Sources littéraires et principaux traits distinctifs du djadidisme turkestanais (début du XXe siècle)* - article ; n°1 ; vol.37, pg 107-132
28 pages
Français

Sources littéraires et principaux traits distinctifs du djadidisme turkestanais (début du XXe siècle)* - article ; n°1 ; vol.37, pg 107-132

Le téléchargement nécessite un accès à la bibliothèque YouScribe
Tout savoir sur nos offres
28 pages
Français
Le téléchargement nécessite un accès à la bibliothèque YouScribe
Tout savoir sur nos offres

Description

Cahiers du monde russe : Russie, Empire russe, Union soviétique, États indépendants - Année 1996 - Volume 37 - Numéro 1 - Pages 107-132
Begali Qosimov, Literary sources and specific traits of jadidism in Turkestan in the beginning of the twentieth century.
In Russian Turkestan as in the Tatar area, the emergence of jadidism is related to the school matter. Indeed, political ties within the Muslim community were bred and woven in the many charitable institutions which, at the turn of the century, were set afoot in the region so as to found and finance the first reformed mekteb and medresseh on the model of the Tatar ones. Those connections were particularly effective on the morrow of the 1905 Russian Revolution and then in wartime. There is no doubt that authors and actors of Turkestan jadidism happened to notably differ in speech and tactics on several matters, namely on the national problem and the stand to adopt facing the Russian power. Nevertheless, literary sources which did not fall under colonial ceasorship, and could be traasmitted, do testify to their attachment to common ideals of modernization and independence. Besides, in June- July of 1916, the violent riot of the seasonal workers — triggered by the mobilization of autochthonous workers in Russian industry and agriculture — and the ranking echo it was granted with in Turkestan press organs and literature one year later, evidenced that Muslim elites meant to take advantage of mass mobilization to triumph with the idea of independence for Turkestan.
Begali Qosimov, Sources littéraires et principaux traits distinctifs du djadidisme turkestanais (début du XXe siècle).
Au Turkestan russe comme dans le monde tatar, le djadidisme trouva son point de départ dans la question scolaire : les multiples sociétés de bienfaisance apparues dans cette région au tournant du siècle, pour la création et le financement des premiers maktab réformés sur le modèle tatar, furent la base sur laquelle se développèrent les sociabilités politiques de la communauté musulmane, particulièrement vivaces au lendemain de la révolution de Russie en 1905 puis dans les années du conflit mondial. Certes de sensibles différences de discours et de tactique distinguèrent les principaux auteurs et acteurs du djadidisme turkestanais, à divers moments, notamment sur la question nationale et celle de l'attitude à adopter officiellement vis-à-vis du pouvoir russe. Cependant les œuvres littéraires léguées par les uns et les autres, lorsqu'elles purent échapper à la censure coloniale, attestent leur attachement à des idéaux communs de modernisation et d'indépendance. Au demeurant la violence de la « révolte des saisonniers » de juin-juillet 1916 (déclenchée par la mobilisation de la main d'œuvre autochtone pour l'industrie et l'agriculture msses) et l'écho exemplifié qu'elle rencontra l'année suivante dans la presse et la littérature turkestanaises attestèrent le souci des élites musulmanes modernistes de mettre à profit la mobilisation populaire pour faire triompher l'idée d'un Turkestan indépendant.
26 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1996
Nombre de lectures 14
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Begali Qosimov
Stéphane A. Dudoignon
Sources littéraires et principaux traits distinctifs du djadidisme
turkestanais (début du XXe siècle)*
In: Cahiers du monde russe : Russie, Empire russe, Union soviétique, États indépendants. Vol. 37 N°1-2. pp. 107-
132.
Citer ce document / Cite this document :
Qosimov Begali, Dudoignon Stéphane A. Sources littéraires et principaux traits distinctifs du djadidisme turkestanais (début du
XXe siècle)*. In: Cahiers du monde russe : Russie, Empire russe, Union soviétique, États indépendants. Vol. 37 N°1-2. pp. 107-
132.
doi : 10.3406/cmr.1996.2455
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/cmr_1252-6576_1996_num_37_1_2455Abstract
Begali Qosimov, Literary sources and specific traits of jadidism in Turkestan in the beginning of the
twentieth century.
In Russian Turkestan as in the Tatar area, the emergence of jadidism is related to the school matter.
Indeed, political ties within the Muslim community were bred and woven in the many charitable
institutions which, at the turn of the century, were set afoot in the region so as to found and finance the
first reformed mekteb and medresseh on the model of the Tatar ones. Those connections were
particularly effective on the morrow of the 1905 Russian Revolution and then in wartime. There is no
doubt that authors and actors of Turkestan jadidism happened to notably differ in speech and tactics on
several matters, namely on the national problem and the stand to adopt facing the Russian power.
Nevertheless, literary sources which did not fall under colonial ceasorship, and could be traasmitted, do
testify to their attachment to common ideals of modernization and independence. Besides, in June- July
of 1916, the violent "riot of the seasonal workers" — triggered by the mobilization of autochthonous
workers in Russian industry and agriculture — and the ranking echo it was granted with in Turkestan
press organs and literature one year later, evidenced that Muslim elites meant to take advantage of
mass mobilization to triumph with the idea of independence for Turkestan.
Résumé
Begali Qosimov, Sources littéraires et principaux traits distinctifs du djadidisme turkestanais (début du
XXe siècle).
Au Turkestan russe comme dans le monde tatar, le djadidisme trouva son point de départ dans la
question scolaire : les multiples sociétés de bienfaisance apparues dans cette région au tournant du
siècle, pour la création et le financement des premiers maktab réformés sur le modèle tatar, furent la
base sur laquelle se développèrent les sociabilités politiques de la communauté musulmane,
particulièrement vivaces au lendemain de la révolution de Russie en 1905 puis dans les années du
conflit mondial. Certes de sensibles différences de discours et de tactique distinguèrent les principaux
auteurs et acteurs du djadidisme turkestanais, à divers moments, notamment sur la question nationale
et celle de l'attitude à adopter officiellement vis-à-vis du pouvoir russe. Cependant les œuvres littéraires
léguées par les uns et les autres, lorsqu'elles purent échapper à la censure coloniale, attestent leur
attachement à des idéaux communs de modernisation et d'indépendance. Au demeurant la violence de
la « révolte des saisonniers » de juin-juillet 1916 (déclenchée par la mobilisation de la main d'œuvre
autochtone pour l'industrie et l'agriculture msses) et l'écho exemplifié qu'elle rencontra l'année suivante
dans la presse et la littérature turkestanaises attestèrent le souci des élites musulmanes modernistes
de mettre à profit la mobilisation populaire pour faire triompher l'idée d'un Turkestan indépendant.BEGALI QOSIMOV
SOURCES LITTÉRAIRES ET PRINCIPAUX TRAITS
DISTINCTIFS DU DJADIDISME TURKESTANAIS
(DÉBUT DU XXe SIÈCLE)*
Le djadidisme turkestanais est le fruit de mouvements réformistes parvenus à
maturité, parmi les musulmans de Russie d'Europe, dès les années 80 du xixe siècle.
Et tous les historiens ont depuis longtemps reconnu le rôle clé que jouèrent le jour
nal Targwnân {L'Interprète) du Tatar de Crimée Ismail Gasprinskij, fondé en 1883,
puis le maktab réformé ouvert Tannée suivante à Bakhtchesaray par le grand publi
cisté et pédagogue, dans l'extension progressive de ces mouvements à l'ensemble
des musulmans de l'Empire1.
Cependant on sait aussi quel profond mécontentement suscitait, dès le début du
XIXe siècle, l'enseignement sclérosé des maktab et madrasa chez les lettrés et savants
musulmans d'Asie Centrale méridionale. Cette insatisfaction et les débats qu'elle
suscita nous sont bien connus grâce, en particulier, aux évocations que nous ont lais
sées deux grands oulémas tatars de la Volga, familiers des madrasa boukhares pour
y avoir étudié ou enseigné : cAbd an-Na§îr Qûrsâwî (1776-1812) et Sihâb ad-Dîn
Margânî (1818-1889) dénoncèrent sans ménagement les obstacles mis par les autor
ités religieuses et juridiques de Boukhara à toute tentative de renouveau d'une
éducation musulmane officielle inadaptée aux besoins de l'époque2.
Une telle paternité spirituelle explique sans doute en partie pourquoi le djadi
disme, dans la province russe du Turkestan comme dans les protectorats de
Boukhara et de Khiva, n'est pas resté une simple mouvance intellectuelle aux
contours incertains, pour se muer au contraire assez tôt, dès les premières années du
XXe siècle, en un puissant moteur de renouveau de la société musulmane, partant de
la réforme du système d'éducation traditionnel pour arriver à la construction de
l'indépendance politique.
Car c'est dans le domaine de la réforme scolaire que le djadidisme trouva au
Turkestan, comme précédemment dans le monde tatar, son véritable point de départ.
Quelque quinze ans après la fondation en Crimée du premier maktab réformé, des
établissements du même type commencèrent à voir le jour, sous l'impulsion ď Ismail
Bey, au Turkestan russe (à Tachkent et Samarcande) puis à Boukhara, pour s'étendre
ensuite dans les principales villes de la vallée de Ferghana. Ce mouvement devait
Cahiers du Monde russe, XXXVII (1-2), janvier-juin 1996. pp. 107-131 108 BEGALI QOSIMOV
être suivi, à peu d'intervalle, par l'apparition des premiers manuels scolaires publiés
en Asie Centrale méridionale3.
Outre leur activité éditoriale, les réformateurs de l'école au Turkestan se signa
lèrent, dès la veille de la première révolution russe, par la création de multiples asso
ciations et sociétés. C'est sur ces organisations qu'allaient reposer la mise en œuvre
du renouveau des maktab, puis la diffusion de la réforme scolaire au moyen d'une
presse moderne et de troupes de théâtre jouant les pièces écrites par les théoriciens
du mouvement, enfin l'organisation des premières formations politiques musul
manes d'Asie Centrale méridionale. Dans sa très brève autobiographie, cAbdallâh
Awlânî (1878-1934), l'un des auteurs et protagonistes de tout premier plan du djadi-
disme turkestanais4, fait remonter à l'année 1904 le début de sa participation à ce
qu'il appelle le « groupe » ou la « bande des djadids » {gadîdâlar tûdasî)5 de
Tachkent — mouvement plus ou moins structuré regroupant les fondateurs de
quelques-uns des premiers maktab réformés du Turkestan, parmi lesquels on trouvait
déjà, à cette date, des personnalités comme Munawwar Qári (1878-1931)6, cUbay-
dallâh b. Ascadallâh-Xwâga (1886-1931)7 ou encore le poète Tûlagân X"âgamyârov,
dit Tawallâ (1882-1939)8, tous appelés à devenir bientôt les créateurs et principaux
auteurs de la presse musulmane réformiste.
L'année 1909 vit à Tachkent la fondation de la Société de bienfaisance
(čamciyat-i xayriya), première d'une longue série d'homonymes, suivie pendant la
décennie précédant la révolution de nombreuses organisations, dont les plus célèbres
furent sans doute la Société Turân, fondée par Awlânî en décembre 1913, puis la
Compagnie d'Édition (Nasriyât Sirkatî) parrainée en 1914 par Awlânî, Munawwar
Qâri, Tawallâ et quelques autres, ou encore les Éditions de l'École (Maktab
Nasriyâtî) en 1916. L'activité de ces organisations était orientée vers l'impressio

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents