Un étudiant tchèque à l Université de Paris au XIVe siècle - article ; n°1 ; vol.24, pg 143-170
29 pages
Français

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris

Un étudiant tchèque à l'Université de Paris au XIVe siècle - article ; n°1 ; vol.24, pg 143-170

-

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus
29 pages
Français
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus

Description

Revue des études slaves - Année 1948 - Volume 24 - Numéro 1 - Pages 143-170
28 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Sujets

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1948
Nombre de lectures 22
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Monsieur Jacques Le Goff
Un étudiant tchèque à l'Université de Paris au XIVe siècle
In: Revue des études slaves, Tome 24, fascicule 1-4, 1948. pp. 143-170.
Citer ce document / Cite this document :
Le Goff Jacques. Un étudiant tchèque à l'Université de Paris au XIVe siècle. In: Revue des études slaves, Tome 24, fascicule 1-
4, 1948. pp. 143-170.
doi : 10.3406/slave.1948.1474
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/slave_0080-2557_1948_num_24_1_1474UN ÉTUDIANT TCHÈQUE
À L'UNIVERSITÉ DE PARIS
AU XLV* SIÈCLE,
PAR
JACQUES LE GOFF.
Charles IV, dans la Charte de fondation de l'Université de
Prague du 7 avril 1 348, dit des habitants de la Bohême qu'ils
étaient « affamés de savoir » (1). Ce n'est pas là une formule. Prague
était une ville de vieille tradition enseignante. Saint Venceslas déjà
passait pour un des princes les plus instruits de son temps, et les
légendes qui nous retracent sa vie font allusion à un prêtre qui lui
aurait appris le latin, tandis que par ailleurs il aurait reçu une fo
rmation religieuse et littéraire slave , héritage des apôtres Cyrille et
Méthode.
A partir du xi* siècle, la langue slave et l'influence byzantine
reculent devant les progrès de la colonisation allemande et de ľin-
fluence romaine. La Bohême entre dans le cadre de l'Europe
romane, cependant, que la tradition slave demeure latente, prête à
de futures résurgences.
Ces transformations ne signifient pas pour autant une éclipse de
la culture en Bohême. De saint Vojtech (Adalbert) et de saint
Procope jusqu'au xiv" siècle plusieurs témoignages , bien que vagues ,
fragmentaires et discontinus, nous permettent de penser qu'il veut
à Prague une tradition enseignante ininterrompue^. Auprès de la
cathédrale, à l'ombre des cloîtres, il y avait des écoles. Au xiii6 siècle ,
en application d'une décision du concile du Latran (121 5),
Ш « . . .fidèles nostri regnicole qui scienciarum fructus indensinenter esuriunt»
(Monumenta Universitati» Pragemit, II, 1, p. я a U).
(*) L'enseignement donné par le Studium partieulare , dont il est parlé ci-après,
fut toutefois interrompu pour quelques années en 12 48, année où, nous dit une
source, «studium Prage periit» (Annal^Pragetu. in Mon. Germ.r IX, p. 17a). í

1Д4 JACQUES LE GOFF.
l'évêque de Prague fondait un Studium particulare qui dispensait
un enseignement assez solide pour que des étudiants des pays
voisins vinssent le fréquenter W. Le roi Venceslas II essaya enfin
de fonder une université, mais son projet rencontra l'opposition
de la noblesse et dut être abandonné^.
Le Studium particulare de Prague conférait des titres qui n'étaient
valables que pour la Bohême. Les Tchèques qui désiraient recevoir
une instruction plus achevée et conquérir des grades universitaires
valables pour tout le monde catholique devaient aller à l'étranger.
Ici encore, une suite remarquable de documenfs nous éclaire sur
ce pèlerinage des Tchèques aux sources de la science médiévale.
Et, si nous voyons apparaître d'abord le nom de Liège, si ensuite
les universités italiennes (Padoue et Bolçgne notamment) reçoivent
la visite de nombreux Tchèques, très tôt Paris est mentionné comme
le principal des pôles d'attraction vers lesquels est entraînée la
jeunesse tchèque avide de savoir. Le premier chroniqueur tchèque,
Kôsmas, en un passage célèbre, nous montre le retour glorieux
dans leur patrie des jeunes érudits tchèques qui sont allés satisfaire
à Paris leur soif intellectuelle (3). Les matricules de l'Université de
Paris à ses débuts n'ont pas été conservés. Mais des noms d'étu
diants tchèques qui la fréquentaient depuis 11 ho cřnviron ont pu
être recueillis çà et là, et déjà Tadra, à la fin du siècle dernier,
avait pu dresser une liste qui comprenait une cinquantaine de per
sonnes, pour la plupart de réputation notable (4).
Quand Pierre, abbé du monastère de Zbraslav, rentre de France
en i334 et commence à rédiger sa chronique, il s'écrie:
О felix terra, cui pax est nulláqueguerra,
Est tibi Francia summa 'potencia , copia rerum ,
non violencia, sed sapiencia, paxque dieram (5).
...
О Cf. notamment Epistoła ad magistrům Ulricum schol. Vienn. , ap. Pez , Thesau
rus Anecdotorum novissimus, І, і. p. 629.
í2'. Cf. Chronicon aulae regiae in Fontes rerum austriacarum , VIII, pp. i3o-j Зі.
(3) «Juvenes... ingenio acutos et in artium artibus ąrgutos, qui nuper ad
magnam mensám dominae philosophiae delitiosis pásti epùlis , et exhaustis totius
Franciae thesauris novi philosophi redeunt» [Fontes rerum bohemicarum, II, pp.
.:..■-.' i94-ł95)- , . .(*) F. Tadra, Kulturní styky Cech s cizinou až do válek husitských, Praha, 1897,
pp. 26З-254. Cf. également Al. Budinsky, Die Universitäí Paris und die Fremdem an
derselben im Mittelalter, Berlin. 1876, pp. 226-2ЗА.
(s) Fontes rerum bohemicarum, IV, p. З21. ., •
ÉTUDIANT TCHÈQUE À L'UNIVERSITE DE PARIS AU XIV* SIECLE. 1Д5 UN
Et encore :
vidi Pary sluš maximám huius mundi sapienciam (1).
C'est ainsi que l'exemple de l'illustre Université, la plus vieille
de l'Europe, a exercé son prestige sur. les Tchèques et leur a inspiré
l'ambition de fonder à Prague un foyer à son image.
C'est en effet sur le modèle parisien que Venceslas II conçoit
son projet. Le chroniqueur PřibikPulkava zRadenína en témoigne
expressément (2).
D'autres raisons, personnelles celles-là, s'ajoutèrent à ces rai
sons générales pour décider Charles IV à donner l'Université de
Paris en exemple à la nouvelle université enfin créée à Prague en
1З/І8. Beneš Krabice z Weitmile l'indique dans sa chronique (3).
Ce n'était pas seulement une formule, courante alors dans les
chartes de fondation d'universités, que Charles IV employait lors
qu'il déclarait que les maîtres et élèves du nouveau Studium gene
rale devaient jouir des mêmes privilèges que ceux qui fréquentaient
les Universités de Paris et de Bologne W. C'était une référence pré
cise à ses souvenirs de jeunesse. Et c'est encore l'exemple de Paris
que Venceslas IV invoquera quand, par le fameux décret de
Kutná Hora, il modifiera en 1U09 l'organisation intérieure de
l'université (5).
* *
C'est qu'en effet la fondation d'une université à Prague ne
détourna pas du chemin de Paris les plus ambitieux au moins des
étudiants tchèques. En 1З62, un document de la nation anglaise
de l'université parisienne cite les Tchèques parmi les membres de
ce groupement^. Les étudiants tchèques se trouvent encore fré-
W Ibidem.
.W Fontes rerum bohemicarum, IV, p. З17.
M a Volens , ut studium Pragense ad raodum et consuetudinem studii Parisien-
sis, in quo olim ipse rex in pueriiibus constitutus annis studuerat, in omnibus et
per omnia dirigeretur et regeretur» (Fontes rerum bohemicarum, IV, p. 5 1 7).
W « . . .firmam singulis lidueiam oblaturi quod privilegia, immunitates et liber-
tates omnes, quibus tam in Parisicnsi, quam Bononiensi studiis doctores et scolares
auctoritate regia uti et gaudere šunt soliti, omnibus et singulis illuc accedere
volumus liberaliter impertimur et faciemus ab et inviolabiliter
observari? (Monumenta Universitatis Pragensis , II, 1, p. заб).
(5> «... ad instar ordinacionis , qua gaudet nacio Gallica in universitate studii
Parisiensis . . . » (Dekret Kutnohorský, édition critique de G. Friedrich, Praha,
1909, p. 68).
(6> «... sub qua nacione conlinentur et reducuntur omnes ad studium Parisius
venientes de Imperio, fere omnes Alamanni et alii de aliis, que in circuit u sunt, і 46 JACQUES LB GOPF.
quemment dans le Cbartuiarium de l'université (1), ou ailleurs.
On comprend aisément pourquoi. Il ne s'agissait pas seulement
d'une habitude. Les débuts de l'Université de Prague furent lents.
L'apparition successive des actes en réglementant l'organisation ^
suffit à en iémoigner. Même lorsque la nouvelle institution fut
devenue réputée, elle n'effaça pas la renommée de celle de Paris
qui restait la grande université. Le caractère international de la
culture médiévale comportait naturell

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents