Les sentes de l espoir
208 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

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Description

Lorsque mon grand-père laissa à ses petits-enfants des feuillets de notes sur son périple durant la Seconde Guerre mondiale, je ne pus me résoudre à les abandonner dans une malle, au fond d'un grenier. L'histoire d'Eugène ne méritait pas d'être oubliée. Mais son destin était étroitement lié à celui de sa femme. Ce livre relate leur aventure, basée sur des faits réels.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 octobre 2011
Nombre de lectures 81
EAN13 9782296470583
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0800€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Les sentes de l’espoir
Graveurs de mémoire

Armand BENACERRAF, Trois passeports pour un seul homme, Itinéraire d’un cardiologue, 2011.
Vincent JEANTET, Je suis mort un mardi, 2011.
Pierre PELOU, L’arbre et le paysage. L’itinéraire d’un postier rouergat (1907-1981), 2011.
François DENIS et Michèle DENIS-DELCEY, Les Araignées Rouges, Un agronome en Ethiopie (1965-1975), 2011.
Djalil et Marie HAKEM, Le Livre de Djalil, 2011.
Chantal MEYER, La Chrétienne en terre d’Islam, 2011.
Danielle BARCELO-GUEZ, Racines tunisiennes, 2011.
Paul SECHTER, En 1936 j’avais quinze ans, 2011.
Roland BAUCHOT, Mémoires d’un biologiste. De la rue des Ecoles à la rue d’Ulm, 2011.
Eric de ROSNY, L’Afrique, sur le vif. Récits et péripéties, 2011.
Eliane LIRAUD, L’aventure guinéenne, 2011.
Louis GIVELET, L’Écolo, le pollueur et le paysan, 2011.
Yves JEGOUZO, Madeleine dite Betty, déportée résistante à Auschwitz-Birkenau, 2011.
Lucien LEYSSIEUX, Parcours d’un Français libre ou le récit d’un sauvageon des montagnes du Dauphiné, combattant sur le front tunisien avec les Forces françaises libres en 1943, 2011.
Sylvie TEPER, Un autre monde, 2011.
Nathalie MASSOU FONTENEL, Abdenour SI HADJ MOHAND, Tinfouchy (Algérie 1958-1960), Lucien Fontenel, un Français torturé par les Français, 2011.
André ROBINET, Larzac-Millau-Grands Causses, Elevage et partage des savoirs, 2011.
Dmoh BACHA, Palestro Lakhdaria, Réflexions sur des souvenirs d’enfance pendant la guerre d’Algérie, 2011.
Robert PINAUD, Dans la gueule du loup, 2011.
Lina BATAMI, Algérie, mon enfance v(i)olée, 2011.
Jean-Paul FOSSET, Histoire d’amour, histoire de guerres ordinaires. 1939 – 1945… Évian 1962, 2011.
Oruno D. LARA, La magie du politique. Mes années de proscrit, 2011.
Jean Michel HALLEZ, 40 boulevard Haussmann, 2011.
Yvon CHATELIN, Recherche scientifique en terre africaine, 2011.
Jean-Philippe Goudet


Les sentes de l’espoir

Une famille auvergnate
durant la Seconde Guerre mondiale
© L’Harmattan, 2011
5-7, rue de l’Ecole-Polytechnique, 75005 Paris

http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr

ISBN : 978-2-296-55538-9
EAN : 9782296555389

Fabrication numérique : Actissia Services, 2012
À ma sœur Ghylène,
À mon frère Ivan.
« T irez nom de dieu, tirez… Vous attendez quoi ? On va en prendre plein la gueule si vous ne bougez pas vos culs »…
Ça résonnait dans ma tête. Un bruit sourd. Machinalement j’amenais les obus dans cette gueule qui ne refroidissait plus. Ça grouillait. Ça criait, ça jurait au rythme des coups. Encore un et en face ils ne fatiguaient pas. Dans un bois derrière, les arbres éclataient dans le fracas et la poussière. Je ne me retournais pas pour ne pas avoir peur. Je m’éreintais sur les obus comme si c’était la solution pour s’en sortir vivant. Ce doit être ainsi, l’enfer. J’avais soif. Les ordres pleuvaient. Une grande pagaille organisée. Je n’entendais plus. J’étais dans cette belle mécanique bruyante qui devait rester vivante. Un simple rouage. Celui qui amenait les obus. Un soldat deuxième classe. La terre grasse collait aux semelles. Mes jambes étaient encore plus lourdes à traîner, à sortir de la boue.
Un gradé nous criait : « C’est bien, les Allemands en prennent plein les dents ! » Nous aussi je trouvais, mais je gardais mes réflexions pour moi. On ne me demandait pas de réfléchir. Des éclairs de feu sortaient des bouches hurlantes et chaudes. Mes yeux me brûlaient, à moins que ce ne fut tout mon corps. Je ne voyais pas grand-chose, à peine si j’avais le temps de relever le nez. De toute façon la nuit tombait. Ce noir ponctué d’horreur, cette nuit traversée de lumières destructrices. Ma bouche se remplissait de poussière et de peurs. Je n’avais pas mangé depuis la veille mais ce n’était pas la faim qui me tordait le ventre. Dans l’obscurité, les bruits étaient encore plus violents, plus terrifiants. Détonations, sifflements et ces cris ne cachant plus l’angoisse. En vol serré les avions traversèrent le ciel. Une pluie de feu illumina ce cauchemar quelques instants. Un grondement incessant nous entourait. Je bouchais mes oreilles des deux mains. J’ai cru que le sol se dérobait. Le sang chaud coulait entre mes doigts me réchauffant les joues. Mes jambes ne me portaient plus. J’ai mis un genou à terre. Mais la gueule réclamait sa pitance. Un peu plus fatigué, j’ai repris le manège incessant qui durait depuis le matin. Des obus, encore et encore, jusqu’à percer la terre, jusqu’à couler l’ennemi dans du métal en fusion, ou jusqu’à ce que mon dos se brise ?
« Les derniers ponts sur la Meuse viennent de sauter. »
Plus de retraite possible. Un peu plus dans le brasier, un peu plus proche de la mort. Les avions sont repassés mais on n’a rien pris à ce voyage. Eux, ils pouvaient quitter l’enfer, mais nous on se retrouvait coincés. D’un côté le feu, de l’autre l’eau et on allait crever sous la terre.
Un obus éclata non loin. Une odeur de charogne se mêlait à celle de la sueur. Sûrement quelques cadavres dérangés dans leur sommeil. Sur la gauche, une colonne de camarades s’avançait. Le front. J’avais envie de vomir. Pas sur les obus. Encore un. Il m’a déchiré les reins et les mains. Je crachai dessus. Ça partira en face. Comme tout serait beau sans tout ça.
Ce fut un sifflement strident puis une montagne de terre qui m’emportait. Complètement sonné je n’ai rien compris sur le moment. Le temps de retrouver mes esprits et les copains étaient là pour me ramasser. Il s’en était fallu de peu que cette charogne m’envoie au tapis. Il n’avait pas pété loin.
« Ça va Goudet ? »
J’étais ailleurs, loin de ce bruit.
« Il n’a rien mais ça l’a bien secoué. »
J’avais mal à la tête.
« Oh, Eugène, t’es encore avec nous ? »
Je ne savais plus trop qui j’étais ni où je me trouvais.
« Tu devrais t’asseoir dans un coin cinq minutes tu es tout blanc. »
Je n’étais pas tout blanc, j’étais recouvert de poussière. J’ai posé mon cul sur une caisse qui traînait pour revoir le brouillon qui me servait de tête.
Putain de tête. Je la voudrais vide, avec un petit pois, non, vide. Si cette saloperie n’enregistrait pas ce serait mieux. Enfin, je supposais. Plus de brouillard, plus d’éclairs, plus de copains, plus de souvenirs, même plus Chomelix, ce serait mieux. Heureux les simples d’esprits qu’ils disaient… Ouais, ils avaient raison et pourquoi pas moi ! Simple d’esprit, j’éliminais six mois et tout repartait à zéro.
Un copain avait pris ma place. A son tour de nourrir la bouche. Avale salope. J’avais mal au crâne. Peut-être blessé ? Tant mieux on me ramènera à l’arrière. A la maison ? Faut pas déconner, ils ne feraient jamais ça. Des cons comme moi ils en avaient besoin à la pelle. Soit x fûts de canons avec autant de soldats autour et une putain de guerre, mon père pouvait en parler de la der des ders. Si le fût met x heures pour refroidir quand va s’arrêter ce bordel ! J’avais peur que le chiffre soit supérieur à mes espérances.
Le ciel s’embrasa en un instant. Le grondement sourd revint à mes oreilles. Il fallait y échapper encore quelques secondes, une minute peut-être. Tout était allé trop vite. Tout basculait sans prévenir.
Je n’imaginais pas, le 4 septembre 1939, que j’allais suivre le chemin qui conduit à la guerre. Le centre de mobilisation 353 à Clermont-Ferrand était un bon début ; j’aurais dû m’en douter. Bon pour la casse. Ils m’ont affecté au 185 e R.A.L. T 6 e batterie 1 er et 2 e groupes. Les gars étaient sympas. En trois semaines on avait le temps de faire connaissance. Et puis, j’étais encore un peu chez moi. Auvergne épargnée mais pas assez loin de ce conflit. Ils sont bien venus me chercher. Me voilà déguisé pour la boucherie. Ça ne me changeait pas beaucoup. La viande je connaissais. L’abattoir dégoulinait souvent de sang, tripes et boyaux que les chiens se disputaient. Mais même un boucher ne pouvait s’habituer… Puis ce fut le moment de prendre la route. Ils auraient pu me donner le mois avant de partir. On grimpait vers le nord. La Saône-et-Loire pour commencer en douceur. Au nord-ouest de Paray-le-Monial : Bourbon-Lancy. Une nuit à mal dormir et le lendemai

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