Neutralité et faits religieux
223 pages
Français
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Description

La question du port de signes religieux dans les services publics se rencontre partout. L'équilibre historique atteint dans les sociétés d'Europe continentale entre institutions publiques et religion est aujourd'hui bousculé. Il devient souvent objet de conflit. Ce volume réunit les contributions de spécialistes – sociologues, philosophes, juristes, politologues – qui interrogent de manière critique la notion de « neutralité », ainsi que des analyses de situations concrètes du monde du travail.

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Date de parution 08 mai 2014
Nombre de lectures 9
EAN13 9782336346328
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

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Extrait

Islams en changement
CollÈçtîo dîîgÈ à FÈlîçÈ DàssÈtto, È çollàBoàtîo àvÈç là dîÈçtîo du Cîsoç (UCL)
CÈttÈ çollÈçtîo vîsÈ À sÈtÈ Èt dîfusÈ àuès d’u làgÈ uBlîç dÈs tàvàuX otàt su l’îslà àvÈç uÈ àttÈtîo à-tîçulîèÈ àuX çhàgÈÈts È çous dàs lÈ odÈ çotÈ-oàî. LÈs tÈXtÈs sot îssus dÈ ÈçhÈçhÈs uîvÈsîtàîÈs, dÈ oîÈs dÈ àïtîsÈ ou dÈ çolloquÈs àtîçulîèÈÈt oîgîàuX ou lÈ tÈàî tudî, là çààçît îtÈtàtîvÈ ou lÈu àot dÈ sythèsÈ. LÈs tàvàuX sÈts ovîÈÈt dÈ doàîÈs dîsçîlîàîÈs dîvÈs : àthoologîÈ, soçîolo-gîÈ, syçhologîÈ, doît, sçîÈçÈs olîtîquÈs, sçîÈçÈs dÈs Èlî-gîos, îslàologîÈ.
. FÈlîçÈ DASSETTO,La rencontre complexe. Occidents et islams,4. . FÈlîçÈ DASSETTO,Discours musulmans contemporains. Diversité et cadrages,. . Youous LAMGHARI,L’islam en entreprise. La diversité culturelle en question,. 4. Màîà CHRISTODOULOU,Amour, islam et mixité. La construction des relations au sein des couples musulman/nonmusulman,. . Ghàlîyà DJELLOUL,Parcours de féministes musulmanes belges. De l’engagement dans l’islam aux droits des femmes ?,. . DoîîquÈ CAbIAUx, FàÇoîsÈ WIbRIN, Luà AbEDINAJ Èt LàuÈçÈ bLÉSIN (çoodo à), Neutralité et faits religieux. Quelles interactions dans les services publics ?,4.
NEUTRàITÉ ET fàITS REIgIEUX
Quelles interactions dans les services publics ?
Dominique Cabiaux, Françoise Wibrin, Luan Abedinaj et Laurence Blésin (coordonné par)
©AçàdÈîà-L’Hààttà s.à. Gàd’PlàçÈ  b-4 Louvàî-là-NÈuvÈ
D/4/4/ ISbN : 978-2-8061-0156-3
Tous doîts dÈ Èoduçtîo, d’àdàtàtîo ou dÈ tàduçtîo, à quÈlquÈ oçd quÈ çÈ soît, sÈvs ou tous àys sàs l’àutoîsàtîo dÈ l’àutÈu ou dÈ sÈs àyàts doîts
Imprimé en France www.EITIOS-àÇàEMIà.E
Préface
Débattre c’est bien plus qu’une méthode
Dominique Cabiaux
L’idée de ce livre est née à l’issue d’une passionnante journée d’étude organisée par la Confédération des syndicats chrétiens de Belgique (CSC) le 4 décembre 2012. J’avais eu l’honneur d’ouvrir les travaux en accueillant les nombreux participants. La logique voudrait donc que cette préface soit, tout simplement, la trans‐ cription de ce mot d’accueil. Mais dans l’entre‐temps, c’est‐à‐dire depuis plus d’un an tout de même, le débat sur la neutralité des services publics s’est tout à la fois amplifié et durci, sous l’effet de quelques dossiers emblématiques, en France et en Belgique. On le sait, ces « cas d’école » sont généralement l’occasion pour les tenants des positions les plus tranchées de mettre en avant leur point de vue, au risque de crisper le débat plutôt que d’ouvrir à la discussion en interrogeant les divergences. Le durcissement et l’amplification ne sont pas restés aux portes de notre organisation, pourtant viscéralement attachée à l’écoute et au dialogue. La CSC est sensible aux débats qui traversent la cité et c’est plutôt un signe de bonne santé citoyenne. Mais, au moins, notre méthode de travail et le choix que nous avons fait le 4 décembre 2012 de discuter sans tabou nous ont‐ils permis d’échapper à la pire manière de traiter la question, celle qui consiste à échanger des slogans, des exclusives, voire des invectives. Car c’est bien de cela qu’il a été question depuis et qui présidait déjà à notre déci‐ sion d’organiser ce débat : partir du vécu de nos déléguées et délégués, c’est‐à‐dire des réalités et non des représentations que nous nous en faisions. Seules balises : la sincérité des échanges, le respect des personnes et des valeurs de solidarité et de tolérance que nous prônons.
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Ces attitudes nous ont permis d’amortir, en notre sein, les soubresauts cycliques du débat et de continuer à réfléchir ensemble en vue de trouver des réponses progressistes là où l’on peut souvent craindre des comportements de régression. On doit d’ailleurs regretter que la question de la neutralité des services publics se réduise à un débat sur le port du voile ; pire, que ce débat se rétrécisse lui‐même à la forme puérile du « pour ou contre »… En ce sens, loin d’avoir été un aboutissement, notre journée d’étude a été, tout au contraire, un signal de départ et ce livre est une nouvelle étape pour nous permettre d’accompagner les dis‐ cussions internes. Un point encore : si la CSC Services publics et la CSC‐Ensei‐ gnement ont estimé nécessaire de réfléchir à la question de la neutralité au sein des services publics, ce n’est pas par effet de mode, mais parce que nous voulons traiter de toutes les questions qui peuvent affaiblir notre combat essentiel, presque exclusif, qui est celui de la question sociale dans un monde en panne de déve‐ loppement. Nous ne devons pas éluder les sujets qui peuvent divi‐ ser les travailleurs, émietter leurs forces en leur faisant perdre de vue leur intérêt commun. C’est pourquoi cette question de la neu‐ tralité doit être examinée sérieusement de façon à y apporter des réponses émancipatrices et porteuses de progrès. Cette nécessité m’apparaît plus urgente et plus nécessaire encore aujourd’hui que ce matin du 4 décembre 2012 en accueil‐ lant les participants à notre journée d’étude. Après ces quelques considérations visant à replacer le livre dans son contexte, voici ce que je leur disais ce matin‐là :
La tentation est réelle, à l’entame d’une journée dont le programme à lui seul est une friandise pour l’intelligence, de nous décerner déjà toutes sortes de compliments, en tenant pour chose acquise qu’il sor‐ tira d’une telle journée la réponse aux nombreuses questions que nous nous posons, ou, pour parler comme le poète, que les fruits de nos réflexions accompliront les promesses des fleurs du programme. Mais il y a un temps pour chaque chose ; un temps pour accueillir et un temps pour conclure. Pourtant, je ne pense pas lire la partition à rebours en nous félicitant dès à présent d’avoir pu organiser une jour‐ née comme celle‐ci. Non seulement parce que l’intérêt des questions mises en débat et la qualité indiscutable des intervenants qui se suc‐ céderont en font un événement marquant, pas seulement au sein de la
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CSC, mais encore et surtout, parce qu’il s’agit d’une démarche con‐ fiante et ambitieuse d’un syndicat qui ne croit pas que débattre soit une menace ou que se confronter à des sujets qui sortent en partie de son domaine d’expertise constitue un risque. Ce sont d’ailleurs les deux composantes de la CSC qui portent cette journée, comme pour en souligner le caractère exceptionnel : l’interprofessionnelle, grâce à l’implication fervente du service diver‐ sité et de l’asbl Formation Éducation Culture de la CSC (FEC), et les centrales professionnelles : la CSC‐Enseignement et la CSC Services publics. La richesse de la CSC doit beaucoup à ces deux dimensions de l’engagement : interprofessionnel et professionnel, l’approche inter‐ professionnelle permettant de garder la pierre angulaire d’un projet de société global et cohérent, au départ des revendications et de l’expertise acquises par les centrales grâce à l’apport des travailleurs dont elles assurent la défense des intérêts professionnels. Qu’il me soit également permis de mentionner que l’intérêt de nos tra‐ vaux dépasse le cadre de notre communauté puisque j’ai la joie d’accueillir plusieurs collègues du nord du pays. Qu’ils sachent qu’ils sont bien davantage que nos invités et que nous les écouterons avec une fraternelle attention. Quand on est militant, c’est‐à‐dire lorsqu’on est engagé dans un com‐ bat rude et quotidien, une journée d’étude et de réflexion, c’est surtout un moment empreint d’humilité puisqu’il s’agit de confronter des options, des convictions, parfois même des intuitions à l’analyse rigoureuse et méthodique, de les soumettre à un examen loyal pour en éprouver la pertinence et la validité. Est‐ce que nos choix, nos propositions, nos analyses sortent renforcés si nous les confrontons à d’autres manières de voir ? Est‐ce que le projet de société de la CSC, à la manière d’un acier que l’on trempe, est plus tranchant, plus robuste aussi, quand il s’appuie tout à la fois sur des valeurs et sur la force éclairante du réel ? Nous le croyons bien sûr ! Et c’est ce qui constitue le socle de notre confiance en nous. Sur le terrain socio‐économique, nous vérifions la pertinence de nos analyses au travers de la « démonstration con‐ traire » : en n’écoutant pas le message syndical, c’est le pire qui sur‐ vient, quasi mécaniquement. Ainsi, lorsque nous affirmons que l’austérité n’est pas la solution, mais la plus grosse partie du problème, lorsque nous fustigeons des choix d’où la solidarité est absente. Je pourrais ainsi prolonger l’énumération jusqu’à vous en faire tourner la tête. Eh bien. C’est le réel qui rattrape par le col ceux‐là qui refusent de
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nous entendre et qui font ainsi peser sur les plus fragiles le poids de leurs choix funestes. Nous avons, à la CSC, poussée à un point dont on ne mesure pas la vigueur, une culture du débat et de la confrontation des idées. Nous croyons à la force des arguments parce que nous choisissons une démarche pragmatique et réaliste, susceptible de rendre possible ce qui est souhaitable, non dans un avenir toujours repoussé, mais ici et maintenant. Cependant, cette culture du débat butte parfois sur une tentation compréhensible, mais non exempte de contradictions et de dangers : nous éprouvons le besoin impérieux, face aux questions de société, aux controverses qui secouent le forum public, de situer très vite, j’écrirais même « presque instinctivement », chaque proposition, chaque point de vue, selon l’axe de la gauche et de la droite. C’est historiquement légitime puisque ce clivage a marqué notre his‐ toire, toute l’histoire du mouvement social d’ailleurs, et qu’il reste bien plus pertinent que ce que prétend le consensus mou et paterne que l’on cherche à nous vendre aujourd’hui, essentiellement pour tenter de nous faire renoncer à transformer fondamentalement la société. Je pense même que rapporter sur l’axe « gauche/droite » toute idée nouvelle, toute proposition, est le réflexe le mieux partagé des mili‐ tantes et des militants, d’où qu’ils viennent. C’est un peu comme sur un terrain de foot quand on repère les équipiers ou les adversaires à la couleur du maillot. Dans la mesure où l’actualité nous expédie au front presque chaque jour, tant les offensives du capitalisme financier se multiplient, nous avons un impérieux besoin de repères, au risque de la simplification. Est‐ce que c’est de droite ? Est‐ce que c’est de gauche ? Est‐ce que c’est équitable ? Est‐ce que ça prépare demain ? Faut‐il soutenir ou com‐ battre ? Parfois c’est évident et tellement simple. Parfois ça l’est moins et le temps fait fluctuer le jugement. Et parfois aussi c’est trompeur. Parce que la société change et, avec elle, les défis auxquels nous sommes confrontés. Pour ne prendre qu’un exemple, la croissance a tradition‐ nellement été pour le mouvement ouvrier l’outil essentiel du progrès social. Nous savons désormais qu’il nous faut faire sur cette question un aggiornamento. Et puis aussi, même si nous l’admettons à contrecœur, nous n’y voyons plus très clair parce qu’au cœur même du débat les arguments et les analyses tombent de manière inattendue, disparate, sur l’abscisse ras‐ surante « gauche/droite ». Pour reprendre la métaphore sportive, le maillot des joueurs ne nous permet plus de comprendre qui est dans
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l’équipe et qui cherche à nous dribbler. On n’a pas toujours un bon vieux débat sur le service minimum ou la limitation du droit de grève pour resserrer les rangs et retrouver de la combativité. Le thème de cette journée d’étude est précisément un de ces débats qui reçoit un éclairage ambivalent lorsqu’on le rapporte à l’aune de notre toise idéologique. Bien entendu, nous ne sommes pas réellement troublés par les slogans haineux, par le faux nez que porte l’extrême droite lorsqu’elle exalte la laïcité qu’elle confond ou feint de confondre avec son vieux fond rance de xénophobie. Nous ne sommes pas abusés par le machiavélisme de ceux qui exacerbent les tensions pour empê‐ cher un rapport de force qui obligera les nantis à davantage de solida‐ rité. Les 125 ans de conquête sociale de la CSC nous mettent à l’abri de ces pièges grossiers. Mais comment penser l’articulation entre les pratiques religieuses et l’espace public ? Qu’entendons‐nous précisément par « laïcité de l’État » sur laquelle il existe un apparent consensus ? Et suffit‐il de sau‐ ter sur sa chaise comme un cabri en criant « neutralité des services publics ! Neutralité des services publics ! » pour trancher toutes les situations mises en lumière par les incidents qui surviennent ici et là ? Tout à l’heure, j’évoquais le pragmatisme de la CSC. Revenons‐y puisque c’est par ce biais que le débat s’est imposé à notre ordre du jour. C’est en effet parce que nous avons été confrontés à l’élaboration de règlements de travail et de règlements d’ordre intérieur dans plu‐ sieurs communes et institutions publiques que la question d’une « ligne de conduite » s’est posée à nous. Régler la question des pra‐ tiques religieuses sur le lieu de travail (qu’il est réducteur de limiter à la question du port du foulard) par deux ou trois lignes sommaires et péremptoires, ne nous semble pas l’approche la plus convaincante. Pas plus d’ailleurs que nos réflexions empreintes de généralités bienveil‐ lantes… Nous avons accueilli les questions de clarification de nos permanentes et permanents, de nos déléguées et délégués, comme une invitation non à trancher, mais à débattre, enfin. On s’en doute, les situations diffèrent d’un endroit à l’autre. Au sein même de la CSC, le travail d’éducation permanente est inégalement mené. Et conseiller aux équipes syndicales de « faire pour un mieux » est un mantra qui trouve vite ses limites. En interrogeant rigoureusement cette notion de « neutralité », nous avons vite constaté qu’elle permettait deux approches possibles, que nous utilisions parfois même sans nous en rendre compte : l’une est la recherche effrénée de l’égalité entre les individus, grâce à l’occultation
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de tout ce qui les différencie, langue, couleur de peau, religion, appar‐ tenance politique. Selon cette approche, le message délivré est le sui‐ vant : vous êtes tous rigoureusement égaux, parce que la collectivité dont vous faites partie veut ignorer vos différences. Mais parfois, nous utilisions une autre lecture de l’idée de neutralité, découlant non plus de la primauté de l’égalité, mais de celle de la tolérance. Selon cette seconde acception, ce que dit l’autre a vocation à mieux être écouté que dans un système étanche que celui de « neutralité‐égalité ». Et ces deux lectures cohabitent parfois au sein d’un même collège communal ou d’un conseil d’administration, en toute bonne foi. Nous peinons, admettons‐le, à trouver le bon équilibre entre ces deux approches‐là où les questions sont évoquées de façon bien concrète. C’est pourquoi nous avons voulu mettre sur pied cette journée d’étude en nous appuyant sur l’expertise du service diversité de la CSC, avec pour seule boussole cette idée fondatrice : le débat sera source de progrès pour l’ensemble du mouvement et pour chacun de ses membres. J’ai donc le plaisir et l’honneur d’ouvrir cette journée d’étude, au pro‐ gramme étoffé, chevillé à l’expertise d’intervenants qui font autorité. Je vous remercie pour votre présence et votre implication au cœur de la vie syndicale.
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