Nourrir les dieux yoruba - article ; n°1 ; vol.66, pg 105-136
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Description

Journal des africanistes - Année 1996 - Volume 66 - Numéro 1 - Pages 105-136
Pour les Yoruba (sud-ouest du Nigeria) le sacrifice, qui permet la communication entre les mondes divin et humain, est la clef de voûte de leur religion. L'auteur a cherché, dans le corpus sacré d'Ifá, ce qui justifirait des préférences et des tabous dans les nourritures offertes aux divinités. L'analyse du corpus fait apparaître des corrélations intéressantes, à savoir que des motifs semblables auront des conséquences différentes qui se traduiront par la consommation ou non de l'objet : consommation en reconnaissance d'un bienfait ou en punition d'un méfait, et non consommation pour des motifs semblables mais inverses.
For the Yoruba (southwestern Nigeria) the sacrifice, which allows communication between the divine and human worlds, is the clef de voûte of their religion. The author has searched the sacred corpus of Ifá, for what could justify preferences and taboos in the food offered to the divinities. The analysis of the corpus shows interesting correlations, that is to say the same motives will have different consequences resulting in consumption or non consumption of the object.
32 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Sujets

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1996
Nombre de lectures 49
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Michka Sachnine
Nourrir les dieux yoruba
In: Journal des africanistes. 1996, tome 66 fascicule 1-2. pp. 105-136.
Résumé
Pour les Yoruba (sud-ouest du Nigeria) le sacrifice, qui permet la communication entre les mondes divin et humain, est la clef de
voûte de leur religion. L'auteur a cherché, dans le corpus sacré d'Ifá, ce qui justifirait des préférences et des tabous dans les
nourritures offertes aux divinités. L'analyse du corpus fait apparaître des corrélations intéressantes, à savoir que des motifs
semblables auront des conséquences différentes qui se traduiront par la consommation ou non de l'objet : consommation en
reconnaissance d'un bienfait ou en punition d'un méfait, et non consommation pour des motifs semblables mais inverses.
Abstract
For the Yoruba (southwestern Nigeria) the sacrifice, which allows communication between the divine and human worlds, is the
"clef de voûte" of their religion. The author has searched the sacred corpus of Ifá, for what could justify preferences and taboos in
the food offered to the divinities. The analysis of the corpus shows interesting correlations, that is to say the same "motives" will
have different consequences resulting in consumption or non consumption of the object.
Citer ce document / Cite this document :
Sachnine Michka. Nourrir les dieux yoruba. In: Journal des africanistes. 1996, tome 66 fascicule 1-2. pp. 105-136.
doi : 10.3406/jafr.1996.1097
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/jafr_0399-0346_1996_num_66_1_1097SACHNINE*
Michka
yoruba1
Nourrir les dieux
Résumé
Pour les Yoruba (sud-ouest du Nigeria) le sacrifice, qui permet la communication
entre les mondes divin et humain, est la clef de voûte de leur religion. L'auteur a
cherché, dans le corpus sacré d'Ifa, ce qui justifirait des préférences et des tabous dans
les nourritures offertes aux divinités. L'analyse du corpus fait apparaître des
corrélations intéressantes, à savoir que des motifs semblables auront des conséquences
différentes qui se traduiront par la consommation ou non de l'objet : consommation en
reconnaissance d'un bienfait ou en punition d'un méfait, et non pour
des motifs semblables mais inverses.
Mots-clefs
Yoruba, Nigeria, religion, corpus d'Ifa, divinité, sacrifice, nourriture, préférence,
tabou.
Abstract
For the Yoruba (southwestern Nigeria) the sacrifice, which allows communication
between the divine and human worlds, is the "clef de voûte" of their religion. The
author has searched the sacred corpus of Ifá, for what could justify preferences and
taboos in the food offered to the divinities. The analysis of the corpus shows
interesting correlations, that is to say the same "motives" will have different
consequences resulting in consumption or non consumption of the object.
Keywords
Yoruba, Nigeria, religion, corpus of Ifá, divinitie, sacrifice, food, preference, taboo.
* 1 INALCO Je remercie , 2 Christiane rue de Lille, Seydou 75007 pour Paris sa - Llacan lecture attentive du CNRS. et pour les suggestions et remarques
judicieuses qu'elle m'a faites.
Journal des Africanistes 66 (1-2) 1996 : 105-135 106 MlCHKA SACHNINE
La religion yoruba de même que le corpus sacré d'Ifa2 qui en est la clef de
voûte sont bien étudiés grâce aux travaux de chercheurs notamment yoruba et
anglo-saxons. Cette religion est caractérisée par l'existence d'un Dieu primordial
Olodùmarè entouré de nombreuses divinités, intermédiaires entre ce Dieu
créateur inaccessible (il n'a ni culte, ni prêtre, ni représentation), et les humains.
Le sacrifice3, (sous forme d'offrandes d'animaux, de nourritures et de boissons),
est au centre du système de croyances ; lui seul permet d'établir le contact entre
les mondes divin et humain et de maintenir ainsi un équilibre, toujours précaire,
entre les forces obscures et maléfiques et les forces bénéfiques constitutives de
l'existence. Plus encore, le sacrifice est l'unique recours offert à l'homme pour
agir, dans une certaine mesure, sur sa destinée. En effet, il est dit que l'homme,
avant de venir au monde, choisit "librement"4 ce que sera sa vie sur terre et que
ce choix est inaltérable. Pourtant, il lui est nécessaire, tout au long de sa vie,
d'accomplir les sacrifices par la médiation d'Ifa pour, soit maintenir sa "bonne"
destinée, soit éviter le pire prévu ou en adoucir les rigueurs.
La nature de ces sacrifices est identifiée grâce au système de divination (le
babaláwo en étant le médium) qui renvoit au corpus d'Ifa. Ce corpus, composé
de plusieurs milliers de vers, est divisé en 256 Odù "chapitre". Chacun
correspond à une figure divinatoire et à un texte portant le nom de Г Odù. Ces
Odù sont eux-mêmes divisés en versets, ese Ifá, d'une longueur variable et
caractérisés par une structure narrative fixe. Ils présentent de façon plus ou
moins elliptique une situation exemplaire dont l'articulation fondamentale est la
prescription d'un sacrifice à une ou plusieurs divinités désignées par le devin.
Cette situation met en scène un héros légendaire (divinité, homme, animal,
concept personnifié) confronté à un problème qu'il résoudra ou non selon qu'il
fera ou non les sacrifices prescrits. Le sacrifice, comme dans la plupart des
religions, a plusieurs fonctions : propitiatoire, expiatoire, purificatrice, votive,
etc.
2 Ifá désigne à la fois le dieu de la sagesse et de la divination, et le corpus de textes liés à cette
divination. Ces textes sont fondateurs de l'ensemble du système de croyances (cosmogonie,
mythologie, philosophie, éthique etc.) des Yoruba, apportant, dit-on, réponse à toute question.
Ils forment aussi la matière des différentes formes de productions littéraires de la société.
3Le terme yoruba ebo ne distingue pas entre sacrifice et offrande, qu'il s'agisse d'un animal
immolé (voire dans des temps plus anciens d'êtres humains) ou de mets préparés. En revanche
le terme ebo peut être déterminé, précisant ainsi la fonction du sacrifice ou de l'offrande. Tout
au long de cet article j'emploierai le terme "sacrifice" sachant qu'il inclut ce qui, dans d'autres
cultures, serait appelé "offrande".
4La tête,ori, symbolise cette destinée. Mais quand la personne à naître la choisit (et là le choix
est effectivement libre) dans le "magasin" des têtes, elle ne sait pas, en fait, si c'est une
"bonne" ou une "mauvaise" tête. L'apparence peut être trompeuse ! De plus, on dit qu'il y a fort
peu de "bonnes têtes". H est donc légitime de poser la question philosophique de la liberté du
choix puisque l'individu ne le fait pas en connaissance de cause. Cela dit, il y a un témoin et
c'est Orunmïlà dieu de la sagesse et de la divination ; ceci explique le recours à cette dernière.
Journal des Africanistes 66(1-2) 1996: 105-135 Nourrir les dieux yoruba 107
Cet article veut tenter de répondre à la question suivante : pourquoi les
divinités ont-elles des nourritures sacrificielles préférées et également des
nourritures taboues5 ? En effet, si la nature des sacrifices propres à chaque
divinité est bien identifiée, il n'y a pas eu, à ma connaissance, de recherche ni
sur les raisons de ces choix, ni sur ce qui pouvait bien les rendre spécialement
agréables ou désagréables à la divinité, et dans certains cas, absolument taboues.
Or, et telle fut mon hypothèse, s'il est vrai qu'Ifa est censé donner une
explication à toute chose, on devait pouvoir y trouver des Odù relatifs aux
sacrifices et justifiant des préférences et des interdits des divinités du panthéon
yoruba.
Lors d'une mission au Nigeria, l'été 1991, j'ai pu travailler avec Babalola
Fátóogún, babaláwo "devin" près d'Osogbo. Après quelques longues
discussions où je lui expliquai ce que je cherchais, il me dit qu'effectivement Ifá
parlait de "ces choses-là" et qu'il allait réfléchir aux Odù pouvant faire référence
aux nourritures sacrificielles des divinités. S'il put, pour quasiment toutes les
divinités, me dire ce qu'elles mangeaient, buvaient, quels animaux elles
préféraient et ce qu'elles ne consommaient pas, il ne put pas toujours en trouver
les justifications dans lia6. Néanmoins, il me récita un c

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