Hassi Mamèche
145 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

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Description

Ce témoignage de Michèle Maldonado évoque les moments heureux d'une Algérie perdue. Avec ses yeux de petite fille, l'auteur relate la simplicité de la vie quotidienne de Rivoli, village prospère de l'Oranais. Elle retrace les joies, les plaisirs minuscules, l'immense détresse lorsqu'il a fallu tout quitter. Hassi Mamèche, c'est la mémoire ravivée, la mer, le soleil, le parfum des freesias...

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 avril 2008
Nombre de lectures 332
EAN13 9782336277387
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0000€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Rue des Ecoles
Cette collection accueille des essais, d’un intérêt éditorial certain mais ne pouvant supporter de gros tirages et une diffusion large.
La collection Rue des Ecoles a pour principe l’édition de tous travaux personnels, venus de tous horizons: historique, philosophique, politique, etc.
Déjà parus
Sylvette DUPUY, Souvenirs à ranger , 2008.
Jacques RAYNAUD, Parfums de jeunesse , 2007.
Leão da SILVA, Jésus révolutionnaire! une condamnation politiquement correcte, 2007.
Ma-Thé, Portraits croisés de femmes , 2007.
Jean SANITAS, Je devais le dire . Poèmes , 2007.
Madeleine TICHETTE, La vie d’une mulâtresse de Cayenne. 1901 - 1997, Les cahiers de Madeleine ., 2007.
Bernard REMACK, Petite... Prends ma main , 2007.
Julien CABOCEL, Remix Paul Pi , 2007.
Isabelle LUCAZEAU, La vie du capitaine Rolland (1762-1841 ), 2007.
Albert SALON, Colas colo — Colas colère , 2007.
François SAUTERON, Quelques vies oubliées , 2007.
Patrick LETERRIER, Et là vivent des hommes. Témoignage d’un enseignant en Maison d’arrêt , 2006.
Annette GONDELLE, Des rêves raisonnables, 2006
Émile M. TUBIANA, Les trésors cachés , 2006
Jean-Claude LOPEZ, Trente-deux ans derrière les barreaux , 2006
Maryse VUILLERMET, Et toi, ton pays, il est où ?, 2006.
Ahmed KHIREDDINE, Rocher de sel. Vie de l’écrivain Mohamed Bencherif; 2006.
Pierre ESPERBÉ, La presse  : à croire ou à laisser , 2006.
Roger TINDlLIERE, Les années glorieuses, 2006.
Hassi Mamèche
L'Algérie de notre enfance

Michèle Maldonado
© L’HARMATTAN, 2008
5-7, rue de l’École-Polytechnique, 75005 Paris
http://www.librairieharmattan.com diffusion.harmattan@wanadoo.fr harmattanl@wanadoo.fr
9782296052260
EAN : 9782296052260

Sommaire
Rue des Ecoles Page de titre Page de Copyright 14 mars 1950 Les adieux Mes origines Pourquoi ? Mes cousins 9 juin 1962 Pères et fils Les grandes vacances Les squelettes de mon placard Les « événements » L’appel du 6 juin : parodie Trahison et rétribution Hassi Mamèche Le plan du village Epilogue Témoignage Remerciements
Assise en tailleur au pied de mon lit, je tricote une robe à ma poupée, accompagnant à tue-tête Ray Charles qui, sur un rythme endiablé, invite Jack à ficher le camp pour ne plus jamais revenir. Funeste augure. Soudain, au rez-de-chaussée, la porte d’entrée claque. Paralysée, j’entends mon père prononcer ces mots sans appel : « Mauricette, fais les valises ; les petites partent en France demain ! »
Nous sommes le 8 juin 1962. Je n’ai que douze ans mais je comprends ce que cela veut dire : jamais nous ne reviendrons.
« Hit the road, Jack, and don’t corne back no more, no more, no more, no more... » 1
Insidieuses, les chansons vont et viennent, pour vous tendre à l’improviste des embuscades.
« J’ai quitté mon pays, j’ai quitté ma maison ».
Le temps n’a rien effacé. Mon estomac se noue encore aux tristes accords d’Enrico Macias. Au moindre rythme de musique orientale, je sens le soleil sur ma peau.
« J’ai quitté mon soleil, j’ai quitté ma mer bleue »
Un clip à la télé, et me voilà à nouveau frappée de plein fouet : en rendant à sa façon hommage à la France, le jeune Faudel saura-t-il jamais à quel point il a fait mouche? Doucement bercés pendant toutes ces années, « mes souvenirs se réveillent ». C’est lui qui me décide à parler, car tout comme lui, j’ai engrangé...

Trop De souvenirs gravés De cours d’écoles et d’étés Trop d’amour pour oublier Que c’est là-bas que je suis née 2
14 mars 1950
« Paul, Paul, va vite chercher Madame Molina ! » Très intrigué mais dressé à ne poser de questions qu’après avoir obéi, mon grand frère tambourine contre la porte de la chambre dont l’entrée lui est inexplicablement interdite, puis dévale l’escalier et traverse la rue pour aller alerter la voisine. En 1950, de nombreux mystères restent encore sans réponse pour un petit garçon de dix ans. Dérangée dans son sommeil, Marie-Rose, adolescente blasée, le regarde de travers, mais, comprenant très vite le problème, se frotte les yeux, réprime un baillement et se rend tout de même d’un pas traînant prévenir sa mère. L’heure semble grave, et, sitôt le message transmis, Paul court à l’autre bout du village alerter Maurice Bonnefont, son grand-père.
Papa est absent ; il ne doit revenir que ce soir. De son côté, Maman s’organise avec les moyens du bord : elle vient de perdre les eaux et se prépare à mettre au monde son troisième enfant.
Elle sait gérer, Maman ! À vingt ans, elle avait vu son jeune époux partir, fleur au fusil, pour la guerre, quelques mois seulement après leur arrivée en France où il s’était engagé dans le Quatrième Régiment d’Infanterie à Auxerre. Titulaire du Brevet Supérieur, elle avait, pour sa part, obtenu son premier poste d’institutrice dans un minuscule village du Morvan : Chastellux-sur-Cure. Nous, les enfants à venir, étions, de ce fait, destinés à naître en Bourgogne.
Enceinte de mon frère au fin fond de la campagne bourguignonne, Maman avait tenu bon et, au moment de sa délivrance, s’était rendue seule à l’hôpital d’Avallon. Mise en attente sur un lit si haut qu’elle avait eu peine à y grimper, elle avait accouché doucement, sans oser alerter l’unique infirmière de garde.
Plus tard, au moment de l’exode, elle était retournée en Algérie auprès de ses parents pour y attendre le retour de son mari.
Parents de quatre enfants, dont trois fils et une fille, Augustine et Maurice Bonnefont n’étaient pas riches. Ils vivaient à Rivoli dans une petite demeure que mon grand-père avait construite de ses propres mains derrière le stade. La maison jouxtait celle des Grostéfan, eux aussi parents de quatre enfants : trois filles et un fils. Deux de leurs filles, Andrée et Mimi, avaient suivi le même parcours que Maman à l’EPS, lycée de Mostaganem, pour devenir institutrices. L’aînée, Andrée, avait aidé Maman à préparer son diplôme du Brevet Supérieur en lui expliquant les subtilités de l’algèbre et de la géométrie. Sa sœur Mimi avait dû quitter le lycée fermé par les soldats américains à la veille de ses examens, au moment de la libération. Il avait fallu à la jeune fille trois ans pour rattraper ce temps précieux qui lui avait été dérobé.
Maman avait l’intention de conserver son poste en France en attendant le retour de son mari. Sa collègue, Madame Cagnat, prénommée « Joffrette » par ses parents en souvenir du Maréchal, était également une jeune maman dont l’époux, directeur de l’école de Chastellux, avait été appelé au moment de la mobilisation générale. Les deux jeunes femmes s’entendaient à merveille. Elles avaient ensemble repoussé l’assaut de jeunes soldats allemands venus réquisitionner l’école. Elles avaient toutes deux dormi dans le même lit, blotties l’une contre l’autre alors que, du logement voisin, leur parvenaient les rugissements avinés des envahisseurs en quête d’oubli.
À l’annonce de la captivité de mon père, maman planifia son retour au pays. Elle cousit dans sa ceinture ses économies d’une année entière. Pendant le long voyage en train, puis sur le bateau qui la ramenait à Oran, elle serrait dans ses bras le petit Paul qui, à force de coups de pieds, finit par déchirer la poche secrète contenant sa bourse. Maman n’avait rien remarqué.
La jeune femme se faisait une joie d’apporter à ses parents cette somme d’argent importante pour une famille d’artisans maçons. A l’arrivée, elle découvrit avec stupeur qu’il ne lui restait plus rien. Désorienté, désolé pour elle, mon grand-père dit à sa femme : « Augustine, va chercher nos économies et donne-les lui ! » Et la brave dame de répondre : « Mais pourquoi ? Elle vivra avec nous et nous l’aiderons ».
Les parents Bonnefont avaient retrouvé un trésor bien plus précieux : ce petit-fils qui leur tombait du ciel et leur fille débarrassée pour un temps du mari qui l’avait éloignée d’eux, les laissant exsangues, impuissants et frustrés sur le quai du port d’Oran.
Français de souche, Maurice avait eu grand-peine à accepter la relation de sa

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