Sens, référence et existence : que  faire de l extra-linguistique ? - article ; n°127 ; vol.31, pg 9-37
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Langages - Année 1997 - Volume 31 - Numéro 127 - Pages 9-37
Should linguistics encompass the real ? Some think it shouldn't, but can we conceive of a meaning disconnected from its reference ? We only have access to the world such as we perceive it, not to the objective world, and what matters is that a stable intersubjective community can agree on its representation. ~~Referential semantics~~ presupposes a language which is oriented towards « the outside » . The fact that this exstant outside is firmly structured by language does not mean one should consider it as a mere discursive object. Referential conceptions postulate a homogeneous meaning. Our contention, however, is that meaning is heterogeneous and that according to the type of expression used it pertains either to a descriptive model, or to an instructional model, or on occasion to both.
29 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1997
Nombre de lectures 207
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

M. Georges Kleiber
Sens, référence et existence : que faire de l'extra-linguistique ?
In: Langages, 31e année, n°127, 1997. pp. 9-37.
Abstract
Should linguistics encompass the real ? Some think it shouldn't, but can we conceive of a meaning disconnected from its
reference ? We only have access to the world such as we perceive it, not to the objective world, and what matters is that a stable
intersubjective community can agree on its representation. Referential semantics presupposes a language which is oriented
towards « the outside » . The fact that this exstant outside is firmly structured by language does not mean one should consider it
as a mere discursive object. Referential conceptions postulate a homogeneous meaning. Our contention, however, is that
meaning is heterogeneous and that according to the type of expression used it pertains either to a descriptive model, or to an
instructional model, or on occasion to both.
Citer ce document / Cite this document :
Kleiber Georges. Sens, référence et existence : que faire de l'extra-linguistique ?. In: Langages, 31e année, n°127, 1997. pp. 9-
37.
doi : 10.3406/lgge.1997.2123
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/lgge_0458-726X_1997_num_31_127_2123Georges KleIBER
Université de Strasbourg 2 , Scolia
SENS, REFERENCE ET EXISTENCE :
QUE FAIRE DE L'EXTRA-LINGUISTIQUE ?
Introduction x
Que faut-il faire du réel en linguistique ? A-t-il une place ou non dans le
domaine sémantique ? Questions redoutables auxquelles le terme d'extra-
linguistique que l'on emploie souvent pour désigner ce réel fournit déj à une sorte
de réponse, négative : le réel est en dehors du linguistique et n'a donc logique
ment rien à faire dans les affaires dulangage. D'un autre côté, sil'on accepte que
parler, c'est dire quelque chose, le réel est alors partie prenante dans le
commerce linguistique, puisque c'est sur lui que s'exerce notre dire.
La relation qui unit une expression linguistique au « quelque chose » qu'elle
exprime est communément appelée référence et « le chose » son réfè
rent. Notre question initiale revient donc à se demander si la référence doit être
intégrée ou non dans l'analyse linguistique.
Fermeture ou ouverture donc sur la référence et les referents ? Quelle
attitude adopter ? La réponse, positive ou négative, est cruciale, parce qu'elle
s'accompagne d'un engagement sur le statut de cette fameuse boîte noire dans
laquelle le sens est produit. Le sens doit-il être conçu en termes référentiels ou
non ?
Actuellement, les études sémantiques connaissent un beau remue-ménage au
centre duquel se trouve cette question du statut du sens. La tendance, assez
forte, poussée par les conceptions systémiques et le courant déconstructi viste 2,
va vers une remise en cause radicale des approches référentielles standard du
sens. Elle se manifeste essentiellement par un refus, celui de l'objecti visme, et
par une adhésion à un principe dynamique, celui du constructivisme.
Elle fournit l'occasion de rouvrir ou prolonger un débat philosophico-
linguistique qui remonte à la nuit des temps « métalinguistiques » , récemment
ponctué par les Frege, Russell, Strawson, Quine, Davidson, Searle et autres
1. Je remercie Martin Riegel et Paul Siblot pour leurs conseils précieux et leur aide amicale, et Bjôrn
Larsson pour les vues toniques et positives sur le sens qu'il défend dans son ouvrage (à paraître) Le bon sens
commun.
2. Pour avoir un aperçu de l'ampleur de ce courant, voir V. Nyckees (1992 et à paraître), G. Levieuge
(1994) et B. Larsson. Donnellan. Notre propos, plus modeste, de dimension volontairement limitée au
linguistique, se place dans la lignée de l'étude que nous avions entreprise en
1981 3 : nous essaierons de répondre à deux problèmes en relation centrale avec
l'extra-linguistique que pose le choix des nouvelles options sémantiques, celui du
rapport entre référence et existence, et celui du lien entre sens et référence.
L'examen des arguments pour et contre conclura au maintien d'un sens « bran
ché » sur la référence. Chemin faisant, c'est toute la problématique du sens et de
la référence qui se trouvera abordée.
1. Référence et existence
Accepter que les expressions linguistiques réfèrent à quelque chose, qu'elles
ont un réfèrent, revient à accepter l'existence de ce réfèrent. Je ne puis renvoyer
à quelque chose avec une expression linguistique que s'ilya quelque chose à
quoi référer et donc que si ce quelque chose existe. La référence repose crucia-
lement sur un « axiome d'existence » :
Tout ce à quoi on réfère doit exister. (J. R. Searle, 1972 : 121)
Mais de quelle existence s'agit-il ? La question est capitale : si on arrive à
montrer que rien n'existe objectivement, indépendamment du langage, on ruine
du même coup les thèses classiques de la référence comme relation entre des
expressions linguistiques et de Г extra-linguistique. L'extra-linguistique ou le
réel se trouve expulsé, tout simplement parce qu'il n'existe pas ou plus, mais,
avant d'arriver à une telle expulsion, nous rappellerons d'abord la position
classique et rassurante de l'objectivisme.
1.1. Le paradigme de l'objectivisme
Les referents sont des entités du monde réel, indépendantes du langage,
auxquelles on renvoie précisément à l'aide des expressions linguistiques. La
référence apparaît alors comme étant une relation langue-monde, qui établit le
Hen entre une portion ou des segments du monde réel et des expressions linguis
tiques. Le nom propre Napoléon, dans l'énoncé Napoléon est mort à Sainte-
Hélène, renvoie à un individu ayant existé réellement, de même que le SN les
vagues dans l'énoncé Les vagues jappent du côté de Noirmoutier renvoie à une
certaine portion de la réalité. La conception classique de la référence s'accom-
3. Cf. Problèmes de référence. Descriptions définies et noms propres (Paris, Klincsieck). Signalons
également le n° 15 des Cahiers de praxématique consacré au rapport entre Le Langage et le réel (1990).
10 pagne d'un engagement ontologique en faveur de l'existence dans ce qui consti
tue notre monde ou la réalité d'êtres et de choses auxquels on peut référer avec
les expressions linguistiques.
Une telle conception se heurte immédiatement à l'obstacle que constituent les
entités fictives, imaginaires dénotées par des expressions comme les licornes,
Tarzan, Pégase, le père Noël, etc. Y a-t-il encore référence lorsque les entités
désignées n'existent pas réellement ? Une réponse négative élimine de la réfé
rence des énoncés tels que :
Le père Noël a une grande barbe.
Tarzan adore les singes.
Sherlock Holmes n'a jamais fumé de cigarettes.
Pégase n'existe pas.
Dieu existe, je l'ai rencontré. (A. Frossard)
Or, mis à part quelques philosophes du langage, personne ne songe sérieusement
à nier que les SN Le père Noël, Tarzan, Sherlock Holmes, etc. , ont un réfèrent.
Mais il faut, du coup, étendre l'accès de la référence à des mondes ou univers
autres que le seul monde réel et donc élargir la définition initiale pour y intégrer
ces mondes possibles : la référence devient alors « la fonction par laquelle un
signe linguistique renvoie à un objet du monde extra-linguistique, réel ou
imaginaire » (J. Dubois et al., 1973 : 414). S'il permet de recouvrir toutes les
situations qui peuvent se rencontrer, un tel élargissement s'accompagne toutef
ois d'un effet pernicieux : celui de remettre sérieusement en cause le réalisme
objectiviste sur lequel s'appuie cette conception standard de la référence.
1.2. Le paradigme constructiviste
Etant donné la possibilité de renvoyer à des objets non existants, construits
par le discours, de plus en plus de sémanticiens sont amenés à critiquer le dogme
objectiviste en soulignant que le monde réel n'est pas aussi réel que ça et qu'il
n'est qu'un univers construit. Autrement dit, le monde ne préexisterait pas au
discours. L' objecti visme ne serait qu'un mythe et il serait erroné de penser que
le monde est constitué d'objets

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