Une obsession française est la marque d'un homme qui a vécu de l'intérieur les grandes évolutions économiques de la France sans jamais se départir de sa lucidité. Examinant tour à tour l'influence de l'État et l'empreinte du libéralisme, la place de l'Hexagone sur l'échiquier international et l'emprise de la mondialisation sur sa prospérité, Alain Noqué scrute les forces et faiblesses, grandeurs et travers de notre pays à l'aune des ambitions qui l'ont toujours habité. Lorsque les crises - politique, financière, sociale - nous plongent dans une agitation extrême, le recul est salvateur. Porté par un infini attachement à notre culture, parcourant les bibliothèques et les musées comme d'autres arpentent les salles de marché, Alain Noqué regarde le monde avec la clairvoyance de ceux qui savent se protéger de sa frénésie et n'oublient pas que, parfois, la vraie vie est absente. C'est alors dans la réminiscence des plus belles uvres de notre patrimoine, celles qui continuent à vivre en nous longtemps après qu'on les a croisées, qu'il retrouve cette vie et s'en délecte. Cet ouvrage présente l'itinéraire d'un homme qui a toujours refusé de clôturer son champ car l'idée, à peine ébauchée, en appelle une autre. Il dresse aussi le portrait critique d'un pays qui, riche d'une histoire exceptionnelle, peine à exprimer sa voix dans le concert international. Introduction. Chapitre 1. Opinions. Réflexions sur le travail. Vicissitudes des corps intermédiaires. Fin de partie ? Mondialisation : entre la crainte et l'espoir. Cette complexe idée du progrès. Réformer nos institutions. Deux France. Un modèle social, vraiment ? Le marché. Caricatures. L'Europe, cette très ancienne idée. Frontières incertaines. L'Empire du milieu. Contraste indien. L'épicentre du monde ? Chapitre 2. Impressions. Lire, l'entreprise merveilleuse. Parcours étranges. Frontières interdites. Curieux itinéraires. L'irruption de la férocité. 1936, au soleil. Le rêve inassouvi. Salut, l'ami ! Images de la guerre. Le vaisseau était noir, mais la voile était blanche. À propos d'une figure de reliquaire. L'amour de la peinture. La grâce. Où es-tu poète ? Si Versailles m'était conté. Géographie de la mémoire. Lumières de cinéma. Conclusion.
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Extrait
Une obsession française
Alain Noqué
Préface de Xavier Darcos
Chez le même éditeur
Intelligence territoriale L. François, 2008
Risques et enjeux de l’interaction sociale Collection Sciences du risque et du danger J.-M. Stébé, 2008
Innover en marketing – 15 tendances en mouvement Collection EDF R&D B. Cova, M.-C. Louyot-Gallicher, 2006
La création de valeur en gestion J.-C. Liquet, 2005
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Mais n’accablons ce texte subtil de formules trop pesantes, car il déplie surtout la revue d’instants de grâce, de ces extases qui touchent l’âme, à défaut d’une fois qui s’est évaporée avec le père et dont la nostalgie se fait tout de même sentir. Apparais-sent ainsi les séductions de l’art. Stendhal disait que la beauté est d’abord, au sens pro-pre, un « ravissement », un rapt qui nous arrache à nous-mêmes, une dépossession qui ouvre un espace inconnu, tout beau tout nouveau. Alain Noqué aime et connaît les peintres. Il cite, pèle-mêle, Degas, Titien, Manet, Goya, Rembrandt, Picasso. Il renvoie Proust, au « petit pan de mur jaune » d’uneVue de Delftde Vermeer, à la mémoire affective. Il évoque les charmes des beaux-arts, quand une perfection ou une splendeur fascine, voire envoûte, comme le flamboiement magique de Sylvie Guilhem dansant. Qu’il procède du coup de foudre ou de la lente cristallisation, l’art est « épiphanie » : il se révèle à celui qu’il touche comme un passage, une mutation. Il ressemble à la fin d’une cécité ; d’où les métaphores poétiques habituelles, qui tournent toutes autour du thème de l’éblouissement, de la clarté aveuglante, de la révélation. «Ce fut comme une apparition», résume Flaubert au début deL’Éducation sentimentalequand, sur le pont souillé d’un vapeur remontant la Seine, Frédéric Moreau aperçoit Mme Arnoux.
Au demeurant, la raison ne perd pas ses droits. On commence par elle, simple-ment, avant de passer aux choses sérieuses. Car Alain Noqué, en bon amateur d’art ancien, organise son livre selon un diptyque : opinions/impressions. Dans la pre-mière partie, il parle déjà de liberté, mais économique et politique. Il s’interroge sur le travail, le progrès, le pouvoir. En disciple des philosophes des Lumières et de leur successeur Tocqueville, il se demande comment concilier efficacité et tolérance. Il élargit son regard à la mondialisation, aux massifs émergents – et envahissants. Mais, ces choses utiles étant dites, on a l’impression qu’il est impatient de rejoindre le monde des sensations et des émotions. La seconde partie est construite comme une fugue avec sesleitmotive: émerveillements, signaux et parcours, troubles, étran-getés, lumières… Elle s’achève, presque naturellement, sur la vision grandiose et composite du palais baroque de Citizen Kane.
Cette structure duelle reflète un équilibre difficile entre raison et cœur, entre animusetanima, comme disait Claudel. Car les deux pans se regardent et dialoguent. Le lecteur se laisse bercer par ce double mouvement, flux et reflux d’une intelligence acérée qui cède aux élans de la sensibilité, d’une volonté qui rend les armes au désir. Borges, l’hommes de la bibliothèque-labyrinthe, qu’Alain Noqué évoque, aurait aimé cette « fiction » où le rationnel bascule vite dans la confusion des engouements. Car c’est alors seulement qu’on touche au vrai savoir : quand perception et sensation se confondent, quand la conscience use conjointement du savoir et du pressentiment.
Mais revenons à Montaigne. LesEssaisse détournaient des modèles abstraits et des idéaux grandiloquents, pour renouer avec l’homme réel, saisi dans ses humeurs, ses sen-sations, ses appétits. Voyez encore ce mot, sur une autre poutre : ’Eπεχω(« je me tiens en équilibre »). Dans son essai à lui, à son tour, Alain Noqué prend conscience de la comédie humaine, mais sa critique reste amusée, refusant le pathétique ou un moralisme trompeur. D’où les rebondissements, l’allure « à sauts et à gambades ». Finalement, cette liberté de la pensée et du goût est tout simplement une leçon de vie.