Quelques effets économiques du prêt à taux zéro
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Pour mesurer l'impact du prêt à taux zéro (PTZ) sur la demande de logement, un modèle utilisant des données provenant des enquêtes Logement 1996 et Patrimoine 1997 réalisées par l'Insee est estimé (cette estimation porte toutefois sur les effets du PTZ avant la récente modification de janvier 2005 étendant ce prêt à l'acquisition de logements anciens). Les résultats montrent que le prêt à taux zéro a bien un effet déclencheur sur l'accession à la propriété et que cet effet touche principalement les ménages les plus modestes parmi les accédants. La plupart de ces ménages seraient restés, en l'absence de l'aide, dans le logement qu'ils occupent en attendant d'accumuler l'épargne nécessaire à un apport personnel. En contrepartie, le PTZ souffre d'effets d'aubaine importants. 85 % des bénéficiaires dans une période donnée auraient tout de même choisi de déménager pour devenir propriétaires en l'absence du prêt à taux zéro. Le PTZ ne contribue pas nécessairement à l'amélioration générale de la qualité des logements neufs mis sur le marché. En l'absence de hausse des prix des logements induite par l'introduction du prêt à taux zéro, l'effet multiplicateur du dispositif sur l'investissement en logement résidentiel serait assez faible, de l'ordre de 1,3.

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Langue Français

Extrait

LOGEMENT
Quelques effets économiques
du prêt à taux zéro
Laurent Gobillon et David Le Blanc*
Pour mesurer l’impact du prêt à taux zéro (PTZ) sur la demande de logement, un modèle
utilisant des données provenant des enquêtes Logement 1996 et Patrimoine 1997 réalisées
par l’Insee est estimé (cette estimation porte toutefois sur les effets du PTZ avant la
récente modification de janvier 2005 étendant ce prêt à l’acquisition de logements
anciens). Les résultats montrent que le prêt à taux zéro a bien un effet déclencheur sur
l’accession à la propriété et que cet effet touche principalement les ménages les plus
modestes parmi les accédants. La plupart de ces ménages seraient restés, en l’absence de
l’aide, dans le logement qu’ils occupent en attendant d’accumuler l’épargne nécessaire
à un apport personnel.
En contrepartie, le PTZ souffre d’effets d’aubaine importants. 85 % des bénéficiaires
dans une période donnée auraient tout de même choisi de déménager pour devenir
propriétaires en l’absence du prêt à taux zéro. Le PTZ ne contribue pas nécessairement
à l’amélioration générale de la qualité des logements neufs mis sur le marché. En
l’absence de hausse des prix des logements induite par l’introduction du prêt à taux zéro,
l’effet multiplicateur du dispositif sur l’investissement en logement résidentiel serait
assez faible, de l’ordre de 1,3.
* Laurent Gobillon appartient à l’Institut national d’études démographiques (Ined) et David Le Blanc à l’Insee et à la
Banque Mondiale.
Les noms et dates entre parenthèses renvoient à la bibliographie en fin d’article.
ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N° 381-382, 2005 63ans beaucoup de pays développés, la pro- bre de ménages subissant effectivement les con-
priété du logement est encouragée, indi- traintes d’emprunt. L’impact du PTZ sur les prin-D
rectement ou directement sous forme d’aides ou cipales marges économiques affectées par son
de subventions. Ces encouragements peuvent introduction est ainsi évalué. (1)
prendre des formes multiples. Ils peuvent con-
sister en des dispositions fiscales qui rendent la
propriété attractive (Rosen, 1985, pour une des- Le Prêt à taux zéro en Francecription du cas des États-Unis), ou en des dispo-
sitifs destinés à inciter les prêteurs privés à prêter
à des catégories de ménages défavorisés, en pre- a propriété a toujours suscité l’attention des
nant une partie du risque de crédit pour les prêts gouvernements successifs depuis laL
accordés. C’est le cas des fonds de garantie à deuxième guerre mondiale. En 1977, une
l’accession qui fonctionnent dans de nombreux réforme du programme de subventions au loge-
pays. Les aides peuvent aussi prendre la forme ment a créé des subventions directes aux nou-
de prêts à des conditions de taux favorables par veaux propriétaires, sous la forme d’un système
rapport aux conditions de marché pour des caté- de prêts aidés, appelés PAP (prêt d’accession à la
gories de ménages dont les revenus ou l’apport propriété) et PC (prêt conventionné). Entre 1977
personnel sont trop faibles pour rembourser un et 1984, presque 60 % des nouveaux accédants
prêt classique. Enfin, elles peuvent prendre la ont eu recours à un PAP ou à un PC. Au cours de
forme de subventions directes, sous forme de ces années, le taux de propriété a nettement aug-
don ou de prêt accordé au ménage au moment menté (de 45 % en 1970 à 54 % en 1988). Le suc-
où il boucle son plan de financement. Cette aide cès du système peut être attribué au fait que pen-
directe sert alors de complément à l’apport per- dant cette période, l’inflation élevée engendrait
sonnel. La justification de cette dernière forme des taux d’intérêt réels négatifs. À partir de 1984,
d’aide est l’existence de contraintes d’emprunt, cette situation a changé. La politique économi-
qui empêchent les ménages à revenus moyens ou que, alors centrée sur la réduction de l’inflation,
faibles d’accéder à la propriété. Une telle aide, le a fait passer celle-ci de 11 % à 4 % en 1987 et
prêt à taux zéro (PTZ par la suite), a été intro- l’inflation s’est depuis lors stabilisée à un niveau
duite en France en 1995, sous forme de prêt sans très bas. Dans le même temps, les taux d’intérêt
intérêt et de montant limité accordé aux candi- des PAP et des PC ne sont pas descendus en des-
dats à l’accession (1) Si des études présentant sous de 7 ou 8 %. Les taux d’intérêt réels ont
les principales caractéristiques et ordres de ainsi augmenté brusquement. Ceci, ajouté à des
grandeur du PTZ existent (Thomas et Grillon, types de prêts inadaptés à cette situation (comme
2001, par exemple), les effets de l’introduction par exemple les prêts à remboursements crois-
de cette aide sur le comportement des ménages sants), a provoqué à la fin des années 1980 une
et plus généralement sur le marché du logement vague de défauts de remboursement d’accédants
n’ont pas fait l’objet, à ce jour, d’investigations ayant obtenu des prêts à des taux très élevés. En
quantitatives reposant sur des modèles de com- réaction, les prêteurs privés sont devenus plus
portement. restrictifs sur l’attribution des prêts (Lacroix,
1995). Dans ce contexte, les contraintes
d’emprunt devenaient l’une des principales bar-Cet article se propose tout d’abord d’estimer un
rières à l’accession à la propriété pour les famillesmodèle économétrique dérivé d’un modèle de
à faible revenu. Fin 1995, le PAP, moribond, a étémaximisation d’utilité décrivant la mobilité (au
remplacé par le prêt à taux zéro (PTZ). Le dispo-sens de changement de logement) et le choix de
ersitif est applicable depuis le 1 octobre 1995 etstatut d’occupation, c’est-à-dire le choix entre
s’est substitué également aux avantages fiscauxpropriété et location. Ce modèle prend explici-
attachés à l’accession à la propriété (exonérationtement en compte les contraintes d’emprunt et
de longue durée des PAP, déductibilité des inté-reflète donc la manière dont les arbitrages des
rêts d’emprunt des impôts). Le PTZ ne peutménages sont affectés par ces contraintes. Le
d’ailleurs pas être cumulé avec les anciens PAP,modèle est estimé sur des données antérieures à
les anciennes primes à l’amélioration de l’habitatl’introduction du PTZ. Les paramètres du modèle
(PAH), les subventions de l’Agence nationalesont ensuite utilisés pour simuler l’introduction
du PTZ dans notre échantillon initial. La compa-
raison des valeurs prédites pour le modèle avant
et après l’introduction du PTZ permet d’en éva- 1. Au début 2005, les pouvoirs publics ont revalorisé les paramè-
luer les effets sur des variables comme les flux tres du barème du PTZ et ouvert le dispositif à l’acquisition d’un
logement ancien sans quotité minimale de travaux. L’enquêted’accession à la propriété, la valeur des logements
Logement ayant été réalisée avant cette refonte, l’évaluation pré-
achetés par les nouveaux propriétaires et le nom- sentée ici porte sur l’ancien dispositif.
64 ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N° 381-382, 2005Encadré 1
LES PRINCIPALES CARACTÉRISTIQUES DU PRÊT À TAUX ZÉRO (PTZ)
C’est le décret n˚ 95-1064 du 29 septembre 1995 qui a Conditions de ressources
créé cette nouvelle aide de l’État à l’accession à la pro- et plafonnement du montant
priété pour l’acquisition d’une résidence principale,
Le barème du prêt à taux zéro distingue plusieurs tran-sous forme d’avance remboursable sans intérêt. Le
ches de revenu imposable qui déterminent les carac-décret n˚ 97-1000 du 30 octobre 1997 a restreint
téristiques du remboursement du prêt (cf. tableau A).l’acc&

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