes. Restait la ressource de protester contre les injustices et les bru
talités : ce dernier espoir, qui acheminait vers la résidence impériale les
délégations paysannes, est anéanti en 1767, lorsque Catherine II sup
prime le droit de pétition. La seule mesure de faveur que l'amie des phi
losophes ait prise consista à proscrire, vers la fin de son règne, l'usage du
marteau du commissaire-priseur lors des enchères publiques où l'on
vendait au détail les bêtes humaines. Les serfs n'avaient plus qu'à pra
tiquer la « soumission silencieuse » que leur recommandera le « Recueil
des Lois » de 1832 jusqu'à la veille de leur émancipation.
La condition des paysans-serfs a été étudiée de près en Russie à la
fin du xixe siècle, et plus encore par les historiens actuels d'U.R.S.S. x.
La noblesse, au contraire, n'a fait l'objet que de rares travaux, qui sont
de caractère essentiellement juridique et remontent au siècle dernier 2.
Aussi peut-on saluer avec joie la publication d'ouvrages récents, qui,
complétés par diverses monographies, permettent de définir avec plus
de précision les relations socio-psychologiques du couple nobles-paysans,
observées du point de vue des nobles, à « l'âge d'or » du servage et lors
du déclin qui a précédé son abolition. Il est naturel de mentionner en
premier lieu, du côté occidental, la large fresque de M. Jérôme Blum
— elle couvre un millénaire d'histoire russe 8 — où l'on retrouve les qua-
1. Par exemple, pour la période prérévolutionnaire : V. I. Semevskij, La question
paysanne en Russie au XVIIIe siècle et dans la première moitié du XIXe, Saint-
Pétersbourg, 2 vol., 1888 ; du même : Les paysans pendant le règne de Catherine II,
Saint-Pétersbourg, 2 vol., 1901-1903. — Parmi les ouvrages soviétiques récents :
N. L. Rubinštejn, L'économie rurale en Russie dans la seconde moitié du XVIIIe siècle,
Moscou, 1957 ; Ja.-I. Linkov, Précis d'histoire du mouvement paysan en Russie de 1825
à 1861, Moscou, 1952 ; J. I. lGNATOvič,Le mouvement paysan en Russie dans le pre
mier quart du XVIe siècle, Moscou, 1963.
2. S. A. Korf, La noblesse et son organisation corporative (1762-1855), St-Pé-
tersbourg, 1906 ; A. Romano vic-Slavatinskič, La noblesse en Russie, du début du
XVIIIe siècle à V abolition du servage, St-Pétersbourg, 1870 (2e éd., Kiev, 1912).
3. J. Blum, Lord and Peasant in Russia from the Ninth to the Nineteenth Century,
Princeton University Press, 1961. Nous ne pouvons entrer ici dans les controverses
112 NOBLES ET PAYSANS EN RUSSIE
lités de composition et d'érudition dont l'auteur avait fait preuve dans
ses études antérieures x.
Avant d'en venir au xvuie siècle, J. Blum décrit la formation pro
gressive de la grande propriété seigneuriale dans la Russie kiévienne.
Il constate que les paysans, tout en restant des hommes libres, tombent
de plus en plus sous la dépendance des propriétaires, surtout lorsqu'ils
entrent dans la catégorie des débiteurs insolvables (zákupy). En même
temps, par le jeu des immunités que les princes se résignent à leur accorder,
les féodaux laïques et ecclésiastiques tendent à s'affranchir de la dépen
dance envers l'État. A partir de l'invasion mongole, cette évolution se
poursuit de façon cahotique mais, en fait, dans une même direction :
la généralisation du servage 2.
Les circonstances économiques les plus contradictoires y coopèrent,
en favorisant toujours les plus puissants. En période de crise et de contrac
tion (la plus accentuée se place au tournant du xvie et du xvne siècles),
les propriétaires appauvris renforcent leurs exigences. En période d'ex
pansion et de commercialisation (xve siècle et début du xvie), ils cherchent
à accroître les profits de leurs ventes. Qu'il y ait abondance ou pénurie
de signes monétaires, ils aggravent toujours les charges qui pèsent sur
les tenanciers, en argent, en nature, et surtout en travail. Les conditions
politiques, quelles qu'elles soient, agissent dans le même sens. Lorsque
le souverain est faible et que l'administration est somnolente, les nobles
donnent libre cours à leur cupidité ; le système du hormliénié (du verbe
kormiť, nourrir) repose d'ailleurs sur le principe que les fonctionnaires
locaux se paient sur le dos des régions qu'ils administrent. Lorsque le
tsar est autoritaire et ambitieux, qu'il rêve d'un État moderne et conqué-
sur la définition et l'établissement progressif du servage. Disons seulement que J. Blum
voit avant tout dans le servage, considéré comme un élément non indispensable du
régime féodal, l'aspect institutionnel, même s'il n'a pas été fixé par des textes précis :
le paysan, soustrait à l'

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