Sénégalaiseries : Le nouveau type  de sénégalaiseries
112 pages
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Sénégalaiseries : Le nouveau type de sénégalaiseries

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Publié par
Date de parution 01 janvier 2021
Nombre de lectures 66
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0038€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

IBOU FALL Le nouveau type de sénégalaiseries
La longue marche du Nouveau Type de Sénégalais
Senghor en a rêvé de ce Sénégalais qui ressemblerait à un Parisien gorgé de vieille France, imbibé de ces humanités qui vous font discerner le Mont Palatin de la Roche Tarpéienne, en même temps que Dakar ressemblerait à Paris. Ibou Diouf et Bocar
Diongue rivaliseraient alors avec Picasso et Dali, et Yandé Codou tiendrait tête à La Callas. Ne cherchez pas, c’est passé de mode…C’est vrai qu’en face, à la même époque, Cheikh Anta Diop, le
Pharaon du savoir, a aussi une idée précise de ce que doit être le Sénégalais de type nouveau. Un Africain pure souche, enraciné dans les profondeurs de la culture égyptienne, mère de toutes les
civilisations méditerranéennes, et qui replace le centre du monde
un peu plus au Sud.
Dans les bas-fonds de Dakar, le débat est moins sophistiqué :
il y a les fonctionnaires et les autres. L’école est face à la racaille, le
Jaraaf creuse ses tranchées contre la Jeanne d’Arc, alors que dans
les dancings, il faut choisir : vous êtes Baobab ou Number One ? Ce nouveau type de Sénégalais qui fait le fantasme de Senghor, formaté à l’école républicaine, il se heurtera à la dure réalité de la sècheresse du Sahel, des plans d’ajustements structurels que la Banque Mondiale et le Fmi mijoteront pour mettre un terme aux lubies du poète, lequel construit le Musée dynamique pour que les chorégraphes de Mudra s’y tortillent à leur aise. L’avènement d’Abdou Diouf balaiera toutes ces interrogations surréalistes. L’alternative? Marche ou crève. Le pays est au plus
mal… Le nouveau type de Sénégalais est un citoyen du vaste monde qui va chercher fortune dans les coins les plus reculés de la
planète en larguant les bons vieux préceptes du Grand-père Léo,
le poète. C’est un démocrate avide de libertés qui se voit ouvrir les vannes de toutes les tolérances. Ce nouveau type de Sénégalais dont Abdou Diouf rêve, c’est dans le ventre des
banlieues qu’il se forge, répondant surtout à l’appel d’un nouveau
type de politicien, Laye Wade de son nom de guerre. Il est tidiane ou mouride, Super Diamono ou Super Etoile, Baol-Baol ou Saloum-Saloum, Sénef ou djolofman… Ce n’est plus ce Sénégalais constipé
par les bonnes manières postcoloniales. Il s’est affranchi des pesanteurs de l’école française, reprend possession de son territoire et revendique sa particularité. En 2000, c’est ce nouveau type de citoyen qui met fin à quarante ans de règne d’un héritage colonial perpétué par un bon élève de l’Ecole de la France d’Outre-mer. Le nouveau type de Sénégalais qui prend le contrôle du territoire est décevant : on le croyait définitivement enterrépar l’Alternance du 19 mars de 2000… Grave erreur! Il est bien là, encore plus arrogant, plus
boulimique d’honneurs et de luxures. Plus décadent. C’est de là que se forgera le ras-le-bol d’une nouvelle génération de Sénégalais dont le code barre est trompeur. Ça n’a l’air de rien, à première vue, toute cette vague de jeunes hirsutes au pantalon tombant sous les fesses. Ils ont cependant un petit quelque chose d’inédit: ils sont les enfants des premiers Sénégalais nés après 1960. Ils ont dans les veines les torrents de l’irrévérence et, à la bouche, le goût des indépendances. A longueur de journée, la bande Fm, les journaux, la rue, ou la vie, tout simplement, leur
distillent cette drogue indispensable: ils ont l’instinct des libertés inné. C’est leur culture. Mais surtout, ils savent quel Sénégalais ils ne veulent pas être. Ils ne seront pas cette sorte d’humanoïde que
Laye Wade acréé, qui a perdu le sens de l’humain à force de se vautrer dans la fange des privilèges indûment acquis. Ces détraqués qui nous offrent le spectacle pénible de gens de peu
d’honneur, prêts à toutes les compromissions pour plastronner à la télé une fois par semaine et rouler à l’arrière d’une limousine estampillée service officiel. Qui renieraient jusqu’à leurs origines pour arborer un costume coupé et scintillant dernier cri assorti d’un portable tactile.C’est là le message du 23 juin 2011, le jour de toutes les libertés.
Macky le petit
Dans un accès de lyrisme que lui inspire sa reconnaissance éperdue, Macky Sall, alors Premier ministre du Père Wade, compare son mentor à l’empereur Napoléon Bonaparte, le premier, le grand… Il ne verra donc pas de malice à être assimilé à son successeur, Napoléon III, que le persiflage d’un poète hors normes surnommera Napoléon le petit.
L’avènement de Macky Sall signe le retour à la modestie républicaine. Il est au Pape du Sopi ce que le placide administrateur de colonie, Abdou Diouf, sera pour l’agrégé de grammaire président. Ça ne rigole plus. Lorsque Senghor, personnage coloré et espiègle à la culture phénoménale, cède le Palais à l’anguleux et austère Abdou Diouf, les économistes soupirent de soulagement. Enfin, un homme sérieux aux commandes des affaires sérieuses. Finie, la bamboula des artistes inaugurée par le Festival mondial des Arts nègres en 1966 et clôturée par le Festival international de Jazz de Senghor fils, Francis de son prénom, en 1980. Signe des temps: Diouf s’installe, et les veinards du Village des Arts avec vue sur l’Atlantique sont
délogés par un bataillon de policiers patibulaires harnachés, et ce sont de très sérieux ministères de l’Urbanisme et de l’Hydraulique qui y emménagent. Le Musée Dynamique accueille le vénérable
Conseil constitutionnel et un frais vent de multipartisme intégral vient balayer la théorie farfelue des quatre courants politiques. Non, Abdou Diouf n’est pas Senghor, et il tient à ce que cela se sache : les finances publiques sont au plus mal, le pays part en lambeaux. L’urgence est au redressement de notre économie, à
ces douloureux ajustements structurels qui dégraisseront la Fonction publique et fermeront quelques banques trop généreuses. Les fautes d’orthographes du «Soleil», il s’en balance.
Le taciturne et longiligne chef de l’Etat et de gouvernement se chiffonne plutôt pour les quelques nouveaux riches extravagants dont les fortunes lui posent des cas de conscience et quelques
irritations très personnelles. Senghor est un leader, Abdou Diouf
un éternel second. Ses vingt années de présidence n’en feront pas
vraiment un chef incontesté. Derrière chaque décision, le soupçon
d’une main discrète. L’ombre de Jean Collin l’écrase une décennie durant, avant de céder les manettes à…Ousmane Tanor Dieng. Depuis son Palais, Abdou Diouf n’est responsable de rien, n’est au
courant de rien, le nez plongé dans les devoirs de vacances dictés par le Fmi ou la Banque mondiale, quand il n’est pas aux quatre coins du monde à démolir l’apartheid ou quelque cause africaine
aseptisée que lui attribue la nouvelle citoyenneté mondiale. Sur la scène politique, également, il est à la traîne : face à lui, un drôle de pistolet, Laye Wade de son nom de guerre, prend l’initiative. Diouf
se contente de dresser des barricades et, parfois riposter, quand la moutarde lui remonte jusqu’à deux mètres d’altitude, hauteur du nez. Jusqu’à la déroute de 2000 qui nous ramène non sans panache
la mégalomanie républicaine.
Diouf regardait tout de haut ? Wade voit tout en grand. Le budget de l’Etat passe du simple au triple, comme les salaires des fonctionnaires. L’Etat chiche est mort, vive l’Etat fou de sa grandeur… Les quelques rendez-vous planétaires de son prédécesseur, du genre Conférences islamiques et Francophonie semblent bien riquiqui et les infrastructures qui en sortent
inspirent la commisération. Le père Wade est là parce qu’il flatte l’orgueil du peuple: le chef d’Etat le plus diplômé de la planète qui se paie le luxe de fusiller ses pairs nègres mal élus et mal mouchés. Le nombril du monde, c’est lui, et il le régente selon ses humeurs. Ça finit en eau de boudin, certes, lorsqu’il devient le chef d’Etat le plus …âgé de la planète. Une dernière pirouette pour une
sortie de scène honorable, non sans avoir tenté de tripatouiller jusqu’à ses serments solennels. Entretemps, rien n’est trop beau, ni trop grand pour sa superbe. Abdou Diouf lui laisse un pays parmi les moins avancés, en deux discours, il le transforme en pays intermédiaire. Si on lui permet de terminer ses chantiers, au père Wade, croix de bois, croix de fer, et foi d’ancien franc-maçon, il nous le transfère chez les pays émergents à côté du
Brésil, de l’Afrique du Sud, de l’Inde et quelques autres puissances
cotées dans les médias du monde. Un sommet planétaire sans lui est inimaginable et un président américain qui ne le reçoit pas n’en est pas vraiment un…En vérité, nous autres, Sénégalais, on est revenus sur terre depuis quelque temps déjà. L’extravagance qui s’invite au devant
de la scène en écœure beaucoup. Les Wade sont bien gentils, mais ils nous tapent sur les nerfs, à force. Ils nous envahissent et nous pompent l’air… Quand on n’ingurgite pas du Père Laye cul sec, on
avale à grandes gorgées du super Karim, de la Viviane au petit lait ou de laSindiely à la fleur bleue ou l’eau de rose. Y’a toujours du Serigne Mbacké Ndiaye ou du Mbaye Pekh pour faire passer le
suppositoire pour une dragée. Jusqu’à l’overdose. Eux, sur leurs nuages princiers ou dans leur jet privé, ne comprennent pas que nous autres, qui avons les pieds dans leJaxaaynauséabond, on n’a
plus le cœur à s’attendrir des épisodes du feuilleton de la Wade family, lequel ressemble de plus en plus à un mauvais film de maffia. Les locales de 2009, annoncées comme la première marche vers le sommet pour Karim Wade, nouvelle icône de la dynastie, sonnent le début de la fin. Ils n’en ont cure, puisque le Sénégal, le vrai, le seul qui compte, c’est eux. Le 23 juin 2011 confirme la détermination des Sénégalais à en finir avec le gang qui braque la
République. Le 25 mars 2012, avec Macky Sall, c’est la modestie et la simplicité qui sont sacrés, que dis-je, plébiscités. Il n’a pas beaucoup de prétentions, le nouveau président. Et surtout, ce n’est pas vraiment une saga qu’il traîne derrière lui. Ça tombe bien, le
peuple en a ras le bonnet des personnages de roman qui font la « une ». Macky, lui, pour son martyre, étrenne tout juste une défénestration de l’Assemblée nationale, et une deuxième place au premier tour de la présidentielle. Son pédigrée ne vole pas plus haut, comparé à l’agrégé qu’il remplace. La couleur est annoncée en pleine campagne électorale, lorsqu’il promet de retailler le mandat présidentiel de sept à cinq années, tandis que l’insatiable père Wade qui vient d’en épuiser deux d’affilée en douze ans, supplie l’électorat pour une p’tite rallonge de son troisième-
deuxième mandat de sept ans. Les monuments, les ponts, les tunnels, les distributions de Cfa à la mitraillette, les docteurs honoris causa à l’autre bout de la planète, bref, le truculent
spectacle en sons et lumières qu’offre le protocole de la république des Wade, tout ça, c’est derrière nous. Les enveloppes
remplies de ce bon vieux Cfa aux alentours des fêtes, on va devoir s’habituer à faire sans.
Ça va faire plus modeste, jusque dans les dancings : en lieu et place de Youssou Ndour, se contenter de Pape Diouf… Jusqu’aux cachets des dieux de l’arène, qui seront rabotés. Faudra la jouer un humble au moins une décennie, jusqu’à ce que l’orgueil national réclame à cors et à cris un président à faire rêver jusque
dans les hameaux des gens singulièrement dépenaillés.
Macky Sall, lui, ne doute pas de sa mission : deux mandats de
cinq ans sont largement suffisants pour son programme qui se résume en un mot : dé-wadisation. En langage académique, traduisez par traitement de choc contre la folie des grandeurs…
Dites, désormais, Sa Rondeur Macky Quatre…
Dans les usages protocolaires, il est fréquent de précéder
d’une marque de révérence la notabilité à laquelle on s’adresse. La liste est longue: de Son Excellence à Sa Grandeur, rien n’est jamais de trop pour lustrer les bottines de ses supérieurs. Ça peut toujours servir pour une augmentation de salaire, une affectation avantageuse ou quelque autre prébende que la République sait
distribuer à ses serviteurs les plus obséquieux… Moi, ce n’est pas que je cherche un poste, mais je réserverais volontiers une appellation spéciale au président Macky Sall, ci-devant tombeur de la dynastie Wade, qui correspondrait à son style, sa faconde : Sa Rondeur.
Ça n’a rien à voir avec sa physionomie, même si l’homme est
un rien enveloppé et dispose d’honorables bajoues qu’il doit, à en croire quelques témoignages anonymes, à un solide revers de cuillère et un coup de fourchette toujours déterminé. Non, il devra
plutôt la distinction que je lui attribue à son style: l’air de rien, ça roule. Aucune déclaration fracassante, pas un geste cassant. Et pourtant, depuis son élection, il en mâte des durs à cuire… Le sommet, sans doute, est atteint avec Abdoul Mbaye. Le Premier Ministre so smart, est pratiquement dans l’obligation d’enlever le
haut publiquement. La rumeur, cette garce, lui prête des idées noires, et quelques frictions avec son employeur depuis certains temps. Des p’tits malentendus en coulisses à vous pourrir
l’atmosphère venus s’ajouter aux jaloux et intrigants, comme il en
existe dans toutes les cours du monde, dont la principale activité
est de travailler l’oreille du patron. Des semeurs de zizanie qui lui
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