La Paix civile
119 pages
Français

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Description

" Quant à ceux qui récusent les valeurs essentielles et cardinales de la droite que sont le respect absolu de la dignité de la personne humaine, le respect en chaque homme, quelles que soient sa race, sa classe, sa religion, de l'éminente et égale dignité de la personne ; quant à ceux qui adoptent un comportement de haine, de cynisme et de mépris, il est non seulement hors de question de les intégrer de quelque façon que ce soit, mais il faut les combattre et avoir le courage de les interdire. "Charles Millon s'explique, ici, sur le fond, sur son analyse politique, sur son itinéraire personnel, sur sa stratégie, sur ses propositions pour la droite, et pour la France. Pour que chacun puisse juger en toute connaissance de cause. Charles Millon, ancien ministre de la Défense, est aujourd'hui député-maire de Belley et président du conseil régional Rhône-Alpes.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 janvier 1998
Nombre de lectures 0
EAN13 9782738162403
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0600€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

collection
« LE TEMPS DU DÉBAT »
©  ODILE JACOB, OCTOBRE  1998 15, RUE SOUFFLOT, 75005 PARIS
www.odilejacob.fr
ISBN 978-2-7381-6240-3
Le code de la propriété intellectuelle n'autorisant, aux termes de l'article L. 122-5 et 3 a, d'une part, que les « copies ou reproductions strictement réservées à l'usage du copiste et non destinées à une utilisation collective » et, d'autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d'exemple et d'illustration, « toute représentation ou réproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite » (art. L. 122-4). Cette représentation ou reproduction donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L. 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
Ce document numérique a été réalisé par Nord Compo .
À Alain et Chantal Mérieux.
INTRODUCTION
Une démocratie immature

Dès ma première jeunesse, j’ai toujours souhaité faire de la politique, par conviction et goût de l’action. N’a-t-on pas dit que la vertu de politique est la seconde après la vertu de religion ? Il me semble que c’est une tâche très grande que celle qui consiste à tenter d’améliorer une société. J’ai la conviction que les gens ont toute chance d’être plus heureux s’ils sont responsables plutôt qu’assistés, impliqués plutôt qu’isolés, utiles par le travail plutôt qu’éternels créanciers. C’est pourquoi je me situe à droite.
Le 20 mars 1998, j’ai été réélu président de la région Rhône-Alpes. Démocratiquement. Avec l’apport de voix de conseillers régionaux du FN.
En acceptant ces voix, je savais pertinemment que je brisais un tabou. Par ce geste, je dénonçais la contradiction hypocrite qui consiste à intégrer un parti au jeu politique et à l’exclure simultanément. Par cette décision, je remettais en cause l’arrangement tacite qui, en faisant du FN un piège à exclus, empêche une droite majoritaire de gagner les élections et conforte la domination de la gauche.
Ce que j’ignorais en revanche, c’est le tintamarre politique et médiatique que ma décision allait engendrer. Dans une ambiance manichéenne, tout était désormais permis : l’intimidation, la pression de la rue, la violence physique. S’est-on interrogé sur le climat qui autorise lettres anonymes et coups de téléphone nocturnes, pressions professionnelles et politiques, et même pressions à l’encontre des familles et des proches ? Quel crime avait donc commis le maire de Briançon, Alain Bayrou, pour avoir la jambe brisée par un groupe venu l’attendre à la sortie de son bureau ? Celui de défendre ouvertement un point de vue similaire au mien.
Je me croyais, naïvement, dans un autre pays, et peut-être en un autre temps, quand, en 1981-1982, en pleine bataille des nationalisations, il m’était tout à fait naturel de serrer la main du très orthodoxe trésorier du PC, Georges Gosnat, ou encore de Pierre Joxe, alors que les dérapages verbaux du congrès de Valence étaient encore dans toutes les mémoires… Aujourd’hui, des conseillers régionaux avec qui j’ai travaillé plus de dix ans en viennent à refuser de me saluer et méconnaissent la frontière qui sépare la désapprobation politique du respect de l’adversaire.
Quant à la stupidité, elle l’a naturellement disputé à la violence. Que n’ai-je lu sur Charles Millon qui révélerait son vrai visage. Tout m’était instruit à charge : mon origine familiale, mon catholicisme, mon provincialisme… Sur trente ans de vie politique, sur la constance de mes convictions et de mes engagements, rien, pas une ligne, tout balayé par l’intolérance, le fanatisme et l’idéologie.
Faut-il vraiment que j’incarne le mal à moi seul, pour qu’à Izieu, lors d’une cérémonie où j’avais été convié, comme chaque année, en mémoire des enfants juifs déportés dans les camps de la mort, certains aient jugé ma présence indésirable ? Alors que depuis des années je combats l’antisémitisme à travers mes prises de position, j’ai témoigné mon respect au peuple juif à maintes occasions et en particulier lors d’un voyage ministériel en Israël et lors de la création du musée-mémorial d’Izieu. Alors que, sur mon intervention, en signe de repentance, le Bade-Wurtemberg a participé au financement de ce musée ? Alors que le Conseil régional Rhône-Alpes non seulement y a participé, mais continue d’affecter des fonds de fonctionnement dans le cadre du « permis de réussir », pour que les jeunes lycéens puissent mesurer l’horreur absolue de la solution finale ?
Plusieurs mois se sont écoulés. Rien n’a changé : des manifestations de violence ou d’intolérance sont organisées à l’occasion de chacun de mes déplacements.
Bien des Français n’acceptent plus cette intolérance que récuse toute la culture démocratique. Qu’on en juge. Élu le 20 mars dernier en bonne et due forme démocratique, j’ai dû faire campagne après les élections. Pourtant, cette seconde et anachronique campagne a été beaucoup plus fervente que la première. Sommé de démissionner immédiatement parce que j’avais accepté des voix de conseillers régionaux du FN, et refusant ce diktat, j’ai subi un lynchage médiatique presque sans précédent. Pourtant, des dizaines de milliers de Français anonymes m’écrivaient pour me féliciter. Des manifestations organisées ici ou là par les partis et mouvements de gauche et d’extrême gauche m’invectivaient, demandaient mon départ. Pourtant, chaque fois que je me trouvais dans un lieu public, des dizaines de personnes m’arrêtaient et me soufflaient toujours le même conseil : « Courage ! tenez bon ! » J’étais exclu de l’UDF. Pourtant, le 16 mai, les dirigeants de Démocratie libérale me demandaient de ne pas venir à leur congrès, car j’y aurais été trop applaudi…
Chacun l’aura compris : je vais à contre-courant et j’ai contre moi des habitudes de pensée, mêlées et liguées. Beaucoup, dans les milieux du microcosme, me donnent raison ; ils me le disent, mais en catimini. Les bien-pensants que je dénonce sont les tenants actuels du manichéisme français. La violence de leurs réactions démontre que j’ai cassé quelque chose : un tabou, un confort d’existence… La France vit sur un mensonge : car cette haine immémoriale pour l’adversaire est le contraire de la démocratie.
Comment se fait-il que la France, puissance respectée, centre intellectuel et spirituel exceptionnel, terre d’accueil et d’asile, référence en matière de Droits de l’homme, ne parvienne pas à la sérénité des grandes démocraties ? Pourquoi est-elle régulièrement ébranlée par des contestations ou submergée par des vagues d’intolérance ? Pourquoi le pouvoir légal voit-il périodiquement sa légitimité contestée ? Pourquoi ses institutions sont-elles toujours discutées ?
Tout se passe comme si ce pays surdoué demeurait immature. La France, l’une des plus anciennes nations du continent, n’est pas encore une démocratie adulte et paisible. Contrairement à la plupart des pays européens, elle n’accepte l’alternance que pour la forme. Elle ne l’a pas intégrée dans sa mentalité politique.
Dans une véritable démocratie, il n’y a pas d’ennemis, il n’y a que des adversaires. Les Français n’ont pas encore accepté, au fond d’eux-mêmes, cette règle du jeu. Un adversaire politique avec lequel on débat sans pour autant accepter ses analyses : cela nous demeure un concept étranger. Il nous faut un ennemi. Nous perpétuons les idéologies plus longtemps que les autres : le dernier marxiste-léniniste au monde sera sans doute un intellectuel parisien. Le libéralisme retrouvé devient entre nos mains – et surtout du fait de ses adversaires – une nouvelle idéologie. Nos luttes internes renouvellent les guerres de religion : sur la laïcité, sur l’école… Nous attisons avec volupté nos passions partisanes. Quand tout ennemi a disparu, nous rappelons le dernier en date, nous le réinventons à coups d’invectives.
En France, notre culture politique est une « culture de l’exclusion 1  ». La III e  République a été, malgré son aspect débonnaire, intolérante au point de faire de la laïcité une religion. Ce qui est tout de même un comble. Le général de Gaulle, qui dérangeait un ordre convenu en 1947, a vu ses affiches maculées de croix gammées – autre paradoxe de la criante intolérance. Les maîtres-penseurs des années 1960-1970 n’ont pas laissé, hors le marxisme, un espace de pensée qui ne fût aussitôt sali et ridiculisé. Aujourd’hui revient en force l’intégrisme républicain, déjà présent avant guerre : tout ce qui ne reflète pas la pensée dominante se voit rejeté hors de la république, laquelle pourtant signifie concorde, existence commune pacifiée, tout le contraire du rejet.
Dans un pays où la religion a été gommée, la politique fonctionne comme une religion. Ici l’État est un absolu, et ses serviteurs-techniciens, des grands prêtres. C’est pourquoi la France n’est pas un pays pacifié ni apaisé, ce qu’on attend normalement d’une démocratie bien comprise. Dans une démocratie, il faut un consensus sur l’alternance, la culture du débat, l’ouverture à l’autre – à tout autre, qu’il soit différent de race ou d’opinion. En revanche, la démocratie ne fait pas bon ménage avec le consensus sur les idées, faute de quoi elle efface l’alternance qui en est la respiration. Nous faisons tout le contraire : nous avons réduit le débat à sa plus simple expression, satanisant les adversaires que nous traitons en ennemis ; et nous cherchons à imposer un consensus sur les idées, réduisant l’alternance à une coque vide.
Nous sommes manichéens parce que drogués d’idéologie, et jusqu’à l’intolérance. Nous vivons de théories et de systèmes. L’irréalisme des Français s’exprime dans la quête avide de l’unité. Notre République s’est accomplie en suscitant l’uniformisation des différences. Nous rêvons toujours de l’unité égalitaire.
Mais l’idéologie de l’unité ne peut qu’engendrer la guerre : le parfait est l’ennemi du bien. Chez nous, tout combat d’idée devient une guerre idéologique, et c’est pourquoi nous ne pardonnons rien. S’est-on demandé, par exemple, comment Mandela en

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