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Repenser les marchés des dérivés de gré à gré pour garantir la stabilité fi nancièreCHRISTIAN NOYERGouverneurBanque de Francees perturbations subies par les instruments Les pertes très importantes subies par le secteur dérivés de gré à gré (over-the-counter — OTC) fi nancier et la nécessité de faire appel à l’argent Lau cours de la crise fi nancière ont incité les public pour sauver des institutions proches de la régulateurs à trouver des solutions pour restaurer le faillite ont brutalement rappelé que le risque avait été bon fonctionnement de ces marchés. L’innovation progressivement négligé ou, tout du moins, qu’il avait fi nancière s’est retrouvée au cœur de la crise des été pris en compte et géré de façon inappropriée. subprime, dans un contexte de mauvaises pratiques Un consensus s’est donc fait jour parmi les autorités sur certains segments de prêts immobiliers et d’octroi et les autres parties concernées afin d’essayer excessif de prêts par des entités non régulées. De fait, d’imposer un changement sur le marché des dérivés les années précédant la crise ont été caractérisées de gré à gré avec pour objectif de lui faire adopter par la création et le développement de produits autant que possible les caractéristiques techniques fi nanciers « structurés », technique qui consistait et les infrastructures des marchés organisés. Il s’agit à élaborer des instruments fi nanciers en utilisant là d’un défi très important puisque les transactions différents « ...

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Banque de France • Revue de la stabilité fi
nancière • N° 14 – Produits dérivés – Innovation fi
nancière et stabilité • Juillet 2010
I
Repenser les marchés des dérivés de gré à gré
pour garantir la stabilité fi
nancière
C
HRISTIAN
NOYER
Gouverneur
Banque de France
L
es perturbations subies par les instruments
dérivés de gré à gré (
over-the-counter
— OTC)
au cours de la crise fi
nancière ont incité les
régulateurs à trouver des solutions pour restaurer le
bon fonctionnement de ces marchés. L’innovation
fi
nancière s’est retrouvée au coeur de la crise des
subprime
, dans un contexte de mauvaises pratiques
sur certains segments de prêts immobiliers et d’octroi
excessif de prêts par des entités non régulées. De fait,
les années précédant la crise ont été caractérisées
par la création et le développement de produits
fi
nanciers « structurés », technique qui consistait
à élaborer des instruments fi
nanciers en utilisant
différents « sous-jacents » dont les prêts
subprime
.
La crise a tout d’abord touché les produits structurés
qui contenaient partie de ces prêts
subprime
, puis
s’est étendue, par contagion, à l’ensemble des
produits structurés en raison des doutes liés à leur
véritable composition. Si le recours à la titrisation
a entraîné la prolifération de produits structurés
très complexes (CDO d’ABS, CDO de CDO), il a
également contribué à l’émergence d’un nouveau
business model
pour les banques, qui ont abandonné
leur rôle traditionnel d’«octroi et de détention
du crédit » pour une nouvelle fonction d’« octroi
et de cession du crédit ». L’innovation fi
nancière
et notamment les dérivés de crédit ont contribué à
ce phénomène, en soutenant la croissance excessive
du crédit et l’accumulation de risques de crédit,
avec pour preuve l’accumulation par l’ensemble du
système fi
nancier d’importantes pertes et positions à
effet de levier. En outre, le manque de transparence
des marchés a certainement contribué à renforcer
cette prise de risques excessifs et a accentué les
effets de contagion entre les intervenants de marché.
AIG et Lehman Brothers, dans des domaines
différents, illustrent les risques systémiques inhérents
à une utilisation sans limite des produits dérivés.
Les pertes très importantes subies par le secteur
fi
nancier et la nécessité de faire appel à l’argent
public pour sauver des institutions proches de la
faillite ont brutalement rappelé que le risque avait été
progressivement négligé ou, tout du moins, qu’il avait
été pris en compte et géré de façon inappropriée.
Un consensus s’est donc fait jour parmi les autorités
et les autres parties concernées afin d’essayer
d’imposer un changement sur le marché des dérivés
de gré à gré avec pour objectif de lui faire adopter
autant que possible les caractéristiques techniques
et les infrastructures des marchés organisés. Il s’agit
là d’un défi
très important puisque les transactions
sur dérivés demeurent largement négociées de gré à
gré tandis que les dérivés négociés sur les marchés
organisés ne représentent que 10 % des transactions.
Le consensus auquel sont parvenus les dirigeants du
G20 à Pittsburgh et qui a été réaffi
rmé récemment
à Toronto est important. La mise en place
d’infrastructures résilientes pour les dérivés de gré
à gré représente une priorité essentielle. Elle doit
permettre d’accroître la transparence et d’améliorer
la gestion du risque de contrepartie.
Si la diffi
culté réside dans les détails, le principal défi
pour les régulateurs consiste dorénavant à fi
naliser
les règles et les incitations qui permettront d’atteindre
ces objectifs. Nous devons trouver le juste équilibre
afin d’inciter suffisamment les intervenants de
marché à mieux gérer leurs risques tout en évitant de
faire obstacle à l’innovation fi
nancière ou de réduire
les incitations à couvrir les risques économiques à
un coût raisonnable.
Les dérivés de gré à gré sont des contrats négociés
de façon bilatérale, conçus pour isoler et transférer
le risque de marché ou de crédit d’une contrepartie
É
TUDES
Christian Noyer : « Repenser les marchés des dérivés de gré à gré pour garantir la stabilité fi
nancière
»
II
Banque de France • Revue de la stabilité fi
nancière • N° 14 – Produits dérivés – Innovation fi
nancière et stabilité • Juillet 2010
vers une autre. Étant donné qu’ils sont négociés
de façon bilatérale, ils sont élaborés sur mesure
et s’adaptent précisément aux besoins spécifi
ques
de couverture. Ils répondent ainsi à d’importants
besoins économiques et de gestion du risque.
Ils encouragent également l’innovation fi
nancière et
contribuent à la complétude des marchés fi
nanciers
1
.
La réglementation doit être conçue de façon à ne
pas porter atteinte à ces avantages économiques et
fi
nanciers. Toutefois, des lacunes dans la conception
et l’infrastructure de ces marchés ont entraîné un
usage abusif de ces instruments. Il faut donc s’attacher
à remédier à ces imperfections afi
n de renforcer
l’effi
cacité et l’égalité de traitement sur ces marchés.
La question du manque de transparence des marchés
de dérivés de gré à gré a été mise en lumière
lors de la crise financière. La communication
très limitée d’informations sur ces marchés non
réglementés a parfois entraîné une surestimation
des risques et a accentué le climat d’incertitude, les
contreparties n’ayant pas d’information sur leurs
expositions mutuelles
2
. Il faut toutefois reconnaître
que les informations relatives aux contreparties
individuelles ne sont généralement pas non plus
toujours disponibles sur les marchés organisés
mais cela ne constitue pas un motif d’inquiétude
puisque ces marchés ont développé des structures
permettant d’atténuer les risques de contrepartie.
Cette situation a provoqué une hausse indifférenciée
de la perception au risque de contrepartie parmi les
institutions fi
nancières consécutivement à la faillite
de Lehman Brothers. Le manque d’informations
a également obéré la capacité des régulateurs et
intervenants de marché à se rendre compte que
certaines contreparties avaient accumulé des
expositions systémiques. Le cas d’AIG sur le marché
des
credit default swaps
(CDS) en constitue un exemple
typique. Plus récemment, des inquiétudes relatives
aux déterminants des
spreads
de CDS souverains
ont créé des soupçons de manipulation sur ce
compartiment du marché, largement caractérisé par
une faible liquidité. En effet, même si la demande de
CDS souverains est forte, les investisseurs cherchant
à se couvrir contre le risque de crédit, la liquidité
et l’activité de négociation peuvent parfois être
extrêmement faibles. Certains produits dérivés de
gré à gré (les CDS par exemple) ou certains types de
transactions (les ventes à découvert) sont toutefois
susceptibles d’accentuer les variations de prix ou de
créer de l’instabilité, évolutions préjudiciables à la
fois aux émetteurs et aux investisseurs. Il peut donc
être tentant d’interdire ou de limiter drastiquement
ce type d’opérations, et nous avons d’ailleurs vu
que certains pays formulaient des propositions dans
ce sens. Il est essentiel de déterminer dans quelle
mesure ces inquiétudes sont fondées et si des mesures
« appropriées » sont nécessaires
3
. L’effi
cacité de telles
mesures réglementaires n’est pas certaine, et, pire,
ces mesures pourraient s’avérer contreproductives.
En effet, elles risquent d’être ineffi
caces parce que
les prix des titres ne se forment pas dans un cadre
national mais sur les marchés mondiaux. Ce qui ne
serait pas possible à Paris ou à Francfort pourrait
encore l’être à Londres ou à New York, par exemple.
Elles risquent également d’être contreproductives car
elles pourraient détourner certaines activités de nos
marchés au profi
t d’autres et altérer considérablement
la liquidité des titres visés par la restriction, dans la
mesure où les investisseurs étrangers pourraient les
délaisser pour se tourner vers d’autres opportunités.
Plutôt que d’interdire et inciter à délocaliser certaines
activités ou à contourner ces règles, il est préférable
de créer des conditions attractives et de superviser
plus effi
cacement. Cela peut être fait :
Premièrement, en intégrant les marchés de gré à gré
dans des infrastructures de marché réglementées
et supervisées telles que les plates-formes de
négociation, les référentiels centraux de données
et les contreparties centrales. Cela signifi
e que tous
les CDS souverains de la zone euro devront être
compensés par une contrepartie centrale située
dans cette zone. Accessoirement, cela nécessite une
plus grande normalisation de ces CDS
single name
.
Deuxièmement, en renforçant la transparence,
ex ante
comme
ex post
, afi
n d’améliorer notre
compréhension du mécanisme de formation du
prix et notre connaissance des positions nettes
réelles des institutions fi
nancières.
1
Cf. Das, Tett, dans cette publication
2
Cf. Russo, dans cette publication
3
Cf. Anderson, Boone, Fransolet et Willeman, Coudert et Gex, Duffi
e, dans cette publication
É
TUDES
Christian Noyer : « Repenser les marchés des dérivés de gré à gré pour garantir la stabilité fi
nancière
»
Banque de France • Revue de la stabilité fi
nancière • N° 14 – Produits dérivés – Innovation fi
nancière et stabilité • Juillet 2010
III
Enfi
n, en améliorant la gestion du risque par les
agents actifs sur ces marchés et en s’assurant que
ces pratiques sont compatibles avec leur profi
l de
risque. En fait, il faudra probablement instaurer une
supervision spécifi
que des vendeurs de protection.
L’
INTÉGRATION
DES
MARCHÉS
DE
GRÉ
À
GRÉ
DANS
DES
INFRASTRUCTURES
DE
MARCHÉ
RÉGLEMENTÉES
ET
SUPERVISÉES
Nous devons consacrer nos efforts à la mise en oeuvre
intégrale et rapide des engagements du G20, qui ont
renforcé et élargi le périmètre de la réglementation
et de la surveillance des dérivés de gré à gré.
Tous les contrats de produits dérivés de gré à gré
normalisés devront être négociés sur des plates-formes
d’échanges ou
via
des plates-formes de négociation
électronique, selon le cas, et compensés par des
contreparties centrales d’ici la fi n 2012 au plus tard.
Le recours obligatoire aux contreparties centrales
pour les contrats suffi
samment normalisés et liquides
pourrait considérablement réduire (sans l’éliminer
toutefois) le risque systémique inhérent aux produits
dérivés en diminuant les risques de contrepartie
et de remplacement. Comme la contrepartie
centrale s’interpose entre les deux contreparties, la
défaillance de l’un des membres de la chambre de
compensation n’affecte pas directement les autres
membres, qui continuent d’effectuer leurs opérations
avec la chambre de compensation. Ce système
permet en fait de réduire le risque de contagion en
cas de défaillance d’un opérateur. Si leur mise en
place et leur gestion des risques sont satisfaisantes,
les contreparties centrales pourraient limiter les
expositions excessives en exigeant des vendeurs de
protection qu’ils fournissent des marges initiales
et des marges de variation appropriées. Enfi
n, la
normalisation des contrats qui serait exigée pour leur
permettre d’être éligibles à la compensation centrale
pourrait accroître leur liquidité tout en écartant le
risque de litiges liés aux différences de valorisation.
Toutefois, le risque de contrepartie ne disparaît jamais.
Comme les chambres de compensation concentrent
les risques, leur fonctionnement doit faire l’objet
d’une surveillance appropriée afi
n de garantir qu’elles
sont suffi
samment capitalisées, qu’elles observent des
pratiques robustes de gestion des risques et qu’elles
respectent des normes internationales élevées en
matière de gouvernance
4
. Les contreparties centrales
ne doivent pas non plus dépendre de la fourniture
de liquidités par d’autres intermédiaires fi
nanciers.
À cet égard, l’accès à la liquidité de la banque centrale
est essentiel. En fait, étant donné leur importance
systémique, une supervision solide et renforcée est
plus que jamais nécessaire. Comme l’a réaffi
rmé
le Conseil des gouverneurs de l’Eurosystème
5
,
l’infrastructure permettant la compensation des
titres et des produits dérivés libellés en euros
doit se situer dans la zone euro. Cela se justifi
e
par la nécessité de garantir l’exercice concret des
responsabilités fondamentales de l’Eurosystème
en matière de politique monétaire et de stabilité
fi
nancière
6
. Cet impératif est d’autant plus important
que l’euro est la principale monnaie de libellé des
contrats sur produits dérivés de gré à gré
7
. Au niveau
international, le Conseil de stabilité fi
nancière, le
Comité sur les systèmes de paiement et de règlement,
l’Organisation internationale des commissions de
valeurs et le Comité de Bâle travaillent en étroite
collaboration afi
n d’améliorer les normes de gestion
du risque applicables aux infrastructures des marchés
fi
nanciers et de défi
nir des incitations prudentielles
effi
caces à utiliser des contreparties centrales solides.
Il est essentiel de créer des incitations en vue
d’encourager les intervenants de marché à effectuer
la compensation auprès des contreparties centrales.
Les régulateurs sont confrontés à la tâche délicate
consistant à trouver une approche équilibrée afi
n que
les exigences en termes de garanties ne soient ni trop
strictes, pour inciter au recours à la compensation,
ni trop laxistes, pour réduire efficacement les
risques. Comme le soulignent nombre d’auteurs
dans la revue, et ce, à juste titre, les contreparties
centrales ne constituent pas la panacée pour
l’ensemble des produits et des marchés. Tous les
instruments ne pourront pas être compensés car
certains continueront à être traités de façon bilatérale
en raison de leur manque de liquidité ou de leurs
caractéristiques sur mesure
8
. Par conséquent, la
compensation bilatérale doit être envisagée comme
4
Cf. Cont, Zigrand, dans cette publication
5
Cf. les décisions correspondantes du Conseil des gouverneurs du 19 décembre 2008 et du 16 juillet 2009
6
Cf. Russo, dans cette publication
7
Cf. l’étude de la BCE intitulée
OTC Derivatives and Central Clearing: Can All Transactions Be Cleared?,
septembre 2009
8
Cf. Hull, dans cette publication
É
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Christian Noyer : « Repenser les marchés des dérivés de gré à gré pour garantir la stabilité fi
nancière
»
IV
Banque de France • Revue de la stabilité fi
nancière • N° 14 – Produits dérivés – Innovation fi
nancière et stabilité • Juillet 2010
un complément nécessaire de la compensation
centrale
9
. C’est pourquoi il est également important
que des exigences claires soient imposées aux
entreprises engagées dans une compensation
bilatérale afin de s’assurer qu’elles suivent des
pratiques saines de gestion du risque, et notamment
la confirmation électronique des transactions,
la réconciliation des portefeuilles, les appels de
marge quotidiens et la collatéralisation. Dans le
même temps, des exigences de fonds propres plus
strictes doivent être imposées à la compensation
bilatérale.
Outre les instruments couverts, les catégories de
participants soumis à la compensation obligatoire
restent à définir. Les sociétés non financières
demandent à être exemptées de la compensation
centrale obligatoire. À l’heure actuelle, la plupart
des entreprises ne sont pas tenues de constituer
fréquemment des appels de marges. Leur
présumé manque de capacités opérationnelles
ne leur permettrait pas de gérer ce processus
quotidiennement, et ceci générerait des besoins
de liquidités supplémentaires auxquels elles ne
pourraient faire face. Répondre aux appels de marge
entraînerait un gel de leurs ressources en liquidité qui
serait préjudiciable au fi
nancement de leur activité
industrielle et commerciale et entraînerait une
diminution de leurs investissements. Cela pourrait
également augmenter le coût de la couverture au
point de les dissuader de couvrir suffi
samment
leurs risques. Toutefois, la capacité des sociétés non
fi
nancières à intervenir sur les marchés fi
nanciers
varie considérablement d’une entreprise à l’autre et
nous devons rester vigilants car certaines d’entre elles
gèrent des activités de négociation très importantes.
Par conséquent, une exigence de compensation
uniforme n’est certainement pas pertinente pour
l’ensemble des entreprises actives sur les marchés de
gré à gré ; d’autres approches, permettant par exemple
des exemptions en dessous de certains seuils, sont à
l’étude et sont acceptables dès lors qu’elles ne vont pas
jusqu’à l’exemption pure et simple de l’ensemble des
sociétés non fi
nancières. En effet, la crise a montré
que les positions sur dérivés de gré à gré prises par
certains de ces intervenants pouvaient avoir une
incidence signifi
cative sur la stabilité fi
nancière.
R
ENFORCER
LA
TRANSPARENCE
Tous les contrats de produits dérivés de gré à
gré doivent faire l’objet d’une notifi cation aux
référentiels centraux de données afi n de renforcer
la transparence sur ces marchés.
Des données plus
précises et plus facilement accessibles permettent une
meilleure gestion du risque. À cet effet, les exigences
de déclaration ne doivent pas se limiter aux contrats
faisant l’objet d’une compensation et doivent permettre
l’accès à l’information aux intervenants de marché
comme aux régulateurs. Il est évident que ces deux
catégories d’agents ont des besoins très différents en
matière d’information. Alors qu’il pourrait suffi
re de
fournir une information globalisée sur les transactions
et les positions aux intervenants de marché, il
faudrait accorder aux régulateurs (banques centrales,
superviseurs bancaires et des marchés) un libre accès
à toutes les données individuelles dont ils ont besoin
pour assurer une surveillance effi
cace, sur les plans
macroprudentiel et microprudentiel, quelle que soit
la localisation du référentiel central de données
10
.
Pour rapprocher ces marchés des marchés organisés,
la transparence
ex post
ne suffi
t pas et une plus grande
transparence
ex ante
est indispensable pour certaines
classes d’actifs. Il est vrai que des services en ligne
comme ceux de Bloomberg et Reuters diffusent les
prix des intermédiaires au marché ; toutefois, le niveau
de détails, la fréquence et la fi
abilité des prix affi
chés
varient largement entre les
swaps
de taux d’intérêt ou
les
swaps
de change classiques, dont la valorisation
est facilement disponible de manière quasi continue,
et certains CDS pour lesquels, dans le meilleur des
cas, un seul prix est disponible pour un jour précis.
Le caractère « sur mesure » de certaines transactions
peut expliquer la réticence à diffuser les prix de
façon régulière ; cependant, toutes les transactions
n’atteignent pas un tel niveau de spécifi
cité et il est à
l’évidence nécessaire d’inciter le secteur à atteindre
rapidement un niveau comparable de transparence
ex ante
. Plus de transparence en amont de la transaction
accroîtra la concurrence entre les teneurs de marché,
contribuant ainsi à l’effi
cacité de la formation des prix
et réduisant l’asymétrie d’information. Cela favorisera
la confi
ance du marché et conduira probablement à
une hausse des volumes négociés et de la liquidité.
9
Cf. Wellink, dans cette publication
10 Cf. Jouyet, dans cette publication
É
TUDES
Christian Noyer : « Repenser les marchés des dérivés de gré à gré pour garantir la stabilité fi
nancière
»
Banque de France • Revue de la stabilité fi
nancière • N° 14 – Produits dérivés – Innovation fi
nancière et stabilité • Juillet 2010
V
L’
AMÉLIORATION
DE
LA
GESTION
DU
RISQUE
Il convient également de traiter avec beaucoup
d’attention les pratiques de gestion du risque sur
les marchés des dérivés de gré à gré. Même si le
fonctionnement de ces marchés s’est amélioré
sous l’impulsion conjointe de la profession et des
régulateurs, de nombreuses questions restent non
résolues à ce jour. Le risque de contrepartie constitue
une faiblesse fondamentale du marché des dérivés
de gré à gré et une source de risque systémique.
La pratique de la compensation bilatérale et de la
collatéralisation des dérivés à payer et à recevoir pour
un portefeuille donné réduit les pertes directes de
contrepartie en améliorant le taux de recouvrement
en cas de défaillance. Cependant, la cohérence
des pratiques de gestion du risque doit encore être
renforcée et harmonisée, car les contreparties les
mieux notées et la plupart des entreprises ne sont pas
tenues par leurs contreparties de constituer des marges.
En outre, la collatéralisation ne suffi
t pas toujours à
éliminer les expositions au risque de contrepartie,
notamment pour les positions de CDS, en raison
du phénomène de
jump-to-default
. Lorsque l’entité
de référence d’un CDS fait brusquement défaut,
la hausse ponctuelle des
spreads
excède largement
les appels de marges calculés sur la base de la
valeur de marché antérieure du contrat, laissant
ainsi l’acheteur de protection fortement exposé au
risque de contrepartie du vendeur.
Il est également essentiel d’améliorer la gestion du
risque par les agents actifs sur ces marchés et de
s’assurer que ces pratiques sont compatibles avec leur
profi
l de risque. Dans le cas des CDS, le problème
ne concerne pas nécessairement les acheteurs, qui
supportent en défi
nitive des risques limités, mais
plutôt les vendeurs. En fait, il faudra probablement
instaurer une supervision spécifi
que des vendeurs de
protection et s’assurer que les acheteurs de protection
ont effectivement mis en place des dispositifs
suffi
sants en matière de gestion du risque.
La déclaration du G20 de Pittsburgh indique une
direction et une échéance claires. Notre défi
consiste
désormais à préciser les règles et à les mettre en
oeuvre. Ces règles ne devront pas seulement avoir pour
objectif de réguler les instruments, mais également
de modifi
er le comportement des intervenants de
marché. Cette démarche est décisive pour améliorer
la gestion du risque sur les marchés de dérivés.
Grâce à des infrastructures de marché plus solides et
à une transparence accrue, nous serons en mesure de
garantir que les dérivés de gré à gré apportent une
contribution plus sûre au fi
nancement de l’économie.
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